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Rapport

Logement : les priorités pour 2022–2027

Le logement est un poste de dépense important pour les ménages, surtout les plus jeunes qui cherchent à s’installer. Le choix du logement pèse sur le pouvoir d’achat et les difficultés d’accès accentuent les inégalités. L’accès au logement doit donc rester une priorité des politiques publiques pour les années qui viennent. Au nom de son devoir de solidarité, l’État doit garder un rôle central pour répondre au besoin de logements mais aussi prendre en compte de nouveaux enjeux comme la lutte contre les émissions de GES. Pour autant, une approche centralisée, centrée sur la construction et territorialement uniforme n’apparaît plus pertinente aujourd’hui. Les principaux défis actuels appellent en effet des différenciations territoriales ainsi que l’engagement de l’ensemble des acteurs concernés par ce secteur sur le terrain, des collectivités locales aux organismes HLM.
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Introduction

Parce que le logement représente un quart des dépenses contraintes des ménages en moyenne et plus de 35 % pour les classes populaires, une politique publique du logement demeure aujourd’hui une priorité pour répondre aux défis multiples de l’habitat, de l’urbanisme et de l’aménagement du territoire.

La politique du logement se trouve en effet au croisement d’enjeux variés et souvent contradictoires.

L’insatisfaction exprimée par l’opinion et les médias est multiforme : elle va de la persistance de situations extrêmes des personnes sans abri ou habitant dans des logements indignes, au constat d’une hausse des prix des logements beaucoup plus rapide que celle des revenus, comme à la difficulté pour les classes moyennes à trouver un logement locatif abordable dans les agglomérations les plus dynamiques. Les causes de ces phénomènes sont également multiples et dépassent le seul secteur du logement : les conditions de crédit ont permis à un plus grand nombre de personnes de devenir propriétaires mais, en parallèle, ont alimenté, dans tous les pays développés, la croissance des prix immobiliers. En outre, les mouvements migratoires ont contribué aux phénomènes de sans-abrisme.

Par ailleurs, notre pays compte une proportion élevée de propriétaires sans charges d’emprunt ou de locataires à faible loyer, qui sont satisfaits de leurs conditions de logement.

Il ne peut donc être question de répondre à toutes les préoccupations mais de formuler des propositions propres à la politique du logement, qui permettent de pallier les insuffisances du marché.

Globalement, la croissance continue et régulière de la population française, l’inflation des prix dans les agglomérations, la lutte contre le mal-logement et le besoin de mobilité résidentielle créent un besoin de logements.

Cela justifie des politiques de soutien à l’investissement et à la construction. Celles-ci doivent cependant tenir compte des réalités locales et des situations de tension d’un marché qui n’est pas uniforme sur le territoire. En outre, les objectifs de résorption de l’habitat insalubre, de réduction de la précarité énergétique et de réhabilitation de centres urbains délaissés engagent des actions dédiées à la rénovation du parc ancien et de soutien aux artisans du bâtiment.

Pour permettre aux collectivités de croître et d’accueillir des nouveaux habitants, il faut libérer du foncier et lancer des projets de construction. Cependant, il faut aussi favoriser un développement urbain plus durable, en limitant l’expansion urbaine. C’est pourquoi la loi fixe aussi des objectifs de sobriété de la consommation de foncier, affirmée dans la loi Climat et résilience avec l’objectif « zéro artificialisation nette ». Pour préserver les espaces naturels mais aussi les terres agricoles, les constructions nouvelles doivent se faire en priorité là où le sol est déjà artificialisé.

Ces deux objectifs ne sont pas aisés à concilier. Ils vont en outre, à bien des égards, à l’encontre des aspirations des ménages. D’une part, de nombreux ménages souhaitent s’installer à la périphérie des villes, là où les coûts du logement sont plus faibles et où le contact avec la nature leur paraît plus direct ; d’autre part, des ménages déjà installés en ville sont réticents face aux nouveaux projets d’aménagements dans leur environnement proche et, plus généralement, à la perspective de densification. De plus, la volonté de préserver des espaces pour les activités économiques, voire des nouvelles activités industrielles, conduit aussi à des situations de concurrence des usages dans des espaces convoités. À l’inverse, des espaces urbanisés sont délaissés par les ménages et les commerces, et des programmes publics ambitieux (« Cœur de ville », etc.) cherchent à recréer de l’attractivité. C’est pourquoi l’aménagement du territoire, les objectifs de mixité sociale et de lutte contre la ségrégation urbaine entrent dans le champ d’une réflexion sur les priorités de la politique du logement.

Pour concilier ces objectifs contradictoires, il faut garder une vision d’ensemble des enjeux et des outils d’intervention permettant un pilotage national. Il convient en outre de dégager des priorités et des calendriers afin de pouvoir gérer simultanément ces contradictions. Il faut, enfin, réussir à concilier les politiques nationales avec les nécessaires adaptations locales des politiques. En matière de logement, l’application uniforme des dispositifs n’a pas de sens. Pour autant, l’État doit rester en grande partie responsable de cette politique du logement. L’accès au logement est un devoir de solidarité de l’ensemble de la nation[1]. Comme l’a rappelé le Conseil constitutionnel en 1995, « la possibilité de disposer d’un logement décent est un objectif à valeur constitutionnelle ». Ainsi, quelle que soit la répartition souhaitable des compétences entre État et collectivités locales, une politique du logement proche des réalités locales devra, au moins en partie, rester pilotée de manière centralisée. L’État reste un garant de la solidarité. Puisque des politiques définies à l’échelle nationale ne répondent pas toujours aux besoins locaux, il est nécessaire que la politique du logement soit aussi prise en charge à l’échelle locale. C’est d’ailleurs largement le cas, puisque le droit actuel confie déjà de nombreuses compétences aux collectivités locales : logement social pour une grande part et urbanisme, ce qui est l’essentiel.

La France dépense des sommes importantes pour le logement. C’est un effort national conséquent de solidarité. Bien que les calculs soient complexes et discutés, on considère que le logement mobilise environ 38 milliards d’euros par an de ressources publiques[2]. Au premier rang figurent les aides à la personne (APL et équivalents) et, pour un montant du même ordre, les avantages fiscaux : ces derniers (TVA à taux réduit, incitation à la construction de logements locatifs) sont à mettre en regard avec les prélèvements fiscaux sur l’ensemble du secteur (par ordre d’importance : taxe foncière, TVA, transactions, taxation des revenus locatifs) qui s’élèvent à 80 milliards d’euros. Au vu des difficultés sociales liées au logement (sans-abrisme, listes d’attente pour l’accès au logement social…), la performance de cette dépense est parfois jugée sévèrement, mais on ne peut pas juger une politique aussi variée et aux objectifs aussi larges en fonction des seuls chiffres de l’exclusion, qui ne sont pas la cible exclusive de cette politique et qui relèvent, par ailleurs, de causalités et de mécanismes n’ayant pas de lien direct avec elle (migrations, grande exclusion, etc.).

Au regard des difficultés anciennes du logement en France, la situation actuelle révèle des progrès notables. La question du logement s’est imposée à partir de la fin du XIXe siècle en raison de l’exode rural, du développement du salariat lié à l’industrialisation et des mauvaises conditions de logement dans des villes en expansion rapide. Les revendications ouvrières et le développement de l’hygiénisme ont conduit à un premier effort de construction et à une offre sociale. Les destructions liées à la Première Guerre mondiale et le gel des constructions pour le parc locatif privé après le blocage des loyers de 1915 ont créé, dans un contexte de dynamisme démographique, une pénurie de logements, qui a perduré jusque dans les années 1960. Dans ces années de reconstruction, une politique volontariste, liée à une ambition d’aménagement du territoire soutenue par un système de financement public, a permis de rattraper le retard, de résorber les bidonvilles et de faire augmenter le parc de logements de 50 % entre 1954 et 1975. Les villes nouvelles, les grands ensembles ont permis de faire progresser le parc, de réduire le surpeuplement et d’améliorer le confort des logements (notamment le confort sanitaire). Durant cette période, la demande de logement est en outre soutenue par le changement des usages lié à la réduction du nombre de personnes par ménage (décohabitation juvénile, séparations…). Comme dans beaucoup d’autres pays, la promotion de l’accession individuelle à la propriété se développe à partir du milieu des années 1970, ce qui fait de l’immobilier le principal, et souvent le seul, patrimoine des ménages moyens et modestes. Dans les années 1980, la question du mal-logement se pose d’une manière nouvelle, avec la prise en compte de la grande exclusion. À partir de la loi Besson de 1990, la question des démunis devient le centre de la politique du logement. La loi SRU de 2000 impose au minimum 20 % de logement social dans toutes les communes et vise à lutter contre la ségrégation spatiale. Parallèlement, la politique de la ville s’est développée pour remédier aux difficultés urbaines et sociales des grands ensembles des années 1960–1970. Elle a été amplifiée par le lancement, dans les années 2000, des programmes de rénovation urbaine de l’ANRU (Agence nationale de renouvellement urbain), qui visaient à favoriser une diversité d’occupation grâce, notamment, aux opérations de démolition-reconstruction. Plus récemment, les objectifs de l’accord de Paris sur le climat ont fait entrer une série de nouvelles priorités dans la politique du logement, et en premier lieu le besoin de rénovation énergétique du parc ancien.

