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Rapport

Décarboner les transports et les mobilités : quelles réponses efficaces face aux urgences ?

La décarbonation des transports et des mobilités, premier secteur émetteur de gaz à effet de serre en France et premier secteur consommateur d’énergie, est un impératif, dont l’urgence est renforcée par le dérèglement climatique, la crise énergétique et les risques d’instabilité économique et sociale. Alors que la Première ministre a dévoilé un plan d’action visant à accélérer la réduction des émissions de gaz à effet de serre et que la programmation énergie-climat doit être discutée à l’automne, cette note expose une vision globale de la décarbonation des déplacements du quotidien par voie terrestre en France, sur longue et moyenne distance, qui ont longtemps constitué un angle mort des politiques publiques alors qu’ils représentent des enjeux essentiels en termes sociaux et environnementaux. Elle est centrée sur des investissements et mesures « sans regret » à déployer dès à présent, pour avoir un impact avant 2030.

Publié le 

Groupe de travail Terra Nova :

– Patrice Geoffron, professeur d’économie à Paris-Dauphine/PSL et Benoît Thirion, avocat

– Thierry Pech, directeur général de Terra Nova, et Annalivia Lacoste, responsable de la communication de Terra Nova

– Benoît Leguet, directeur général d’I4CE – Institut de l’économie pour le climat

Patrice Geoffron et Benoît Thirion conseillent plusieurs acteurs du secteur des transports dans le cadre de leurs activités professionnelles. Le groupe de travail s’est appuyé sur certains de ces travaux, en particulier réalisés avec le cabinet de conseil Altermind.

Décarboner les transports impose enfin de résoudre une équation financière particulièrement complexe : répondre à court terme à des besoins d’investissement massifs, maîtriser les finances publiques et être acceptable par les Français (sans augmentation de la pression fiscale globale) et équitable. Pour y répondre, il faut, d’une part, allouer l’argent public au développement des technologies pertinentes, pour les amener à maturité technique et économique, et aux investissements qui ne présentent pas un modèle économique suffisamment attractif pour les investisseurs privés et, d’autre part, mobiliser autant que possible les acteurs privés. La note propose un certain nombre de pistes à instruire pour dégager de nouvelles ressources publiques pour les transports : arbitrages intersectoriels, affectation issue des recettes de la taxation carbone ou des sanctions financières attachées aux mesures de « forçage » réglementaires, taxe sur la détention des véhicules dans le cadre d’une remise à plat du système, captation de la rente foncière, valorisation d’actifs, mise à contribution de certains secteurs dans le respect du droit applicable, augmentation de la contribution des usagers… Il s’agit aussi d’attirer les investisseurs et industriels dans une logique public-privé, selon des modalités adaptées à chaque type d’investissement (subventions, PPP, …) et à chaque situation (nouveaux projets ou contrats en cours, comme dans le cas des autoroutes).

Introduction

Vecteurs de liberté pour chacun et de développement pour la collectivité, les enjeux auxquels doivent répondre les systèmes de transports ont évolué au cours du temps. Aux objectifs de croissance économique et d’aménagement du territoire, qui ont dominé le XIXe siècle et le XXe siècle, s’ajoute aujourd’hui un impératif : la décarbonation rapide des transports, pour espérer atteindre zéro émission nette en 2050 en France.

Au-delà des prévisions hautement alarmantes des derniers rapports du GIEC, confirmées par la multiplication des événements climatiques extrêmes, la crise énergétique entraînée par la guerre en Ukraine vient renforcer cet impératif : décarboner les transports répond non seulement à la transition écologique, mais également à la résilience face aux menaces multiples induites par la dépendance aux carburants fossiles.

La France dispose de systèmes de transports jugés parmi les plus performants au monde[1]. Pourtant, leur qualité tend à se dégrader – en particulier s’agissant de l’état du réseau ferroviaire et du réseau routier national non concédé – et notre pays est en retard sur le chemin de la décarbonation. Ainsi, le secteur des transports est le premier émetteur de gaz à effet de serre (GES) en France, avec 30% des émissions nationales, et le seul dont les émissions ont augmenté depuis 1990[2]. Il est également le plus consommateur d’énergie (32% de la consommation énergétique finale).

Alors que l’État a pour ambition de faire de la France « la première économie décarbonée au monde », cette ambition sera obérée sans décarbonation des transports et des mobilités, constituant dès lors une priorité de premier rang. Viser la neutralité carbone au milieu du siècle implique une impulsion forte dans le court terme, puisque la réduction des émissions devra atteindre – 55% dès 2030. Réduire drastiquement les émissions des transports est donc prioritaire pour surmonter la « tragédie des horizons ». Le Gouvernement identifie ainsi les transports comme le premier contributeur à l’effort de réduction des émissions à fournir d’ici à 2030 (27% des 138 millions de tonnes de CO2 (MtCO2) à supprimer)[3].

Atteindre ces objectifs nécessite d’engager une triple rupture dans la politique publique des transports :

  • Dans les ambitions : Il faut à la fois répondre aux besoins de mobilité des personnes, à la circulation des marchandises et aux impératifs de décarbonation, en tenant compte des enjeux d’aménagement du territoire et d’équité sociale. Les crises des bonnets rouges et des gilets jaunes ont montré la nécessité d’associer étroitement l’agenda environnemental et l’agenda social. La décarbonation peut aussi marquer le renouveau de la politique industrielle, en l’inscrivant dans les enjeux du XXIe siècle ;
  • Dans la conception : La politique publique doit articuler les différents modes, dans une perspective multimodale (et non silotée – voire conflictuelle – entre le transport ferroviaire et le transport routier, qu’il importe de ne pas opposer) et intégrant trois dimensions : les infrastructures, les véhicules, les personnes. Les transports et les mobilités doivent véritablement se concevoir comme des « systèmes », pilotés de façon globale et cohérente, permettant d’offrir des « services » adaptés aux besoins ;
  • Dans la mise en œuvre : Il s’agit de mieux associer l’ensemble des niveaux de gouvernance (Union européenne (UE), État, régions, métropoles, territoires) et tous les acteurs de l’écosystème des transports et des mobilités (gestionnaires d’infrastructures, opérateurs de transports, gestionnaires de réseaux énergétiques, constructeurs, industriels, usagers, etc.). La décarbonation des transports passe par l’activation d’un ensemble de leviers de politique publique : investissement, évolution de la réglementation, incitations fiscales ou tarifaires, etc.

Ces enjeux ne sont certes pas absents du débat public. Le diagnostic a été posé, les solutions ont été identifiées : elles doivent combiner à la fois des évolutions techniques et des efforts sobriété[4]. Mais l’action – et les résultats – ont jusqu’à présent trop souvent fait défaut, en raison notamment d’une gouvernance extrêmement fragmentée, d’une acceptabilité pas toujours assurée en amont et d’un financement pas à la hauteur des enjeux.

Dans son discours du 24 février 2023 à l’occasion de la remise du rapport du Conseil d’Orientation des Infrastructures (COI) et de présentation d’un plan d’avenir pour les transports[5], la Première ministre a esquissé une perspective pour répondre à ces enjeux, en exposant une vision centrée sur les transports du quotidien et la décarbonation. Elle a notamment annoncé le lancement d’un plan de 100 Mds€ d’ici à 2040 pour le transport ferroviaire et appelé à une collaboration renforcée entre l’État et les régions. Le 22 mai dernier, elle a présenté un plan d’action visant à accélérer la réduction des émissions de GES, qui met également en avant d’autres leviers pour décarboner les transports, comme l’électrification de la mobilité ou le covoiturage[6]. Ces actions ont vocation à être discutées avec les filières concernés. Les transports seront également concernés par la programmation énergie-climat à l’automne 2023.

De nombreuses questions restent néanmoins ouvertes, notamment en ce qui concerne l’articulation entre les différents modes au niveau territorial, les projets à mettre en œuvre, le financement de ce plan d’action…

En créant le groupe de travail qui a produit le présent rapport, Terra Nova entend contribuer au débat pour convaincre de la nécessité de la décarbonation des transports et des mobilités et présenter les voies et moyens pour agir dès maintenant, avec un impact avant 2030. Ce rapport montre ainsi qu’il est urgent de déployer des investissements et des mesures « sans regret » (c’est-à-dire, bénéfiques quelles que soient les évolutions), avec une forte valeur collective, finançables de façon soutenable et équitable, pour des résultats concrets dès la présente décennie en matière de décarbonation et d’amélioration des services accessibles.

Ce travail porte sur les transports et mobilités terrestres, à la fois pour les voyageurs, le fret et la logistique. Il se concentre sur les déplacements du quotidien longue et moyenne distances en France, en intégrant toutefois la nécessaire interconnexion avec nos voisins européens. Cette catégorie représente en effet la plus grande partie des déplacements et la plus émettrice de CO2 et constitue donc la clé du succès de la politique de décarbonation des transports.

Encadré 1 – L’enjeu essentiel des « déplacements longs du quotidien »

Comme y invite André Broto dans un ouvrage récent[7], les mobilités se structurent autour de trois catégories de déplacements :

  • Les voyages, qui sont des déplacements occasionnels longs (plusieurs centaines de kilomètres), et le transport de marchandises. Ces besoins sont satisfaits par les réseaux routiers, autoroutiers et ferroviaires ;
  • Les déplacements du quotidien de quelques kilomètres, à l’échelle des villes et des communes. Les usagers disposent pour ce type de déplacements de différents choix : marche, vélo, bus, voiture, taxi, trottinette, etc. ;
  • Les déplacements du quotidien relativement longs (de 10 à 100 km), particulièrement importants pour les habitants des banlieues et des territoires périurbains. Cette catégorie est à la fois la plus importante en termes de km parcourus et celle pour laquelle il existe peu ou pas d’alternatives à la voiture, surtout en dehors de la région parisienne. Ainsi, selon les données de l’INSEE, en 2015, 14% des salariés, soit 3,3 millions de personnes, effectuaient plus de 25 km le matin en voiture pour se rendre au travail. Ces déplacements représentent seulement 14% des actifs, mais plus de 55% des km parcourus et la moitié des émissions de CO2[8]. André Broto montre bien comment ces « déplacements longs du quotidien » ont été jusqu’à présent un « angle mort des politiques publiques ». C’est à combler cette lacune que ce travail cherche à contribuer.

 

1. Le « pourquoi » : la décarbonation des transports, un enjeu « surplombant » [9]

Sans les écraser, la décarbonation « surplombe » tous les enjeux de la mobilité, à trois titres : par son urgence et compte tenu du retard pris (1.1) ; par ses « co-bénéfices », qui permettent, en décarbonant, de satisfaire d’autres objectifs économiques, sociaux, environnementaux et sanitaires (1.2) ; et par sa « valeur assurantielle », face à l’instabilité et aux chocs qu’affronte et affrontera le pays (1.3).

1.1. Une priorité devenue un impératif

L’Accord de Paris conclu en 2015 a prévu de limiter le réchauffement à +2°C d’ici la fin du siècle et de tendre, dans toute la mesure du possible, vers un réchauffement contenu vers +1,5°C. Cet objectif implique une rupture avec le modèle de croissance économique en vigueur depuis le début de l’ère industrielle : il s’agit de ramener en 2050 les émissions de CO2 mondiales à leur niveau de 1950 mais avec un PIB possiblement décuplé et une population quadruplée par rapport à cette époque[10].

Le GIEC estime ainsi que les émissions de GES ont déjà provoqué un réchauffement planétaire d’environ +1,1°C par rapport au niveau préindustriel. Si rien n’est fait, le réchauffement pourrait atteindre +2°C entre 2040 et 2050 et davantage au-delà, avec des conséquences dramatiques sur la vie humaine et la biodiversité[11]. La situation est encore plus alarmante en France, puisque la température moyenne y est déjà supérieure de 1,7°C au niveau préindustriel, tandis que le réchauffement pourrait atteindre 3,8°C en 2100 dans un scénario intermédiaire d’émissions de GES[12], contre 2,7°C au niveau mondial.

Face à ces défis, l’UE s’est engagée à atteindre la neutralité carbone en 2050 et, en cohérence, a revu à la hausse ses objectifs à horizon 2030 (-55% en 2030, contre –40% précédemment), dans le cadre du Green Deal et du Fit for 55. Pour la France, la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) adoptée en 2020, et dont les objectifs ont vocation à être rehaussés en 2023, prévoit de passer d’un rythme de décarbonation de 1,4% par an en moyenne entre 2005 et 2017 à –6,0% par an en moyenne de 2019 à 2050 et, dans le même temps, de doubler les émissions négatives, c’est-à-dire les capacités de stockage du carbone[13].

Cette trajectoire met le secteur des transports sous une pression spécifique. Ils représentent en effet 16% des émissions de GES[14] au niveau mondial, 22% au niveau européen[15] et 30% en France, premier secteur d’activité émetteur[16]. Atteindre la neutralité carbone en 2050 passe par une baisse de 90 % par rapport au niveau de 2020[17]. En France, la SNBC vise une mobilité totalement décarbonée à horizon 2050[18], ce qui implique une réduction de 28% des émissions du secteur des transports en 2030 par rapport à 2015.

Pour l’instant, l’échec est patent. Les transports sont en France le seul secteur dont les émissions de GES ont augmenté depuis 1990 : elles ont cru de 9% tandis que celles des autres secteurs diminuaient de 28 %[19]. Les émissions stagnent depuis les années 2000. Le Haut Conseil pour le Climat a ainsi souligné que les émissions du secteur des transports ne sont pas sous contrôle et regretté les « lacunes » des politiques publiques en la matière[20].

Le transport routier est le principal contributeur aux émissions de GES des transports : il correspond à 83% des transports de voyageurs et 88% des transports de fret et représente 95% des émissions sectorielles à l’échelle nationale[21]. La hausse des émissions du transport routier, malgré les gains d’efficacité des motorisations, s’explique par plusieurs facteurs : hausse des trafics jusque dans les années 2000 (notamment liée à la localisation des emplois et des habitats), très nette augmentation des ventes de véhicules lourds type SUV, etc.[22].

Cette trajectoire traduit l’incapacité des politiques publiques nationales et locales à s’attaquer efficacement au problème. Sur la dernière décennie, et en particulier à la suite du Grenelle de l’environnement en 2009[23], l’État a cherché à accélérer le développement des transports en commun et ouvert la voie à la diminution de la place de la voiture en ville. Mais, dans la mesure où ces déplacements urbains ne constituent qu’une faible part des kilomètres parcourus en voiture et ne sont donc pas les principaux foyers d’émission de GES, elle a amélioré la qualité de vie dans les cœurs d’agglomération mais elle ne s’est pas traduite par une baisse des émissions de GES du secteur des transports. Comme l’explique Jean Coldefy dans une note récente publiée par Terra Nova, « Si l’on veut décarboner les mobilités du quotidien, c’est sur le lien périurbain-agglomération et entre agglomérations qu’il faut porter l’effort ainsi que sur les déplacements au sein du périurbain : 70% des émissions du quotidien »[24].

1.2. Une diversité de bénéfices à intégrer et maximiser

Au-delà du changement climatique, la décarbonation des transports et des mobilités doit permettre de répondre à d’autres objectifs, de court terme et de long terme, dans une logique de maximisation des « co-bénéfices » [25]. Elle doit ainsi se penser comme une politique globale, à la fois économique, industrielle et sociale, mais aussi environnementale et sanitaire.

1.2.1. Des bénéfices économiques, industriels et sociaux

La décarbonation produit tout d’abord des bénéfices économiques certains. En réduisant la dépendance aux énergies fossiles, elle renforce l’indépendance énergétique du pays. Rappelons qu’en 2021, avant même la guerre en Ukraine, la facture énergétique de la France s’établissait à 44 Mds€[26], en grande partie liée au poids des transports, compte tenu de leur part dans la consommation finale d’énergie (32%) et de leur caractère essentiellement carboné : en France, les transports consomment 75% des hydrocarbures hors usage militaire et grands aéroports et ports. Décarboner les transports évite dès lors directement des dépenses – en plus des externalités négatives liées au carbone – et accroît notre indépendance à l’égard de pays producteurs dont les choix géopolitiques sont parfois contraires à nos valeurs.

La décarbonation a également une dimension industrielle forte, qui, après avoir été largement négligée, devient aujourd’hui prioritaire, comme l’illustrent les discussions en cours au niveau européen et national sur l’industrie verte. Il est essentiel, dans cette perspective, que les filières industrielles françaises dans le ferroviaire et l’automobile puissent accélérer leur transformation, au risque d’être supplantées par leurs concurrents étrangers. Cet enjeu est notamment majeur en matière d’électrification des mobilités routières (cf. section 2.1), évolution d’autant plus favorable au climat que, dans notre pays, la production électrique est déjà largement décarbonée. Au-delà de ces filières, la décarbonation des transports participe de la souveraineté industrielle, en procurant un avantage compétitif à nos entreprises, et conforte la dynamique d’attractivité de la France, en s’appuyant sur des infrastructures de transport « vertes » interconnectées au continent européen.

