Pour un Pacte bleu durable : vers une transition maritime de la France
Après New York (2017) et Lisbonne (2022), la France et le Costa Rica co-organisent la 3e Conférence des Nations unies sur l’Océan (UNOC3) à Nice, du 9 au 13 juin 2025. Dix ans après l’Accord de Paris sur le climat, la France, responsable du deuxième domaine maritime mondial, doit saisir cette occasion pour affirmer son ambition en faveur de la protection et la régénération des mers et océans.


11 millions de km² de zone économique exclusive (ZEE), s’étendant sur trois océans, abritant 16 écorégions marines, 10 % des récifs coralliens mondiaux et 20 % des atolls planétaires, 20 000 km de côtes : le territoire maritime de la France est un atout exceptionnel pour notre pays. Pourtant, la mer reste marginale dans l’imaginaire national français et, encore trop souvent, à l’écart de nos politiques publiques.
À l’heure où les mers et océans deviennent un champ de bataille écologique, commercial et diplomatique, la France doit cesser de tourner le dos à cet horizon porteur de défis et d’opportunités. C’est l’objet du Pacte bleu durable ici proposé, structuré en quatre ambitions majeures : réinscrire la mer au cœur du projet national, bâtir une économie bleue décarbonée, passer de la protection à la régénération des écosystèmes marins et conforter la place de la science, de la diplomatie et des territoires dans la fabrique des politiques maritimes.
Le premier enjeu est de donner corps à un récit maritime qui « embarque » citoyens, acteurs économiques et institutions publiques : la tenue à Nice de la 3ᵉ Conférence des Nations Unies pour les Océans (UNOC 3), en juin 2025, doit devenir un moment fondateur. Sur le modèle de la COP21, cet événement historique pourrait permettre de renforcer la gouvernance des mers et océans à tous les échelons – international, européen, national et territorial. La France se doit d’être à l’avant-garde et à la hauteur de ses ambitions : ainsi, un « super-ministère » délégué à la Mer et aux Océans, à la Transition maritime, aux Ports et Littoraux, à la Pêche et aux Énergies marines, rattaché à Matignon et doté d’un pouvoir d’arbitrage interministériel, mériterait de voir le jour. Il pourrait s’appuyer sur le Secrétariat général de la Mer, administration déjà existante, pour piloter et coordonner les politiques publiques maritimes dans toutes leurs dimensions. Cette vision politique doit s’accompagner d’un « Pacte Mer-Régions » structurant un cadre partenarial entre l’État et les collectivités littorales, facilitant le déploiement de contrats de transition maritime locaux, afin de faire émerger une culture maritime partagée dans les territoires.
Le deuxième volet vise la transition bleue d’une économie maritime, aujourd’hui encore trop déconnectée des impératifs écologiques. Le transport maritime, responsable de 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre et désormais intégré au système d’échange de quotas carbone européen (ETS) depuis 2024, doit accélérer vers une cible de –30 % de CO₂ d’ici 2030 en France, notamment grâce à la réduction de la vitesse des navires, au développement du recours à des carburants marins alternatifs et à la propulsion vélique. Ces efforts mériteraient d’être soutenus et financés à l’aide d’un « Fonds Bleu ». Les ports, hubs industriels et logistiques, doivent être massivement et rapidement électrifiés à quai, tandis que des initiatives locales – par exemple à Dunkerque et Marseille-Fos – montrent la voie vers des zones industrialo-portuaires plus respectueuses de l’environnement. Parallèlement, la filière des énergies marines renouvelables (EMR), prometteuse – 45 000 à 130 000 TWh/an de potentiel à l’échelle globale – reste entravée dans son développement sur le terrain, malgré l’émergence d’une démarche de planification maritime.
Au-delà du développement durable, l’enjeu écologique exige de passer de la protection à la régénération de nos mers et océans, véritables « poumons bleus » de la planète. La préservation des milieux marins est essentielle et doit être renforcée : si 33 % des eaux françaises sont classées en aires marines protégées (AMP), moins de 4 % sont strictement « no-take » et autorisent encore chalutage et extraction, diminuant l’efficacité du dispositif de protection. Il convient ainsi d’harmoniser la définition des zones de protection forte selon les standards UICN, de fixer un objectif de 10–15 % d’AMP strictes d’ici 2030 et de renforcer la gouvernance locale des AMP, grâce à un suivi régulier d’indicateurs biologiques. Parallèlement, les pouvoirs publics devraient sanctuariser les grands fonds marins, en instaurant un moratoire de 10 à 15 ans sur l’exploitation minière abyssale et intensifier la recherche sur ces écosystèmes fragiles. La lutte contre la pollution plastique, qui déverse chaque année des millions de tonnes de déchets et microplastiques, doit être amplifiée via un traité international contraignant couvrant tout le cycle de vie du plastique.
Enfin, une gouvernance bleue efficace repose sur une diplomatie océanique pionnière et une science indépendante : la France, pays hôte de l’UNOC 3, doit promouvoir la création d’un « GIEC des océans » pour garantir la neutralité de l’expertise scientifique, soutenir l’entrée en vigueur du traité sur la haute mer (BBNJ), tout en diffusant une culture maritime à travers les programmes scolaires et les lieux de médiation scientifique. Du global au local, cette nouvelle gouvernance bleue permettra d’associer toutes les parties prenantes du fait maritime.
Grâce aux synergies entre sciences et recherche, pouvoirs publics, territoires, acteurs économiques, associations – et, en définitive, par la mobilisation de la société civile dans son ensemble – ce Pacte bleu durable permettra de faire de nos mers et océans un véritable horizon de transformation systémique pour la France et l’Europe, où écologie, économie et souveraineté vont de pair.
Introduction
« La mer est tout ! (…) C’est l’immense désert où l’homme n’est jamais seul, car il sent frémir la vie à ses côtés. La mer n’est que le véhicule d’une surnaturelle et prodigieuse existence ; elle n’est que mouvement et amour ; c’est l’infini vivant (…). La mer est le vaste réservoir de la nature. C’est par la mer que le globe a pour ainsi dire commencé, et qui sait s’il ne finira pas par elle ! »[1]
Pourtant, aujourd’hui encore, la France est une puissance maritime qui s’ignore. Son territoire s’étend sur trois océans, mais la mer ne figure qu’en marge de notre récit national. À l’heure où l’espace maritime devient un champ de bataille écologique et diplomatique, sur fond de guerre commerciale internationale, continuer de tourner le dos à la mer n’est plus tenable. D’autant plus que 2025 a été déclarée « Année de la Mer » par le Gouvernement[2].
Le territoire maritime français, le deuxième au monde si l’on tient compte de sa zone économique exclusive (ZEE) de 11 millions de km² et de nos Outre-mer, s’étend sur tous les océans et confère à notre pays une responsabilité à l’échelle planétaire. Une part importante de la biodiversité marine mondiale se trouve dans les eaux françaises : nos territoires d’Outre-Mer abritent 16 écorégions marines couvrant environ 10 % des récifs coralliens et lagons mondiaux, ainsi que 20 % des atolls de la planète[3]. Pourtant, cette richesse marine peine à devenir source de transformation écologique et de souveraineté économique.
Ce paradoxe est d’autant plus marquant que la mer n’est plus une promesse d’infini, mais un espace tangible confronté à nos limites planétaires. Le secteur maritime est un pilier essentiel de l’économie mondiale, facilitant plus de 80 % du commerce international en volume[4]. Les océans abritent également des ressources naturelles cruciales et jouent un rôle vital dans la régulation du climat. La mer représente un immense puits de carbone, un régulateur climatique global, un réservoir de solutions pour l’atténuation et l’adaptation aux bouleversements en cours.
Cependant, cette importance économique s’accompagne d’impacts environnementaux significatifs, notamment en termes d’émissions de gaz à effet de serre, de pollution marine et de dégradation des écosystèmes. La mer chauffe, s’acidifie, monte. Elle se remplit de plastiques, se vide de poissons, se fragilise sous l’effet des activités humaines. Nos espaces maritimes et océaniques sont à la fois victimes, témoins et acteurs des dérèglements climatiques de notre temps.
Dans ce contexte, la tenue de la 3ᵉ Conférence des Nations Unies pour les Océans (UNOC 3) à Nice en juin 2025 représente une opportunité politique majeure. À l’image de ce que fut la COP21 pour le climat, elle doit permettre de redéfinir la gouvernance des mers et océans à l’échelle internationale. En appelant récemment à la création d’un « GIEC des océans », Emmanuel Macron a ouvert une brèche : il revient désormais à la France de transformer cette inspiration en une politique concrète et coordonnée.
Pour réussir ce virage, il est indispensable de dépasser la vision fragmentée qui cantonne la politique maritime à un simple appendice du ministère de l’Écologie ou des Transports. Elle incarne un enjeu de transition pluridimensionnelle – énergétique, économique et territoriale – qui exige des moyens dédiés, une vision à long terme et un volontarisme politique fort.