Pendant tout ce temps, l’État a légiféré, réglementé et financé. Les textes de loi consacrés au logement, l’urbanisme et l’aménagement se succèdent à chaque nouveau gouvernement. Sauf aménagement à la marge, il est possible d’affirmer qu’on ne manque pas aujourd’hui d’outils d’intervention : HLM, aides personnelles au logement, encadrement des loyers, encadrement des rapports entre locataires et bailleurs, outils d’aménagement urbain, établissements publics fonciers, incitation fiscales, financements dédiés via la Caisse des dépôts et Action logement, lutte contre l’insalubrité et le saturnisme, prévention des expulsions, droit au logement opposable… Nous ne sommes pas en manque de textes mais de responsabilisation des acteurs et de coopération. 

Que peut et doit encore faire l’État ? Mais, surtout, avec qui et à quelle échelle ?

1. Un état garant, des acteurs locaux responsabilisés

Depuis une vingtaine d’années, les collectivités locales sont appelées à élaborer des politiques de l’habitat (loi Chevènement de 1999, SRU 2000, loi Raffarin 2004). Avec ce partage de la décision, différentes formes de coopération et de négociation sont imaginées entre l’État et les collectivités locales. Progressivement, les intercommunalités se sont rapprochées des bassins d’habitat (échelle pertinente pour les habitants), renforçant le besoin de coopération locale, en complément de la contractualisation avec l’État.

Récemment, l’État a mis en place un nouveau dispositif de contractualisation avec les intercommunalités, le contrat de relance et de transition écologique (CRTE). Ce dernier a vocation à retranscrire les projets de territoire des intercommunalités intégrant une approche transversale. Il a également vocation à regrouper les financements des différents acteurs publics intervenant aux cotés de l’intercommunalité[3]. Ces projets transversaux ne sont pas spécifiquement consacrés au logement mais incluent la transition démographique et environnementale, qui sont indissociables des politiques de logement. Signé pour six ans, le CRTE illustre la généralisation d’un nouveau mode de collaboration entre l’État et les collectivités territoriales et a pour fonction de regrouper l’ensemble des contrats signés entre l’État et les collectivités, comme les contrats de ville, mais aussi les programmes des différents ministères, et leurs partenaires comme « Action cœur de ville » ou « Petites villes de demain ».

C’est aussi un mode de financement différent qui se met en place dans un contexte de forte évolution du panier de ressources des collectivités, en particulier des collectivités du bloc communal, avec la suppression de la taxe d’habitation. La compensation sous forme de dotation globale par l’État répond à un objectif de traitement égal des communes mais ne satisfait pas le besoin de prise en compte des spécificités des territoires. Outre le financement, l’État peut apporter au cours de la contractualisation un support d’expertise, qui permette de monter la qualité des projets envisagés localement, certains EPCI (établissement public de coopération intercommunale) n’ayant pas toujours l’expertise nécessaire en ingénierie pour monter leurs projets. L’État doit continuer à tracer le cadre législatif et réglementaire et assurer une péréquation entre les collectivités au nom de la solidarité nationale, dont il est le garant.

Plutôt qu’une nouvelle étape de déconcentration, qui n’aurait pas de sens en ce qui concerne le logement puisqu’il ne s’agit pas de construire des mètres carrés au niveau local en fonction d’objectifs nationaux, comme cela a pu être le cas par le passé, il s’agit de donner comme priorité de susciter une coopération des acteurs locaux à l’échelle de leur territoire et de trouver une complémentarité des actions entre les échelles locales et nationales[4]. Il n’est plus question d’aménager le territoire sur le mode d’un « jardin à la française », ni de chercher des transferts de compétences comme s’il s’agissait d’une nouvelle étape de décentralisation, ni non plus d’accorder des dérogations au risque de multiplier les situations d’exception et de susciter des contentieux, mais de faire émerger des projets territoriaux qui engageraient la responsabilité des acteurs qui sont directement au contact de la population. Si la politique du logement reste une priorité au nom de la solidarité nationale, elle doit bel et bien favoriser l’égalité de tous. Néanmoins, des règles uniformes, en la matière, ne suffisent pas à lutter contre les inégalités. Il convient donc de  rechercher des formes de coresponsabilité, où l’adaptation locale est nécessaire pour restituer l’égalité.

C’est la raison pour laquelle il ne semble plus pertinent de fixer des objectifs nationaux en nombre de constructions. Fixer un objectif national de nouveaux logements (par exemple, dans une contribution récente, 450 000 logements annuels[5]) ne remplirait pas les objectifs, aujourd’hui prioritaires, d’une politique du logement adaptée à chaque territoire. S’il est vrai que le nombre d’autorisations d’urbanisme a connu une baisse considérable en 2020, on peut considérer qu’il s’agit là d’un phénomène conjoncturel lié à la coïncidence des élections municipales (qui sont toujours un moment de baisse de l’activité) et du premier confinement. En outre, les investisseurs institutionnels sont incertains de l’évolution de l’immobilier de bureau en raison du développement rapide du télétravail et se tournent à nouveau, semble-t-il, vers le marché de l’immobilier résidentiel, sans que l’on sache encore si ce phénomène sera durable, de grande ampleur et quels seront ces investisseurs : banque et assurances comme par le passé ou regroupement d’investisseurs particuliers ? Le risque des plans de relance généraux est de doper l’activité du secteur de la construction dans des zones où les besoins ne sont pas les plus criants. Dans ce cas, ils renchérissent le coût du foncier et alimentent l’augmentation des prix sans que la qualité architecturale et d’usage soit toujours au rendez-vous. Un objectif quantitatif national de construction n’a pas d’intérêt si l’on ne précise pas quels territoires ni quels publics sont visés.

De plus, l’État n’est pas le mieux placé pour établir des objectifs territorialisés même s’il doit rester garant de la solidarité entre les territoires, à l’instar de ce que permet la loi SRU pour une répartition équilibrée des logements sociaux.  Le mal-logement ne se résoudra pas uniquement par un objectif de constructions neuves qui favoriserait le parcours résidentiel de tous. Il faut déterminer localement les besoins, notamment des personnes en situation de grande exclusion, et avoir une production adaptée aux capacités contributives et à la typologie des ménages concernés (on manque notamment de petites surfaces pour des personnes seules).

La nécessité de produire de nouveaux logements reste entière, ne serait-ce qu’en raison de l’évolution démographique et de l’obsolescence d’une partie du parc de logements. Toutefois, la question de la localisation est devenue prioritaire : la fin de l’étalement urbain doit avoir pour corollaire l’acceptation d’une plus grande densité urbaine afin de répondre aux besoins des nouveaux ménages. Celle-ci demeure cependant contraire à l’aspiration d’une grande partie des ménages, tant l’attrait pour la maison individuelle reste fort.

L’exigence écologique conduit à favoriser les réhabilitations, les transformations d’usage, le traitement des friches, l’évitement du mitage et tout ce qui consomme des terres non urbanisées. Les surcoûts liés la production de logements dans ces conditions doivent être mieux connus pour être pris en compte et, le cas échéant, compensés par les pouvoirs publics. Le succès du fonds friches, doublé pour répondre à la demande, atteste de l’importance du gisement. L’accent sur la qualité architecturale, en valorisant le projet urbain, doit devenir une priorité[6]. Des projets architecturaux nouveaux, ambitieux et originaux peuvent ouvrir de nouvelles perspectives aux ménages aujourd’hui aspirés par le modèle pavillonnaire.