La décarbonation des transports est aussi accompagnée d’enjeux socio-économiques de premier rang, qui doivent être pris en compte :

  • La décarbonation présente le risque d’aggraver « l’archipélisation » de notre pays[27], c’est-à-dire sa fragmentation, en particulier entre métropoles à vocation mondiale et territoires déconnectés des flux marchands internationaux, entre la France des centres urbains et ses périphéries. Les Français n’ont ni les mêmes besoins ni la même expérience de la mobilité en fonction de leurs lieux de résidence et de travail : la conjugaison de la périurbanisation de l’habitat et de la métropolisation de l’emploi a fait croître les mobilités du quotidien, et la dépendance à la voiture est aujourd’hui très forte dans les deuxièmes couronnes et les zones peu ou moyennement denses, en particulier pour aller au travail, alors que la part de la marche, du vélo et des transports en commun tend à augmenter dans les agglomérations et les zones denses où l’offre est plus abondante[28] ;
  • Il est dès lors essentiel que la décarbonation des transports et des mobilités, au lieu d’aggraver ces fractures, contribue à les réduire, en donnant les moyens aux Français, notamment dans les territoires, de faire face aux ruptures qu’elle engendre, en aidant au changement de véhicule, en facilitant l’accès aux transports collectifs ou au covoiturage. Cet enjeu est clé notamment pour la mise en place des zones à faibles émissions mobilité (ZFE-m)[29], pour améliorer la qualité de l’air en milieu urbain, qui devra faire l’objet de mesures d’accompagnement adaptées à chaque territoire et à chaque population pour éviter de nouveaux mouvements comme les bonnets rouges ou les gilets jaunes [30].

1.2.2. Des bénéfices environnementaux et sanitaires

La décarbonation doit s’articuler avec d’autres enjeux environnementaux. Un enjeu majeur est de s’inscrire dans une démarche « Zéro Artificialisation Nette » (ZAN), pour préserver les espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF), protéger la biodiversité, la filtration de l’eau dans les sols et la captation naturelle du carbone par la végétation. La loi Climat et Résilience du 22 août 2021 prévoit ainsi de réduire de 50 % le rythme d’artificialisation et de consommation des ENAF d’ici 2030 et l’absence de toute artificialisation nette en 2050. La réussite de cette démarche passe non seulement par un effort de régulation de l’extension des sols artificialisés mais aussi par la révision des modes d’artificialisation et par une meilleure utilisation des emprises foncières déjà constituées. Le secteur des transports, qui contribue à hauteur de 28% à l’artificialisation des sols[31], doit prendre tout sa part à cette stratégie. La densification des zones déjà urbanisées, notamment dans les villes moyennes et dans la première couronne des grandes villes, doit permettre de réduire les distances de déplacements, facteur clé de décarbonation. Les infrastructures de transport existantes doivent également évoluer pour optimiser les flux, désartificialiser certaines emprises (par exemple, à terme, les péages sur les autoroutes) ou encore optimiser le bâti et les délaissés existants pour déployer de nouvelles infrastructures ou équipements (installations photovoltaïques, bornes de recharge électrique sur les routes, etc.).

L’amélioration de la résilience des infrastructures de transport est également clé face aux événements climatiques extrêmes, notamment les crues, les inondations ou les variations de températures, pour en limiter les impacts sur les infrastructures mais aussi l’environnement, alors que le ministre Christophe Béchu a annoncé vouloir préparer les capacités d’adaptation du pays à un scénario + 4°C (cf. section 2.6).

La décarbonation a enfin vocation à avoir des effets sanitaires bénéfiques, en particulier sur la pollution de l’air, qui est la première cause environnementale de morts prématurés dans le monde, la source de près de 40 000 décès chaque année en France, dont plus de la moitié seraient évitables[32], et qui coûte environ 50 Mds€ par an à la collectivité[33]. Et plus encore, tragiquement, durant la crise sanitaire dont les effets ont été renforcés par les pollutions des métropoles, source de facteurs de co-morbidité[34].

1.2.3. Quels critères de décision pour investir ?

Pour maximiser les impacts de la décision publique à moindre coût, l’ensemble des co-bénéfices de la décarbonation des transports doivent être pris en compte dans la décision publique, dans le cadre d’une approche de long terme.

En premier lieu, le pilotage de la transition doit se faire au regard du critère de la baisse des émissions de CO2 mais aussi, plus largement, de l’ensemble des co-bénéfices. Concrètement, ces co-bénéfices peuvent être approchés par l’identification et la mesure des externalités négatives évitées (économies d’énergie, baisse de la congestion, sécurité, qualité de l’air, biodiversité, etc.). Cette prise en compte doit se faire à la fois au niveau global[35], pour définir la stratégie, et au niveau de chaque projet, dans le cadre des évaluations socio-économiques, pour mettre en œuvre cette dernière.

Encadré 2 – Mesure et prise en compte des externalités négatives des transports

Les coûts externes correspondent à des activités dont certains impacts ne sont pas entièrement pris en compte, ou directement compensés, par les personnes/organisations qui en sont à l’origine. En matière de transport, par exemple, les voitures rejetant des oxydes d’azote (NOx) causent des dommages à la santé humaine, qui ne sont pas intégrés par le conducteur du véhicule.

Les coûts externes des transports peuvent être regroupés en trois « familles » : les coûts environnementaux (contribuant à l’effet de serre, pollutions de l’air, dommages à la biodiversité, nuisances sonores, …), les coûts de congestion (retards, temps de parcours et/ou d’arrivée peu fiables, coûts d’exploitation supplémentaires, activités économiques perturbées, …), les coûts d’accidentalité (coûts directs et indirects d’un accident non compensés par les assurances).

En 2019, CE Delft a évalué les externalités au niveau de l’UE 28, aboutissant à un montant de plus de 700 Mds€ pour les effets relatifs à l’environnement et aux accidents. En prenant également en considération les conséquences des congestions, l’impact global avoisine les 1000 Mds€, soit plus de 6% du PIB européen.

Figure 1 – Externalités négatives des transports au niveau de l’UE 28

CE Delft, Handbook on the external costs of transport, rapport commandité par la Commission Européenne, 2019.

En second lieu, la recherche des solutions les plus efficientes doit s’inscrire dans une stratégie de long terme : l’objectif doit être d’atteindre la neutralité carbone à horizon 2050 en minimisant le coût complet de la transition. Cela implique de tenir compte des interactions entre différents secteurs (électrification des mobilités et décarbonation de l’électricité, par exemple), de combiner différentes solutions (y compris sur un même territoire) et d’avoir une approche dynamique, intégrant la baisse des coûts de certains investissements dans le temps  (comme, par exemple, dans le cas de l’hydrogène d’origine renouvelable ou bas carbone).

Dans cette perspective, le critère du « coût d’abattement du CO2 » , qui permet de comparer différentes solutions de décarbonation en ramenant leurs coûts à leur impact sur la réduction des émissions de GES, est un indicateur utile, mais qui doit être manié avec précaution. Reposant sur une approche marginale, il peut conduire à éliminer des solutions pourtant structurantes. Comme l’explique Stéphane Hallegatte, senior climate change advisor de la Banque Mondiale, « pour ramener les émissions à presque zéro, on ne peut se permettre d’ignorer les émissions difficiles à abattre : la question n’est plus d’identifier les opportunités à bas coût, mais de supprimer toutes les émissions au coût le plus faible possible » [36]. Il faut donc d’abord définir l’ensemble des actions nécessaires à la transition et leur chemin critique (en prenant des hypothèses sur les pratiques, les technologies, les coûts, etc.), dans le cadre d’un exercice de « backcasting ». Le coût d’abattement ne doit pas servir à déterminer dans quel ordre on fait les choses, mais à comparer, une fois définies les actions nécessaires à la transition, des solutions comparables entre elles.

Proposition n°1 : Maximiser les impacts des décisions en matière de transport en tenant compte de l’ensemble des co-bénéfices (baisse des émissions de CO2, économies d’énergie, baisse de la congestion, sécurité, qualité de l’air, biodiversité, etc.) et en minimisant le coût complet de la transition, dans le cadre d’une stratégie de long terme.

1.3. Une protection face aux chocs à mieux prendre en compte

La décarbonation des transports présente une valeur « assurantielle » qu’il convient d’intégrer au débat public pour éclairer les choix à venir : si les investissements nécessaires avaient été réalisés (notamment dans les transports publics ou les mobilités actives, qui sont des solutions de décarbonation disponibles depuis plusieurs décennies), la France aurait certainement amoindri l’effet des chocs qu’elle a connus ces dernières années : crise des gilets jaunes, crise sanitaire et crise énergétique. Or, cette « trilogie » de crises aura significativement concouru à la forte progression de la dette publique d’environ 1 000 Mds€ intervenue depuis le début des années 2010, soit un accroissement de l’ordre de 40% du PIB.

Il est en effet possible de montrer les liens entre ces crises et leurs impacts d’une part et l’échec à déployer un système de transport décarboné d’autre part :

  • Crise des gilets jaunes : relayant la perception d’un accès inégalitaire à la mobilité, le mouvement à l’origine de ce choc s’est construit, dans un contexte de forte remontée du prix du pétrole, en opposition à une série de mesures visant à réduire les déplacements en voiture thermique (hausse de la composante carbone, convergence de fiscalité entre le diesel et l’essence, limitation à 80 km/h de la vitesse sur les routes nationales). Il a ainsi mis en évidence la fragilité du système de mobilité dans les espaces « périphériques » et peu ou moyennement denses. La crise a coûté près de 20 Mds€ à la collectivité (avec des effets récurrents)[37] et durablement interrompu la progression de la fiscalité du carbone ;
  • Crise sanitaire : au regard des coûts économiques de la pollution de l’air (±50 Mds€ par an en France) et de la corrélation avérée entre taux de pollution et mortalité liée au Covid-19 (et désormais éclairé par une littérature épidémiologique très dense), des transports décarbonés auraient certainement réduit le coût annuel de ces pollutions et mieux préparé la France à la crise sanitaire, en réduisant les facteurs de comorbidité et en limitant l’engorgement des hôpitaux qui a conduit aux confinements. Le coût de la crise Covid-19 pour les finances publiques aurait été allégé sachant que le « quoi qu’il en coûte » a représenté près de 200 Mds€ de dépenses directes et que, durant cette période, la dette publique a été accrue de plus de 500 Mds€[38]. En ce sens, relevons également que l’Institut national de l’environnement industriel et des risques (INERIS) estime qu’à horizon 2030, le respect des nouveaux plafonds d’émission issus du droit de l’UE pourrait induire, en France, des bénéfices sanitaires annuels de l’ordre de 17,7 Mds€, pour un coût des mesures de réduction estimé à 6,4 Mds€ par an, soit un gain annuel net de plus de 11 Mds€[39] ;
  • Crise énergétique : face aux tensions sur les marchés de l’énergie causées par l’invasion russe en Ukraine, des transports décarbonés auraient davantage pu contribuer à (i) protéger les équilibres économiques et sociaux du pays, (ii) progresser vers la neutralité carbone et (iii) préserver les finances publiques (offrant un « triple dividende ») alors que la Cour des comptes a estimé le montant des mesures prises par l’État face à la hausse des prix de l’énergie à 25 Mds€ en 2022 et 36 Mds€ en 2023[40].

A l’évidence, au regard des volumes en jeu, il importe de placer dans le débat public ces divers coûts de la « non-décarbonation » (i.e. des coûts cachés reliés à un volume d’investissements sous-optimal) mécaniquement traduits dans la dette publique.

Proposition n°2 : Prendre en compte la valeur « assurantielle », c’est-à-dire de protection face aux chocs, de la décarbonation des transports dans la prise de décision

2. Le « quoi » : une approche globale pour des résultats dès 2030

L’échec à décarboner les transports et les mobilités par le passé et l’urgence à « inverser la courbe » des émissions de GES et plus largement de l’impact environnemental de ces derniers doit conduire à un changement de paradigme, selon trois priorités :

  • Intégrer l’ensemble des modes : pour décarboner les transports, les politiques des dernières décennies, en particulier depuis le Grenelle de l’Environnement, ont privilégié le report modal vers le transport ferroviaire, avec le déploiement de lignes à grande vitesse (LGV). Le développement du transport ferroviaire, réorienté vers les trajets du quotidien et le fret, est justifié sur le domaine de pertinence du rail : grâce notamment au TGV, le transport ferroviaire offre un bilan carbone très favorable (seulement 0,3% des GES du secteur pour 10% de part modale), car il est largement électrifié et bénéficie à ce titre du mix français (caractéristique différenciante dans l’UE). 

Pour autant, la décarbonation des mobilités routières est tout aussi impérative[41]. L’usage de la route est en effet prédominant et pérenne : aujourd’hui, la route correspond à 83% des transports de voyageurs (part modale stable depuis 30 ans) et 88% des transports de fret (part modale en croissance). Les scénarios sous-tendant la programmation pluriannuelle de l’énergie 2019–2028 (PPE) et la SNBC prévoient une hausse de la mobilité routière d’ici 2030 et une part modale quasi-stable. Même en doublant la part modale du ferroviaire, son empreinte resterait supérieure à 70%. Les prévisions à horizon 2050 établies par l’ADEME confirment également la prépondérance durable de la route, quel que soit le scénario ;

  • Renforcer la logique territoriale, pour adapter les solutions aux caractéristiques de chaque territoire. La décarbonation des transports et des mobilités doit être une priorité pour tous les territoires – et pas seulement les métropoles. Mais elle n’appelle pas partout les mêmes solutions.

De façon générale, comme l’explique Jean Coldefy, « Compte tenu de l’analyse territoriale de la répartition des émissions, il faut assurer l’accessibilité par des moyens décarbonés, c’est-à-dire une intermodalité voiture / vélo + transports en commun ou du covoiturage entre périurbain et agglomérations, une intermodalité mode doux + transports en commun urbains au sein des premières couronnes et enfin la voiture électrique au sein du périurbain, les distances à parcourir étant inférieures à 100 km par jour et la densité ne permettant pas de déployer des transports en commun efficaces » [42] ;

 

Figure 2 – Localisation des émissions de la voiture et modes à mobiliser

  • Répondre véritablement à l’urgence : pour respecter les jalons de décarbonation définis pour 2030, qui sont indispensables au respect des objectifs de l’Accord de Paris, les mesures et les investissements permettant de donner des résultats tangibles dès la présente décennie doivent être privilégiés. Ils existent.

On distingue généralement cinq leviers de décarbonation des transports[43] :

  1. La modération de la demande de transport : il s’agit de l’enjeu clé de la sobriété, qui recouvre des changements d’organisation de la société et une évolution des comportements et des usages ;
  2. Le report modal, de la route vers les mobilités actives (marche, vélo trottinettes, etc.), en milieu urbain notamment, et vers le transport ferroviaire ;
  3. L’optimisation du remplissage des véhicules, avec le développement des transports en commun mais aussi du covoiturage pour le transport de personnes et l’amélioration du taux de remplissage des poids lourds pour le fret ;
  4. L’efficacité énergétique des véhicules, c’est-à-dire la baisse des consommations d’énergie par kilomètre parcouru grâce au progrès technologique et à l’électrification (deux à trois fois plus efficace que les solutions thermiques). Notons toutefois que, ces dernières années, l’augmentation du poids des véhicules avec l’essor des SUV, a annulé les gains liés à l’amélioration des performances énergétiques des moteurs thermiques[44] ;
  5. La baisse de l’intensité carbone du parc de véhicules, avec en particulier l’électrification.

A ces leviers classiques de décarbonation doivent être ajoutés, dans une perspective plus globale, d’autres actions qui ont vocation à accélérer la transition écologique des infrastructures de transport, notamment :

  1. L’adaptation au changement climatique, qui passe en particulier par le renforcement de la résilience des infrastructures aux phénomènes météorologiques extrêmes comme les crues, les inondations ou les incendies ;
  2. La production d’énergie renouvelable ;
  3. L’amélioration de l’intégration des infrastructures à l’environnement.

 

Encadré 3 – Quels leviers de sobriété dans les transports ?

Comme l’avait souligné Terra Nova à l’été 2022[45], la sobriété « implique des changements d’usage, de comportement, d’organisation de nos espaces de vie ou de pratique de consommation qui engendrent une baisse des besoins ». Elle relève à la fois d’actions individuelles et de modes d’organisation de nos sociétés. En matière de transports, les leviers de sobriété principaux relèvent notamment de l’aménagement du territoire (pour limiter l’étalement urbain, qui engendre les « trajets longs du quotidien », du télétravail (même si ce dernier peut entraîner des effets rebonds[46]), de l’organisation des espaces de travail (bureaux « satellites » de bureaux centraux pour limites les déplacement) de la limitation des déplacements domicile-travail à la pause déjeuner (cuisine sur place, tickets restaurants, etc.), de la téléconsultation ou encore du développement de circuits courts.

