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Revue de presse

La primaire PS, une révolution de la vie politique française?

Pour Thierry Pech, directeur général de Terra Nova, l’organisation d’une primaire avant l’élection présidentielle est devenue incontournable. Sauf en 2017, si Hollande se lance de nouveau…
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En 2011, près de 3 millions de sympathisants de gauche s’étaient déplacés pour désigner, lors d’une primaire ouverte, leur champion, François Hollande. Ce dernier devrait logiquement se représenter en 2017, sans avoir à repasser par la case primaire. Du côté de l’UMP, l’idée a fait son chemin. Le parti d’opposition a quasiment calqué les modalités d’organisation de la primaire socialiste pour mettre sur pied son propre scrutin. Il aura lieu fin 2016.
Quatre ans après l’expérience socialiste, le think tank, Terra Nova, publie sur son site une note intitulée, "Primaires : et si c’était à refaire ?".
Challenges.fr a interrogé Thierry Pech, le directeur général de Terra Nova, co-auteur de l’étude.

La primaire du parti socialiste de 2011 a-t-elle un succès ?

L’organisation d’une primaire ouverte et transparente a été une réponse directe aux querelles internes qui ont agité pendant dix ans le parti socialiste. Cette procédure a permis d’imposer le vainqueur comme candidat à l’élection présidentielle de façon incontestée. Ce dernier s’est vu investi d’une légitimité populaire lui permettant de pouvoir affronter celle du président sortant. La primaire de 2011 a également permis l’expression de toute les sensibilités au sein du PS, de Manuel Valls à Arnaud Montebourg. Mais une fois le scrutin passé, tous les candidats se sont rangés derrière le vainqueur. En clair, la primaire a hiérarchisé les positions de chacun, sans pour autant les effacer. Elle a permis de gérer pacifiquement des débats internes. Par ailleurs, elle semble avoir explicité les lignes de front du débat politique à l’intérieur d’un parti, davantage que ne l’avait fait le Congrès de Reims en 2008. Les clivages qui se sont dessinés en 2011 préfiguraient ceux qui allaient agiter la majorité actuelle. Au final, la reprise par l’UMP des modalités d’organisation de la primaire socialiste est la meilleure preuve de réussite de ce mode de désignation d’un candidat pour une élection présidentielle.

La primaire a aussi permis à des outsiders de se révéler ?

C’est une rampe de lancement pour des petits candidats. Les meilleurs exemples sont Manuel Valls et Arnaud Montebourg. En se présentant, ces deux outsiders en 2011 ont pu s’installer dans la majorité. D’ailleurs, certains à l’UMP, comme Bruno Le Maire ou Nathalie Kosciusko-Morizet l’ont très bien compris. S’ils veulent concourir à la primaire de 2016, c’est moins par espoir de l’emporter que pour peser politiquement dans le futur. C’est pour cela que la question du nombre de soutiens nécessaires pour pouvoir participer à la primaire agite à droite : il ne faut pas mettre la barre trop haut si l’on veut ouvrir la porte aux outsiders. Par ailleurs, ce qui est vrai au niveau national l’est aussi au niveau local. Il faudrait que les primaires soient rendues possibles dans les élections municipales ou départementales. Ce qui ne veut pas dire que cela doit être obligatoire. Les instances nationales d’un parti pourraient, par exemple, décider de consulter les électeurs dans les endroits où il y a besoin de renouveler le personnel politique ou pour trancher des rivalités locales.

Peut-on imaginer une primaire en 2017 à gauche ?

François Hollande bénéficie, du fait de sa position, d’une forte légitimité institutionnelle. Il est par nature président de tous les Français. Il serait donc curieux, s’il estime être en situation de se porter à nouveau candidat, qu’il redescende dans la lice pour croiser le fer avec d’autres socialistes. Il est donc a priori le candidat naturel du parti socialiste pour 2017, même si les statuts du PS précisent, pour l’instant, que l’organisation d’une primaire est obligatoire pour désigner le candidat de la gauche. Jusqu’à présent, il n’avait pas envisagé la situation d’un président sortant qui se représente pour un second mandat. Au final, une primaire en 2017 à gauche aboutirait sans doute à affaiblir François Hollande et le parti lui-même. De plus, un président de la République ne peut pas se permettre de battre le pavé pendant 8 mois.
En revanche, le tripartisme croissant de la vie politique française, avec la percée du Front national, confère un intérêt croissant à des primaires de coalition, c’est-à-dire des primaire auxquelles participent plusieurs formations politiques pour désigner un candidat commun. Car, par exemple, la multiplicité des candidatures à gauche ferait courir le risque à François Hollande de ne pas pouvoir se qualifier pour le second de l’élection présidentielle. Organiser une primaire de coalition pourrait donc prendre tout son sens dès lors que le président sortant aurait reçu l’investiture de son parti d’origine. Pour que les « petites » formations politiques soient motivées, des accords d’investiture législative ultérieurs pourraient être conditionnés à leur participation à cette primaire. Ils pourraient d’ailleurs prendre ses résultats pour base de négociation.

L’organisation d’une primaire ne vient-elle pas dépouiller les derniers attributs de pouvoir d’un parti politique ?

Jusqu’en 2011 les adhérents du Parti socialiste pouvaient désigner eux-mêmes leur candidat à l’élection présidentielle. L’organisation d’une primaire leur a retiré cette possibilité. Mais les militants l’ont plutôt bien vécu : ils ont participé de façon très active à l’organisation de la primaire. Pour l’essentiel d’entre eux, ils étaient plutôt fiers de porter une telle innovation démocratique. Pour ce qui est du parti lui-même, il a été dépossédé de son pouvoir d’‘imposer’ son programme à un candidat. Mais ce mouvement est en réalité beaucoup plus ancien. Au total, l’organisation d’une primaire n’est pas la raison du malaise des partis politiques, mais plutôt une réponse à ce malaise. Mieux : elle montre le chemin d’une redéfinition possible de leur rôle comme animateurs du débat politique et instruments de structuration des affrontements à venir. 

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