Les orientations possibles d’une politique du logement en France

2. La priorité de la lutte contre le mal-logement : l’implication nécessaire des collectivités locales et des organismes HLM

Le débat sur les défaillances de la politique du logement est souvent abordé à partir de la question des personnes sans-abri. Peut-on trouver des pistes nouvelles pour résorber ce phénomène évolutif qui perdure sans se réduire, malgré les sommes et l’énergie dépensées ? Sans nier l’utilité des actions menées par l’État depuis trente ans, qui ont évité à un grand nombre de personnes de se retrouver à la rue (notamment la politique de prévention des expulsions) ou leur ont permis d’en sortir, force est de constater que des solutions restent à trouver pour améliorer l’efficacité de l’action publique.

Il est en effet choquant de voir tant de personnes à la rue alors que la politique du logement (au sein de laquelle se trouve désormais la politique de l’hébergement) mobilise des sommes considérables. Pourtant, le rapprochement ne va pas de soi et crée même un découragement dommageable, jetant un doute sur une politique du logement qui poursuit, comme on l’a vu, des objectifs multiples. Il faut se garder de tout amalgame entre des situations qui vont de l’absence de logement à la difficulté d’accéder au logement souhaité en termes de qualité, prix et localisation.

Il est en outre artificiel de traiter comme des sujets connexes le sans-abrisme, le logement précaire et le logement inadéquat. Les demandeurs d’asile en attente de l’examen de leur situation, par exemple, ont en effet peu de points communs avec des personnes handicapées ou dépendantes dont les logements ne sont pas adaptés à leurs besoins spécifiques. Les personnes qui vivent à la rue relèvent en effet de la grande exclusion et ne manquent pas seulement d’un toit. Elles ont besoin d’un accompagnement social global, sanitaire, juridique, psychiatrique parfois… qui dépasse la seule prise en charge de la pauvreté. Nombre de personnes à la rue ne sont, de plus, pas toujours éligibles aux dispositifs d’aide au logement car elles sont en situation irrégulière sur le territoire. Il en va de même pour une partie importante des personnes accueillies dans les centres d’hébergement. Au nom de l’inconditionnalité de l’accueil des personnes sans-abri, elles peuvent se trouver dans des centres d’urgence ou des hôtels payés par la collectivité, mais elles ne sont pas éligibles à d’autres dispositifs, qu’il s’agisse d’établissements médico-sociaux ou de logements sociaux.

En ce qui concerne les reconduites à la frontière des étrangers en situation irrégulière, les mesures d’éloignement du territoire (obligation de quitter le territoire français, OQTF) sont souvent suspendues au manque de coopération des États dont les personnes sont ressortissantes, qui refusent de les reconnaître et de leur délivrer un laissez-passer consulaire en retour sur le territoire. Le sujet relève autant du droit des étrangers et de la relation diplomatique bilatérale avec les États dont ces populations sont originaires que de la lutte contre la pauvreté. De ce point de vue, une régularisation des personnes non expulsables leur ouvrirait l’accès à d’autres options, et notamment au parc social. Ceci résoudrait davantage de problèmes qu’une gestion à courte vue des hébergements d’urgence.

La prise en charge des personnes sans-abri se trouve souvent dans un « no man’s land » bureaucratique entre les services sociaux, les services de police, les mairies, les préfectures… La complexité des dispositifs et des situations est réelle. À ces difficultés classiques s’ajoutent désormais celles des mineurs étrangers isolés, dits « mineurs non accompagnés » (MNA), qui relèvent de l’aide sociale à l’enfance (ASE) des conseils départementaux et qui, à leur majorité, sont souvent livrés à eux-mêmes et à la rue. Les solutions de continuité entre dispositifs sociaux, notamment liés aux seuils d’âge, créent des ruptures de parcours : par exemple, des jeunes, étrangers ou non, sortant des dispositifs relevant de l’ASE se trouvent parfois du jour au lendemain sans solution d’hébergement et sans accompagnement. Beaucoup de situations choquantes, portant atteinte à la dignité des personnes, se prolongent par manque de coordination entre les services compétents, voire font l’objet d’un rapport de force entre autorités centrales et locales[7].

Le sans-abrisme est en réalité traité dans le cadre d’une politique de l’hébergement.  Celle-ci s’est développée ces dernières années en figeant des situations qui ne devaient être que temporaires. Le budget consacré à l’hébergement est en hausse constante (3 milliards d’euros en 2021 auxquels il faut ajouter 1 milliard pour l’hébergement des demandeurs d’asile). Il touche une population toujours plus nombreuse, évaluée approximativement à 300 000 sans-domicile.  Les dépenses publiques pour l’hébergement représentaient 2 % des dépenses publiques pour le logement en 1984, contre 12 % en 2021[8]. En outre, ces sommes sont trop souvent dépensées dans des dispositifs d’urgence onéreux et peu adaptés[9], comme des chambres d’hôtel, qui ne procurent pas aux personnes la stabilité et la sécurité temporelle nécessaire pour formuler un « projet personnel d’insertion » ou, en ce qui concerne les enfants, pour suivre une scolarité normale.

Ce secteur de l’hébergement est de fait rattaché à la politique du logement (sauf pour les demandeurs d’asile). Il se trouve imbriqué dans sa gestion administrative. Fondamentalement, il vaudrait mieux consacrer les sommes dépensées pour des « mises à l’abri » et des situations d’urgence à des projets structurants, qui passent nécessairement par un logement « à soi ». La stratégie « logement d’abord » rappelle l’importance de disposer d’un toit de manière pérenne pour s’engager dans un parcours de réinsertion sociale sur plusieurs années et pour procurer de conditions d’éducation normales pour les enfants.

L’organisation de l’aide aux personnes sans-abri doit bénéficier de davantage d’implication des collectivités locales. Dans la plupart des pays occidentaux, l’action publique en direction de ce public relève plus de l’action locale que de l’intervention nationale. Il faut que, là encore, l’État transfère les moyens et délègue des compétences aux collectivités locales.

La contribution du secteur du logement, en particulier des HLM, à l’intégration des personnes sortant de la grande exclusion doit à nouveau être interrogée. La vocation du secteur HLM n’est pas historiquement liée à la résorption de la grande pauvreté. Sa mission initiale, s’adressant à « des gens modestes vivant de leur salaire », est beaucoup plus large et inclut d’ailleurs un objectif de mixité sociale. Par ailleurs, les bailleurs sociaux sont contraints de présenter une gestion équilibrée. Or, le parc social connaît déjà une relative paupérisation de son public. Alors que le logement social a été, pendant les années de croissance des Trente Glorieuses, un lieu de transit offrant une étape dans un parcours résidentiel, il regroupe de plus en plus fréquemment une population plus modeste, dont la perspective d’évolution résidentielle est réduite voire nulle[10]. C’est pourquoi le « turn-over » se ralentit dans le logement social, ce qui allonge les temps d’attente pour les ménages qui ont posé une demande.

On ne peut donc ignorer que le logement social joue déjà un rôle important en faveur des ménages modestes. Il apparaît pourtant qu’il pourrait jouer un rôle plus actif afin d’offrir une solution de logement aux personnes sortant de la grande exclusion. Plusieurs freins sont identifiés : les HLM n’ont pas d’incitation particulière à le faire ; il manque des logements de petite taille adaptés aux personnes seules ; les loyers, des logements neufs en particulier, sont parfois trop élevés pour les plus modestes (même si l’on ne tient compte que du reste à charge). Les loyers les plus accessibles sont situés dans des quartiers souvent paupérisés, et la mixité sociale est invoquée pour en limiter l’accès à de nouveaux ménages défavorisés.