Au-delà de ces changements organisationnels et comportementaux, la sobriété est également liée à la massification et à l’optimisation des flux de mobilité, qui passent notamment par un meilleur remplissage des trains et autres modes de transports collectifs ou par la lutte contre l’autosolisme. L’activation de ces leviers devrait en effet conduire, toutes choses égales par ailleurs, à une baisse des trafics (ou en termes plus techniques des véhicules.km en valeur absolue). Comme le souligne le COI dans son récent rapport, « L’un des puissants leviers, outre le report modal et la conversion des motorisations, est que les véhicules qui roulent soient remplis le mieux possible. (…) Si l’on met de côté les facteurs technologiques, c’est donc bien le degré de mutualisation de l’usage (lutte contre l’autosolisme, mutualisation des flottes, offre de services semi-collectifs ou collectifs (minibus, bus, autocars)) qui déterminent un usage optimisé de l’infrastructure »[47].

Il n’entre pas dans le cadre de cette note de présenter de façon exhaustive tous ces leviers. Notre objectif est d’identifier et de détailler ceux qui, parmi eux, ont vocation à avoir le plus d’impact à court terme, en tenant compte de leurs coûts relatifs et des spécificités territoriales. Sans négliger, bien entendu, de préparer le plus long terme, la réussite de la décarbonation des transports et de la mobilité passe nécessairement par des résultats concrets et rapides.

Dans cette perspective, nous insistons plus particulièrement sur cinq séries de propositions : accompagner l’électrification de la mobilité routière (2.1), réussir l’« Acte II » du ferroviaire (2.2), déployer un plan « cars express et covoiturage » pour développer les mobilités partagées dans les territoires (2.3), étendre le domaine du vélo (2.4) et utiliser les infrastructures de transport pour produire de l’énergie verte (2.5). A ces leviers de décarbonation mérite également d’être ajouté dès à présent un volet sur l’adaptation des infrastructures de transport au changement climatique (2.6).

2.1. Accompagner l’électrification de la mobilité routière

L’électrification est le levier de décarbonation le plus efficace de la mobilité routière individuelle, grâce au faible contenu carbone de l’électricité française. La dynamique est déjà enclenchée : le choix de la mobilité électrique par les Français est sensiblement plus rapide que ne le prévoyait la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) 2019–2028. Fin 2022, 1,1 million de véhicules électriques et hybrides rechargeables étaient en circulation en France et les immatriculations de ces véhicules atteignaient 22,2% de parts de marché.

Cette dynamique s’explique par le renforcement des obligations réglementaires relatives aux motorisations (cf. section 3.2) et par un soutien public fort pour l’acquisition des véhicules électriques, afin de compenser un coût à l’achat plus élevé, du fait du coût des batteries. Ce soutien repose aujourd’hui essentiellement sur des mécanismes fiscaux s’appliquant lors de l’achat/l’enregistrement d’un nouveau véhicule (bonus/malus écologique, prime à la conversion, exonération du coût de la carte grise). Le caractère beaucoup plus faible des divers coûts d’usage (carburants, assurances, réparations, etc.) par rapport à ceux des véhicules thermiques, est également un facteur d’attractivité de la mobilité électrique et pourrait être une source précieuse de gains de pouvoir d’achat pour les ménages modestes s’ils avaient les moyens d’y accéder[48].

La question de la soutenabilité et de l’efficacité de ce dispositif, notamment d’un point de vue social, mérite toutefois d’être posée :

  • Entre 2013 et 2020, environ 1,7 Md€ de subventions publiques a été accordé pour subventionner l’achat de véhicules électriques [49]. L’augmentation du parc électrique aura pour conséquence d’accroître mécaniquement le montant des aides mais aussi de diminuer les recettes fiscales, notamment la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Une étude estime qu’à horizon 2030 le manque à gagner pour l’Etat s’élèverait, selon les scénarios, entre 8 et 17 Mds€ par an dans le cas d’une croissance faible du véhicule électrique[50]. Pour des raisons de maîtrise budgétaire, il apparaît donc indispensable de prévoir, à terme, une baisse des aides et une évolution de la fiscalité énergétique ;
  • En dépit des baisses de prix et des subventions (qui prennent en compte les revenus), le véhicule électrique reste aujourd’hui réservé à une catégorie aisée de la population. 79% des propriétaires ont d’ailleurs au moins un autre véhicule à moteur thermique pour effectuer de longs trajets[51] . Le fait qu’il n’existe pas encore un marché secondaire d’occasions pour le véhicule électrique ne favorise pas non plus l’accès des ménages modestes à ce type de solutions. La proposition du Président de la République de « véhicule à 100 euros », dans le cadre d’une offre de leasing social, vise à remédier à cette situation. La Première ministre a annoncé le 26 avril 2023 sa mise en place à l’automne pour de premières livraisons début 2024.

On peut considérer que le système mis en place jusqu’à présent a permis l’amorçage de la transition vers la mobilité électrique, mais qu’il doit aujourd’hui évoluer pour consolider cette transition, dans deux directions[52] :

  • D’une part, en redéployant une partie des aides vers l’industrie, en amont, sous la forme d’aides à l’adaptation, à l’innovation et à la compétitivité de l’écosystème industriel vert français, soumises à différentes conditions permettant de s’assurer de l’adéquation de l’offre (véhicules électriques abordables, plus petits et plus frugaux, leasing social) ;
  • D’autre part, en ciblant mieux les aides sur les usages les plus vertueux (en intégrant un critère de poids des véhicules, pour éviter de subventionner l’achat de SUV électriques[53]) et sur les publics les plus contraints (leasing social, aides à l’achat de véhicules d’occasion, aides au retrofit électrique, etc.).

Proposition n°3 : Revoir le système d’aides à l’acquisition des véhicules électriques (i) en le redéployant vers l’industrie, en amont et (ii) en ciblant mieux les aides sur les usages les plus vertueux (en intégrant un critère de poids des véhicules) et sur les publics les plus contraints (leasing social, aides à l’achat de véhicules d’occasion, etc.)

Au-delà des aides à l’acquisition des véhicules électriques, l’infrastructure routière doit être transformée pour accueillir ces véhicules décarbonés. Il faut adopter, en la matière, une logique d’offre : l’absence d’un réseau satisfaisant de bornes de recharge constitue en effet l’un des principaux freins à l’adoption à grande échelle des véhicules électriques[54]. 

L’objectif des 100 000 points de recharge ouverts au public a été atteint, avec retard, en avril 2023, avec une forte accélération du rythme de déploiement (+17 000 points de recharge depuis janvier 2023, soit 2/3 des installations effectuées sur toute l’année 2022). Si la recharge au domicile et sur le lieu de travail sont naturellement clés, il convient d’insister sur l’importance d’équiper les routes – et en particulier les autoroutes, qui accueillent la mobilité longue distance et structurent l’ensemble des mobilités routières – d’un réseau adapté de bornes de recharges suffisamment puissantes.

Sur le réseau autoroutier, il s’agit de déployer, à court terme, un maillage dense de bornes de recharge électrique rapides et surtout ultra-rapides, fiables et à un tarif compétitif pour les véhicules légers, en anticipant les besoins compte tenu des délais de déploiement. Si l’ensemble des aires de service du réseau autoroutier devrait être équipé en 2023, il apparaît nécessaire d’accélérer le rythme de déploiement pour accompagner l’essor du véhicule électrique. A titre d’exemple, pour couvrir les besoins estimés sur autoroutes à horizon 2035, il faudrait multiplier par 10 le nombre de bornes par aires de service et les raccorder au réseau électrique à hauteur de 8 MW par aire[55].

Face à un tel cahier des charges, un véritable schéma directeur est indispensable notamment pour assurer la cohérence à l’échelle du territoire, coordonner les investissements dans les bornes et les réseaux électriques et garantir une modération des tarifs de recharge dans la durée pour « rassurer » les futurs usagers.

L’électrification des poids lourds est plus complexe en raison du volume et du coût plus élevé des batteries. Elle prendra plus de temps. A horizon 2030, il semble que les poids lourds électriques à recharge statique constituent la solution la plus probable. Le schéma directeur devra donc intégrer des bornes de recharge électrique ultra-rapides pour poids lourds. A plus long terme (après 2030), des systèmes de route électrique (Electric Road System – ERS) pourraient être déployés, en fonction des résultats des expérimentations en cours et des choix technologiques qui devront être effectués au niveau européen. L’hydrogène vert pourrait également constituer une solution technologique pertinente pour décarboner le transport routier de marchandises.

Proposition n°4 : Adopter un schéma directeur pour le déploiement des bornes de recharge électrique sur le réseau routier, en particulier autoroutier

2.2. Réussir l’« Acte II » du ferroviaire

Le premier quinquennat d’Emmanuel Macron a marqué une étape importante dans la longue histoire du système ferroviaire français. Le pacte ferroviaire adopté en 2018[56] a préparé l’ouverture à la concurrence du transport de voyageurs, réorganisé le Groupe SNCF, autour d’une société mère (SNCF SA) et de filiales transformées en sociétés anonymes (SNCF Réseau, SNCF Voyageurs, Fret SNCF, etc.), mis fin au recrutement au statut et prévu la reprise par l’État de 35 Mds€ de la dette de SNCF Réseau. Dans le contexte de la crise sanitaire et du plan de relance, l’État a ensuite apporté un soutien fort au transport ferroviaire, en lui consacrant 4,7 Mds€, dont une augmentation de capital de la SNCF de 4,05 Mds€ destinée à soutenir les investissements de SNCF Réseau. L’État a aussi repris à son compte l’objectif de doubler la part modale du fret ferroviaire à horizon 2030, désormais inscrit dans la loi[57], et, après de premières mesures de relance, adopté en septembre 2021 une stratégie nationale de développement du fret ferroviaire (SDFF)[58]. Cependant, le contrat de performance conclu en avril 2022 entre l’État et SNCF Réseau a été unanimement considéré comme insuffisant non seulement pour satisfaire ces ambitions mais ne serait-ce que pour éviter un décrochage du réseau ferroviaire français par rapport à nos voisins européens.

Après cet « Acte I », le Gouvernement a annoncé un « Acte II » du ferroviaire. Dans son discours de politique générale, la Première ministre Elisabeth Borne a souligné que « le ferroviaire est et restera la colonne vertébrale de la mobilité propre ». Cette ambition initiale s’est traduite dans les annonces du discours du 24 février 2023, qui place le ferroviaire au cœur du « plan d’avenir pour les transports », avec un investissement de 100 Mds€ d’ici à 2040.

Au-delà de ces annonces, il est essentiel de dégager les conditions de réussite de cet ambitieux plan. Trois principales conditions méritent d’être particulièrement soulignées.

La première réside dans la précision des montants alloués au plan[59] et la hiérarchisation et le séquencement des investissements. Cet exercice devra être fait en tenant compte de plusieurs considérations : l’impact sur les émissions de CO2 et les autres co-bénéfices (cf. section 1.2.3), les spécificités territoriales, la capacité des acteurs de la filière à délivrer (et en particulier les maîtres d’ouvrage – SNCF Réseau et Société du Grand Paris), etc.

A ce stade, et de façon générale, il est possible d’identifier trois catégories d’investissements et de nouveaux services prioritaires pour la décennie 2020 :

  • La régénération et la modernisation du réseau ferroviaire et des gares : face au risque de décrochage du réseau ferroviaire français (dont les composantes sont deux fois plus âgées en moyenne qu’en Allemagne), le réseau ferroviaire doit être régénéré et modernisé, avec le déploiement de l’ERTMS[60] et le remplacement de 2 000 postes d’aiguillage par 15 commandes centralisées du réseau (CCS). La Première ministre a annoncé à ce titre 1 Md€ supplémentaire par an pour la régénération du réseau, et 500 M€ par an pour sa modernisation.
  • Les infrastructures et services ferroviaires du quotidien : il s’agit principalement des réseaux express régionaux (RER) métropolitains, c’est-à-dire une offre ferroviaire cadencée à haute fréquence dans les grandes agglomérations, ayant vocation à s’interconnecter avec les autres modes de mobilité (cf. section 2.3). A l’instar de ce qui est en place en région parisienne, ces services ont vocation à proposer, pour une partie des « déplacements longs du quotidien », une alternative à la voiture, avec des trains « plus nombreux, plus réguliers et desservant mieux les bassins de vie », intégrés dans « des réseaux de transport complets pour les Français » [61].

A ce titre, le COI a identifié 15 projets majeurs, dont la maturité est toutefois variable. Au-delà des RER métropolitains stricto sensu, de nouvelles lignes apparaissent également pertinentes pour la décarbonation des mobilités du quotidien, telles que la LGV Provence Côte d’Azur (LNPCA) ou le sillon lorrain – Luxembourg. Une proposition de loi relative aux services express régionaux métropolitains a été déposée à l’Assemblée nationale le 25 avril 2023 et devrait être discutée mi-juin 2023.

Figure 3 – Projets de RER métropolitains

Source : COI, 2023

  • Le développement du fret ferroviaire : si le transport routier de marchandises doit encore progresser vers la décarbonation (cf. section 2.1), le fret ferroviaire constitue une solution déjà disponible décarbonée (car majoritairement électrique) et plus sobre en énergie (6 fois moins d’électricité à la tonne que le fret routier). Le doublement de la part modale du fret ferroviaire, objectif affiché par l’État, passe par plusieurs leviers : (i) l’amélioration de la disponibilité et de la qualité des sillons, (ii) des investissements capacitaires dans le réseau ferroviaire (rénovation des triages, des investissements de capacité autour de certains nœuds ferroviaires, l’extension du domaine accessible aux trains longs de 850 m, mise au gabarit, etc.) et dans les terminaux multimodaux (existants et nouveaux), pour un montant estimé à environ 4 Mds€, et (iii) le soutien aux opérateurs, à très court terme, pour les protéger contre la hausse des prix de l’énergie, et à moyen terme, en pérennisant les aides au secteur après 2024, pour assurer l’équité concurrentielle face à la route, qui ne paie pas, aujourd’hui, ses externalités négatives[62]. Les annonces récentes faites par le Gouvernement vont dans le bon sens, qui a annoncé le 23 mai 2023 un plan de financement de 4 Mds€ d’ici 2032 et une augmentation des aides pour le secteur à hauteur de 200 M€ par an, jusqu’en 2030. Mais la question de l’allocation des capacités ferroviaires reste ouverte (cf. infra).

Les investissements dans le ferroviaire devront être pensés également dans une perspective de multimodalité :

  • Dans le fret, le transport combiné a vocation à être le principal moteur du report modal : le trafic du transport combiné rail-route devrait tripler à horizon 2030 dans le cadre d’un doublement de la part modale du fret ferroviaire. Il permet d’optimiser la complémentarité entre le rail et la route par répartition des distances à chaque mode (long pour le rail, court pour la route) ;
  • Dans le transport voyageurs également, l’interconnexion des gares avec d’autres modes de mobilité (cars, voitures, vélos, trottinettes, etc.) sera déterminante pour la décarbonation des mobilités (cf. section 2.3). La meilleure desserte ferroviaire des aéroports servirait également les objectifs de décarbonation, en assurant des liaisons multimodales performantes tant pour les déplacements du quotidien que pour les clients voyageurs longue distance en correspondance TGV et autres transports ferrés ou routiers.

La définition des besoins puis la déclinaison des projets au niveau territorial – dans le cadre des négociations des contrats de plan État-régions notamment – devront être assurées « en mode projet » par les pouvoirs publics (État, régions), en lien avec les autres parties prenantes, puis par les maîtres d’ouvrage (SNCF Réseau et SGP), pour engager et réaliser ces travaux dès que possible et obtenir des résultats avant la fin de la décennie (cf. section 3.1).

La programmation de ces investissements au sein d’une loi pourrait permettre, sur cette base, de construire un consensus et d’inscrire ces investissements dans la durée (cf. section 3.1). Une telle loi n’est toutefois pas un prérequis à la réalisation de ces investissements. Cette programmation devra identifier les investissements et clarifier les responsabilités.