C’est tout l’objet de cette note : proposer un Pacte bleu durable liant la France à ses mers et océans, en esquisser les grandes lignes et définir ses priorités. À l’instar du pacte vert pour le climat, ce pacte bleu dessine une méthode d’action publique novatrice, fondée sur la résilience, la sobriété et la régénération écologique. Il s’articule autour de quatre grandes ambitions : repenser la place de la mer à l’échelle nationale, bâtir une économie bleue décarbonée, restaurer et protéger les écosystèmes marins, et conforter le rôle de la science, de la diplomatie et des territoires dans la fabrique des politiques océaniques.
Loin des seules images de voiliers et de tempêtes, ce Pacte bleu fait de la mer un horizon de transformation systémique. Mais pour jeter l’ancre dans cette nouvelle stratégie, il faut d’abord que la France se donne les moyens politiques, institutionnels et financiers de relever ces défis. .
Après avoir posé le constat de la place encore périphérique de l’océan dans notre récit national, il convient désormais de plonger au cœur de l’analyse : comment réinscrire la mer au cœur du projet politique français ?
I. Redonner à la mer toute sa place dans le projet national pour « embarquer » les Français
1. Une puissance maritime dépourvue de récit national
La France dispose du deuxième espace maritime mondial, derrière les États-Unis[5]. Elle est présente dans tous les bassins maritimes stratégiques, des Antilles à la Polynésie, de l’océan Indien à l’Antarctique. Ce patrimoine océanique, à la fois géopolitique, écologique et économique, reste pourtant sous-utilisé dans les politiques publiques, en particulier écologiques. Dans l’imaginaire collectif comme dans les outils institutionnels, la mer reste périphérique.
Ce paradoxe n’est pas nouveau. Il s’inscrit dans une longue histoire administrative, culturelle et politique. La République française s’est construite sur une logique territoriale intérieure, centrée sur le cœur continental. L’aménagement du territoire, la décentralisation, la transition écologique elle-même, ont rarement intégré la mer comme un pilier stratégique. Elle est restée, au mieux, un secteur à part : celui de la pêche, de la Défense ou des transports maritimes.
Politiquement, la mer parvient difficilement à bénéficier d’un ancrage durable au sein de l’exécutif. Le premier ministère de la Mer à plein exercice ne voit le jour qu’en 1981, sous la présidence de François Mitterrand. Il alternera ensuite les rattachements : tantôt absorbé par l’Équipement, tantôt par les Transports ou l’Écologie. Ce manque de continuité freine l’émergence d’une véritable politique maritime de long terme.
Aujourd’hui encore, la mer reste sous-représentée dans les grands axes de la transition écologique. La planification de la neutralité carbone, les budgets de l’écologie, les projets de loi successifs ne lui accordent qu’une place marginale. Elle est perçue comme un sujet technique, un domaine d’expertise, trop rarement comme un levier politique de transformation.
Cette marginalisation tient aussi à l’absence d’un véritable récit maritime national. Contrairement à la forêt, à la montagne ou au monde rural, la mer n’est pas investie d’un imaginaire collectif fort en France. Elle demeure largement absente des programmes politiques, malgré l’émergence ces dernières années de collectifs et représentants des acteurs industriels qui défendent le secteur dans le débat public.
Bâtir ce récit est un préalable à toute politique durable. Cela suppose de considérer la mer non plus comme un espace lointain, mais comme un acteur de la transition. Non plus comme un patrimoine figé, mais comme un milieu vivant, traversé de tensions et de promesses. Ce récit collectif ne doit pas être technocratique, mais culturel, émotionnel, citoyen.
2. Un moment politique et diplomatique à saisir : l’UNOC 2025
Dans ce contexte d’effacement relatif de la mer dans le débat public national, la tenue de l’UNOC 3 à Nice, en ce mois de juin 2025, constitue une occasion unique. Cette conférence pourrait devenir pour les océans ce que la COP21 fut pour le climat : un moment de convergence politique, diplomatique, scientifique et citoyenne. La France, en tant que pays hôte, se retrouve placée au centre de cet agenda international.
Encore faut-il qu’elle soit à la hauteur des attentes qu’elle suscite. Pour cela, elle doit montrer l’exemple : non pas simplement accueillir une conférence, mais transformer structurellement sa propre politique maritime pour être à l’avant-garde. Cela signifie ancrer la mer au cœur de son projet écologique, à l’échelle nationale comme territoriale. Il ne s’agit pas d’une simple question de diplomatie environnementale, mais de réaffirmer la place de nos mers et océans dans la stratégie écologique française.
Or à ce jour, la planification écologique menée par les Gouvernements successifs reste largement terrestre. Les politiques d’atténuation du changement climatique, de protection de la biodiversité, de rénovation énergétique ou d’adaptation territoriale intègrent peu les spécificités littorales et marines. Trop souvent, il manque encore une pensée écologique de la mer dans nos politiques publiques : une vision stratégique de long terme qui tienne compte des dynamiques propres aux écosystèmes marins, aux risques côtiers, aux flux maritimes, aux ressources halieutiques et aux potentiels considérables liés aux énergies marines renouvelables (EMR).
L’UNOC peut être un tournant si elle s’accompagne d’un changement interne. Si elle catalyse un effort transversal de coordination entre l’État, les collectivités, les acteurs privés, les scientifiques, et les citoyens. Si elle devient un levier pour faire exister la mer dans nos politiques publiques, de manière transversale et interministérielle.
3. Réinscrire la mer dans un projet de société et refonder sa gouvernance
a. Faire de la mer un horizon éducatif et citoyen
La mer ne peut être réduite à un simple enjeu environnemental, productif ou stratégique. Elle est aussi un espace d’imaginaire, de transmission, de migrations, de liens et de souveraineté. Pour faire face aux défis climatiques, écologiques et géopolitiques, il est urgent de réinscrire la mer dans un projet de société fédérateur.
Cela commence par l’éducation. Trop souvent absente ou reléguée à des approches techniques, la mer doit devenir un objet transversal dans les programmes scolaires : à la croisée de la géographie, de l’histoire, de l’écologie, des arts et de la citoyenneté. Des dispositifs innovants comme les « classes bleues », inspirées des classes vertes, pourraient être développés pour reconnecter les jeunes générations à l’univers maritime. Dans le supérieur, les campus maritimes, les lycées professionnels des métiers de la mer et les écoles d’ingénieurs navals doivent être pleinement soutenus, car ils participent à la formation des compétences nécessaires à la transition maritime[6]. L’École nationale supérieure maritime (ENSM), pilier de l’excellence française dans la formation des officiers de la marine marchande, pourrait jouer un rôle moteur dans ce mouvement, en ouvrant régulièrement ses portes à des visites d’observation pour des collégiens et lycéens, afin de susciter des vocations précoces et d’illustrer la diversité des métiers de la mer, civils comme scientifiques.
b. Sortir de l’émiettement institutionnel grâce à une gouvernance de plein exercice
Un tel projet de société ne peut se déployer sans un pilotage politique rénové. Aujourd’hui, la politique maritime française souffre d’un émiettement des compétences entre ministères (Écologie, Transports, Outre-Mer, Armées, Agriculture, Économie…), agences et structures nationales (DGAMPA, OFB, ADEME, Bpifrance…), collectivités littorales, autorités portuaires et services déconcentrés. Cette dispersion conduit à une dilution des responsabilités, à un déficit de lisibilité pour les acteurs économiques et associatifs, et à une inefficacité dans la conduite des transitions, comme le montrent les retards persistants sur les énergies marines renouvelables, la protection des aires marines ou l’aménagement portuaire.