Propositions 

  • La responsabilité administrative de la prise en charge des personnes à la rue doit être clarifiée pour éviter les allers et retours entre échelons administratifs, notamment entre municipalités et préfectures. Préoccupation du quotidien pour le voisinage, question à la fois urbaine et sociale, elle devrait relever des attributions des municipalités. Des inégalités apparaitraient sans doute entre collectivités locales, car certaines villes, en particulier les métropoles, sont plus attractives ou accueillantes que d’autres pour des publics en errance ou qui doivent se rapprocher des services administratifs pour faire valoir leurs droits. Ces collectivités sont cependant aussi les mieux armées pour mener une action sociale de cette nature. Une péréquation de l’État, garant de la solidarité, devrait accompagner ce transfert de responsabilités et de moyens, sans renoncer à une répartition équilibrée de l’offre adaptée à ces publics. Ces nouvelles obligations pourraient être assorties, le cas échéant, de sanctions pour les collectivités qui n’assumeraient pas leur part, à l’instar des dispositions du type de celles prévues par la loi SRU.
  • Les organismes HLM doivent être incités à se montrer plus actifs dans l’accueil des ménages les plus modestes et des personnes en parcours de réinsertion. Il ne s’agit pas de prôner un centrage drastique des HLM sur le public le plus pauvre, car le logement social doit garder une vocation généraliste (gage de ses équilibres sociaux comme financiers). En revanche, le secteur du logement social doit prendre une part plus importante encore dans la lutte contre la grande pauvreté. Pour développer une offre de logements très abordables, des appartements autrefois prévus pour des familles nombreuses, et même des trois-pièces, doivent être réaménagés en appartements pour personnes seules. Dans les programmes neufs, la baisse tendancielle de la taille des ménages doit être mieux prise en compte, avec une offre plus élevée de studios et de deux-pièces. Les parcours « logement d’abord » doivent être développées dans les HLM, en lien avec les associations d’insertion en ce qui concerne l’accompagnement social. Les grilles de loyers doivent être aménagées pour dédier une partie du parc aux ménages très défavorisés, comme nous l’avons défendu dans une précédente note. Les organismes HLM, à cette fin, devraient avoir une plus grande liberté pour fixer eux-mêmes leurs loyers[11].

 

3. Une rénovation urbaine à poursuivre

Si la période de reconstruction d’après-guerre fut un moment ambitieux pour la construction et le logement social, elle a également laissé un habitat et un urbanisme qui ont parfois mal résisté au temps. Des quartiers isolés, parfois enclavés, mal connectés au marché du travail et aux aménités urbaines, des immeubles dégradés, une population paupérisée et stigmatisée… Des projets architecturaux qui devaient favoriser l’intégration et la promotion sociale sont perçus aujourd’hui comme des facteurs de relégation.

La politique de renouvellement urbain menée depuis sa création en 2003 par l’Agence nationale de renouvellement urbain (ANRU) a apporté des changements positifs, y compris en interpellant les habitudes des opérateurs du logement social dans ces quartiers. À partir de 2014, un nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) a été lancé, dont le budget a été porté à 12,1 milliards d’euros en 2018, qui doit cibler 500 quartiers de la politique de la ville (QPV).

Les opérations de l’ANRU ont permis trois types d’évolution. Tout d’abord, la perception de choix à nouveau ouverts pour les habitants qui ont changé de logement. La décision de partir ou de rester dans le quartier étant ouverte, une occasion était offerte de se « remettre en mouvement », même si elle n’a pas été donnée à tous. En effet, la politique de destruction des bâtiments obsolètes n’a pas été complètement compensée par une offre équivalente de logements, si bien que le bilan net est un déficit de 20 000 logements à caractère social. Les quartiers rénovés ont pu également travailler sur leur image pour rompre avec des processus stigmatisants. Les opérations urbaines, au-delà des immeubles d’habitation, ont permis une reconnexion physique à la ville, grâce à l’achèvement du réseau viaire, une extension des transports publics et un retour à la gestion par la ville de voiries et d’espaces communs qui étaient gérés par les bailleurs. Enfin, entre les collectivités locales, les bailleurs sociaux et l’ANRU, un débat politique ouvert et contradictoire s’est instauré à l’occasion de ces projets.

Les projets de rénovation urbaine menés conjointement par les collectivités locales et les organismes HLM soutenus et financés par l’ANRU ont amélioré concrètement le quotidien de millions de personnes, en leur offrant des conditions de logement nettement supérieures à ce qu’elles étaient auparavant, en leur offrant des équipements de proximité (écoles, crèches, maisons de quartier, gymnases, terrains de sport, etc.) au niveau de ceux des autres quartiers de la ville, en désenclavant les quartiers et en les ouvrant vers la ville tout en supprimant les délaissés pour les remplacer par des aménagements publics (espaces verts, aires de jeux pour enfants, etc.) de qualité . Pour les maires porteurs de projet de cette politique publique, les quinze années de rénovation urbaine ont permis d’engager des travaux d’envergure et de rendre leur ville plus cohérente, solidaire et moderne.

Pour réaliser toutes ces actions, cette politique a mobilisé de très importants financements : près de 11,4 milliards d’euros de fonds publics ont été engagés par l’ANRU, répartis entre 30 000 opérations situées sur l’ensemble du territoire national, dans près de 600 quartiers[12]. Au total, plus d’un million de logements ont été concernés par des opérations de démolition, de reconstruction, de réhabilitation ou de résidentialisation. Par nature, l’évaluation de ce type de dépense est difficile à établir, en raison de ses nombreuses retombées sociales potentiellement positives en ce qui concerne, par exemple, la réussite scolaire des enfants, la situation sanitaire, la qualité de vie, l’amélioration des relations de voisinage, etc. Pour les bailleurs, elle a permis une revalorisation de leur patrimoine, inscrite dans leur bilan comptable. Elle n’a pas répondu à toutes les carences : la mixité sociale n’est pas revenue dans les quartiers anciennement enclavés (en moyenne, 20 % de renouvellement de la population dans ces quartiers), la sécurité publique reste une préoccupation des habitants, les indicateurs sociaux restent plus défavorables que la moyenne. Pourtant, les demandes des habitants pour habiter dans ces quartiers restent fortes. Par ailleurs, des promoteurs privés y interviennent à nouveau, signe d’un changement d’image.

Le rôle joué par l’ANRU indique une articulation intéressante entre acteurs locaux et agence publique. Les projets doivent venir des collectivités locales, en accord avec les bailleurs sociaux. L’ANRU apporte de l’ingénierie et des compétences, avec un retour sur expérience conséquent. L’agence, dans le dialogue autour du projet, aide les acteurs à préciser leur projet et à monter en qualité. Ce type de dialogue est proche du modèle des « projets territoriaux » responsabilisant les acteurs locaux dans un dialogue avec l’État, tel qu’il se développe dans les Contrats de territoire.

Dans les années qui viennent, d’autres patrimoines immobiliers devront faire l’objet de programmes de rénovation. En outre, les objectifs de l’Accord de Paris sur le climat vont justifier, et justifient déjà, des projets importants d’isolation des bâtiments. D’un point de vue urbain, la nécessité de « refaire la ville sur la ville » va aussi susciter des projets d’aménagement urbain coûteux. Les défis restent donc encore nombreux. Mais le renouvellement urbain a montré une capacité à changer profondément des situations qui étaient localement ingérables. D’autre part, la consolidation en cours du secteur du logement social permet une montée en compétences des interlocuteurs et un renforcement des capacités d’investir. La participation des habitants aux décisions concernant des grands programmes de cette nature doit rester un sujet de vigilance particulière et prendre en compte à la fois les habitants du parc social et les habitants de l’ensemble urbain auquel il appartient. Dans les « contrats de ville » (loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, 2014), un conseil citoyen est créé ; il est composé de personnes résidant dans les quartiers et tirées au sort. Il doit être associé au comité de pilotage du contrat de ville et du projet de rénovation urbaine.

Le sujet des copropriétés dégradées a été relégué au second plan puisqu’il s’agit de propriétés privées, mais il devra être pris en compte. La construction de la décision collective y est beaucoup plus complexe, avec des situations individuelles des copropriétaires parfois dramatiques. L’accompagnement des copropriétés dégradées, qui sont de plus en plus identifiées comme une cible explicite de l’action publique, devra être encore consolidé, au profit de modalités de coordination renforcée des interventions des différents acteurs. Les établissements publics fonciers (EPF) sont déjà engagés dans les opérations les plus lourdes et les bailleurs sociaux, forts de leurs savoir-faire, devraient voir leur rôle affermi pour accompagner la rénovation, voire la reprise de ces ensembles.