Proposition n°5 : Programmer dans la loi, sans en faire un prérequis, les investissements ferroviaires dans les 10 prochaines années, en priorisant notamment la régénération et la modernisation du réseau ferroviaire, les RER métropolitains et nouvelles lignes du quotidien et le fret ferroviaire

La deuxième condition est d’améliorer l’articulation entre travaux et trafics. Cet enjeu est particulièrement important pour le fret ferroviaire longue distance (transport combiné notamment)[63] :

  • Aujourd’hui, SNCF Réseau privilégie l’optimisation des travaux à l’attribution de la capacité. L’organisation des travaux est devenue très confiscatoire pour les trafics de fret (avec, par exemple, des chantiers fermant les deux voies sur plus de 8h par nuit sur des durées de 20 à 30 semaines), ce qui, outre une compétition travaux-sillons, génère une compétition sillons-sillons puisque, autour des grandes villes, les trains de voyageurs comme de fret doivent désormais passer en heures de pointe ;
  • Face à cette situation, et compte tenu de l’ampleur des investissements à venir, SNCF Réseau devrait déployer une vision industrielle consistant à réduire et figer l’empreinte capacitaire des travaux sur le trafic de fret. Il s’agit, sur les axes structurants, d’afficher et de réorienter la stratégie capacitaire de SNCF Réseau pour mieux équilibrer la part des capacités ferroviaires bénéficiant au trafic, notamment au transport combiné, et celle bloquée pour les travaux. La planification des sillons et des travaux devrait être anticipée et mieux coordonnée pour réserver et protéger la place réservée au trafic face aux travaux. Ne pas changer la situation actuelle signifierait l’échec de la stratégie nationale de développement du fret ferroviaire.

Proposition n°6 : Déployer une vision industrielle de la gestion du réseau passant par (i) la réorientation et la publication de la stratégie capacitaire, pour mieux équilibrer la part bénéficiant au trafic (notamment combiné) et celle bloquée pour les travaux et (ii) une planification anticipée et coordonnée des travaux et des sillons

La troisième condition réside naturellement dans la mise en place d’un financement suffisant et pérenne. Il convient de relever à ce titre que :

  • Comme en témoigne le montant de 100 Mds€ annoncé par la Première ministre, les besoins d’investissement sont particulièrement élevés. Ils doivent couvrir non seulement les infrastructures mais aussi le matériel roulant, qui pose notamment problème dans les régions ;
  • Ce financement ne pourra pas passer par une hausse des péages ferroviaires, qui ont un niveau élevé[64] et n’incitent pas à augmenter le nombre de circulations. En tout état de cause, en application de la « règle d’or », le Pacte ferroviaire interdit à SNCF Réseau de participer au financement d’investissements de développement du réseau ferré jusqu’au 31 décembre 2026, date à laquelle le ratio dette/marge opérationnelle devra être revenu en-deçà de 6[65] ;
  • Il est dès lors nécessaire de trouver d’autres ressources. Cette recherche de financements devra aussi aller de pair avec une amélioration de la productivité des différents acteurs du ferroviaire, pour optimiser les coûts (gestionnaire de réseau, opérateurs – ce que devrait favoriser notamment la concurrence) (cf. section 3.3).

Si le temps du ferroviaire est, nécessairement, long, des résultats concrets seront obtenus dès 2030 si les décisions sont prises rapidement. Ainsi, une dizaine de RER métropolitains pourraient être déployés d’ici 2030. Par ailleurs, la filière du transport combiné estime possible, avec une réorientation de la stratégie capacitaire et des investissements bien ciblés, d’augmenter les trafics de 60% d’ici 2027, ce qui reviendrait à retirer environ 450 000 camions supplémentaires des routes entre 2021 et 2027[66].

2.3. Déployer un plan de transport routier express dans les territoires

Outre les solutions technologiques, notamment l’électrification (cf. section 2.1), il est essentiel, pour décarboner les mobilités routières, de lutter contre l’autosolisme, en augmentant le taux d’occupation moyen des véhicules.

Alors que 81% des kilomètres parcourus par les Français le sont en voiture individuelle, seulement 16 personnes sont transportées pour 10 véhicules et une capacité totale de 50 places. Le taux d’occupation a fortement diminué en 60 ans, passant de 2,3 personnes/véhicule (toutes distances de trajet confondues) en 1960 à 1,58 en 2017[67], et même 1,3 pour les trajets locaux, soit un gaspillage de la capacité de transport de 75%. Cette inefficacité généralisée sous-tend l’ensemble des enjeux économiques (dépendance aux importations d’hydrocarbures), sociaux (mouvement des gilets jaunes…) et environnementaux (émissions de GES, pollutions…) autour de la route.

Pour lutter contre cette situation, une politique ambitieuse pourrait prendre la forme d’un grand plan de transport express dans les territoires :

  • Ce projet consisterait à déployer de manière coordonnée, sur le réseau de routes départementales et nationales et d’autoroutes, des services de car express et de covoiturage haute fréquence, afin d’offrir aux autosolistes – et en particulier aux navetteurs longs – une alternative concrète et sans contrainte, à l’usage de la voiture individuelle. Un rapport remis en avril 2023 par François Durovray, Président du Département de l’Essonne, préconise ainsi de lancer au plus tôt une cinquantaine de nouvelles lignes de cars express (et potentiellement une centaine) sur les grands axes routiers de la région Ile-de-France, pour connecter rapidement les territoires les plus éloignés au cœur de la métropole parisienne, pour un montant estimé à 1 Md€ sur 10 ans[68]. Cette solution aurait vocation à être étendue à d’autres territoires. Un tel modèle a été par exemple déployé à Madrid mais est aujourd’hui quasi inexistant en France, à l’exception notable des lignes Marseille – Aix-en-Provence et sur l’A10. Le covoiturage – qui fait l’objet d’un soutien fort de l’Etat, avec un plan covoiturage de 150 M€ pour tripler le nombre de trajets quotidiens d’ici 2027 – aurait également toute sa place dans un tel projet, en adoptant une approche plus territoriale. A ce titre, il convient de valoriser en particulier les services de « lignes de covoiturage »[69], qui consistent à proposer un système de mise en relation en temps réel (sans réservation, ce qui les distingue des plateformes de covoiturage planifié) pour relier les périphéries aux centres. Le développement de ces lignes est soutenu par le fonds vert mis en place par l’Etat et pourrait trouver sa place dans les contrats de plan avec les régions ;
  • Pour constituer des alternatives crédibles à l’autosolisme, ces lignes de transport express (car ou covoiturage) devraient offrir un haut niveau de service, c’est-à-dire confortable, sûr, fiable et avec une fréquence élevée, pour être aussi voire plus rapides qu’un trajet en voiture individuelle. Elles seraient d’autant plus attractives qu’elles seraient moins chères. Ainsi, un salarié automobiliste se rendant quotidiennement sur son lieu de travail, situé à 30 km, en alternance avec son voisin, économiserait ainsi près de 2000 euros chaque année[70] ;
  • Les services de car express et de covoiturage seraient complémentaires et non exclusifs l’un de l’autre. Des expériences conduites dans certains territoires, comme le pays voironnais près de Grenoble, montrent que la combinaison d’offres de trains, de cars et de covoiturage peut être particulièrement pertinente et efficace pour lutter contre l’autosolisme[71] ;
  • Pour permettre l’exploitation de ces services, l’infrastructure routière devrait être adaptée, avec notamment la création de parkings, de gares et de pôles d’échanges multimodaux (PEM), permettant d’assurer de bonnes interconnexions et services au départ comme à l’arrivée. En fonction des besoins des territoires, ces gares et PEM représenteront des investissements modestes, pouvant être déployés rapidement, ou plus importants, notamment sur autoroutes (où l’investissement peut atteindre plusieurs millions d’euros). Par ailleurs, des voies réservées devraient également être mises en place pour garantir la qualité du service offert (notamment sa fiabilité et sa rapidité). Ces voies réservées peuvent être dynamiques (en fonction de l’état du trafic) ou permanentes. A ce titre, afin de maximiser les incitations aux mobilités partagées et d’éviter les effets rebonds, il apparaît possible de réorienter une partie des capacités existantes des 2*3 voies aux cars express et au covoiturage (plutôt qu’utiliser la bande d’arrêt d’urgence ou de créer de nouvelles voies). Ce choix est d’autant plus justifié que les efforts de sobriété et de massification / optimisation des flux devrait conduire à diminuer le nombre de véhicules.km sur route (cf. supra) ;
  • Le véhicule connecté et le véhicule autonome pourront permettre, à terme, d’améliorer encore ces services, notamment le covoiturage[72].L’intérêt majeur de ces technologies est si les véhicules sont partagés, pour accroître les capacités en diminuant les coûts d’exploitation.

Pour mettre en œuvre un tel plan dans les meilleurs délais, l’État, dans un rôle d’impulsion, pourrait lancer un appel à projets pour co-financer, aux côtés des autorités organisatrices de la mobilité (AOM), l’adaptation de l’infrastructure et des services de mobilité associés[73] (cf. section 3.1).

Proposition n°7 : Lancer, dans le cadre d’appels à projets, un grand plan de transport express couvrant tout le territoire de lignes de car express ou de covoiturage, à partir de gares et pôles d’échanges multimodaux (PEM) et sur des voies réservées (en privilégiant la réaffectation des 2*3 voies)

Des mesures réglementaires pourraient également être prises pour favoriser le déploiement de tels services, en particulier dans le cadre de la mise en place des ZFE (cf. section 3.2). Ainsi, l’étude réalisée préalablement à l’institution d’une ZFE pourrait mieux prendre en compte les impacts sur les territoires dont les habitants travaillent dans la ZFE, au-delà de la « zone urbaine », et intégrer obligatoirement le déploiement des alternatives à la voiture individuelle (lignes de car express ou covoiturage), pour toutes les liaisons territoriales non couvertes par des transports collectifs réguliers existants. Par ailleurs, pour favoriser le covoiturage, les interdictions de pénétrer dans la ZFE pourraient être modulées selon le nombre de personnes transportées, pour donner un avantage aux automobilistes partageant leurs véhicules. 

Proposition n°8 : Aménager le dispositif des ZFE pour mieux intégrer et encourager le déploiement des alternatives à la voiture individuelle (lignes de car express ou de covoiturage)

2.4. Faire du vélo un moyen de transport massifié

La pratique du vélo est, avec la marche à pied, la mobilité active la plus vertueuse : neutre en carbone, bon marché, relativement rapide dans les cœurs d’agglomération sur les courts trajets et, last but not least, excellente pour la santé.

L’usage du vélo a connu un véritable décollage ces dernières années en France : les Français ont fait l’acquisition de plus de 10 millions de bicyclettes ces cinq dernières années[74], à quoi s’ajoutent les quelques 45 000 vélos en libre-service dans les grandes villes. 700 000 personnes utilisent ce mode de transport quotidiennement pour se rendre sur leur lieu de travail ou d’études. Un usage encore résiduel par rapport à la voiture, mais que le développement rapide des vélos à assistance électrique (VAE) pourrait stimuler dans les années qui viennent en allongeant les trajets envisageables par ce moyen (aujourd’hui, au-delà de 5 km, l’usage du vélo s’effondre).

La pratique du vélo est cependant encore largement circonscrite aux cœurs d’agglomération et aux populations les plus aisées : un tiers seulement des ménages modestes (premier décile) possèdent un vélo contre deux tiers des ménages aisés (dixième décile).

Les raisons de ne pas prendre son vélo sont bien connues : (i) impossibilité de le faire (distances trop longues, manque de temps…), (ii) manque de réseau cyclable sécurisé, (iii) solution de VAE trop chères, (iv) manque de lieux de stationnement sécurisés. Si la première raison est souvent irréductible, les trois suivantes méritent notre attention.

 

Figure 4 – Raisons de ne pas se déplacer davantage en vélo

Source : CGDD/SDES, Enquête sur les pratiques environnementales des ménages, 2016

En décembre 2017, la France comptait 40 201 kilomètres de pistes cyclables et de voies vertes. Quatre ans plus tard, en mars 2021, ce réseau cyclable avait grandi de 25% pour atteindre 51 921 km. Mais cette forte dynamique présente d’importantes disparités territoriales : une poignée de départements tire l’essentiel de la croissance. Les 20 premiers représentent à eux seuls 50% du domaine cyclable national. A quelques exceptions près, la France des pistes cyclables concerne des territoires plutôt plus denses, plus peuplés, plus jeunes et plus attractifs que la moyenne[75]. Souvent organisés autour d’une métropole, ils se caractérisent par des infrastructures routières étendues et par un dynamisme démographique plus soutenu.

Examiné à une maille plus fine, le réseau de pistes cyclables peut être assez dense dans les cœurs d’agglomération et beaucoup plus lâche, voire inexistant dans les couronnes périurbaines qui sont le plus souvent organisées pour et par la voiture. Même si les distances à parcourir entre lieu de résidence, lieu de travail et lieux de consommation et de loisirs y sont plus grandes, les habitants renoncent rapidement au vélo pour des raisons de sécurité. Alors même que l’appétit pour ce type de mobilité y est plus marqué qu’on ne le pense[76] et que le développement des VAE pourrait permettre de couvrir des distances plus grandes.

Une autre difficulté tient au prix des VAE. Aujourd’hui encore, l’entrée de gamme se situe autour de 1 000 € et les aides publiques nationales autour de 300 €[77]. Pour bien faire, il faudrait qu’elles soient pérennisées, voire accrues. C’est le cas de certaines aides régionales comme en Ile-de-France où l’aide peut atteindre 500 €. Il faut noter que la batterie représente une part importante de ce prix et que le progrès technique en la matière devrait tirer progressivement les prix à la baisse.

Le manque d’espaces de stationnement sécurisés est un autre facteur de réticence. L’aménagement de parkings à vélos sécurisés à proximité des plateformes intermodales et des gares serait utile : les coûts en sont modestes et les bénéfices potentiels importants. Il pourrait également être utile de faire en sorte que les copropriétés ne puissent pas s’opposer à l’installation de racks à vélos dans les cours d’immeuble.

Au total, le plan gouvernemental annoncé en mai 2023 présente une vision très « englobante » : pistes cyclables, formation des jeunes, accessibilité économique, filière industrielle… Et les montants sont non négligeables en valeur absolue (2 Mds€, d’ici 2027), tout en restant modestes dans le monde des transports (ce qui vient confirmer qu’investir dans le développement du vélo peut-être une « bonne affaire » en considérant les effets de chaque € public et privé investi). Si l’objectif est de tendre vers les 100 000 km de pistes, répétons que le décollage dépend désormais de la qualité et la continuité des réseaux, déterminants pour assurer la sécurité et rassurer les usagers potentiels et étendre son usage hors des villes.

Par ailleurs, l’effort de développement des infrastructures cyclables doit épouser les zones à fort potentiel. C’est le cas autour des pôles de transports en commun pour favoriser l’usage du vélo en intermodalité sur des trajets quotidien qui ne pourraient être intégralement parcourus à bicyclette (77% des kilomètres du quotidien sont le fait de trajets de plus de 10km, soit 20km/jour). De vastes parcs relais devraient ainsi être installés à proximité des gares. La pratique du vélo dispose également d’un réel potentiel de développement dans les villes moyennes où les distances moyennes sont beaucoup plus faibles que dans les métropoles.

Proposition n°9 : Développer l’usage du vélo en renforçant la sécurité des trajets dans les couronnes périurbaines, en pérennisant et augmentant les aides à l’achat des VAE et en aménageant davantage d’espaces de stationnement près des gares et dans les copropriétés.

2.5. Utiliser les infrastructures de transport pour produire de l’énergie verte

Dans le contexte de la guerre en Ukraine, l’indépendance énergétique s’impose comme un enjeu prioritaire. Cette indépendance passe à court terme (outre la recherche de nouvelles sources de gaz) par le déploiement de centrales de production d’énergies renouvelables, et en particulier photovoltaïque. Le Président de la République a fixé le 22 février 2022 un objectif de 100 GW de puissance installée pour la production d’électricité photovoltaïque d’ici 2050. La crise impose, plus encore, d’obtenir des résultats à un horizon très court, mesurables durant le mandat qui s’ouvre.

Les infrastructures de transport représentent un gisement important de production d’électricité photovoltaïque, en valorisant un foncier exempt de conflits d’usages et sans soulever de problème d’acceptabilité :

  • Les autoroutes, en mobilisant leur emprise foncière, sont propices à la production d’énergie renouvelable, notamment avec l’installation de centrales solaires sur les délaissés du domaine public autoroutier ou d’ombrières photovoltaïques sur les aires de service et de repos et sur les parkings de covoiturage (voire, à plus long terme, de véritables « autoroutes solaires », avec des panneaux surplombant la chaussée). A titre d’exemple, VINCI Autoroutes, qui exploite la moitié du réseau autoroutier concédé, estime le potentiel de production sur son périmètre à 1 GW, ce qui correspondrait à la consommation des véhicules électriques circulant sur le réseau autoroutier concédé en 2030[78] ;
  • De même, le Groupe SNCF a un grand potentiel de production photovoltaïque (autoconsommation électrique des gares d’ici 2030, développement de fermes solaires sur les fonciers non-utiles à l’activité ferroviaire et dont la localisation n’est pas compatible avec la construction de logements, etc.).