Il est temps de proposer un cap et une politique maritime de plein exercice. Un « super-ministère » délégué à la Mer et aux Océans, à la Transition maritime, aux Ports et Littoraux, à la Pêche et aux Énergies marines, rattaché à Matignon et doté d’un pouvoir d’arbitrage interministériel, mériterait d’être créé. Ce capitaine pourrait s’appuyer sur le Secrétariat général de la Mer, administration déjà existante, capable de coordonner les politiques publiques maritimes dans toutes leurs dimensions : environnement, économie, aménagement, sécurité, recherche, culture…
Zoom sur le Secrétariat général de la Mer (SG Mer) Méconnu du grand public, le SG Mer est institué dès 1995, rattaché aux services du Premier ministre. Il joue un rôle de coordination des politiques maritimes de l’État, en veillant à leur cohérence entre ministères. Ses missions incluent l’animation et le pilotage de l’action des préfets maritimes en métropole et des délégués du Gouvernement en Outre-Mer, le contrôle, l’évaluation et la prospective sur l’ensemble des textes et actions relatives à la mer, ainsi que la préparation et le suivi des décisions du Comité interministériel de la Mer (CIMer) réuni chaque année. Par délégation, il assure également la fonction de « garde-côtes », coordonnant les moyens de surveillance et d’intervention en mer. Malgré son positionnement stratégique, le SGMer reste très modeste en moyens : il ne compte qu’une vingtaine d’agents permanents, épaulés par des fonctionnaires détachés de ministères et établissements publics pour remplir son rôle interministériel. Cette structure, pourtant essentielle, reste toutefois peu visible et sous-dotée face à l’ampleur des enjeux climatiques, écologiques et géopolitiques qui se jouent dans nos mers et océans. |

Organigramme du SG Mer[7]
Par ailleurs, cette gouvernance renouvelée doit pleinement s’articuler avec le niveau européen. La directive « cadre MSP » (Maritime Spatial Planning)[8] a instauré pour les États membres un cadre commun visant à :
- Définir et mettre en œuvre des plans de gestion de l’espace maritime couvrant toutes leurs eaux (territoriales et zones économiques exclusives).
- Coordonner ces plans à l’échelle des bassins maritimes (Manche, Atlantique, Méditerranée, Mer Noire, etc.) afin de réduire les conflits d’usages entre secteurs (pêche, transport, énergies marines, conservation, tourisme…) et de renforcer la cohérence environnementale et économique.
- Assurer la consultation des parties prenantes (collectivités, usagers, ONG, monde scientifique) et la mise à disposition de données transparentes.
Ce cadre est essentiel. La France doit ainsi aligner ses objectifs nationaux sur cette gouvernance de bassin, désormais indispensable pour répondre à l’ampleur des enjeux climatiques, écologiques, économiques et géopolitiques. Au niveau local, cette gouvernance pourra être renforcée par un cadre contractuel et partenarial clair, afin de mettre en œuvre une transition maritime territorialisée[9].
Il conviendrait de traduire cette ambition en réalités tangibles : c’est dans l’économie bleue, ses infrastructures, ses filières et ses innovations que se jouera une transition bleue réussie vers un modèle maritime réellement écologique et résilient.
II. Une transition bleue pour bâtir une économie maritime décarbonée et soutenable
Pendant des décennies, l’économie maritime a été perçue comme un levier de croissance relativement déconnecté des contraintes écologiques. La mer offrait l’image d’un espace sans limites, où la régulation était minimale et les externalités peu tangibles. Mais cette logique atteint aujourd’hui ses limites. Si le maritime reste un vecteur majeur de compétitivité, d’innovation et d’échanges commerciaux, il doit désormais s’inscrire dans une trajectoire de décarbonation profonde et de régénération écologique. Une transition bleue s’impose, fondée sur l’investissement, l’innovation et la régulation, mais surtout sur une volonté politique forte.
1. Transport maritime : un secteur stratégique à verdir
a. Un poids économique et climatique considérable
Le transport maritime représente environ 3 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre et 14 % des émissions de transport au sein de l’UE. En France, il alimente les échanges extérieurs, structure la logistique nationale et soutient des dizaines de milliers d’emplois directs et indirects. Pourtant, la transition énergétique y reste marginale. L’entrée du transport maritime dans le système d’échange de quotas d’émissions de l’UE (ETS) depuis 2024 est un tournant. Désormais, les armateurs doivent acquérir des quotas en fonction des émissions de CO₂ générées par leurs navires desservant l’UE.
Cette mesure, bien que significative, reste limitée : elle ne couvre qu’une partie des émissions (principalement les trajets intra-européens), ne s’applique qu’à certains navires, et ne modifie pas encore les règles du jeu mondial. À l’échelle internationale, l’Organisation maritime internationale (OMI) peine à imposer des standards ambitieux, bien que sa stratégie révisée en 2023 fixe un objectif de neutralité carbone « aux alentours de 2050 », après une baisse de 20–30 % des émissions de CO₂ d’ici 2030 (par rapport à 2008). Afin de gagner en efficacité et d’éviter une perte de compétitivité du pavillon européen sur la scène internationale, il serait nécessaire que le système ETS maritime soit à terme étendu à l’ensemble du globe, sous l’autorité de l’OMI.
En France, l’entrée en vigueur progressive de l’ETS maritime et le plan France-Mer 2030 appellent à aller au-delà, avec une cible nationale de –30 % des émissions de CO₂ d’ici 2030 (par rapport à 2020), réaliste et conforme aux engagements européens.
Zoom sur la mer Méditerranée La pollution générée par le transport maritime est un enjeu écologique, économique, mais aussi sanitaire. Depuis 2025, la mer Méditerranée est devenue une zone SECA (Sulphur Emission Control Area), au même titre que les côtes de la mer du Nord et de la Baltique. Cette reconnaissance oblige les navires à utiliser des carburants à très faible teneur en soufre – 0,10 % au maximum – ou à installer des dispositifs de désulfuration (scrubbers), renforçant ainsi la lutte contre la pollution atmosphérique et les pluies acides. Cette mesure reste toutefois partielle et progressive, et doit être complétée par des incitations plus larges pour accélérer la transition énergétique. En effet, une ECA au sens large[10] peut fixer des niveaux plus stricts pour plusieurs polluants :
La mer Méditerranée, devenue zone SECA en 2025, fait donc partie des ECA au titre de la lutte contre les SOx, mais n’est pas – à ce stade – classée en NECA. Si l’on veut réduire simultanément SOx et NOx dans cette même zone, l’OMI devrait ainsi la désigner comme zone NECA. |

Source : Restitution de l’étude INERIS du 18 janvier 2019 relative à la mise en place d’une zone ECA en Mer Méditerranée[11]
D’après cette étude, le gain sanitaire est estimé entre 8,1 et 14 milliards d’euros par an pour tous les pays concernés – entre 43 et 93 millions d’euros pour la France – : cela correspondrait à l’évitement de 1 730 décès prématurés chaque année sur l’ensemble de la Méditerranée, dont une trentaine en France, imputables à la pollution générée par le transport maritime.
b. Des leviers techniques et économiques encore insuffisamment mobilisés
Plusieurs options existent pour réduire l’empreinte carbone du transport maritime : réduction de la vitesse (slow steaming), efficacité énergétique accrue, propulsion vélique ou hybride, carburants alternatifs (GNL, hydrogène, ammoniac, biocarburants). Mais la généralisation de ces solutions reste freinée par leur coût, leur maturité technique variable et l’insuffisance des infrastructures portuaires d’accueil.
Des initiatives françaises existent. Certains armateurs, comme Neoline, Towt ou Grain de Sail, développent des navires à propulsion vélique, c’est-à-dire utilisant le vent comme énergie. Le projet Zéphyr & Borée vise des lignes transatlantiques plus sobres. Mais, globalement, ces projets sont encore à l’état de démonstrateurs. Le passage à l’échelle reste entravé par l’absence d’incitations économiques fortes.
c. Financement de la transition maritime : vers un « Fonds Bleu »
Les acteurs économiques ont pris plusieurs initiatives ces dernières années en faveur de la décarbonation du transport maritime. Ainsi, en avril 2024, CMA CGM et Bpifrance ont lancé un fonds de dotation pour la filière maritime française à hauteur de 200 millions d’euros[12].
Pour accélérer, il est nécessaire d’amplifier ce type de dispositif. Il conviendrait de créer à l’échelle nationale un « Fonds Bleu » dédié à financer la transition maritime, abondé par l’État, l’UE, les collectivités littoralesles opérateurs du secteur maritime et portuaire, ainsi que d’autres acteurs privés comme les banques ou les fondations. Comme l’ont récemment proposé les acteurs industriels et représentants des armateurs français, un cercle vertueux pourrait être mis en place, par un fléchage des 350 millions d’euros collectés annuellement dans le cadre de l’ETS maritime. Un premier pas a été franchi dans ce sens par le Gouvernement qui a annoncé la redistribution partielle de ces recettes, à hauteur de 90 millions d’euros en 2026[13]. Cela permettrait de réallouer ces sommes à la transition énergétique du secteur maritime, via ce Fonds Bleu :
- Le montant total du besoin de financement annuel pris en charge par la part ETS est estimé à 350 millions d’euros, sur un total de 1,4 milliard d’euros par an nécessaires pour atteindre le net zéro en 2050. L’ETS maritime couvrirait donc un quart du besoin global de financement.
- Les 75 % restants pourraient provenir majoritairement d’investissements privés et du redéploiement de crédits et dispositifs déjà existants[14].
Ce fonds pourrait, notamment, financer le rétrofit des navires existants vers des systèmes hybrides ou sobres, la construction de navires zéro émission, ou encore l’électrification des quais portuaires et l’équipement des terminaux en matière d’hydrogène.