Propositions  

  • Les programmes de rénovation urbaine doivent se poursuivre en s’élargissant, en fonction des situations, à des projets portant sur des propriétés privées (copropriétés dégradées), avec l’aide éventuelle des organismes publics de logement social, comme cela se fait déjà ponctuellement.
  • La participation des habitants à la définition des programmes doit passer systématiquement du principe aux actes et contribuer à l’insertion des quartiers au droit commun de la ville.

4. Lutter contre la rétention foncière et favoriser une politique à long terme de maîtrise du foncier par les collectivités

Les politiques du logement sont largement tributaires des politiques foncières qui poursuivent les trois grands objectifs suivants, difficiles à concilier.

  • Un objectif économique : libérer pour alimenter l’offre de logement accessible.
  • Un objectif social : limiter la tendance spontanée à la ségrégation spatiale en veillant à un équilibre entre catégories de logement dans les différents quartiers.
  • Un objectif écologique : freiner l’artificialisation des sols pour préserver la biodiversité et les puits de carbone.

Ces trois objectifs d’intérêt général vont à contre-courant des aspirations des ménages, qu’il s’agisse de leur désir de constitution, voire d’accumulation, de patrimoine, de leurs attentes en matière de rentes foncières, de leur aspiration à la maison individuelle ou encore de leur préférence pour un « entre soi » résidentiel.

4.1 Les prix du foncier et les prix du logement sont étroitement liés

Le prix des logements a été multiplié par 2,3 de 2000 à 2020, alors que le coût de la construction a progressé de 60 % et l’indice général des prix a augmenté de 30 %. Cette croissance des prix du logement a favorisé les ménages propriétaires, qui voient leur patrimoine prendre de la valeur, et entraîné une croissance des inégalités répartie inégalement dans l’espace et selon l’âge. La différence entre prix du logement et coût de construction a été absorbée en partie par d’autres composantes du coût telles que l’amélioration de la qualité, marges et honoraires, mais l’essentiel a bénéficié au poste foncier.

Aujourd’hui, la construction de logements se réalise de moins en moins par extension urbaine (les lotissements en zone rurale ou des projets en site vierge comme les villes nouvelles) et de plus en plus par recyclage de sites déjà construits ou au moins déjà artificialisés. Le prix d’achat du terrain ou de l’immeuble à démolir et à recycler résulte d’un « compte à rebours » : le prix du marché (prix de l’ancien, le logement d’occasion représentant 80 % des transactions) détermine le prix de vente du neuf, le règlement d’urbanisme fixe le nombre de mètres carrés possible, et le promoteur déduit le coût de construction (résultant d’une concurrence entre entreprises), les frais annexes et sa marge. Le prix maximum admissible pour la charge foncière s’obtient par différence. C’est donc la demande, exprimée par le prix de l’ancien, qui détermine la valeur du foncier.

C’est aussi le foncier qui est responsable de la faible élasticité du prix à l’offre de logement. En effet, la logique économique du foncier n’est pas celle d’un secteur productif où l’augmentation de l’offre pèse sur les prix. Au contraire, c’est une logique de gisement et de la rente associée : c’est l’augmentation des prix qui conduit à exploiter de nouvelles ressources foncières plus coûteuses (recyclage de sites déjà construits, démolition, dépollution, etc.). Pour peser sur les prix, il faut soit une augmentation rapide et massive des quantités (cas de certains marchés locaux inondés par des produits défiscalisés) soit une chute de la demande (fermeture de sites industriels, exode démographique).

Les cycles sont asymétriques : lorsque le prix du logement augmente, le propriétaire du terrain a intérêt à attendre, d’autant que les coûts de portage sont faibles. Inversement, en phase de baisse des prix et des volumes (situation connue en 1990–1995), le prix du foncier ne réagit que faiblement et avec retard. La faiblesse des coûts de portage (frais financiers, fiscalité) favorise la rétention.

Quels leviers pour favoriser une offre foncière compatible avec les besoins de développement urbain ?

En préalable, soulignons que toute politique foncière suppose de raisonner à long terme (au moins cinq à dix ans), qu’il s’agisse de constituer des réserves foncières, de mener des opérations d’aménagement ou de soutenir des filières de production sociales.

Depuis la dernière décennie, des outils ont été développés pour favoriser une maîtrise publique du foncier en vue d’une utilisation répondant à des motifs d’intérêt général (production de logements sociaux notamment). C’est le cas des établissements publics fonciers qui sont bien installés dans le paysage et devraient couvrir en zone tendue de 15 %  à 20 % des besoins : ils bénéficient d’une ressource parafiscale et du produit de la rotation de leur patrimoine.

La cession de foncier public à des conditions privilégiées est une revendication permanente des promoteurs (comme celle des collectivités et de leurs aménageurs pour le foncier de l’État et de ses établissements publics). Elle a été rendue possible par la loi, pour le logement social notamment.

Les outils de dissociation foncier/bâti et la constitution d’offices fonciers solidaires permettent à une collectivité propriétaire de foncier d’aider la réalisation de programmes, notamment en accession sociale, grâce à un régime de location de longue durée du terrain. Le régime juridique de ces dispositifs est défini mais les possibilités de déploiement sont limitées par la capacité financière des collectivités à acquérir du foncier et à le louer à des conditions privilégiées.

4.2 Des points d’alerte 

  1. La construction de logements génère des coûts d’investissement et de fonctionnement des équipements publics qui peuvent s’avérer dissuasifs. La suppression de la taxe d’habitation n’incite pas les collectivités à accueillir des populations nouvelles.
  2. L’objectif gouvernemental de sobriété foncière ne peut se combiner avec le développement urbain qu’au prix d’une plus forte densité : en zone tendue, il faudrait construire en hauteur tout en dégageant des espaces naturels au sol. Ce raisonnement arithmétique est logique mais il est loin de faire consensus. Pour faire accepter la densité acceptable, il faut imaginer des projets qui emportent l’adhésion par leur qualité.
  3. Les nouveaux modes d’accession sociale à la propriété par l’intermédiaire des offices fonciers solidaires sont innovants et tout à fait intéressants mais, outre le fait qu’ils ne peuvent produire qu’un nombre limité de biens, ils posent le problème du choix des heureux bénéficiaires et reposent sur un suivi, dans le temps, des mutations pour éviter les droits de reprise (somme à donner de manière plus ou moins occulte au vendeur) qui contourneraient les règles anti- spéculatives.

4.3 Nos préconisations

De multiples rapports ont relevé que la fiscalité immobilière frappe beaucoup plus les transactions que la détention des biens, ce qui pénalise la mobilité et encourage la rétention, et ont proposé d’inverser cette logique. Diverses tentatives de taxer les terrains nus constructibles se sont heurtées à de vives oppositions.

Pour favoriser des projets urbains de qualité et lutter contre la rétention foncière, il est proposé de définir des secteurs dans lesquels les propriétaires seraient incités à réaliser eux-mêmes le projet ou à céder leurs terrains à un promoteur ou investisseur. Dans ces secteurs, les terrains verraient leur taxation augmenter au fil du temps pour rejoindre celle de terrains construits conformément au projet. Cette proposition, qui s’inspire d’exemples étrangers, suppose que le projet soit largement concerté avec les populations concernées et que le propriétaire qui devrait acquitter une fiscalité intégrant la plus-value potentielle du bien soit assuré de pouvoir le réaliser en le cédant à un promoteur ou à la collectivité (un droit de délaissement analogue à celui des ZAC).

Les établissements publics fonciers et les offices fonciers solidaires desserrent à court terme la contrainte foncière, mais seule une politique résolue à long terme de maîtrise foncière conduite par les collectivités peut générer l’offre foncière nécessaire à la satisfaction des besoins. Pour cela, deux mesures pourraient être envisagées.

  • D’une part, financer une politique ambitieuse de réserves foncières en offrant aux collectivités des prêts à quatre-vingts ans sur la ressource du livret A, soit des conditions analogues à celles consenties aux offices fonciers solidaires : une enveloppe de 10 milliards d’euros sur cinq ans.
  • D’autre part, améliorer l’articulation des documents d’urbanisme, à portée réglementaire, avec les programmes locaux de l’habitat qui expriment les objectifs et leur traduction spatiale. Les PLU (plan local d’urbanisme) devraient comporter une étude de réceptivité qui permettrait de vérifier la cohérence entre ces deux documents de planification.