Pour permettre le déploiement massif de centrales de production d’énergie photovoltaïque à court terme, en prévision des prochains hivers (qui pourraient être marqués par des tensions dans les approvisionnements énergétiques), les procédures, aujourd’hui très longues et complexes (environ 4 ans), doivent absolument être simplifiées.

La loi du 10 mars 2023 relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, adopté par le Parlement en janvier 2023, fait un pas en ce sens mais apparaît comme une occasion en partie manquée. Elle simplifie les procédures applicables aux terrains aux abords des routes et autoroutes (notamment en supprimant l’interdiction de construire des installations photovoltaïques dans la bande des 100 m), voies ferrées et fluviales mais aurait pu aller plus loin, en adoptant une approche plus ciblée pour les fonciers dits « dégradés » des infrastructures de transport. Il aurait pu, par exemple, être prévu, à titre expérimental, un mécanisme d’autorisation préfectorale unique, délivrée après une étude d’impact limitée dans le temps et des consultations simplifiées. L’adoption du plan REPowerEU, qui consacre des « go-to-areas », au niveau européen, pourrait être l’occasion de revenir sur ce point.

Proposition n°10 : Simplifier les procédures applicables aux fonciers dégradés des infrastructures de transport

Proposition n°10 : Simplifier les procédures applicables aux fonciers dégradés des infrastructures de transport

2.6. Adapter les infrastructures de transport au changement climatique

Comme le souligne le COI dans son dernier rapport, « il est plus que temps de se préoccuper d’améliorer la résilience aux risques naturels dans un contexte de changement climatique », alors qu’« aucun véritable plan structurel d’ensemble d’adaptation des infrastructures n’existe »[79].

Les effets du changement climatique sont déjà très tangibles dans certaines régions, comme la région Provence Alpes Côte d’Azur, où, depuis les années 1960, les températures ont augmenté en moyenne de 1,8 °C : records de température, sècheresse, vagues de chaleur et méga-incendies ; augmentation de l’intensité des épisodes méditerranéens depuis le milieu du XXe siècle, avec de fortes pluies, des tempêtes et des submersions marines ; instabilité des sols due à ces évènements climatiques… Ces dérèglements nécessitent des actions « rapides et radicales » [80].

Si le gouvernement continue de déterminer sa politique d’atténuation en fonction de l’objectif de l’Accord de Paris (visant un réchauffement inférieur à 2°C), la politique d’adaptation doit être déterminée en fonction des dérives plus extrêmes : Christophe Béchu a indiqué qu’un scénario d’accroissement de + 4°C devait être pris en considération pour déterminer la politique française d’adaptation aux effets du changement climatique[81].

C’est l’enjeu du troisième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC3) qui devra être finalisé fin 2023. Les infrastructures de transport sont exposées à une grande diversité d’effets du changement climatique. A court terme, selon le CEREMA[82], elles seront soumises à des tempêtes plus violentes (aboutissant à une destruction plus fréquente des équipements des réseaux routiers et portuaires), des inondations qui pourraient aussi évoluer en fréquence et en intensité, une déformation des rails avec la chaleur, une exposition des routes au gonflement des sols, …

Dans le long terme, sous l’hypothèse d’une augmentation importante du niveau de la mer, on observera qu’une partie importe des réseaux routiers et ferroviaire se trouvera exposée à des épisodes de submersion.

 

Figure 5 – Infrastructures exposées au risque de submersion (en cas d’augmentation du niveau de la mer de 1 m)

Source : MTES

Autre enjeu, d’importance particulière en France, les continuités écologiques devront être préservées à un haut niveau de façon à réduire les impacts sur la biodiversité. Cette obligation a certes été introduite dans le droit français par les lois dites Grenelle 1 et 2 en 2009 et 2010. Mais la France est en Europe parmi les pays dont le réseau routier est le plus dense (avec 1,77 km de routes par km²). Si les efforts pour rétablir les continuités écologiques sur le réseau routier structurant sont notables, ce n’est pas le cas sur le réseau routier local (faute de moyens financiers et/ou d’expertise technique), en dépit de l’impact sur des espèces à mobilité limitée (comme certains amphibiens).

Dans ce contexte, il est essentiel de systématiser la prise en compte de l’adaptation dans les programmes d’investissements publics, en l’érigeant en un objectif explicite de ces programmes et en la déclinant opérationnellement en critères précis au sein des cahiers des charges[83].

Proposition n°11 : Systématiser la prise en compte de l’adaptation au changement climatique dans les investissements, notamment dans les infrastructures de transport ferroviaire (dans le cadre de la régénération du réseau) et routier (concédé et non concédé), en limitant les effets sur la biodiversité

3. Le « comment » : Gouvernance, régulation et financement

Le déploiement de la stratégie globale de décarbonation des transports présentée en section 2 ne sera possible qu’avec une gouvernance adaptée (3.1) et en utilisant à bon escient les deux principaux leviers à la disposition des pouvoirs publics : la régulation (3.2) et l’investissement, impliquant la question du financement (3.3).

3.1. Aller au bout de la logique engagée sur la gouvernance

L’éclatement de la gouvernance des transports et des mobilités, malgré les réformes récentes[84], constitue un frein majeur à la décarbonation des transports. Si certaines évolutions institutionnelles restent souhaitables, ces difficultés peuvent néanmoins être largement réglées à cadre constant, sans attendre une nouvelle réforme (peu compatible avec l’impératif d’obtenir des résultats dès le court terme).

Notons d’abord que la politique de décarbonation des transports et des mobilités doit s’inscrire, naturellement, dans le cadre général défini par l’UE, pour accélérer la transition écologique, dans le cadre du Green Deal et du Fit for 55 et l’interconnexion au sein du continent européen – ce qui touche à l’infrastructure mais aussi aux services. Les règles adoptées au niveau de l’UE ont déjà eu un impact particulièrement fort sur le secteur des transports, notamment en matière de réduction des émissions des motorisations (cf. section 3.2). D’autres chantiers restent ouverts : industrie net zéro, matériaux critiques, taxonomie, efficacité énergétique, standards CO2 poids lourds, pour n’en citer que quelques-uns. L’UE offre également des leviers de financement de la politique de décarbonation qui doivent être pleinement exploités (cf. section 3.3). L’articulation entre le niveau européen et le niveau national devra être assurée et même renforcée à l’avenir.

Sans préjudice des compétences locales, l’État a un rôle stratégique à jouer, en articulant les horizons de court, moyen et long terme, pour (i) impulser, (ii) coordonner les choix d’investissements et de technologies et (iii) financer les projets, en recourant de façon cohérente aux différentes sources de financement disponibles (cf. section 3) :

  • La mise en place de la planification écologique, sous l’égide de la Première ministre et du Secrétariat général dédié, va dans le bon sens mais tarde à se traduire opérationnellement. Si associer tous les acteurs de l’écosystème des transports et des mobilités est naturellement indispensable, la multiplication des enceintes de concertation et autres groupes de travail a pu conduire à une certaine confusion[85]. Au-delà du cadrage global, il est nécessaire de donner une portée plus opérationnelle aux travaux conduits jusqu’à présent, indispensable dans un contexte d’urgence ;
  • Face à ce constat, il apparaît que l’État devrait plus résolument s’organiser « en mode projet », ce qui suppose de (i) fixer des objectifs clairs, notamment dans le cadre de la programmation énergie-climat, (ii) déterminer les moyens budgétaires à dégager dans la durée pour les atteindre, (iii) désigner, pour chaque volet de la stratégie de décarbonation des transports et des mobilités, un référent responsable du bon avancement du process, (iv) définir des jalons clairs pour élaborer puis déployer les actions de cette stratégie et (v) élaborer un tableau de bord composé d’indicateurs de performance précis, couvrant l’ensemble des volets de la décarbonation des transports (ex. : part modale du transport ferroviaire, taux d’occupation moyen des véhicules, taux de pénétration des véhicules électriques, production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelables sur le foncier des infrastructures de transport, etc.), rendu public et présenté chaque année devant la représentation nationale[86] ;
Proposition n°12 : Désigner, pour chaque volet de la stratégie de décarbonation des transports et des mobilités, un référent responsable de son déploiement au sein de l’État, dans un cadre clair (objectifs, moyens, calendrier), et élaborer un tableau de bord composé d’indicateurs de performance précis, rendu public et présenté au Parlement
  • En termes d’outils, l’État devrait (i) fixer un cadre général, le cas échéant, mais sans en faire un pré-requis, dans une grande loi de programmation de la décarbonation des transports et des mobilités (loi spécifique ou volet d’une loi de planification écologique plus vaste), (ii) se concentrer sur l’élaboration de schémas directeurs nationaux (ex. pour les bornes de recharge électrique ou les terminaux de transport combiné), et (iii) utiliser différents outils contractuels vis-à-vis des autres parties prenantes, aussi bien publiques que privées : protocoles et conventions d’exécution pour les grands ouvrages, appels à projets, contrats régionaux ou interrégionaux (CEPR, CIEPR). Comme l’a souligné la Première ministre dans son discours du 24 février, le rôle des préfets sera clé pour assurer le lien entre les orientations stratégiques définies par l’État et leur déclinaison au niveau local, en lien étroit avec les AOM et les autres acteurs.

Proposition n°13 : Procéder à une programmation globale de la décarbonation des transports et des mobilités et en assurer la déclinaison dans le cadre de schémas directeurs nationaux et de contrats entre l’État et les autres acteurs impliqués

Au niveau local, il faut mieux répartir les rôles entre les différents niveaux de collectivités en consolidant les évolutions déjà engagées, selon deux grandes orientations.

En premier lieu, les niveaux territoriaux les plus agrégés devraient être privilégiés, car ils sont ceux les plus à même d’avoir une vision systémique, saisissant l’ensemble des mobilités moyenne distance, au niveau des bassins de vie, et longue distance. La décarbonation des transports et des mobilités doit ainsi être d’abord portée au niveau des régions, comme cheffes de file pour la planification des mobilités et l’intermodalité (via le SRADDET) et AOM du transport collectif régional, en veillant à bien étendre l’exercice de leurs compétences au-delà du ferroviaire, qui mobilise la plus grande part de leur budget. Les communes et intercommunalités ont également, à l’évidence, un rôle important à jouer, prévu par la LOM. Mais il faut veiller à éviter tout effet de morcellement et conserver une vision stratégique pour l’ensemble d’un territoire.

Encadré 4 – Un exemple de planification écologique régionale : Provence-Alpes-Côte d’Azur

Désignée région pilote de la planification écologique, la région Sud a conclu avec l’État un protocole d’expérimentation visant à mettre en place une planification régionale conjointe pour une mobilité décarbonée dans le cadre du volet mobilité du CPER. L’objectif est, en s’inscrivant dans le Fit for 55 européen, de définir une feuille de route collective autour d’objectifs, d’obligations de résultats et d’une trajectoire globale engageante pour tous les acteurs.

La stratégie régionale de transition écologique dans les transports repose sur 5 axes stratégiques : adapter, convertir, reporter et éviter (ACORE).

Elle a vocation à être déclinée dans différentes démarches : plan d’actions pour l’adaptation du système régional, projet LNPCA (dont l’ouverture des phases 1 et 2 est prévue à horizon 2032–2035), projet expérimental de co-voiturage 2924–2026, etc.

Source : Région Sud

En second lieu, il s’agit de valoriser les moyens de contractualisation de l’action publique au niveau territorial afin de saisir les singularités locales et lier tous les acteurs entre eux[87].

Si des questions de périmètre (par exemple sur les services de RER métropolitains, entre régions et AOM locales) ou d’éclatement des compétences (notamment entre intercommunalités et communes, en matière de mobilité, stationnement, circulation et urbanisme) continuent à se poser, il existe désormais des outils pour mieux coordonner l’action des différents niveaux de collectivités, qui doivent être pleinement mobilisés, en particulier les contrats opérationnels de mobilité[88] (COM) ou les conventions territoriales d’exercice concerté des compétences (CTEC) [89]. La création d’établissements publics de coopération communale (EPCI, tels que par exemple des syndicats mixtes) compétents en matière de mobilité, à la bonne échelle, est également une solution à recommander, sous réserve qu’ils puissent être dotés de ressources robustes. A terme, certaines évolutions législatives seraient souhaitables[90], mais elles ne doivent pas conduire à retarder l’action.

Proposition n°14 : Utiliser pleinement les contrats opérationnels de mobilité entre collectivités territoriales et les conventions territoriales d’exercice concerté des compétences

Pour la réalisation des projets, il convient de considérer avec intérêt le modèle des sociétés de projet permettant de réunir l’ensemble des acteurs publics au sein d’une structure dédiée pour assurer la maîtrise d’ouvrage des projets et d’y affecter des ressources, ce qui leur permet notamment de lever de la dette pour financer les investissements (cf. section 3.3.1). Tel est le modèle de la Société du Grand Paris (SGP) ou des nouvelles lignes à grande vitesse (LGV) comme le Grand Projet du Sud-Ouest (GPSO). Ce type de schéma pourrait être étendu à d’autres types d’investissement, comme les RER métropolitains ou encore le déploiement d’un réseau de cars express ou de lignes de covoiturage, le cas échéant en faisant entrer dans ces sociétés des partenaires privés (cf. section 3.3.2).

Proposition n°15 : Promouvoir le modèle des sociétés de projet pour piloter les projets en réunissant les acteurs publics et pérenniser leur financement

3.2. Mettre la régulation au service de la décarbonation

La régulation, entendue dans son sens le plus large, permet d’orienter le marché vers la satisfaction d’objectifs de politique publique. A ce titre, elle constitue un levier majeur pour la décarbonation. La Convention Citoyenne pour le Climat s’était ainsi essentiellement concentrée sur ce levier[91]. Une note récente du think tank Transport Développement Intermodalité Environnement (TDIE) a aussi appelé à une « approche systémique de la régulation des mobilités », pour favoriser la sobriété[92].

La décarbonation passe par une combinaison de mesures réglementaires, fiscales et tarifaires, contraignantes et incitatives, dont le succès dépend aussi de l’introduction de mesures d’accompagnement.

Il est essentiel que la régulation soit conçue de façon cohérente (en s’inscrivant dans le Fit for 55), efficace (en ciblant les acteurs les plus solvables ou les plus agiles, qui disposent des leviers pour réaliser les transformations nécessaires) et équitable (en accompagnant les acteurs les plus précaires ou les plus contraints).

De façon schématique, deux grandes voies sont envisageables : augmenter le prix du carbone, sous réserve d’équité sociale, ou mettre en place des mesures réglementaires contraignantes assorties de sanctions.

La première voie consiste à utiliser directement le signal-prix, par l’augmentation du prix du carbone, pour orienter les comportements et dégager des financements, qui peuvent être affectés directement à la décarbonation des transports et des mobilités et/ou à leur accompagnement social. Le signal-prix fait appel au « least cost principle », c’est-à-dire qu’il minimise le coût des dépenses climatiques en faisant en sorte que ce soient toujours les mesures les moins chères et les plus réductrices d’émissions de GES qui soient mises en œuvre. Ainsi, il permet, à budget constant, de faire plus pour la décarbonation (cf. section 3.3.1).

Si elle a échoué par le passé en raison de contestations sociales, une approche généralisée de l’augmentation du prix du carbone peut rester pertinente, sous certaines conditions. Elle passe par l’atteinte en 2030 d’un prix de 100€ la tonne, conformément à l’objectif inscrit dans la SNBC 2.

Cet objectif pourrait être atteint en combinant deux instruments : le marché carbone européen, qui vient récemment de s’étendre au transport routier, et la composante carbone nationale :

  • L’extension du marché du carbone au transport routier : l’accord du 18 décembre 2022 prévoit la création d’un nouveau système d’échange de quotas d’émission à l’échelle de l’UE (« SEQE 2 ») pour couvrir les secteurs du bâtiment et du transport routier, à partir de 2027, avec un plafond de prix à 45 euros par tonne de carbone émise jusqu’en 2030. Il met en place un Fonds social pour le climat pour accompagner les ménages les plus modestes face à la hausse prévisible des coûts du chauffage et du transport, qui sera doté de 87 Mds€ pour l’ensemble de l’UE, dont 1,4 Mds€ pour la France. Il faut noter que les États-membres qui disposent actuellement d’une taxe carbone d’un montant égal ou supérieur au prix qui s’établira sur le nouveau marché carbone auront la faculté de ne pas le mettre en œuvre. Le gisement de décarbonation, s’il sera appréciable à l’échelle européenne, n’est donc pour le moment pas garanti en France, puisque nous disposons déjà d’une taxe carbone (cf. infra) d’un niveau quasi équivalent au prix plafond du nouveau marché. Une solution serait donc de mettre en œuvre en France ce nouveau marché, tout en conservant la composante carbone, afin d’atteindre l’objectif de 100 € la tonne en 2030 ;
  • La composante carbone de l’accise sur les énergies : son taux est gelé à 44,6 € la tonne d’équivalent CO2 depuis 2018, à la suite du mouvement de protestation des gilets jaunes, alors que loi de finances pour 2018 prévoyait qu’elle atteigne 86,2 € en 2022. La relance de la fiscalité carbone en France peut jouer un rôle important pour atteindre les objectifs contenus dans la SNBC, plusieurs études ayant montré son efficacité pour réduire les émissions de GES. Ainsi, la taxe carbone suédoise aurait réduit de 26% les émissions des transports en Suède et la composante carbone de 8,7% en France par rapport au scénario contrefactuel sans taxe[93].