Des obligations souveraines bleues (« blue bonds »), sur le modèle de celles émises par la Banque mondiale[15] ou les Seychelles, pourraient constituer une ressource complémentaire, en associant finance verte et priorités maritimes. Il s’agit de titres de créance dont le produit est dédié au financement d’activités contribuant à la protection, à la restauration et à la gestion durable des mers, océans et des zones côtières (protection des aires marines, lutte contre la pollution, soutien aux pêcheries durables…). Inspirées du succès des green bonds, elles visent à mobiliser des capitaux à grande échelle pour répondre aux besoins croissants de financement de l’économie bleue.
Zoom sur les Seychelles Les premières obligations bleues : un modèle pour la France et l’Europe ? En octobre 2018, la République des Seychelles a émis le premier blue bond souverain de l’histoire, d’un montant de 15 M$ sur 10 ans, garanti à 5 M$ par la Banque mondiale et soutenu par un prêt concessif de 5 M$ du Global Environment Facility (GEF)[16]. Les fonds ont été affectés à :
Ce dispositif a permis d’attirer des investisseurs privés, tout en garantissant une gestion prudente et transparente des ressources levées. En France, l’émission d’obligations bleues pourrait être une opportunité forte pour soutenir le Fonds Bleu proposé pour la transition énergétique maritime, en associant les grands armateurs et investisseurs institutionnels. Au niveau européen, un cadre commun devrait être envisagé sous l’égide de la Commission européenne (DG MARE) pour standardiser les critères et promouvoir des émissions paneuropéennes, favorisant la cohérence de la finance bleue avec la stratégie « Blue Economy » et les objectifs du Green Deal. |
Au-delà des leviers technologiques et financiers, la transition du transport maritime appelle aussi une réflexion stratégique sur notre souveraineté et le contrôle des outils logistiques. La France – comme l’Europe dans son ensemble – ne peut durablement dépendre de compagnies extracommunautaires pour des segments critiques du transport maritime, en particulier les liaisons ultramarines, le fret stratégique, ou l’acheminement des équipements de la transition énergétique. Il devient nécessaire de repenser la notion de flotte stratégique nationale : il s’agit d’un ensemble de navires placés sous pavillon national ou sous contrôle national, mobilisables en toutes circonstances pour assurer la continuité des flux vitaux en cas de crise (tension géopolitique, catastrophe naturelle, rupture des chaînes d’approvisionnement mondiales…). Cette flotte stratégique ne répond pas seulement à une logique économique, mais également à une exigence de souveraineté. Elle pourrait prendre plusieurs formes : relance d’un pavillon national d’intérêt public bénéficiant de garanties étatiques ; soutien à la consolidation d’un groupe armatorial de référence capable de garantir une présence française sur les routes maritimes essentielles ; et/ou création d’une capacité logistique bleue européenne, sur le modèle d’Airbus, articulant les ressources publiques et industrielles des États membres pour maîtriser les segments les plus sensibles du transport maritime. À l’heure où l’espace maritime devient un terrain d’affirmation des puissances, ne pas disposer d’une telle flotte revient à renoncer à une part de notre souveraineté nationale et européenne.
2. Ports : des hubs industriels à verdir et adapter aux réalités locales
Nos ports sont à la fois des hubs logistiques, des bassins d’emplois, des zones à forts impacts écologiques et des acteurs clés de la transition bleue. Ils représentent un essentielle au service de la souveraineté maritime française. Pourtant, la France accuse un retard dans la transformation écologique de ses infrastructures portuaires, malgré de nombreuses initiatives prises dans les territoires.
a. Bâtir une stratégie nationale solide rendant les ports « verts » et intégrés aux territoires
Pour donner toute sa portée à la mutation écologique des ports, il convient d’articuler les actions sectorielles au sein d’une Stratégie nationale portuaire (SNP) qui mériterait d’être actualisée, compte tenu des enjeux liés au contexte international tendu que nous connaissons.
Zoom sur la Stratégie nationale portuaire Adoptée en janvier 2021 par le Comité interministériel de la mer, cette feuille de route repose sur quatre ambitions interdépendantes, communes à l’ensemble du réseau portuaire français, métropolitain et ultramarin :
Optimiser leur fonction logistique, en visant à accroître la part du fret conteneurisé et à fluidifier les opérations grâce à la dématérialisation. |
Les ports doivent devenir de véritables plateformes industrielles bleues. Ainsi, il devient nécessaire de déployer un plan national de transformation écologique des grands ports maritimes, sur le modèle du programme « Territoires d’industrie », afin d’accélérer la décarbonation portuaire et l’électrification à quai. Un partenariat renforcé entre grands ports maritimes, collectivités locales et opérateurs privés sera le moteur de cette mutation.
L’une des grandes priorités de ce plan concerne l’électrification à quai des ports, levier majeur de réduction des émissions portuaires et d’amélioration de la qualité de l’air. Le modèle californien, pionnier en la matière, mériterait d’être observé de près. Au niveau européen, le règlement AFIR impose un cap clair[17], en obligeant les ports maritimes situés sur le réseau des corridors de transports transeuropéens (RTE-T) d’installer des bornes de shore power d’ici à 2030. La France doit désormais accélérer ses déploiements, lever les verrous financiers et techniques, et établir un plan national cohérent pour atteindre dans les cinq années à venir l’objectif de connexion obligatoire à quai de tous les navires pertinents, notamment les porte-conteneurs, les paquebots de croisière et ferries.
b. Études de cas : Marseille, Dunkerque, Outre-Mer
- Dunkerque : un pôle industriel en mutation verte
Le Grand Port maritime de Dunkerque (GPMD) s’affirme comme un acteur majeur de la décarbonation industrielle en France. Il développe une zone industrialo-portuaire dédiée à la production d’hydrogène vert, avec des projets tels que celui de H2V visant à produire 28 000 tonnes d’hydrogène par an via électrolyse. Parallèlement, Dunkerque est pionnier dans la recherche de solutions liées à la captation et la valorisation du CO₂, accueillant des projets comme DMX et CAP Décarbonation. Ces initiatives s’inscrivent dans le cadre du plan « Énergie Grand Large », visant à faire émerger une zone industrialo-portuaire sobre en carbone[18].
- Marseille-Fos : entre avancées et défis techniques
Le Grand Port maritime de Marseille-Fos (GPMM) a été précurseur, le premier en France à proposer des connexions électriques des navires à quai (CENAQ) pour les ferries desservant la Corse dès 2017. Depuis, des efforts sont en cours pour étendre cette électrification aux ferries internationaux et aux paquebots de croisière, bien que des obstacles techniques subsistent, notamment en matière de puissance requise et de compatibilité des équipements. En effet, l’utilisation d’énergie par les grands navires de croisière branchés à quai peut atteindre 16 MW, soit l’équivalent de la consommation électrique d’une ville européenne de 10 000 habitants… Des investissements significatifs ont été réalisés, avec un programme de 50 millions d’euros entre 2017 et 2025 pour équiper les quais. De plus, un projet de centrale photovoltaïque de 9 MWp en toiture de bâtiments portuaires est en cours pour alimenter le port en énergie renouvelable[19]. Une giga-usine de production de panneaux solaires « made in France », portée par l’entreprise CARBON, devrait également voir le jour dans les prochains mois sur 45 hectares situés dans le domaine portuaire : ce projet pourrait générer plus de 3 000 emplois directs.
- Outre-Mer : des ports vulnérables en quête de modernisation
Les ports ultramarins, tels que ceux de La Réunion et de Pointe-à-Pitre, sont confrontés à des défis spécifiques liés à leur vulnérabilité aux risques climatiques et à des infrastructures souvent inadaptées face à l’augmentation du trafic maritime. Des projets de modernisation sont en cours, comme le projet HUB ANTILLES en Guadeloupe, prévoyant des investissements de 135 millions d’euros pour sécuriser l’accueil des navires. Cependant, la transition écologique de ces ports nécessite des efforts supplémentaires pour développer des infrastructures décarbonées et intégrer des solutions innovantes adaptées aux spécificités insulaires[20].
3. Énergies marines renouvelables : du potentiel au déploiement industriel
Les EMR regroupent essentiellement l’éolien offshore posé ou flottant, la marémotrice, l’houlomotrice, l’énergie osmotique ou thermique[21]. Le potentiel est immense à l’échelle mondiale : en effet, l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (IRENA) l’a évalué pour l’ensemble des EMR entre 45 000 et 130 000 térawattheure (TWh) par an.
a. Une filière stratégique pour notre souveraineté énergétique, encore lente à émerger
La France dispose d’un important potentiel national – deuxième gisement européen après la Grande-Bretagne – qui englobe également la marémotrice, l’énergie houlomotrice et thermique des mers. À l’horizon 2050, l’État s’est fixé un cap ambitieux de 45 gigawatts (GW) de capacité installée en éolien en mer, incluant à la fois des technologies posées et flottantes. Cela s’inscrit dans la stratégie nationale visant à atteindre la neutralité carbone d’ici cette échéance. Pour atteindre cet objectif, la France prévoit de développer environ 50 parcs éoliens offshore répartis sur ses façades maritimes, avec une cible intermédiaire de 18 GW d’ici 2035 (soit 10 % du mix électrique), selon la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE)[22].
