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Revue de presse

L’Esprit Public avec Thierry Pech : élections Européennes : défiance ou indifférence ? / Soldats tués au Sahel : la France en quête d’héroïsme ?

L’analyse politique de la semaine du 13 mai avec les journalistes Gérard Courtois et Christine Ockrent, le directeur général du think tank Terra Nova Thierry Pech, le directeur de la Fondation pour l’innovation politique Dominique Reynié.
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Première partie : Elections Européennes : défiance ou indifférence ?

Dans une semaine, à cette heure-ci, les bureaux de vote seraient ouverts… On irait voter, déjà ou enfin, pour ces élections européennes qui avaient donné lieu à une bien étrange campagne, tardive et plutôt confuse. Ces élections intervenaient dans un contexte historique de ce qu’il fallait appeler défiance et/ou indifférence. L’Europe payait ainsi des décennies durant lesquelles des dirigeants français disaient « Bruxelles nous impose », pour évoquer des décisions auxquelles ils avaient -de fait- participé. Tant pis pour elle, cette Europe qui garantissait aussi ce bien si précieux qui s’appelait la paix, tant pis pour l’Europe qui avait permis à tant d’états membres de voir s’améliorer leurs conditions démocratiques et économiques. Tant pis pour l’avenir aussi, car sans l’Union européenne, que serait demain chacun des pays qui la constituait, replié derrière ses frontières ? Que pèserait, seul, un état-membre, dans le tourbillon de la mondialisation et face à la concurrence de grandes puissances comme les Etats-Unis, la Chine ou l’Inde ?

En France comme dans les pays voisins, l’abstention s’annonçait massive : six Français sur dix disaient les sondages, un taux d’abstention supérieur à celui des dernières européennes, en 2014. Il fallait dire aussi que le débat public des dernières semaines ne les avait pas beaucoup aidés. Les Gilets Jaunes, le feuilleton du grand débat national, l’attente des annonces d’Emmanuel Macron, l’incendie de Notre Dame de Paris, l’affaire des otages, avaient occupé tout l’espace. Sans oublier l’inévitable jeu des partis qui voulaient faire de cette élection un référendum pour ou contre le pouvoir en place. Bref, nationalisation, instrumentalisation des enjeux, paresse des politiques à aborder les vrais sujets, souvent complexes qui faisaient l’Europe, paresse médiatique aussi. Un rapport de la fondation Jean Jaurès ayant récemment révélé que l’actualité de l’UE ne représentait, période électorale, que 3% des sujets dans les journaux télévisés français.

Alors à la fin, que resterait il de cette campagne ? Les bourdes et autres erreurs de jeunesse de Nathalie Loiseau et l’inconnu de ce groupe parlementaire dans lequel siégeraient les eurodéputés marcheurs, Marine Le Pen qui ne voulait plus du Frexit mais parlait désormais « de concert des Nations » avec ses nouveaux alliés nationaux-populistes, la droite revigorée derrière François-Xavier Bellamy mais qui n’avait pas clairement dit si elle voulait à l’avenir plus ou moins d’Europe, la division des gauches impuissantes à proposer une nouvelle voie sociale ET écologique, et surtout le bruit assourdissant des critiques faites à l’Europe qui rendait inaudible ses éventuels bienfaits. Alors il fallait plus que jamais tendre l’oreille pour continuer d’entendre Robert Schumann le 9 mai 1950, donnant le coup d’envoi d’une aventure européenne qui, avec les années, était devenue comme sa voix : fragile et abîmée.

Deuxième partie : Soldats tués au Sahel : la France en quête d’héroïsme

Il écrivait juste cet éditorialiste du Parisien, qui soulignait le contraste entre les « bateleurs politiques, polémistes compulsifs et experts en coup de gueule saturant l’espace public » et le silence soudain, le visage dissimulé des forces spéciales françaises portant, mercredi matin, dans la cour de l’Hotel des Invalides à Paris, les cercueils drapés bleu blanc rouge de leurs frères d’armes tombés au combat, Deux soldats devenus héros de la France au Burkina Faso, tués lors d’une opération visant à libérer des otages dont deux touristes français. Le silence après quelques jours de polémiques tellement françaises sur le thème : la valeur d’une vie : celle de deux touristes imprudents – ou pas- d’aller se balader dans le dangereux Sahel, et celle de deux admirables soldats qui connaissaient les risques du métier.

Mardi pourtant la France avait serré les rangs, retransmission télévisuelle, grande solennité, discours présidentiel particulièrement réussi, émotion collective devant les  cercueils, les chants militaires, les larmes et les accolades entre familles des défunts et couple présidentiel. 

Que disait donc de notre pays cette armée qui faisait son retour dans le cœur des Français, et ces nouvelles figures du héros qui s’appelait Arnaud Beltrame, Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello ?

L’armée n’avait jamais été aussi populaire, avec 90% d’opinions positives quand tant d’autres institutions étaient décriées, et les signes extérieurs du patriotisme, drapeau, marseillaise semblaient retrouver une nouvelle jeunesse, tandis que l’on comptait de nombreux candidats au statut de réservistes. Des armées tellement consensuelles qu’elles servaient aussi la popularité fragile des présidents, François Hollande par exemple n’avait jamais été aussi populaire que lorsqu’il avait pris la décision d’intervenir au Mali ou pendant les attentats terroristes de 2015. Comme si les valeurs de courage et d’abnégation, mais aussi de discrétion, fascinaient….fascinaient une époque qui était tout le contraire !   

Références / conseil de lecture : 

  • Nicolas Normand, Le Grand livre de l’Afrique,  Eyrolles
  • Musique de fin : Rokia Traoré, Dream mandé – bamanan djourou
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