Néanmoins, la fiscalité carbone emporte de forts effets distributionnels, à la fois de manière verticale (elle touche plus fortement les plus modestes, ces derniers consacrant une part plus importante de leur revenu aux dépenses de chauffage et de transport) et de manière horizontale (elle affecte plus fortement, au sein de chaque décile de revenu, les ménages des zones de faible ou de moyenne densité, qui sont ceux qui ont le recours le plus intensif aux énergies carbonées pour le chauffage et le transport).

Cet enjeu d’acceptabilité sociale peut se traiter en recyclant les recettes générées par la composante carbone. Ainsi, la mise en place d’un chèque climat, qui serait versé aux ménages modestes et majoré pour ceux vivant dans des zones éloignées des transports en commun, pourrait permettre de rendre la composante carbone financièrement indolore pour ces derniers, tout en conservant un fort signal d’incitation à la réduction des émissions de GES. En outre, les recettes résiduelles pourraient être utilisées pour financer les orientations mentionnées dans la deuxième partie de cette note. Ainsi, si la tarification carbone atteint 100 € la tonne en 2030, il serait possible de consacrer près de 4,5 Mds€ par an au chèque climat, et 3 Mds € à la décarbonation des transports, sans creuser le déficit de l’État et en s’assurant de la bonne acceptation de la mesure par les catégories populaires.

Une alternative à cette approche généralisée du signal-prix pourrait consister en une approche plus localisée, avec la mise en place de péages urbains autour des métropoles. Pour être acceptables, de tels péages urbains devraient, à l’instar des villes scandinaves, être d’un montant faible (1 à 2€ par jour), exempter les publics les moins aisés (les deux premiers déciles, par exemple) et être affectés à un programme de mobilité dans l’aire urbaine, défini conjointement entre métropoles, zones périphériques et régions. De tels systèmes, outre la décarbonation, permettent de diminuer également la congestion (difficulté que l’électrification des véhicules ne permet pas de résoudre)[94].

Outre le signal-prix, une seconde voie possible consiste à mettre en place des mesures de « forçage » réglementaires. Lorsqu’elles consistent en des interdictions ou sont assorties de sanctions financières élevées, de telles mesures peuvent avoir des effets comparables à la tarification directe du carbone.

Ainsi, la réglementation européenne CAFE (Corporate Average Fuel Efficiency) – qui fixe des objectifs de gCO2/km à ne pas dépasser pour la moyenne des ventes annuelles, renforcés tous les 5 ans, et assortis de sanctions financières fortes – a été le véritable moteur de l’émergence de l’offre puis de l’accélération de l’électrification du parc de véhicules électriques[95]. Elle a conduit les constructeurs à traduire le risque de sanctions en coût à la tonne de carbone évitée dans leur offre. L’interdiction de la vente des véhicules neufs utilisant de l’énergie fossile en 2035, décidée au niveau européen en mars 2023, va également dans ce sens.

D’autres mesures réglementaires fixant des objectifs de décarbonation assortis de sanctions pourraient être mises en place. A ce titre, la LOM a fixé des quotas de renouvellement pour les flottes d’entreprises : les entreprises privées ayant plus de 100 véhicules en parc, doivent, depuis le 1er janvier 2022, intégrer au moins 10% de véhicules à faible émissions (VFE) dans leur renouvellement annuel, quota qui devra être de 20% en 2024, de 35% en 2027 et atteindre 50% en 2030. Comme le propose l’IDDRI[96], ce dispositif pourrait être étendu (par exemple aux entreprises ayant plus de 10 véhicules en parc) et assorti de sanctions (qui pourrait prendre la forme de l’absence de bonus ou de suramortissement). Cette mesure aurait également pour avantage de créer assez rapidement un marché secondaire de l’occasion permettant aux ménages modestes d’accéder à des véhicules électriques.

Dans le contexte politique et social actuel, marquée par de fortes tensions et une extrême sensibilité à la question du pouvoir d’achat, cette seconde voie semble, à tout le moins dans l’immédiat, la plus praticable et donc préférable.

Proposition n°16 : Renforcer la régulation en faveur de la décarbonation (i) soit par une augmentation généralisée de la tarification du carbone en combinant le marché carbone européen et la composante carbone de l’accise sur les énergies pour atteindre l’objectif de 100 € la tonne en 2030 et en allouant les recettes à un chèque climat pour les plus modestes et à la décarbonation des transports, (ii) soit par une approche plus localisée du signal-prix, reposant sur des péages urbains d’un montant faible (1 à 2€ par jour), exemptant les publics les moins aisés et affectés à un programme de mobilité dans l’aire urbaine, (iii) soit par la mise en place des mesures de « forçage » réglementaires assorties de sanctions financières élevées (en matière de quotas de renouvellement pour les flottes d’entreprises notamment). Dans le contexte actuel, cette dernière voie semble dans l’immédiat plus praticable et donc préférable

3.3. Faire face au mur d’investissements de décarbonation

Les besoins d’investissement pour décarboner les transports et les mobilités requièrent un effort massif – et ce, dès à présent – qu’il faut naturellement mettre en regard des bénéfices qui peuvent en être attendus (cf. section 1) :

  • Au niveau européen, la Commission estime que le besoin de financement pour réussir le Fit for 55 s’élève au total à 1 040 Mds€ par an entre 2021 et 2030, et 60 % de ce montant devront être consacrés au seul secteur des transports (soit plus de 600 Mds€ par an)[97] ;
  • Pour la France, le Ministère de la transition écologique estime qu’il sera nécessaire d’investir plus de 2 500 Mds€ d’ici à 2050 dont 65 % pour le secteur des transports, afin d’atteindre l’objectif de neutralité carbone à horizon 2050[98] ;
  • Le think tank I4CE a évalué que d’ici à 2030 il faudra investir entre 33,3 et 55,7 Mds€ chaque année dans les transports et les mobilités[99] ;
  • Dans son dernier rapport, le COI estime les besoins à 175 Mds€ d’investissement dans les infrastructures sur 10 ans dans le scénario de « planification écologique » et à 195 Mds€ dans le scénario de « priorité aux investissements » ;
  • Ce besoin d’investissement est particulièrement élevé dans trois domaines :
    • Pour l’électrification du parc de véhicules : selon I4CE, l’investissement dans les véhicules bas carbone implique lui entre 21 et 44 Mds€ par an entre 2022 et 2030, soit une augmentation jusqu’à 30 Mds€ par rapport au niveau de 2021[100] ;
    • Pour la transformation de l’infrastructure routière, et en particulier autoroutière : le réseau autoroutier représente 1% du réseau routier mais 25% des émissions de GES des usages de la route. En ordre de grandeur, la décarbonation du réseau autoroutier nécessiterait entre 5 et 6 Mds€ d’investissements pour un tronçon-type de 1 000 kilomètres, soit entre 60 et 70 Mds€ pour l’ensemble du réseau autoroutier, ce qui correspond en ordre de grandeur à un quart de la valeur « à neuf » du réseau[101] ;
    • Dans le secteur ferroviaire, avec l’enveloppe de 100 Mds€ d’ici à 2040 annoncée par le Gouvernement (qui devra toutefois être précisée, cf. section 2.2) ;
  • Aux besoins d’investissements dans les infrastructures et les véhicules (ou le matériel roulant s’agissant du ferroviaire) s’ajoutent également les besoins de financement de l’exploitation, qui sont trop souvent négligés – même si la crise récente autour du prix du pass Navigo en Ile-de-France a remis le sujet au centre du débat public. Un projet comme le Grand Paris Express fait ainsi face, à ce stade, à de grandes incertitudes pour couvrir ses coûts d’exploitation (estimés à 1 Md€ par an). Cette problématique doit être prise en compte notamment pour les services de RER métropolitains, les transports urbains, les cars express ou les lignes de covoiturage.

Dans ce contexte, trois principes doivent guider le financement de la décarbonation des transports et des mobilités :

  • Répondre aux besoins et à l’urgence : les investissements pour la décarbonation des transports doivent être programmés et engagés au plus vite, pour faire face à la crise énergétique en cours et obtenir des résultats à horizon 2030 ;
  • Maîtriser les finances publiques : à la fin du troisième trimestre 2022, la dette publique s’établissait à 3 000 Mds€ soit 114% du PIB. Elle est exposée à la remontée de taux. Le Gouvernement a pour objectif de ramener le déficit public sous les 3% d’ici 2027 ;
  • Être acceptable pour les Français et équitable : le Gouvernement exclut d’augmenter le taux de prélèvements obligatoires des entreprises et des ménages. La décarbonation devra prendre en compte des considérations sociales, qui imposent que les services concernés demeurent à un tarif accessible pour tous (par exemple le prix de la recharge électrique) et que les publics les plus contraints ou dépendants fassent l’objet de mesures d’accompagnement. Cette exigence est d’autant plus critique dans un contexte de forte inflation et de risque de récession.

De ces trois principes résulte une ligne directrice : pour financer la décarbonation des transports et des mobilités, il faut s’appuyer sur « le privé autant que possible, l’État autant que nécessaire ». Dans une logique d’efficacité de la dépense publique, l’argent public devrait être alloué au développement des technologies, pour les amener à maturité technique et économique, et aux investissements qui ne présentent pas un modèle économique suffisamment attractif pour les investisseurs privés. C’est une analyse au cas par cas, investissement par investissement, qui doit être menée pour déterminer une clé de répartition optimale entre financement public et financement privé.

Dans ce contexte, deux orientations se dégagent pour assurer le financement de la décarbonation des transports et des mobilités, et en particulier des investissements[102] : la recherche de nouvelles sources de financement public et la mobilisation du secteur privé dans une logique de partenariats public-privé.

3.3.1. Dégager de nouvelles sources d’argent public pour les transports

Il est indispensable pour l’État de mettre en place de nouvelles sources de financement compte tenu d’un « effet ciseaux » marqué par, d’une part, des besoins d’investissement très élevés et, d’autre part, la baisse prévisible de l’accise sur les produits énergétiques (ex-TICPE), qui a vocation à disparaître avec la fin des véhicules thermiques[103], alors qu’elle représente un montant de plus de 30 Mds€ par an[104]. A la baisse de l’accise s’ajoute la perspective de la fin des concessions d’autoroutes historiques, qui, compte tenu de la Directive Eurovignette, aura pour conséquence une baisse des péages (estimée de 50% à 70% par le COI) et des recettes fiscales qui en sont issues (de l’ordre de 5 Mds€ par an aujourd’hui). Si la décarbonation devrait être, à long terme, une « bonne affaire » (en améliorant la balance commerciale du pays, en entraînant des gains de pouvoirs d’achat pour les ménages), il n’en reste pas moins que, à court terme, ces importants besoins de financement doivent être satisfaits.

Plusieurs pistes de réflexion sont de nature à respecter le « cahier des charges » présenté plus haut et méritent d’être instruites au plus vite :

  • Des arbitrages intersectoriels, passant notamment par la réduction voire la suppression des subventions aux énergies fossiles – qui représentent encore 0,5% du PIB actuel, soit près du double des subventions aux énergies renouvelables – au profit des transports et mobilités décarbonés[105] ;
  • L’affectation des recettes issues de la tarification carbone : comme indiqué plus haut (cf. section 3.2), l’augmentation généralisée ou localisée de la tarification du carbone, combinée à une approche sociale, ou la mise en place de mesures réglementaires contraignantes assorties de sanctions financières pourraient permettre de dégager des recettes supplémentaires affectées en partie à la décarbonation des transports et des mobilités, sans dégrader le déficit des administrations publiques ni évincer des dépenses publiques déjà existantes;
  • La taxation de la détention des véhicules : le système fiscal français comporte aujourd’hui de nombreux dispositifs (et, du reste, peu lisibles) portant sur l’achat des véhicules (bonus / malus, primes à la conversion, TVA, etc.) et l’usage (TICPE, TVA carburants, péages, etc.), mais peu sur la détention des véhicules (taxe sur les véhicules des sociétés, amortissement et suramortissement). Dans un rapport récent, l’Institut Montaigne a proposé de rééquilibrer le système en remplaçant partiellement la TICPE par une taxe locale sur les véhicules[106]. Une proposition proche est portée par l’IDDRI, dans le cadre d’une remise à plat du système fiscal et réglementaire appliqué à la mobilité[107]. Une telle mesure ne devrait pas augmenter la pression fiscale. Elle pourrait être calibrée de sorte à favoriser les usages les plus vertueux, notamment en prenant en compte les critères de taille et de poids du véhicule, ainsi que des considérations d’équité, en fonction des lieux de vie et des revenus ;
  • La mise en place de dispositifs de captation de la rente foncière, comme évoqué par le COI dans son dernier rapport. Un tel dispositif avait été discuté dans le cadre du projet de loi Grenelle 2 et envisagé pour le Grand Paris, mais finalement abandonné. Il pourrait prendre la forme d’une taxe forfaitaire sur le produit de la valorisation des terrains nus et des immeubles bâtis résultant de la réalisation d’infrastructures de transports collectifs ou d’autres dispositifs plus « innovants », qu’il est souhaitable d’instruire[108]. Ces ressources nouvelles pourraient être affectées à des sociétés de projet (cf. 3.3.2), sur le modèle de la SGP[109] ;
  • Les recettes issues de la valorisation de certains actifs, en les confiant à des investisseurs privés tout en veillant à la continuité de leur exploitation, à l’image des opérateurs télécoms avec les tours ou de la SNCF avec Ermewa et Akiem. Des marges de manœuvre semblent en particulier exister dans le secteur ferroviaire (patrimoine immobilier, parc de wagons de SNCF Réseau, etc.) ;
  • La mise à contribution de certains secteurs : dans son discours du 24 février 2023 sur le plan d’avenir pour les transports, la Première ministre a annoncé vouloir « mettre à contribution les secteurs les plus émetteurs de gaz à effet de serre comme l’aérien, et ceux qui dégagent des profits importants, comme les sociétés d’autoroute ». Il convient de relever à cet égard que les sociétés concessionnaires d’autoroutes (SCA) sont déjà soumises à une fiscalité importante, qui assure une partie du financement des investissements dans les infrastructures de transport : en 2021, 4,7 Mds€ de fiscalité ont été prélevés par l’intermédiaire des péages autoroutiers (soit près de 40% de la collecte totale des péages) ; sur ce montant, près de 3 Mds€ financent des investissements dans les infrastructures de transport du pays, dont environ 1 Md€ en dehors du réseau autoroutier concédé[110]. Cette contribution pourrait être augmentée en négociant avec les SCA une contribution supplémentaire dans le cadre de l’équilibre des contrats de concession[111]. Cette voie devrait s’envisager en lien avec la réalisation par les SCA des investissements nécessaires à la décarbonation du réseau autoroutier, dans le cadre d’un accord global (cf. section 3.3.2).

Au-delà de ces sources d’argent public, l’augmentation de la contribution des usagers des transports en commun devrait être envisagée. Aujourd’hui en France l’usager paie environ un quart des coûts d’exploitation des transports en commun (contre 70% en 1975), le solde étant pris en charge par les entreprises pour les transports en commun urbains et par les Régions pour les TER. La meilleure répartition des modes de transports en fonction des besoins des territoires (entre voiture individuelle électrique, covoiturage, cars express, transport ferroviaire) doit permettre d’optimiser le coût global des transports en commun. L’ouverture à la concurrence doit également se traduire par une baisse des coûts unitaires des services. En complément de ces efforts sur les dépenses, compte tenu du niveau de la fiscalité sur les ménages et sur les entreprises, les usagers devraient être mis davantage à contribution, dans le cadre d’une tarification plus dynamique que les systèmes d’abonnement forfaitaires actuels. Comme le montre Jean Coldefy[112], de manière générale, ces systèmes sont peu efficaces : ils n’incitent pas les voyageurs occasionnels à utiliser les transports en commun (car les tarifs au ticket sont trop élevés, et représentent 50% de la clientèle des transports publics urbains) et, pour les abonnés, ils induisent une surconsommation sur les courtes distances. Le numérique doit permettre d’avoir une approche plus fine de la tarification, en fonction de l’usage et des revenus : combinaison d’un prix d’accès au réseau et d’un prix par trajet, tarification à l’abonnement pour les seuls trajets domicile-travail, tarification à la distance et en fonction des revenus, etc. De tels systèmes permettraient d’augmenter à la fois la fréquentation et les recettes.