Toutefois, la production reste marginale à ce jour. Les projets accumulent les retards, du fait de complexités de mise en œuvre opérationnelle :
- Un retard de développement considérable
Fin 2023, la capacité installée d’éolien en mer en France atteignait environ 1,5 GW, répartie sur trois parcs opérationnels : Saint-Nazaire (480 MW), Fécamp (497 MW) et Saint-Brieuc (496 MW). Ce chiffre est bien inférieur aux objectifs fixés par la Programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui visait 2,4 GW d’éolien en mer installé d’ici 2023. En comparaison, d’autres pays européens, comme le Royaume-Uni et l’Allemagne, ont développé des capacités supérieures dans ce domaine.
- Des obstacles persistants à lever
Les freins identifiés concernent d’abord les lenteurs administratives, en raison de procédures d’autorisation longues et complexes ; mais également le risque élevé de contentieux juridiques, puisque de nombreux projets font l’objet de recours, notamment de la part de pêcheurs ou d’associations environnementales, ce qui allonge les délais de mise en œuvre. Ainsi, des oppositions locales s’expriment souvent, avec des résistances liées à des préoccupations environnementales ou paysagères, freinant également le développement de certains projets.

État des lieux des projets éoliens marins d’après le Gouvernement[23]
b. Une planification maritime renforcée et priorisée, mais encore incomplète
Pour accélérer le déploiement de l’éolien en mer tout en préservant les équilibres écologiques et les autres usages de la mer, la France articule désormais deux leviers : la désignation de zones prioritaires et le renforcement de la planification spatiale maritime.
Ainsi, quatorze zones d’implantation privilégiées ont été identifiées, dès 2024, couvrant les façades Manche-Est, Atlantique et Méditerranée. Celles-ci présentent trois atouts principaux : un éloignement suffisant du littoral pour limiter l’impact visuel, une connexion électrique aisée grâce à la proximité des couloirs de réseau, et un périmètre déjà étudié pour sa compatibilité avec les habitats marins à haute valeur écologique. De surcroît, l’appel d’offres de 9,2 GW (AO10, représentant près de 10 % de la capacité de production nationale actuelle) programmé pour 2025 offrira une visibilité pluriannuelle aux développeurs énergétiques, en vue de nouveaux projets avant la fin de l’année 2026[24].
Cependant, certaines ONG, comme France Nature Environnement (FNE), pointent une planification éolienne maritime incomplète. En effet, la façade Nord Atlantique Manche Ouest n’est pas directement concernée, puisque seules des zones indicatives de poursuite de la concertation ont été retenues et les objectifs de développement de l’éolien en mer y ont été revus à la baisse, au profit d’autres activités[25].

Zones prioritaires retenues pour le développement de l’éolien en mer, présentées par le Gouvernement en octobre 2024[26]
c. Participation et co-construction territoriale : vers des contrats locaux de transition maritime
La réussite de l’accélération du déploiement des EMR dépendra aussi de l’appropriation locale par les riverains. Pour chaque projet, la Commission nationale du débat public (CNDP) organise ainsi une concertation publique afin de recueillir avis et réserves, notamment en matière de paysage, de pêche ou encore de tourisme. Pour aller plus loin, de véritables contrats de transition maritime associant État, Régions, intercommunalités et communes à la gouvernance, mériteraient d’être mis en place. Ces dispositifs permettraient d’assurer la redistribution économique des projets EMR dans les territoires concernés, en termes de redevances ou d’emploi local par exemple[27].
4. Économie bleue : anticiper les mutations, soutenir les transitions
L’économie bleue française regroupe un ensemble hétérogène de filières – pêche, aquaculture, biotechnologies marines, EMR, tourisme littoral, nautisme, écoconstruction navale… – dont la transformation est indispensable pour répondre aux impératifs écologiques. Certaines de ces activités sont aujourd’hui à fort impact environnemental ; d’autres représentent des gisements de solutions durables, à condition d’être soutenues et orientées stratégiquement.
a. Bâtir un modèle de pêche durable à la française
Dans le domaine de la pêche et de l’aquaculture, en 2021, seulement 62,3 % des stocks halieutiques mondiaux étaient exploités à un niveau biologiquement durable, marquant une baisse de 2,3 points depuis 2019[28]. À l’échelle européenne, la pêche a connu des progrès en matière de durabilité ces dernières années, notamment en Atlantique Nord-Est, mais ces avancées restent inégales : en Méditerranée et en mer Noire, la surexploitation des stocks persiste, révélant une fragilité régionale dans la mise en œuvre des objectifs environnementaux[29].
Il conviendrait ainsi de renforcer la durabilité de la pêche en Europe, en s’appuyant sur une meilleure gouvernance, une réduction de l’impact environnemental et une consommation plus responsable :
- Renforcer la gouvernance et la gestion des pêches, en améliorant l’application des réglementations : les mesures de protection du milieu marin sont encore peu appliquées et seule une part relativement faible des fonds disponibles est utilisée pour financer des mesures de conservation. Il serait donc recommandé de renforcer l’application des réglementations existantes et d’assurer une utilisation plus efficace des fonds alloués à la conservation.
- Réduire l’impact environnemental de la pêche, à travers une limitation des captures d’espèces vulnérables : globalement, si la pêche européenne a vu son empreinte environnementale s’améliorer ces dernières années, ces progrès n’en demeurent pas moins fragiles. Par exemple, en Méditerranée, le taux de mortalité par pêche reste supérieur de 71 % au taux de durabilité recommandé, indiquant une surexploitation persistante des ressources halieutiques.
- Promouvoir une consommation responsable, par une intégration des exigences de durabilité dans les importations : l’UE ne dispose pas des ressources halieutiques pour répondre totalement à la demande de ses consommateurs : 75 % des produits de la mer consommés sont importés. Ces importations devraient également intégrer des exigences de durabilité pour éviter de reporter la demande vers des pêches non durables[30].
b. Miser massivement sur la formation aux métiers maritimes
Concernant la sensibilisation aux filières maritimes, les campus des métiers de la mer, pleinement soutenus par les Régions et les branches professionnelles, doivent devenir de véritables pôles d’excellence bleus couvrant la formation initiale et continue, de la seconde professionnelle aux écoles d’ingénieurs. Il s’agit d’un enjeu majeur pour la filière navale française, représentant 15 milliards d’euros de chiffre d’affaires et un gisement de 56 000 emplois directs.
Ainsi, les lycées professionnels maritimes et aquacoles (LPM/LPMA) – au nombre de douze répartis sur le littoral métropolitain – restent le premier vivier pour les métiers de la pêche, de la marine marchande, de la plaisance et des cultures marines. Ils délivrent des CAP maritimes, bacs professionnels et BTS, formant chaque année plusieurs centaines de marins qualifiés[31].
Parallèlement, les centres de formation d’apprentis (CFA), souvent adossés aux lycées ou aux branches artisanales, complètent cette offre par des parcours en alternance, garantissant une immersion rapide dans le monde professionnel et une adaptation aux besoins des entreprises locales.
Au-delà du secondaire, l’ENSM, présente sur cinq sites (Le Havre, Saint-Malo, Nantes, Marseille, Bastia), assure la formation d’officiers de la marine marchande, d’ingénieurs en génie maritime et de cadres supérieurs, tout en proposant des formations continues pour la montée en compétences des professionnels en poste.
Les écoles d’ingénieurs et universités jouent également un rôle clé. C’est le cas, par exemple, d’établissements de référence comme l’Institut Universitaire Européen de la Mer (IUEM) à Brest, véritable centre de recherche et de formation doctorale sur l’océan, des filières « SeaTech » et « HydroContest » au sein de l’École Centrale de Marseille, ou encore du Campus Économie de la Mer abrité par l’Université de Toulon.
À Marseille, l’Institut des sciences de l’océan d’Aix-Marseille-Université (AMU) pourrait être renforcé et devenir une « Université de la Mer » installée sur le Grand Port maritime, un lieu de formation aux métiers de la mer, de recherche fondamentale sur les écosystèmes marins et d’innovation technologique pour la transition bleue.
Pour mieux anticiper et accompagner vers la formation aux métiers de la mer, il est proposé de :
- Créer des « zones campus » portuaires sur les façades méditerranéenne, atlantique et Outre-Mer, associant un lycée maritime, un CFA, un pôle R&D local, voire une antenne ENSM, pour offrir un continuum de formation et de recherche.