5. Rénovation énergétique des habitats

La transition énergétique qualifie un double mouvement, d’une part de substitution progressive des énergies renouvelables aux énergies fossiles, d’autre part d’économie d’énergie par l’amélioration rapide de l’efficacité énergétique. À l’évidence, il s’agit d’un changement considérable d’ambition et de perspective.

Or, malgré un mouvement accéléré de renforcement des exigences sur la construction neuve[13] et, plus tardivement, sur le parc existant avec la création en 2007 de la règlementation thermique sur le parc existant, et malgré un volume croissant de travaux réalisés sur le parc (pour preuve, sur la période récente, les bons résultats de MaPrimeRénov’[14]), une accélération des réalisations s’impose si notre pays veut respecter ses objectifs globaux de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050.

La question de la stratégie à suivre pour parvenir à « décarboner » le logement à l’horizon 2050 reste donc entière. Pour atteindre l’objectif, deux voies sont possibles et déjà partiellement empruntées.

  1. Décarboner la production d’énergie. Les émissions liées aux consommations dépendent des énergies utilisées pour les usages individuels. C’est ce que rappelle la Commission européenne, qui encourage les États membres à chercher un « équilibre économique entre la décarbonation de l’approvisionnement en énergie et la réduction de la consommation finale d’énergie ». La décarbonation des énergies utilisées dans les bâtiments peut donc s’obtenir par la disparition de la part du charbon, du fioul et du gaz naturel, au profit des énergies renouvelables et de l’électricité d’origine nucléaire. À cet égard, la Suède présente un cas intéressant. Elle a en effet déjà atteint une décarbonation quasi totale des énergies utilisées pour le chauffage par le biais du développement massif des réseaux de chaleur, dont la production n’utilise que très peu d’énergie fossile (il en va de même de la production d’électricité). Évidemment, le succès de cette politique sera d’autant facilité, comme dans le cas de la Suède, qu’elle s’accompagnera d’un fort mouvement de renforcement des normes de performance et d’isolation[15]. En France, en raison de l’importance du parc nucléaire pour la production d’électricité, l’électrification du chauffage permet également de décarboner l’énergie consommée par le logement. À cet égard, le remplacement des chaudières à fioul est une priorité par rapport à l’isolation des logements équipés au chauffage électrique, l’installation de nouvelles chaudières aux énergies fossiles étant vouée à disparaître. Cependant, l’électricité décarbonée (nucléaire ou renouvelable) n’est pas infinie : toute quantité d’électricité bas carbone économisée sert à effacer une production d’électricité fossile sur le réseau européen. Il y a donc bien un intérêt climatique (et social) à faire de la performance énergétique dans les logements chauffés à l’électricité.
  2. Baisser la consommation énergétique des bâtiments, laquelle suppose de lourds investissements sur le parc pour réduire les consommations. Malgré des objectifs ambitieux et des dispositifs qui commencent à monter en puissance, les réalisations ne progressent que lentement.

5.1 Les économies d’énergie procurent des gains faibles pour les ménages

Les interventions visant à baisser les consommations d’énergie sont coûteuses et ne permettent de réaliser que de faibles économies, sauf explosion durable des coûts de l’énergie. Le bénéfice des travaux d’isolation est souvent surévalué par les experts. À titre d’illustration, la fiche de certificat d’économie d’énergie (CEE) décrivant la pose d’une fenêtre ou d’une porte-fenêtre avec vitrage isolant prédit un impact deux fois plus élevé que les économies réellement observées[16]. L’explication de cet écart vient des comportements : on se chauffe peu lorsque la qualité du logement est faible, on se donne plus de confort quand la technique le permet[17].Une étude néerlandaise, à partir d’un échantillon de 200 000 logements, a de même montré l’existence d’écarts substantiels entre les consommations théoriques et les consommations réelles, parfaite illustration de « l’effet rebond ». De la même façon, une étude américaine identifie des économies d’énergie environ 2,5 fois inférieures à celles prédites par le modèle utilisé par les autorités publiques américaines[18]. Les ménages réalisent de fait le plus souvent des travaux d’économie d’énergie pour des raisons de confort et afin de pouvoir mieux se chauffer après travaux. Cela signifie tout de même un gain de confort et de qualité de vie pour des ménages modestes.

À ces facteurs comportementaux, il convient d’ajouter la disproportion entre le coût des travaux et le bénéfice annoncé. On peut le mesurer dans les HLM ayant réalisé des travaux. L’écart est important entre les économies d’énergie réalisées et les coûts associés pour y parvenir (coût des abonnements supplémentaires, entretien des équipements, etc.). C’est même un alourdissement de la quittance qui s’observe dans un nombre significatif de cas[19].

La rentabilité économique des travaux n’est donc pas au rendez-vous quand le coût de l’énergie est faible[20]. Le faible coût de l’énergie qui a prévalu jusqu’à présent n’assure des temps de retour sur investissement acceptables que pour un nombre restreint de travaux. Les études abondent en la matière. On se limitera à une seule citation : « 1 000 euros de travaux ne diminueraient en moyenne la facture énergétique que de 8,4 euros par an. Pour un investissement moyen de l’enquête[21], cela correspond à une diminution de 2,7 % de la facture. La rénovation énergétique est alors loin d’être rentable si l’on s’en tient aux seules économies d’énergie puisque le temps de retour correspondant, c’est-à-dire le nombre d’années nécessaires pour récupérer le coût de l’investissement initial, est de 120 ans[22]. »

En outre, le gain de valeur des biens rénovés n’est pas encore visible. On ne peut pas encore parler de « valeur verte ». C’est ce qui ressort des études de l’association DINAMIC[23], de loin les plus sérieuses en France, qui s’appuient sur un échantillon large. En 2015, l’écart de valeur moyen d’un bien immobilier estimé entre deux évaluations successives (DPE énergie) se situe :

  • en province, à environ 5 % pour les maisons et 3 % pour les appartements ;
  • en Île-de-France, de l’ordre de 1 % quelle que soit la nature du logement.

En 2018, les notaires ont mesuré l’éventuelle dépréciation de logement étiqueté F ou G par rapport à un logement de classe D, ainsi que la possible valorisation des logements étiquetés A ou B. L’étude montre que l’effet négatif d’une mauvaise étiquette pour une maison reste presque toujours plus important que l’effet positif d’une bonne étiquette, A ou B. Pour les appartements, l’effet étiquette se révèle nettement moins significatif. Au final, l’impact sur le prix des étiquettes énergétiques se révèle d’autant plus faible que le niveau de tension du marché est important. En zone tendue, le sujet des charges est secondaire par rapport à d’autres critères ; c’est seulement lorsque le candidat à l’accession a le choix qu’il peut refuser ou négocier le prix, ce qui peut expliquer que la « valeur verte » ne morde pas sur les agglomérations de Paris et Lyon. C’est donc en zones rurale et périurbaine, les moins tendues, que la valeur verte jouerait pour les maisons étiquetées F ou G (entre 9 % et 13 % moins chères) que celles de la classe D, contre seulement 5 % pour les zones tendues (A et B).

Reste encore à savoir si la faible valeur d’un bien naît du fait qu’il est globalement dégradé ou de sa seule mauvaise étiquette énergétique… Ces réserves montrent que les estimations de la « valeur verte » sont plus que fragiles. Mais, surtout, l’espoir que les gains de valeur permettraient de « couvrir » les coûts des travaux d’efficacité énergétique est un vœu pieux. Les calculs montrent a contrario que la « valeur verte » ne permet que rarement de compenser le coût des travaux de rénovation énergétique associés[24].

Au total, que l’on considère la valeur verte ou le gain sur facture, les travaux d’économies d’énergie ne se révèlent économiquement rentables qu’à la marge[25]. Le renchérissement des prix de l’énergie, soit en raison des investissements à venir, soit en raison des tensions sur certains approvisionnements (gaz, pétrole), peut en partie changer l’équation, même en l’absence d’intervention fiscale (type taxe carbone). En tout état de cause, les ménages ne peuvent supporter seuls le coût de travaux dont ils ne verront pas la rentabilité dans des délais raisonnables. C’est pourquoi des aides publiques devront orienter les investissements. Encore faut-il bien les calibrer et les évaluer.