On le voit, les pistes de financement sont nombreuses. Ne rien faire n’est pas une option.

Proposition n°17 : Instruire au plus vite les pistes de financement suivantes : arbitrages intersectoriels, affectation issue des recettes de la taxation carbone, taxation de la détention des véhicules, captation de la rente foncière, valorisation d’actifs, mise à contribution de certains secteurs (dans le respect du droit applicable), augmentation de la contribution des usagers par une adaptation de la structure des transports publics urbains

3.3.2. Mobiliser le secteur privé dans une logique public-privé

Le secteur privé peut être mobilisé pour le financement des investissements nécessaires à la décarbonation des transports, selon des modalités variables en fonction des modèles économiques.

D’une part, des investissements ont vocation à être réalisés par le secteur privé, généralement en bénéficiant de subventions ou d’autres dispositifs de soutien :

  • Les opérateurs se rémunèrent alors par les recettes des services associés. Les subventions permettent de trouver un équilibre économique (subventions publiques régionales, nationales, européennes – Feder –, subventions d’agences comme l’ADEME, etc.). Outre les subventions, de nouveaux instruments financiers public-privé de partage des risques se sont aussi développés – notamment au niveau européen avec le Fonds européen d’investissement (FEI), depuis le plan Juncker de 2014 – afin de générer un effet d’entraînement du secteur privé dans des secteurs d’activité risqués ou à la rentabilité privée faible : garanties, prêts bonifiés, fonds propres et quasi-fonds propres. Outre ces aspects financiers, la simplification de certaines procédures (cf. section 2.5) est également un facteur favorable aux investissements privés ;
  • Entrent dans cette catégorie notamment le déploiement de bornes de recharge électrique à domicile, ouvertes au public ou sur les grands axes routiers[113] (mais les aides mises en place ne sont toutefois pas suffisantes sur le réseau autoroutier, qui pose des enjeux spécifiques, cf. infra), la réalisation de certains terminaux multimodaux de marchandises[114], ou encore de l’installation de capacités photovoltaïques sur le foncier des gestionnaires d’infrastructures de transport[115].

 

Proposition n°18 : Créer des conditions favorables à l’investissement privé, par l’accélération des procédures et la mise en place de certains instruments financiers (subventions, garanties, prêts bonifiés, etc.)

D’autre part, certains investissements relèvent de la compétence des pouvoirs publics (État, collectivités territoriales, établissements publics) mais ces derniers peuvent avoir intérêt à faire appel au secteur privé, dans une logique partenariale.

De façon générale, les investissements publics dans les infrastructures de transport peuvent être réalisés dans le cadre de marchés (marchés publics classiques, marché de conception-réalisation, marché global de performance) ou de partenariats public-privé (ou PPP, incluant au sens large les concessions, les marchés de partenariat ou d’autres montages contractuels complexes équivalents). La détermination du schéma contractuel le plus adapté doit se faire au cas par cas, compte tenu des caractéristiques des projets.

Il apparaît que dans un certain nombre de cas le recours au modèle concessif – lorsqu’il existe une demande suffisante pour assurer la rentabilité du projet – pourrait être davantage développé pour accélérer les investissements. Tel est le cas notamment pour les terminaux de transport combiné, qu’il s’agisse des terminaux existants, aujourd’hui sous la gestion de SNCF Réseau, ou de nouveaux terminaux[116]. Il pourrait en aller de même pour les gares ou les PEM les plus importants.

Proposition n°19 : Développer le recours aux concessions pour certains investissements (terminaux de transport combiné, gares, PEM, …)

Compte tenu de leur longue durée, les PPP doivent s’adapter aux besoins, innover pour répondre à de nouveaux impératifs. Le droit de l’UE, en ce sens, a élargi, lors de la dernière réforme des directives sur la commande publique, les possibilités de modifier les contrats en cours par avenant.

Dans le domaine autoroutier, la question de l’avenir des concessions historiques, qui arrivent à échéance dans les années 2030, se pose, dans le cadre d’un débat souvent inflammable, mais qui mérite d’être abordé avec objectivité, en tenant compte de la priorité écologique.

L’Etat a annoncé des « Assises des autoroutes » d’ici à l’été pour repenser le modèle des concessions. L’ART a formulé des propositions, en insistant notamment sur la nécessité de réduire la durée des concessions (autour de 20 ans par exemple) ou de revoir les modalités de partage de risques[117].  Le think tank TDIE a également proposé de revoir le système de tarification de l’autoroute, en utilisant les abonnements LiberT pour faire payer l’utilisation du réseau non concédé et lui affecter une partie des recettes[118].

Ces réflexions sont légitimes et même indispensables. Toutefois, si l’on s’inscrit à horizon 2030, on ne peut se contenter de renvoyer la « transformation écologique » des autoroutes à la fin des concessions historiques : 

  • L’urgence écologique et l’atteinte des objectifs fixés pour 2030 imposent de réaliser au moins une première tranche d’investissements sur le réseau autoroutier dès la présente décennie, sans attendre le terme normal des contrats, au risque d’obérer la décarbonation de cette infrastructure clé ;
  • Pour répondre à la fois aux impératifs de la décarbonation et aux attentes politiques et sociales qui s’expriment envers les concessions d’autoroutes, l’État doit engager au plus tôt les discussions avec les sociétés concessionnaires pour instruire les investissements à plus fort impact environnemental et définir leurs conditions de financement. En fonction des investissements, plusieurs sources de financement pourraient être mobilisées : auto-financement par les opérateurs, subventions publiques ou financement par les concessionnaires, avec une contrepartie à déterminer (hausse des péages, soulte ou allongement de la durée de la concession). Cette discussion pourrait être l’occasion de moderniser un certain nombre de paramètres des concessions, notamment l’encadrement de la rentabilité des projets ou encore les obligations de performance environnementales des concessionnaires.
Proposition n°20 : Engager au plus tôt les discussions avec les sociétés concessionnaires d’autoroutes pour instruire les investissements à plus fort impact environnemental et définir leurs conditions de financement

Encadré 5 – Réhabiliter les PPP pour décarboner ?

Les partenariats public-privé (PPP) ont permis, dans bien des cas, de construire notre système de transports actuel, en particulier pour le secteur autoroutier et les lignes à grande vitesse (LGV) ferroviaires. Ces schémas contractuels ont été critiqués pour des raisons plus ou moins justifiées et font souvent l’objet d’un rejet politique a priori. Les impératifs de la décarbonation devraient conduire à réexaminer sereinement leur pertinence.

Les PPP présentent plusieurs caractéristiques avantageuses :

Une mission globale, favorisant une approche intégrée des projets sur une longue durée : la mission confiée dans le cadre d’un PPP inclut généralement le financement, la conception, la construction d’infrastructures ou d’ouvrages publics, ainsi que leur entretien, leur maintenance ou leur exploitation. Le partenaire privé est incité à privilégier une approche intégrée de ces missions dans une logique d’optimisation du coût global du projet appréhendé sur toute la durée du contrat. A l’inverse, on constate souvent que, dans le cadre d’une gestion en régie, les personnes publiques tendent, pour des raisons budgétaires, à limiter les coûts d’exploitation, au détriment de la qualité de l’ouvrage (comme dans le cas du réseau routier non concédé ou du réseau ferroviaire) ;

Un pré-financement des investissements par le partenaire privé : le financement est réalisé par le partenaire privé, sur fonds propres et par recours à la dette, et le plus souvent en bénéficiant de subventions. A compter de la mise en service, le partenaire est rémunéré par un loyer payé par la personne publique (dans le cadre d’un marché de partenariat) ou par les recettes issues de l’exploitation du service (dans le cas d’une concession) ;

Un transfert de risques entre partenaire public et partenaire privé, adapté à chaque projet : selon le schéma contractuel et le partage des risques, les PPP permettent de transférer tout ou partie des risques des investissements, qu’il s’agisse des risques de construction, d’exploitation ou de demande (dans le cas des concessions). Ce transfert des risques a un impact sur le caractère consolidant ou déconsolidant du PPP. Il détermine la rentabilité attendue par le partenaire privé. En matière de transports, certaines modalités de partage des risques pourraient être revues au cas par cas pour optimiser le coût des projets, comme les risques de sols ou les risques trafic. A titre d’exemple, notons que, dans le cadre des concessions, qui transfèrent en principe tous les risques au partenaire privé, y compris les risques trafics, les pouvoirs publics peuvent choisir des systèmes dans lesquels la rentabilité est encadrée à la hausse et à la baisse, au sein d’un « tunnel de rentabilité », ce qui permet à la fois de dérisquer les partenaires privés et d’éviter des niveaux de rentabilité trop élevés ;

Une logique de performance : de façon générale, la contractualisation permet de fixer le niveau de performance attendu sur toute la durée du contrat et de l’assortir de pénalités, ce qui constitue une incitation forte à la qualité de service. Les PPP comportent aussi, de façon mécanique, des incitations à la performance. Ainsi, le partenaire privé a intérêt à raccourcir les délais de réalisation, d’abord pour limiter les frais d’immobilisation de ses personnels et de ses matériels, ensuite pour percevoir sa rémunération le plus tôt possible, incitation que l’on ne trouve pas lorsque le contrat porte uniquement sur la conception et la construction de l’ouvrage. Le transfert du risque de demande, dans le cadre de concessions, incite également naturellement le partenaire privé à fournir un service de qualité.

Il existe néanmoins des conditions à la réussite de ces montages. Il est évident qu’un tel modèle ne peut fonctionner que si la personne publique joue pleinement son rôle. Elle reste ainsi responsable de la définition du service et de sa bonne exécution. Les PPP impliquent un recentrage sur des fonctions stratégiques : définition et structuration des projets, choix du partenaire privé, fixation des objectifs et des règles d’organisation et de fonctionnement du service, contrôle et sanction en cas de sous-performance ou de violation de ces règles, etc. Avant de décider de recourir à de tels schémas, il est par ailleurs nécessaire de s’assurer de leur intérêt financier – compte tenu notamment du fait que les coûts financiers portés par le partenaire privé sont généralement plus élevés que ceux des collectivités publiques et en particulier de l’État.

Annexe : Auditions

  • Think tanks

Jean-Philippe Hermine, Coordinateur de l’initiative Mobilités en transition, IDDRI

Jean Coldefy, Directeur du programme Mobilité et transitions ATEC ITS France, Président du think tank de l’Union Routière de France (URF)

  • Responsables politiques

Pascal Canfin, Député européen, président de la Commission Environnement, Santé publique et Sécurité alimentaire du Parlement européen

Jean-Marc Zulesi, Député des Bouches-du-Rhône, président de la Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire de l’Assemblée nationale

  • Collectivités locales

Victor Alonso, Directeur général adjoint Transports, mobilité et grands équipements, Région SUD

Didier Biau, Directeur des Infrastructures et des grands équipements, Région SUD

Folco Laverdière, Directeur général de la Société de la Ligne Nouvelle Provence Côte d’Azur, Région SUD

Fabrice Girard, directeur des Transports et des mobilités, Région Bretagne

François Durovray, Président du Département de l’Essonne

  • Opérateurs privés

Thomas Matagne, Président fondateur d’Ecov

Blaise Rapior, Directeur général adjoint de Vinci Autoroutes


[1] Elle se classe 10e pour le pilier « Infrastructures de Transports » dans le Global Competitiveness Index réalisé par le World Economic Forum. Source : World Economic Forum, Global Competitiveness Report, 2019.

[2] SDES, Chiffres clés du climat, 2021.

[3] Communication du Conseil national de la transition énergétique, 22 mai 2023.

[4] Voir par exemple : Bigo, A., Les transports face au défi de la transition énergétique. Explorations entre passé et avenir, technologie et sobriété, accélération et ralentissement, thèse de doctorat en Économie, gestion, sciences sociales, soutenue le 23 novembre 2020, Institut Polytechnique de Paris ; CGEDD et France Stratégie, Prospective 2040–2060 des transports et des mobilités. 20 ans pour réussir collectivement les déplacements de demain, février 2022 ; Institut Montaigne, Infrastructures de transport : vers le futur et le durable !, avril 2022 ; TDIE, Engagements climatiques et mobilités : à la recherche du bien commun, janvier 2023 ; Conseil d’Orientation des Infrastructures, « Investir plus et mieux dans les mobilités pour réussir leurs transitions », février 2023.

[5] https://www.gouvernement.fr/discours/discours-de-la-premiere-ministre-elisabeth-borne-remise-du-rapport-du-conseil-dorientation-des-infrastructures-coi-et-presentation-dun-plan-davenir-pour-les-transports

[6] Voir pour une présentation détaillée : « La planification écologique dans les transports », Réunion du Conseil national de la refondation, 31 mai 2023 : https://www.gouvernement.fr/upload/media/content/0001/06/934536595b1a2bb34d3f4e0d8381ac1b07944e0a.pdf

[7] Broto, A., Transports : les oubliés de la République, La Fabrique de la Cité, Editions Eyrolles, 2022.

[8] INSEE, « Sept salariés sur dix vont travailler en voiture », INSEE Focus n°143, février 2019.

[9] Pour reprendre le terme utilisé par le rapport CGEDD, France Stratégie, « Prospective 2040–2060 des transports et des mobilités : 20 ans pour réussir collectivement les déplacements de demain », Rapport thématique, février 2022.

[10] Geoffron P., Vers une société post-carbone, Note de la Fondapol, Calculs de l’auteur à partir de données UNFCCC, IEA, World Bank, 2019.

[11] GIEC, Résumé à l’intention des décideurs, in Changement climatique 2021 : les bases scientifiques physiques, Contribution du Groupe de travail au sixième Rapport d’évaluation du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (…). Cambridge University Press, 2021.

[12] Ribes, A., Boé, J., Qasmi, S., Dubuisson, B., Douville, H., and Terray, L, “An updated assessment of past and future warming over France based on a regional observational constraint”, Earth Syst. Dynam., 13, 1397–1415, 2022.

[13] Les émissions négatives correspondent à « l’absorption de carbone par les écosystèmes gérés par l’homme (forêts, sols agricoles…) et les procédés industriels capture et stockage ou réutilisation de carbone) à l’échelle du territoire national, sans recours à la compensation par des crédits internationaux ».

[14] Our world in data, 2020.

[15] SDES, Chiffres clés du climat, 2021.

[16] Ibid.

[17] International Energy Agency, “Net Zero in 2050: A Roadmap for the Global Energy Sector”, mai 2021.

[18] Seuls les transports maritimes et aériens conservent une part de carburants fossiles à horizon 2050.

[19] SNBC, mars 2020, p. 9.

[20] Haut Conseil pour le Climat, « Rapport annuel 2021 – Renforcer l’atténuation, engager l’adaptation », 30 juin 2021.

[21] Seuls les transports maritimes et aériens conservent une part de carburants fossiles à horizon 2050.

[22] CITEPA, Rapport Secten, juin 2022.

[23] Loi n° 2009–967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement.

[24] Coldefy, J., « Mobilités : pour des solutions justes et décarbonées (et non juste décarbonées), Note pour Terra Nova, février 2023.

[25] Geoffron, P., Leguet, B., « Co-bénéfices environnementaux et sanitaires de l’action publique : it’s (also) the economy, stupid! », Note pour Terra Nova et I4CE, 7 mai 2020.

[26] SDES, Bilan énergétique de la France. Données provisoires, avril 2022.

[27] Fourquet, J., L’Archipel français, Seuil, 2019.

[28] SDES, Enquête « Mobilité des personnes » 2018–2019, 2020.

[29] La loi d’orientation des mobilités (LOM) du 24 décembre 2019 a prévu l’institution de ZFE dans les agglomérations où les seuils de pollution sont régulièrement dépassés, entraînant la création de 5 ZFE à fin 2021 (dont Paris et Lyon). La loi Climat et Résilience du 22 août 2021 rend obligatoire les ZFE dans les agglomérations de plus de 150 000 habitants d’ici fin 2024.

[30] Pech, T., Heard, M., « Les ZFE : fake news politiques, urgences sanitaires et solutions locales », Note pour Terra Nova, décembre 2022. Cf. également la section 2.3.

[31] En 2014, les volumes construits représentaient 1,7 % de la surface totale de la France métropolitaine, auxquels s’ajoutaient 7,7 % d’autres types de sols artificialisés (sols revêtus, stabilisés, nus ou enherbés). Les infrastructures de transport arrivent au 2e rang en termes d’utilisation, après l’habitat (42 % des surfaces artificialisées estimées). Source : France Stratégie, « Objectif ″zéro artificialisation nette″ : quels leviers pour protéger les sols ? », Juillet 2019.