- Mettre en place des parcours passerelles entre CAP, Bac Pro, BTS et licence-pro, garantissant la mobilité des élèves et l’ouverture vers les écoles d’ingénieurs.
- Développer des formations spécialisées, notamment en robotique sous-marine, EMR et décarbonation portuaire, afin de répondre rapidement aux besoins sectoriels croissants.
Alors même que nous bâtirons les fondations d’une économie maritime sobre et compétitive, il restera essentiel de préserver puis de restaurer la richesse vivante qui se déploie sous la mer. Ainsi, au-delà des objectifs quantitatifs de décarbonation, la vie sous-marine doit être au cœur de l’action publique, à travers des dispositifs de protection stricte, la lutte contre la pollution et des programmes de régénération active.
III. Protéger ne suffit plus : vers une écologie de la régénération marine
À force d’être considérés comme infinis, les mers et océans ont été longtemps pensés comme inaltérables. Leur profondeur, leur opacité, leur relative inaccessibilité les ont souvent placés hors du champ des politiques environnementales. Pourtant, leur état écologique se dégrade rapidement. La biodiversité marine s’effondre à un rythme alarmant, les récifs coralliens blanchissent et meurent, les habitats côtiers se réduisent, les stocks halieutiques sont surexploités, les pollutions multiples s’accumulent. Les rapports les plus récents du GIEC, de l’IPBES ou de l’UICN pointent une altération rapide des grands équilibres océaniques.
La France, forte du deuxième espace maritime mondial, héberge plus de 10 % de la biodiversité marine planétaire, notamment dans ses territoires ultramarins. Elle porte donc une responsabilité écologique et géopolitique majeure. Agir ne consiste plus à simplement protéger : il faut désormais réparer, restaurer, régénérer.
1. Aires marines protégées : entre ambitions et contradictions
a. Des chiffres flatteurs, une réalité contrastée
Officiellement, plus de 33 % des eaux sous juridiction française sont classées en aires marines protégées (AMP), un taux qui dépasse déjà de loin les engagements internationaux. Cependant, moins de 4 % de ces espaces bénéficient d’une protection véritablement stricte, interdisant toute activité extractive. Dans le droit fil de l’objectif « 30×30 » adopté par l’ONU, il serait à la fois crédible et ambitieux de porter ce seuil à 10–15 % d’ici à 2030, à condition d’harmoniser la définition française de la « protection forte » avec les standards de la Commission européenne et de l’UICN.
Aujourd’hui, la plupart des AMP françaises autorisent encore des activités industrielles ou extractives — qu’il s’agisse de pêche, d’extraction de granulats ou de projets d’infrastructures — ce qui diminue leur efficacité écologique. Cette situation révèle des lacunes profondes en matière de cohérence et de gouvernance. Une étude publiée par l’association Bloom en 2023 a révélé que plus de 60 % de la surface des AMP en Europe font l’objet de chalutage de fond, une méthode de pêche particulièrement destructrice pour les écosystèmes sous-marins[32]. Dans certaines zones, l’intensité de cette activité est même plus élevée qu’en dehors des AMP, remettant en cause leur vocation de préservation. Ce décalage entre les objectifs affichés et les pratiques autorisées fragilise la crédibilité du dispositif des AMP et limite son efficacité écologique réelle.

Carte des AMP françaises présentée par le Gouvernement[33]
b. Redonner aux AMP cohérence et ambition
Renforcer la couverture quantitative des AMP est important, mais améliorer qualitativement leur impact l’est tout autant. Cela suppose d’activer plusieurs leviers :
- Harmoniser la définition des aires de protection forte
Les directives de l’IUCN exigent que les zones strictes (« no-take ») interdisent toute activité extractive pour garantir la conservation des écosystèmes[34]. Ainsi, des retours d’expériences récents – tels que l’augmentation de 20 % de la couverture corallienne ou le triplement de la densité de poissons dans des zones strictes –, plaident en faveur de mécanismes de protection renforcée dans les AMP. Un suivi régulier d’indicateurs clés, comme la diversité corallienne et l’abondance de poissons, a permis d’affiner les stratégies de protection[35].
- Renforcer la gouvernance locale des AMP
Les études montrent que l’efficacité des AMP dépend largement de l’implication des pêcheurs, des ONG, des scientifiques et des collectivités locales dans la prise de décision et le suivi, réduisant les conflits et favorisant l’appropriation locale[36]. Un mode de gouvernance participatif, qui articule comités d’usage et instances co-gérées, a permis d’améliorer sensiblement le respect des règles de protection dans plusieurs AMP à travers la planète[37]. En outre, des contrôles accrus doivent être prévus pour assurer l’effectivité de la protection en place dans les AMP.
- Fixer un objectif de 10–15 % d’AMP strictes d’ici 2030
La stratégie de biodiversité de l’UE vise à protéger légalement 30 % des mers, dont au moins 10 % en zones strictes d’ici 2030. Pour se positionner en leader, la France devrait s’engager sur une fourchette minimale de 10–15 %, priorisant des écosystèmes clés (récifs, herbiers, mangroves, nurseries).
Zoom sur les AMP des Îles Galápagos (Équateur) : une AMP modèle Ces zones font figure d’exemple, elles sont « probablement le meilleur projet de conservation réalisé dans les océans », d’après Greenpeace[38]. En effet, elles ont démontré un net retour de la biodiversité et des ressources halieutiques dès les premières années de mise en œuvre stricte :
Aller plus loin : Greenpeace et un collectif de scientifiques appellent à la création d’une première réserve marine en haute mer autour des Galápagos, via l’entrée en vigueur du Traité sur la Haute Mer (dit BBNJ, Marine Biodiversity of Areas Beyond National Jurisdiction)[41]. Ce dernier, adopté en 2023, a pour objectif de protéger 30 % des mers et océans d’ici 2030 et permet la création d’AMP en haute mer ; mais il n’est pas encore entré en vigueur, faute de ratifications en nombre suffisant[42]. |
2. Mers et océans pollués, biodiversité menacée
a. Combattre le fléau de la pollution plastique
Chaque année, entre 4,8 et 12,7 millions de tonnes de plastique se déversent dans les océans, alimentant une pollution marine aux conséquences écologiques majeures. Selon la Fondation Ellen MacArthur, si aucune action significative n’est entreprise, les océans pourraient contenir plus de plastique que de poissons d’ici 2050[43]. Actuellement, on estime que la quantité totale de plastique dans les océans varie entre 75 et 199 millions de tonnes, représentant environ 85 % des déchets marins, et que 24 400 milliards de particules de microplastiques flottent à leur surface[44].
Parmi les sources de cette pollution figurent les plastiques flottants, les microbilles issues des cosmétiques ou des vêtements synthétiques, ainsi que les filets fantômes provenant de la pêche industrielle. Ces déchets composent un cocktail toxique qui altère l’ensemble des écosystèmes marins.
Un exemple emblématique de cette accumulation de polluants est le « continent de plastique » du Pacifique Nord, également connu sous le nom de Great Pacific Garbage Patch. Situé entre Hawaï et la Californie, il s’étend sur une superficie estimée à 1,6 million de kilomètres carrés, soit environ trois fois la taille de la France. Cette zone contient plus de 1,8 milliard de morceaux de plastique, pesant environ 80 000 tonnes. Les microplastiques, bien que représentant la majorité en nombre, ne constituent qu’une petite fraction du poids total, la majeure partie étant composée de débris plus volumineux, notamment des équipements de pêche abandonnés[45].
Vers un traité international contre la pollution plastique ? Les négociations en vue d’un traité international juridiquement contraignant pour lutter contre la pollution plastique ont débuté en 2022, sous l’égide du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE). L’objectif initial était d’aboutir à un accord d’ici fin 2024, couvrant l’ensemble du cycle de vie des plastiques, de la production à l’élimination. Le traité vise à établir des mesures globales pour réduire la pollution plastique, y compris des restrictions sur la production, l’utilisation de substances dangereuses et des mécanismes de financement pour aider les pays en développement. Cependant, les désaccords persistants entre les différentes parties prenantes continuent de retarder sa conclusion. À ce jour, cinq sessions du Comité intergouvernemental de négociation (INC) ont eu lieu :
Lors de la cinquième session à Busan, les négociateurs n’ont pas réussi à s’entendre sur les éléments clés du traité, notamment sur la réduction de la production de plastique et la gestion des substances chimiques dangereuses. Les divergences entre les pays favorables à des mesures contraignantes et ceux privilégiant des approches volontaires ont conduit à l’ajournement des discussions. Une session supplémentaire, INC-5.2, est prévue du 5 au 14 août 2025 à Genève pour tenter de surmonter les obstacles restants et finaliser le traité[46]. |
Face à cette urgence écologique, des initiatives telles que The Ocean Cleanup ou Plastic Odyssey s’efforcent de réduire la pollution plastique en haute mer. Toutefois, la solution la plus efficace demeure la prévention à la source, notamment par la réduction de la production de plastique, l’amélioration des systèmes de gestion des déchets et la promotion d’une économie circulaire.
b. Réduire les autres sources de pollution marine préoccupantes
La pollution marine ne se limite pas aux plastiques ; elle englobe diverses formes de contaminations qui affectent gravement les écosystèmes océaniques :
- Pollutions hydrocarbures : le transport maritime contribue à la pollution de l’eau par les marées noires et les rejets opérationnels tels que les eaux grises. Les rejets d’eau des systèmes d’épuration des gaz d’échappement en boucle ouverte (scrubbers), utilisés pour réduire les émissions d’oxydes de soufre (SOx) dans l’atmosphère, représentent 98 % des rejets autorisés. Ces rejets des contaminants dans l’eau mettent en évidence le compromis entre la réduction de la pollution atmosphérique et l’augmentation de la pollution marine. Les rejets d’eaux grises, principalement liés à l’exploitation des navires de croisière, ont augmenté de 40 % entre 2014 et 2023.