5.2 L’évolution par les normes

Un tel constat économique, compte tenu de l’urgence des enjeux climatiques, sauf à envisager une hausse spectaculaire et durable du prix de marché de l’énergie, justifie une approche en termes d’obligations, approche qui se doit d’être prudente puisqu’elle ne peut ignorer le coût pour les ménages, en particulier les plus modestes d’entre eux. Il en découle qu’un soutien financier puissant de la collectivité apparaît indispensable. L’instauration d’une taxe carbone à taux progressif répondrait à cette exigence, sous réserve évidemment que le produit soit bien affecté au soutien des opérations de travaux d’économie d’énergie. Chacun connaît l’histoire de la première tentative d’instaurer une telle taxe et le traumatisme que fut le mouvement des Gilets jaunes en ce domaine.

C’est donc le choix de l’obligation qui a été ouvert dans la loi « Climat et résilience », en suivant les recommandations de la Convention citoyenne pour le climat : le gel des loyers des logements classés F ou G par le diagnostic de performance énergétique (DPE) est annoncé pour l’année 2022. Ensuite, la mise en location de ceux qui relèvent de la classe G sera interdite en 2025, avant que la mesure s’étende à la classe F en 2028 puis à la classe E en 2034. Les locations situées dans des copropriétés seront néanmoins de fait dispensées de cette obligation, par impossibilité d’imposer des travaux dans une copropriété. La France compte 4,8 millions de logements considérés comme des « passoires thermiques » (logements les plus énergivores classés F ou G dans le diagnostic de performance énergétique) dont 2 millions en location. En 2028, on ne pourra plus proposer à la location de telles passoires thermiques. L’exigence d’un certain niveau de performance énergétique sera donc introduite dans la notion de logement décent. On retrouve ici le souci d’agir par paliers. Néanmoins, le risque est de retirer du marché des biens accessibles notamment aux revenus modestes. Au final, tout est affaire de calendrier et de graduation des obligations. 

Il faut donc combiner une hausse maîtrisée du coût de l’énergie avec des obligations, des accompagnements et une redistribution vers les ménages modestes. Une taxe supplémentaire sur la consommation d’énergie pourrait en effet être redistribuée aux propriétaires les plus modestes, et ce sous forme d’aide au financement des travaux : elle aurait alors un double effet, direct – sur les propriétaires aisés, qui auraient dès lors intérêt à réaliser des travaux – et indirect – sur les plus modestes, qui en auraient ainsi les moyens. Cette combinaison permettrait de viser, avec des chances sérieuses de les atteindre, des objectifs ambitieux d’amélioration de la performance énergétique du parc de logements. Seule en effet la mise en place d’aides massives et ciblées est à même de rendre supportable une obligation de travaux, à condition toutefois qu’elle se conjugue à un effort de formation et de productivité de l’appareil de production (notamment les petits artisans).

L’accès à un professionnel formé pour opérer une rénovation globale reste difficile pour les particuliers : les risques d’inflation des prix et de qualité insuffisante des travaux sont réels. Or, l’évaluation de la qualité de la dépense est essentielle. Aujourd’hui, on ne dispose pas d’études permettant de mettre en relation les subventions accordées par le dispositif MaPrimRénov’ et une éventuelle amélioration de la qualité énergétique des bâtiments. Il est probable que les ménages n’engagent pas des travaux importants sans en espérer un réel gain. Cependant, ils ne font ce type de travaux qu’une seule fois dans leur vie, si bien qu’il n’existe pas de retour d’expérience. L’évaluation précise n’est pas faite, faute souvent de disposer d’un diagnostic antérieur aux travaux. Les certificats d’économie d’énergie (CCE) sont émis dans le cadre d’un autre dispositif public, qui n’est pas raccordé à MaPrimRénov’.

Taxation des loyers des passoires non rénovées 

L’interdiction de louer les logements privés les plus énergivores risque d’avoir des conséquences très lourdes : une partie du parc risque de perdre son statut locatif, les normes de décence n’étant pas opposables aux propriétaires occupants. Dans les immeubles collectifs, l’interdiction de louer peut être contournée si la copropriété refuse de réaliser les travaux.

Une partie de ce parc relève de politiques de lutte contre le logement indigne, mais ce n’est qu’une partie : on estime à 500 000 ou 600 000 le nombre de logements indignes, et le nombre de passoires est de l’ordre de 5 millions, dont 2 millions de locataires, essentiellement dans le parc privé.

En complément des contraintes réglementaires, pour accélérer la réalisation de travaux avant les dates butoirs de la réglementation, on pourrait imaginer une taxe sur les logements passoires, dont le produit serait reversé à un fonds alimentant l’ANAH (Agence nationale d’amélioration de l’habitat). Seraient concernés les logements dont les émissions de GES seraient supérieures à l’étiquette E. Le taux serait calculé en appliquant au dépassement d’émissions le montant tutélaire du CO2, soit 250 €/tonne. Le risque de répercussion de cette taxe sur les loyers payés par les locataires sera limité du fait que ceux-ci ne peuvent évoluer que de manière plafonnée en cours de bail et à la fin du bail en zone tendue lors du renouvellement. En 2018, la répartition par milliers de logements locatifs privés était la suivante d’après l’étude du Conseil général de l’environnement et du développement durable de mai 2021 :

Classe

A

B

C

D

E

F

G

Tous locataires privé

126

305

1 023

2 319

1 887

977

696

Appartement

77

234

744

1 679

1 329

697

509

Maison

49

71

278

639

558

280

187

 

Hypothèses de calcul

Si l’on se situe par rapport à la valeur moyenne de 50 kg CO2/m2/an : le surplus est de 50 kg CO2*70 m2 = 3,5 t de CO2 par an pour un logement en G, 20 kg en F soit 1,4 t. ; en valorisant la tonne de CO2 à 250 €/tonne, la taxe serait de 875 € pour un logement classé en G, 350 € pour un logement classé en F.

Le produit maximal serait de 700 000*750 € = 525 millions d’euros pour les logements classés en G et 350 millions d’euros pour les logements F.

Cette taxe carbone aurait le mérite de ne s’appliquer qu’aux seuls logements locatifs privés et alimenterait un fonds destiné à subventionner les travaux, notamment sous forme d’une aide aux syndicats de copropriété.

Ce n’est qu’un ordre de grandeur mais, désormais, avec le registre de la copropriété et l’amélioration du DPE, on devrait assez facilement vérifier ces hypothèses et mettre en œuvre une stratégie de traitement de ces logements.

La rénovation énergétique du parc social semble plus facile à mener. Une industrialisation des travaux de rénovation peut s’y déployer. La décision de mener les travaux relevant du bailleur social est plus facile à prendre, de même qu’un suivi professionnel des travaux.

Propositions

  • Moduler les obligations en fonction de la composante GES : les logements chauffés à l’électricité ne sont pas prioritaires. En revanche, l’intervention sur les équipements les plus polluants comme les chaudières au fioul sont prioritaires.
  • Inciter à la sobriété en agissant sur le coût de l’énergie progressif au-delà d’un certain seuil de consommation. Le tarif de l’énergie pourrait être fixé de manière progressive, en augmentant son prix de façon exponentielle, avec une incidence sur le montant des loyers reversés à son propriétaire dans le cas d’une location. L’objectif est d’éviter le gaspillage en produisant un choc, accompagné d’aides pour les plus pauvres. Cette action agit sur la consommation réelle et évite les biais entre consommation projetée et réelle des logements BBC (bâtiment basse consommation)[26]. La consommation énergétique d’un logement deviendrait ainsi un enjeu important avec une incidence directe sur le marché de location et de vente. Autre piste, il serait imaginable de considérer un quota d’énergie annuel par personne de manière à promouvoir l’égalité. Au-delà de l’utilisation de ce quota, les prix augmentent.

Les gains réalisés serviraient à financer des aides individuelles de transformation respectant les spécificités architecturales des bâtiments existants et à rénover les bâtiments publics.