[32] Santé Publique France, 2021.

[33] Voir la synthèse de ces questions dans une note de la Direction générale du Trésor : « Le rôle des instruments économiques dans la lutte contre la pollution de l’air », Trésor-Eco, n°256, Février 2020. Voir également les travaux réguliers du Sénat, dont : « Lutte contre la pollution de l’air : au-delà du risque contentieux, une urgence sanitaire », Rapport d’information n° 412, 2018.

[34] Entre autres études voir, pour l’Europe : Renard J.B., Surcin J., Annesi-Maesano I., Delaunay G., Poincelet E., Dixsaut G., « Relation between PM2.5 pollution and Covid-19 mortality in Western Europe for the 2020–2022 period », Science of the Total Environment, juillet 2022.

[35] Cf. par exemple Geoffron, P., Thirion, B., « Les co-bénéfices du Fret ferroviaire. Éléments d’évaluation et propositions », Rapport Altermind pour l’Alliance Fret Ferroviaire Français pour le Futur, juin 2020.

[36] Hallegate, S. « Du bon usage du coût d’abattement pour piloter la transition », Billet d’analyse, I4CE, 4 avril 2023.

[37] Calculs des auteurs sur la base de diverses sources (INSEE, rapports parlementaires).

[38] Cour des comptes, Rapport public annuel 2022, février 2022.

[39] INERIS – Citepa, « Évaluation ex-ante des émissions, concentrations et impacts sanitaires du projet de PREPA (Plan National de Réduction des Emissions de Polluants Atmosphériques) », 27 mars 2017.

[40] Cour des comptes, Rapport public annuel 2023, mars 2023.

[41] Cf. « Décarboner la route : une urgence écologique », Rapport Altermind pour VINCI Autoroutes, novembre 2021.

[42] Coldefy, J., « Mobilités : pour des solutions justes et décarbonées (et non juste décarbonées) », Note pour Terra Nova, février 2023.

[43] En cohérence avec l’équation de Kaya, selon laquelle : CO2 = population x (PIB/population) x (énergie/PIB) x (CO2/énergie).

[44] Cf. IEA, “Growing preference for SUVs challenges emissions reductions in passenger car market”, 15 October 2019.

[45] Goldberg, N., « Comment donner l’impulsion pour une sobriété collective, efficace et aller au-delà des symboles ? », Note pour Terra Nova, 23 août 2022 ; Goldberg, N., « Propositions pour une sobriété juste et efficace », Note pour Terra Nova, 7 septembre 2022.

[46] Concernant le télétravail, les analyses présentent un ordre de complexité élevé (en raison d’une diversité d’effets rebond), dès lors que la faculté de télétravailler peut encourager les gens à s’éloigner de leur lieu de travail (créant le risque d’un allongement des trajets) ou à effectuer d’autres déplacements non professionnels, voire à influencer le comportement des autres membres du ménage en matière de déplacement. Caldarola B. & Sorrell S. (2022), ‟Do teleworkers travel less? Evidence from the English National Travel Survey”, Transportation Research Part A: Policy and Practice, Volume 159.

[47] Conseil d’orientation des infrastructures, « Investir plus et mieux dans les mobilités pour réussir leurs transitions », février 2023.

[48] Ainsi, selon France Stratégie, « à l’usage, le véhicule électrique est moins coûteux pour un ménage (économie de l’ordre de 1 200 euros par an en tenant compte de l’entretien et de la facture énergétique pour un véhicule du segment B) ». Source : France Stratégie, « Voiture électrique : à quel coût ? », Note d’analyse, novembre 2022.

[49] Source : 6t – Bureau d’Etudes, « Le soutien à l’électromobilité par la puissance publique », décembre 2021.

[50] Ibid.

[51] Source : ENEDIS, « Utilisation et recharge : Enquête comportementale auprès des possesseurs de véhicules électriques », février 2021.

[52] Nous partageons à cet égard les orientations retenues par l’IDDRI au sein de la Plateforme Mobilité en Transition. Cf. par exemple sur le sujet du leasing social : IDDRI, Transport & Environnement, « Leasing social : propositions pour un mécanisme social et industriel innovant et technologique », 12 mai 2023.

[53] Sur la base des propositions de la Convention Citoyenne, l’article 171 de la loi de finances pour 2021 a introduit un malus assis sur le poids des véhicules, en vigueur depuis le 1er janvier 2022. A ce stade, ce malus a toutefois une portée très limitée et les véhicules électriques et hybrides rechargeables en sont exemptés.

[54] Selon une étude de 2020, plus de deux tiers des actifs déclarent qu’une multiplication des bornes de recharge les inciterait à acheter une voiture électrique. Enquête Ipsos, « Consultation auprès de conducteurs de véhicules électriques », septembre 2020. L’étude est basée sur un échantillon de 3 643 personnes issues d’un fichier de propriétaires de véhicules électriques interrogé par internet du 27 juillet 2020 au 8 septembre 2020.

[55] Source : VINCI Autoroutes.

[56] Loi n° 2018–515 du 27 juin 2018 pour un nouveau pacte ferroviaire

[57] Article 131 de la loi n° 2021–1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets.

[58] Ministère chargé des Transports, Stratégie nationale pour le développement du fret ferroviaire, Définir une stratégie de développement des autoroutes ferroviaires à moyen/long terme, 13 septembre 2021.

[59] Il faudrait notamment clarifier si les 100 Mds€ annoncés par la Première ministre couvre l’ensemble des investissements ou s’il s’agit d’un montant s’ajoutant aux investissements historiques ou à ceux prévus dans le contrat de performance SNCF Réseau-État sur la période 2021–2030.

[60] European Rail Traffic Management System.

[61] Discours de la Première ministre du 24 février 2023 à l’occasion de la remise du rapport du Conseil d’Orientation des Infrastructures (COI) et de présentation d’un plan d’avenir pour les transports.

[62] Selon une note du Trésor, en 2015, les prélèvements supportés par les usagers de la route ne couvraient en moyenne qu’un tiers des externalités de la circulation. Cette sous-tarification est particulièrement marquée en milieu urbain, où les coûts liés aux embouteillages et à la pollution de l’air sont plus importants. Les prélèvements ne sont supérieurs aux externalités que sur les autoroutes à péage et pour les véhicules essence en milieu rural. Source : Direction générale du Trésor, « Les usagers de la route paient-ils le juste prix de leurs circulations ? », Note Trésor-Eco, n°283, avril 2021.

[63] Cf. sur ces enjeux : « Un plan de développement pour le transport combiné », Rapport Altermind pour le GNTC et RLE, novembre 2022.

[64] Cf. pour une comparaison européenne : IRG Rail, Ninth annual Market Monitoring Working Document, avril 2021. Il s’agit là d’une spécificité française, s’expliquant notamment par le choix d’un modèle d’auto-financement, qui fait reposer l’intégralité du financement des dépenses d’exploitation et des investissements de renouvellement du réseau sur le gestionnaire d’infrastructure, alors que dans la plupart des États européens, les redevances perçues par le gestionnaire d’infrastructure ont pour vocation première de couvrir les coûts d’exploitation du réseau, sans contribution attendue aux investissements de renouvellement.

[65] Article L2111–10–1 du Code des transports.

[66] « Un plan de développement pour le transport combiné », Rapport Altermind pour le GNTC et RLE, novembre 2022.

[67] Durovray, F., Rapport remis à Ile-de-France Mobilités sur le développement des lignes de cars Express en Ile-de-France, avril 2023.

[68] Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, « Le covoiturage en France, ses avantages et la réglementation en vigueur », juillet 2022.

[69] Le service de « lignes de covoiturage » est aujourd’hui offert par l’opérateur Ecov dans 30 territoires. Cette offre conçoit le covoiturage comme un système de transport collectif, déployé pour le compte des collectivités territoriales, pour pallier l’absence ou compléter l’offre de transport public hors des centres-villes. Ce modèle a été récemment mis en avant dans le rapport remis par Philippe Duron sur les transports collectifs (source : Duron, P., « Rapport sur le modèle économique des transports collectifs », juillet 2021).

[70] Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, « Le covoiturage en France, ses avantages et la réglementation en vigueur », juillet 2022.

[71] Cf. Broto, A., « La multimodalité au service de la décarbonation des trajets longs du quotidien », TIM Magazine, n°537, janvier-février 2023.

[72] A titre d’exemple, dans le cadre du projet TRAPEZE, un certain nombre d’acteurs (Vinci Autoroutes, Nokia, Renault, Ecov) ont créé un consortium pour construire un système d’exploitation du véhicule autonome passant notamment par le déploiement de voies réservées au covoiturage (VR2+) intelligentes.

[73] Cf. pour un précédent comparable l’appel à projets relatif aux transports collectifs en site propre et pôles d’échanges multimodaux lancé en décembre 2020.

[74] Source : notre-environnement.gouv.fr, « Les Français et le vélo en 2022 ».

[75] Pisani-Ferry, C., Tattevin, A., « Baromètre des résultats de l’action publique : la France des pistes cyclables », Note pour Terra Nova, février 2021.

[76] Cf. notamment les enquêtes MobiObserver réalisées par le groupe Transdev.

[77] Cf. notamment les enquêtes MobiObserver réalisées par le groupe Transdev.

[78] En ordre de grandeur, avec un facteur de charge de 14% pour le solaire PV, la mobilisation de l’emprise foncière des autoroutes concédées à VINCI Autoroutes pourrait permettre de produire 1,2 TWh/an.

[79] Consiel d’Orientation des Infrastructures, « Investir plus et mieux dans les mobilités pour réussir leurs transitions », février 2023.

[80] Source : Région Sud.

[81] Discours de Christophe Béchu, Ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, à l’occasion de l’installation du Comité de pilotage ministériel sur l’adaptation au changement climatique, 23 février 2023.

[82] Centre de ressources pour l’adaptation au changement climatique (CEREMA), « Infrastructures de transport : Identifier les vulnérabilités, mettre en place des stratégies d’adaptation », 2019.

[83] Cf. en ce sens Depoues, V., Dolques, G., « Au moins 50 Mds/an d’investissements publics à adapter », Billet d’analyse, I4CE, 15 septembre 2022.

[84] Notamment la loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles (MAPTAM) du 27 janvier 2914 et la loi d’orientation des mobilités (LOM) du 24 décembre 2019, qui consacrent le rôle des régions et des intercommunalités et métropoles et créent un cadre de coopération à l’échelle de bassins de mobilité.

[85] Cf. également en ce sens IDDRI, « Planification de la transition bas-carbone en France : faire mieux avec moins », Billet de blog, 3 février 2023.

[86] Cf. également en ce sens Canfin, P., et Pech, T., « Gouverner la transition écologique », Note pour Terra Nova, 2 novembre 2021.

[87] Ibid.

[88] Article L. 1215–2 du code des transports.

[89] Article L. 1111–9–1 du code général des collectivités territoriales. Voir également en ce sens le rapport annuel de la Cour des comptes 2022.

[90] Cf. également en ce sens Institut Montaigne, Infrastructures de transport : vers le futur et le durable !, avril 2022.

[91] Cf. Rapport final de Convention Citoyenne pour la Climat, 21 juin 2020. Lien : https://propositions.conventioncitoyennepourleclimat.fr/objectif/reduire-la-circulation-des-poids-lourds-emetteurs-de-gaz-a-effet-de-serre-sur-de-longues-distances-en-permettant-un-report-modal-vers-le-ferroviaire-ou-le-fluvial/

[92] TDIE, « Engagements climatiques et mobilités : à la recherche du bien commun », janvier 2023.

[93] Dervaux, H., « Leçons du Nord de l’Europe : les enseignements pour la France de la taxe carbone suédoise », Note pour Terra Nova, janvier 2023.

[94] Cf. en ce sens Coldefy, J., « Mobilité du quotidien : la redoutable équation du carbone, de l’équité et de l’efficience », Note à paraître. Voir également l’ouvrage Coldefy, J., « Mobilités : changer de modèle – Solutions pour des déplacements bas carbone et équitables », Publishroom factory, 2022.

[95] Pour respecter les objectifs fixés au niveau européen, les constructeurs ont d’abord travaillé sur l’efficience énergétique des véhicules et l’hybridation. Aujourd’hui, la vente de véhicules électriques est le levier principal.

[96] Source : Dossier communiqué par l’IDDRI à l’Inspection Générale des Finances dans le cadre de la mission en cours sur la performance de la fiscalité pour la transition dans le secteur Mobilité et transport.

[97] Bruegel, “How much investment do we need to reach net zero?”, 2021 et Commission européenne, Paquet “Ajustement à l’objectif 55”, 14 juillet 2021.

[98] SNBC, « La transition écologique et solidaire vers la neutralité carbone », mars 2020.

[99] I4CE, Panorama des financements climats, édition 2022.

[100] Ibid.

[101] « Décarboner la route : une urgence écologique », Rapport Altermind pour VINCI Autoroutes, novembre 2021.

[102] A ces pistes doit évidemment être ajoutée celle de l’amélioration de la productivité et la recherche d’économies, qui concerne davantage la problématique des coûts d’exploitation. La mise en concurrence des opérateurs (notamment dans le ferroviaire) doit à ce titre être un aiguillon.

[103] Voir le cas de la Norvège et du Royaume-Uni : David Hodari, « Electric-Car Shift Drains Fuel Taxes in Some Countries », The Wall Street Journal, 23 septembre 2021.

[104] Annexe au projet de loi de finances pour 2023, « Évaluations des voies et moyens ».

[105] Dans un rapport de 2022 la Cour des comptes européenne a montré que les subventions aux combustibles fossiles des États membres représentent entre 55 et 58 Mds€ par an et sont restées relativement stables au cours des dix dernières années, malgré les appels à leur élimination progressive. Source : Cour des comptes européennes, « Taxation de l’énergie, tarification du carbone et subventions à l’énergie », Document d’analyse 01, 2022. En France, l’État a ainsi récemment décidé de réduire et supprimer à horizon 2030 l’avantage fiscal sur le gazole professionnel dans le cadre de la loi Climat et Résilience.

[106]Institut Montaigne, Infrastructures de transport : vers le futur et le durable !, avril 2022.

[107] Source : Dossier communiqué par l’IDDRI à l’Inspection Générale des Finances dans le cadre de la mission en cours sur la performance de la fiscalité pour la transition dans le secteur Mobilité et transport.

[108] Audition de Jean-François Monteils, président du directoire de la SGP à l’Assemblée nationale le 8 mars 2023.

[109] La SGP bénéficie de ressources provenant notamment de plusieurs prélèvements additionnels aux impôts fonciers – la taxe sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux, les locaux de stockage et les surfaces de stationnement (TSB), la taxe spéciale d’équipement (TSE) et la taxe annuelle sur les surfaces de stationnement – et d’une part régionale de la taxe de séjour. Ces ressources affectées lui ont permis de lever de la dette pour financer les travaux.

[110] Sources : rapport annuel de l’ART sur la synthèse des comptes des concessions autoroutières, budget exécuté de l’AFIT France 2021, comptes transport de la Nation 2021.

[111] En application du principe d’ordre public du « fait du prince » et des clauses des contrats de concession, les SCA doivent être compensées en cas de toute augmentation de fiscalité spécifique. Par le passé, les hausses de fiscalité spécifique sur les autoroutes ont ainsi toujours été intégrées dans le péage, à l’exception de la décision prise sur la taxe d’aménagement du territoire (TAT) en 2020 par l’État, qui fait l’objet d’un contentieux en cours.

[112] Coldefy, J., « Mobilité du quotidien : la redoutable équation du carbone, de l’équité et de l’efficience », Note à paraître.

[113] Différents dispositifs d’aides ont été mis en place pour accélérer le déploiement (crédit d’impôt pour les particuliers, prise en charge de 40 à 75% du coût des raccordements aux réseaux de distribution par le TURPE, programme ADVENIR, subvention plan de relance…).

[114] Tel que par exemple le terminal combiné rail/route Terminal Ouest Provence à Miramas et Grans réalisé par le groupe Open Modal, qui devrait être livré au printemps 2024.

[115] Dans le cadre d’appels d’offres organisés par le Ministère de l’énergie et la Commission de Régulation de l’Énergie (CRE), qui offre un dispositif de prix d’achat garanti.

[116] « Un plan de développement pour le transport combiné », Rapport Altermind pour le GNTC et RLE, novembre 2022.

[117] ART, Rapport sur l’économie des concessions autoroutières, 2e édition, janvier 2023.

[118] TDIE, « Engagements climatiques et mobilités : à la recherche du bien commun », janvier 2023 ; Conseil d’Orientation des Investissements, « Investir plus et mieux dans les mobilités pour réussir leurs transitions », février 2023.

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