- Déchets marins : les déchets marins provenant de la pêche (11,2 %) et du transport maritime (1,8 %) ont diminué de moitié au cours de la dernière décennie. Cependant, des problèmes persistent, notamment la pollution par les granulés de plastique provenant des conteneurs perdus.
- Bruit sous-marin : de nouveaux modèles paneuropéens révèlent des niveaux élevés de bruit sous-marin rayonné (underwater radiated noise, URN) dans la Manche, le détroit de Gibraltar, la mer Adriatique, le détroit des Dardanelles et la mer Baltique. Des mesures d’atténuation pourraient réduire l’URN jusqu’à 70 % entre 2030 et 2050[47].
Sur ce dernier point, il convient de souligner l’impact croissant de la pollution sonore d’origine humaine sur les écosystèmes marins. En effet, les sons produits par les activités humaines, tels que le trafic maritime, les sonars militaires et les explorations sismiques, perturbent la communication, la navigation et les comportements des espèces marines, notamment des cétacés. Ainsi, la pollution sonore sous-marine constitue une menace sérieuse pour la faune marine, affectant sa capacité à communiquer, à se nourrir et à se reproduire, ce qui peut entraîner des conséquences écologiques majeures.
Il est donc recommandé de mettre en place des mesures de réduction du bruit anthropique dans les océans. Cela pourrait inclure la limitation de la vitesse des navires, l’adoption de technologies de propulsion plus silencieuses et la création de zones marines protégées où les activités bruyantes sont restreintes[48].
c. La mer Méditerranée : un hotspot écologique et politique
La Méditerranée ne représente que 1 % de la surface des mers, mais concentre 10 % de la biodiversité marine mondiale. Mer semi-fermée, elle cumule les vulnérabilités : surpêche, pollution plastique, tourisme de masse, espèces invasives, acidification accélérée… Elle est aujourd’hui en première ligne du changement climatique et identifiée comme l’une des zones les plus polluées par les plastiques au monde. L’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) estime qu’environ 229 000 tonnes de plastique y sont déversées chaque année, menaçant la biodiversité marine et la santé humaine. Sans intervention significative, cette pollution n’aura de cesse de s’aggraver jusqu’à doubler et atteindre 500 000 tonnes d’ici 2040[49].
Face à cette situation, il est urgent de :
- Coordonner un plan méditerranéen de restauration écologique, impliquant États, régions, villes, scientifiques et sociétés civiles, en s’appuyant sur une coalition méditerranéenne pour la Mer allant au-delà des seules initiatives locales (Nice, Monaco) ;
- Créer un réseau d’aires marines strictement protégées, couvrant les zones les plus sensibles (delta du Rhône, golfe du Lion…) ;
- Réguler les pressions anthropiques : mouillages, croisières, ports, artificialisation des littoraux.
3. Grands fonds marins : sanctuariser l’inconnu
L’exploitation minière des grands fonds marins, visant notamment les nodules polymétalliques riches en métaux rares tels que le nickel, le cobalt et le manganèse, suscite de vives inquiétudes quant à ses impacts sur des écosystèmes abyssaux encore largement méconnus et d’une extrême fragilité. Une étude récente a révélé que les espèces vivant autour des sources hydrothermales occupent des aires de distribution bien plus restreintes qu’on ne le pensait auparavant, soulignant ainsi leur vulnérabilité face aux perturbations humaines[50].
Face aux incertitudes économiques et environnementales entourant l’exploitation minière des grands fonds marins, un collectif international de scientifiques recommande un moratoire de 10 à 15 ans sur cette activité. Cette pause permettrait d’approfondir les connaissances scientifiques sur ces écosystèmes fragiles avant toute décision d’exploitation[51].
Pour préserver ces environnements uniques, il est proposé :
- La suspension immédiate de toute exploration en grands fonds ;
- Des efforts diplomatiques de la part de la France pour faire adopter un protocole de non-exploitation à l’ONU ;
- Un investissement scientifique accru pour documenter ces zones extrêmes et leurs rôles dans les cycles biogéochimiques globaux.
Ces mesures visent à garantir que toute décision future concernant l’exploitation des ressources des grands fonds marins soit fondée sur une compréhension scientifique approfondie et une évaluation rigoureuse des risques environnementaux.
Donald Trump et l’exploitation des grands fonds marin : une attaque en règle contre le multilatéralisme Le 24 avril 2025, un décret visant à « libérer les minéraux et ressources critiques offshore de l’Amérique » – autrement dit, à autoriser l’exploitation minière des grands fonds marins – a été signé par le Président américain. Celui-ci s’appliquerait y compris dans la « Zone » définie par la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM) comme patrimoine commun de l’humanité. Ce décret soulève de vives préoccupations quant à une remise en cause du multilatéralisme en droit international de la mer[52]. La Zone, qui englobe le sol et le sous-sol marins au-delà des juridictions nationales, est régie par des principes de non-appropriation et d’utilisation dans l’intérêt de l’humanité tout entière. L’Autorité internationale des fonds marins (AIFM) est chargée de superviser les activités dans cette région, assurant une gestion équitable et durable des ressources. Le décret de Donald Trump, motivé par des considérations économiques et de sécurité nationale, notamment la réduction de la dépendance aux minerais critiques étrangers, ne mentionne pas explicitement la CNUDM. Les États-Unis, n’étant pas parties à cette convention ni à l’Accord de 1994 relatif à son application, ne sont pas légalement tenus par ses dispositions. Cependant, cette initiative unilatérale est perçue comme une atteinte aux efforts internationaux visant à préserver les écosystèmes marins profonds et à promouvoir une gouvernance collective des ressources marines. En somme, le décret américain pourrait fragiliser les principes établis par la CNUDM et compromettre les mécanismes de coopération internationale en matière de gestion des grands fonds marins. |
Qu’il s’agisse de la biodiversité ou des grands fonds marins, la connaissance scientifique des mers et océans apparaît essentielle pour piloter les politiques publiques et les actions diplomatiques, du niveau local jusqu’à l’échelle internationale.
IV. Une gouvernance bleue à construire : science, diplomatie, territoires
Aucune stratégie maritime sérieuse ne peut s’écrire sans une gouvernance adaptée à la complexité de l’océan. La mer n’est pas un territoire comme les autres : mouvante, transfrontalière, régie par des conventions internationales aussi bien que par des souverainetés nationales. Elle est le lieu d’intersections entre climat, commerce, biodiversité, ressources, sécurité et science. Et pourtant, elle reste encore largement sous-gouvernée.
La puissance publique, pour être à la hauteur, doit articuler les échelles – des littoraux à l’ONU –, les temporalités – du court terme politique au temps long géologique – et les disciplines – du droit à l’océanographie, de la diplomatie à l’économie. Il en va de la mer comme du climat : seule une alliance entre savoirs, États, territoires et sociétés civiles permettra de préserver et régénérer ce bien commun mondial.
1. Pour une diplomatie bleue pionnière : faire de la France une puissance maritime au service du multilatéralisme
Face à l’urgence écologique et à la nécessité de préserver les océans, la France ambitionne de devenir une puissance maritime engagée dans le multilatéralisme. En la matière, sa diplomatie s’est récemment illustrée par des positions fortes : opposition à la pêche électrique, soutien aux aires marines protégées, appel à un moratoire sur l’exploitation des grands fonds marins et engagement en faveur d’un traité international contre la pollution plastique. Cependant, ces initiatives restent parfois isolées ou insuffisamment mises en valeur.