Annexes

Les membres du groupe Logement :

Sabine Baïetto-Beysson, inspectrice générale au Conseil général de l’environnement et du développement durable  

Jean Bosvieux, économiste, animateur du site Politique du logement (politiquedulogement.com)

Éric Cassar, fondateur et architecte principal, Arkhenspaces

Bernard Coloos, économiste

Philippe Crouzet, président d’associations d’insertion

Julien Damon, professeur associé à Sciences Po

Anne-Claire Davy, urbaniste à Institut Paris Région

Claire Delpech, responsable Habitat, Logement à Intercommunalités de France

Guillaume Ginebre, Action Tank Entreprise et pauvreté

Frédérique Lahaye de Fréminville, juriste, coordinatrice du pôle logement de Terra Nova

Anne-Katrin Le Doeuff, urbaniste 

Marc-Olivier Padis, directeur des études de Terra Nova

Clémentine Paliotta, étudiante, stagiaire à Terra Nova

Fabrice Peigney, urbaniste et sociologue

Sandra Moatti, économiste, directrice de l’IHEDATE, rédactrice en chef de l’Économie politique 

Nathalie Reuland, juriste, haut fonctionnaire 

Bernard Vorms, économiste

Auditions : 

18 octobre 2021, Sébastien Soleille, responsable Rénovation énergétique et environnement chez BNP Paribas

6 septembre 2021, Géraldine Chavrier, professeur des universités en droit public 

21 juin 2021, Daniel Béhar, géographe et urbaniste 

31 mai 2021, Gilles Bouvelot, directeur général de l’établissement public foncier d’Île-de-France

17 mai 2021, Michel Platzer, ATD Quart-Monde

26 avril 2021, Nicolas Binet et Yves Laffoucrière, auteurs de La vie plus belle ? Retour sur 20 ans de rénovation urbaine, « Bibliothèque des territoires », Série « Les rencontres Palladiennes », Éditions de l’Aube, 2020

12 avril 2021, Jean Bosvieux et Bernard Coloos, auteurs de Logement social : les enjeux du modèle français, Institut pour l’innovation économique et sociale (2IES), 2021 

29 mars 2021, Frédéric Paul, auteur de HLM mon amour. Un combat pour la solidarité, Éditions de l’Aube, 2020

8 mars 2021, Philippe Crouzet, à propos de la note des Gracques sur le logement 

22 février 2021, Julien Damon, auteur de La Question SDF, PUF, collection « Quadrige », réédition 2021


[1]Ce sont les termes du premier article de la « loi Besson » sur le droit au logement (1990) : « Garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l’ensemble de la nation. Toute personne éprouvant des difficultés particulières, en raison notamment de l’inadaptation de ses ressources ou de ses conditions d’existence, a droit à une aide de la collectivité, dans les conditions fixées par la présente loi, pour accéder à un logement décent et indépendant et s’y maintenir. » Le préambule de la Constitution de 1946 déclare notamment : « La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement. Elle garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs. »

[2] Voir par exemple Jean-Claude Driant, « Assumer les contradictions apparentes du logement », Adequation, 9 novembre 2021 ;

https://media.adequation.fr/immo/travailler-ensemble/jean-claude-driant-assumer-les-contradictions-apparentes-de-la-politique?utm_source=Sarbacane&utm_medium=email&utm_campaign=Newsletter%20n%C2%B017%20-%2016/11/21

[3]https://agence-cohesion-territoires.gouv.fr/crte

[4] Daniel Béhar et Aurélien Delpirou, « Après la décentralisation. Quinze propositions pour refonder l’action territoriale », Terra Nova, janvier 2021.

[5]« Logement : sortir du piège du malthusianisme », Les Gracques, 11 février 2021 ;

http://lesgracques.fr/logement-sortir-du-piege-du-malthusianisme/

[6] Voir le rapport sur la « Ville compacte », Terra Nova, janvier 2022.

[7] Voir Matthieu Angotti, « La solidarité à l’épreuve de la coopération territoriale », Terra Nova, 21 avril 2020.

[8] Voir Julien Damon, « Héberger, c’est loger ? Aux frontières du logement ordinaire », novembre 2021. Voir aussi Julien Damon, La question SDF, Paris, PUF, coll. « Quadrige », nouvelle édition, 2020.

[9] En Île-de-France, ce sont 41 000 chambres d’hôtel qui sont financées chaque nuit pour les sans-domicile. Dans la région 20 % de l’offre hôtelière est aujourd’hui utilisée dans ce sens. Voir Julien Damon, « Héberger, c’est loger ? », rapport cité, p. 15.

[10] Voir le rapport inter-associatif « Les difficultés d’accès au parc social des ménages à faible ressources », juin 2020.

[11] Voir « Les loyers HLM et l’accueil des plus pauvres : plus de liberté pour plus de responsabilités », Terra Nova, 21 septembre 2021.

[12] Voir le rapport de Cour des comptes : https://www.ccomptes.fr/fr/publications/lagence-nationale-pour-la-renovation-urbaine-anru-et-la-mise-en-oeuvre-des-programmes

[13] Non négligeables, puisque de 1974 à aujourd’hui, les consommations énergétiques d’un logement neuf, toutes choses égales par ailleurs, ont été divisées par 9. Les efforts, tant sur le neuf que sur le parc existant ont permis, sur la période 1990–2015, une stabilisation des émissions alors même que le parc croissait de plus d’un quart.

[14] « Le gouvernement a fixé de nouveaux objectifs à l’Anah avec 700 000 à 800 000 primes distribuées en 2021, contre 500 000 initialement prévues. Par ailleurs, le budget prévisionnel alloués à MaPrimeRénov’ a été augmenté à 2,4 milliards d’euros, contre 1,7 milliard en début d’année », Anah, communiqué de presse, 9 juillet 2021.  

[15] Rapport du HCC : « Rénover mieux. Leçons d’Europe ». Jean Bosvieux, janvier 2021, Politiquedulogement.com

[16] Gaël Blaise et Matthieu Glachant, « Quel est l’impact des travaux de rénovation énergétique des logements sur la consommation d’énergie ? Une évaluation de poste sur données de panel », L’énergie, n° 646 septembre-octobre 2019, p. 46–60. La citation est tirée d’une dépêche du 18 novembre 2019 : « La rénovation thermique réduit-elle vraiment votre facture d’énergie ? »

[17] OTB Research Institute 2013, « Theorical vs actual energy consumption of labelled dwellings in the Netherlands : discrepancies and policy implication » par D. Majcen, LCM Itard, H. Visscher, Energy Policy, vol. 54, p. 125–136.

[18] Matthieu Glaschant, op. cit.

[19] Observatoire de la performance énergétique du logement social, USH, septembre 2014.

[20] Voir à ce sujet pour plus de détails sur les objectifs et résultats, Bernard Coloos, « Que Penser de la transition énergétique ? », 2016, politiquedulogement.com.

[21] Il s’agit de l’enquête maîtrise de l’énergie ou « 10 000 ménages » réalisée chaque année de 2000 à 2013 par TNS – Sofres pour le compte de l’ADEME.

[22] Matthieu Glachant, op. cit.

[23] Une première fois en avril 2013 puis chaque année ou presque jusqu’en 2018.

[24] Bernard Coloos, « Valeur verte : mythe ou réalité ? 15 questions de politique du logement », politiquedulogement.com, 2020.

[25] Un tel schéma d’analyse fonctionnerait, au dire de nombre de professionnels, dans le non-résidentiel en général, et les bureaux en particulier. Ce point mériterait approfondissement et validation. On notera que, faute de résultats suffisants, le gouvernement s’est néanmoins décidé, après avoir hésité depuis 2009, à publier un décret au Journal Officiel le 10 mai 2017, qui crée une obligation de travaux d’amélioration de performances énergétiques afin de réduire les consommations énergétiques dans les bâtiments à usage tertiaire.

[26] La mesure de la dépense énergétique demande de pouvoir collecter à la fois les dépenses de gaz, fioul et électricité et de la corréler à la surface de l’habitation.

La valeur tutélaire du carbone est de 250 €/tonne. À appliquer à ce raisonnement :

x €/kWh jusqu’à une consommation de 50 kWh/m² et par an

2 x €/kWh de 50 kWh/m² et par an jusqu’à 75 kWh/m² et par an

4 x €/kWh de 75 kWh/m² et par an jusqu’à 125 kWh/m² et par an

8 x €/kWh de 125 kWh/m² et par an jusqu’à 175 kWh/m² et par an

16 x €/kWh au-delà de 175 kWh/m²

Et, pour inciter aussi les propriétaires non-occupants à réaliser les travaux adaptés, il conviendrait qu’une part (pourcentage à définir) des dépenses énergétiques au-delà d’une limite à définir (par exemple de 75 kWh/m²) soient déduites du montant du loyer pour son locataire.

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