L’UNOC 3, co-organisée par la France et le Costa Rica à Nice du 9 au 13 juin 2025, représente une opportunité majeure pour renforcer cette diplomatie bleue. Il s’agit notamment de promouvoir la mise en œuvre du Traité BBNJ, adopté après près de 20 ans de négociations, visant à protéger la biodiversité marine au-delà des juridictions nationales[53]. La France devrait défendre l’instauration d’un traité international juridiquement contraignant sur la pollution plastique, incluant des objectifs de réduction, d’interdiction et de substitution, est également cruciale. Inspirée du Green Deal européen, la France pourrait proposer un « Pacte bleu » multilatéral en faveur des mers et océans, visant à renforcer leur gouvernance, promouvoir une économie bleue durable et encourager l’innovation scientifique.
Au niveau européen, l’instauration d’un label « Capitale européenne de la Mer », sur le modèle de la Capitale européenne de la culture, permettrait de valoriser chaque année une ville littorale engagée dans la transition maritime, la préservation du patrimoine côtier et la participation citoyenne. La ville de Marseille, premier port français, pourrait être une candidate idéale pour inaugurer ce label[54].
Enfin, la diplomatie maritime ne peut reposer uniquement sur les États. Elle doit s’appuyer sur des coalitions d’acteurs variés : villes portuaires prêtes à agir sur les mobilités, les pollutions et le tourisme ; réseaux de collectivités littorales actives sur l’adaptation côtière ; ONG environnementales jouant un rôle moteur dans les négociations internationales et acteurs privés engagés dans la transition bleue, tels que les armateurs, les industriels et les financeurs. Cette approche inclusive est essentielle pour construire une gouvernance océanique efficace et durable.
Une diversité d’initiatives collectives en faveur de la mer Coalitions et réseaux d’acteurs sont multiples dans le domaine maritime, illustrant la diversité des initiatives collaboratives (public, privé, associations, fondations…) en faveur de la protection et du développement durable des mers et océans. En voici quelques exemples :
Coalition des villes et régions côtières : lancée officiellement ce mois de juin à Nice, en marge de l’UNOC 3, cette coalition vise à réunir plusieurs centaines d’élus de villes et régions côtières du monde entier, représentant 1 milliard de personnes directement menacées par l’élévation du niveau de la mer d’ici 2050. Elle se structure autour de trois axes principaux : la coopération scientifique et la prévention des catastrophes naturelles ; la coopération décentralisée entre collectivités ; et la mobilisation de financements pour réaliser les actions nécessaires face à ce défi[59]. |
2. La science, levier de souveraineté et de légitimité pour l’action publique
a. Mieux connaître pour mieux décider
Les mers et océans demeurent l’un des écosystèmes les moins explorés de notre planète. À ce jour, seulement environ 25 % des fonds marins ont été cartographiés avec précision, et moins de 0,001 % ont été observés directement par des instruments scientifiques. Cette méconnaissance limite notre capacité à comprendre et à anticiper les changements environnementaux majeurs.
Les effets des dérèglements climatiques sur la mer sont multiples et encore mal modélisés. Ils incluent la modification des courants océaniques, la réduction de la production de phytoplancton et la diminution de l’efficacité des puits de carbone marins. Ces changements peuvent entraîner des perturbations significatives des écosystèmes marins et de la régulation climatique globale.
Pour renforcer l’action publique, sur la base de connaissances scientifiques solides, il conviendrait tout d’abord de renforcer les instituts de recherche océanographique français tels que l’Institut français de recherche sur la mer (Ifremer) ou le Service hydrographique et océanique de la Marine (SHOM), en augmentant leurs moyens humains et financiers. Il serait également recommandé d’investir dans les technologies marines de mesure (satellites, balises, drones sous-marins et modélisation numérique), pour améliorer la collecte et l’analyse des données océaniques ; ainsi que de favoriser l’open science en rendant les données marines accessibles à tous via des plateformes telles que le portail des données marines opéré par l’Ifremer. Cette question de l’accès aux données devient d’autant plus cruciale que l’administration Trump a brusquement mis fin aux échanges scientifiques avec l’Ifremer, entraînant une fragilisation des moyens d’observation océanographique. Il devient urgent, pour l’UE et la France, de reconstituer cette capacité technique géostratégique[60].
b. Défendre une expertise indépendante et intergouvernementale : pour un « GIEC des mers et océans »
Il serait souhaitable qu’à l’occasion de l’UNOC 3, la France plaide activement pour la création d’un « GIEC des mers et océans », de nature intergouvernementale et placé sous l’égide de l’OMI, afin de fournir des évaluations scientifiques indépendantes sur l’état des écosystèmes marins[61].
Dans un contexte de tensions géopolitiques croissantes sur les océans, la neutralité scientifique constitue un outil diplomatique essentiel. Ce futur « GIEC des océans », s’il voit le jour, devra garantir une expertise indépendante, à l’abri des influences économiques ou étatiques. La France peut jouer un rôle clé en capitalisant sur son expérience avec le GIEC climat, l’IPBES et les agences de l’ONU pour promouvoir une gouvernance scientifique impartiale.
c. Éduquer à la mer
Par ailleurs, la diffusion de la culture scientifique maritime est cruciale pour sensibiliser le public et favoriser une compréhension globale des océans. Ainsi, cela passe par intégrer une culture maritime dans les programmes scolaires, en lien avec l’éducation au développement durable, pour former les citoyens de demain. Il est également essentiel de soutenir des lieux de médiation scientifique sur l’océan, tels que les ports centers, musées ou universités, pour promouvoir la connaissance et l’engagement du public envers la préservation marine.
En renforçant la recherche océanographique, en garantissant l’indépendance de l’expertise et en diffusant la culture maritime, la France pourra d’autant mieux asseoir sa souveraineté scientifique et légitimer son action publique en faveur des mers et océans.
3. Les territoires littoraux, en première ligne
a. Le rôle stratégique des collectivités littorales
Les collectivités littorales, qu’il s’agisse des Régions, des intercommunalités ou des communes côtières, jouent un rôle crucial dans la mise en œuvre des politiques maritimes. Elles sont en première ligne pour l’aménagement du territoire, l’urbanisme et l’adaptation, la gestion des ports, ou encore la mobilisation citoyenne locale.
Il est donc essentiel de créer un cadre contractuel clair entre l’État et les collectivités sur les politiques maritimes, afin de renforcer la cohérence et l’efficacité des actions menées sur le terrain.
b. Un « Pacte Mer-Régions » pour une gouvernance partagée
Face aux défis croissants liés au changement climatique, à la biodiversité marine et à la transition maritime, il est impératif de renforcer la coopération entre l’État et les territoires littoraux et ultra-marins. La mise en place d’un « Pacte Mer-Régions » structurant permettrait de clarifier les compétences partagées, notamment dans les domaines de l’économie bleue, de la protection du littoral, de la recherche maritime et du soutien à l’innovation. Ce pacte viserait à organiser les responsabilités, garantir les cofinancements et permettre le déploiement de contrats de transition maritime, co-construits entre l’État, les Régions et l’ensemble des collectivités littorales.
Les contrats de transition maritime territorialisés : des outils clés pour l’action locale Inspirés des contrats de relance et de transition écologique (CRTE), les contrats de transition maritime seraient des instruments contractuels visant à accompagner les territoires littoraux dans leur transformation écologique et économique. Ils intégreraient des volets tels que la décarbonation des activités maritimes, l’adaptation au changement climatique, la préservation de la biodiversité marine et le développement de l’emploi local. Ces contrats favorisent une approche intégrée et participative, mobilisant l’ensemble des acteurs locaux, des collectivités aux entreprises, en passant par les associations et les citoyens. |
c. Le Conservatoire du littoral : un acteur clé de la préservation des espaces côtiers
Le Conservatoire du littoral joue un rôle déterminant dans la protection des espaces naturels littoraux. Depuis sa création, il a pour mission d’acquérir des terrains fragiles ou menacés en bord de mer et de lacs, afin de les préserver de l’urbanisation et de les gérer de manière durable. Ces terrains, une fois acquis, sont confiés à des collectivités locales ou à des associations pour en assurer la gestion, dans le respect des orientations arrêtées. Le Conservatoire contribue ainsi à la préservation de la biodiversité, à l’équilibre des littoraux et à la sensibilisation du public à la protection de l’environnement. À ce jour, on compte plus de 840 sites protégés grâce à son intervention.
En 2025, à l’occasion de son 50e anniversaire, le Conservatoire du littoral renforce son engagement pour une gestion partagée, durable et résiliente des littoraux, en lien avec les collectivités territoriales et les acteurs locaux[62]. Toutefois, son modèle financier devrait être renforcé. Son budget repose en grande partie sur la taxe annuelle sur les engins maritimes à usage personnel (TAEMUP), qui constitue sa principale source de financement. Or, la perception de cette ressource fiscale est plafonnée chaque année, malgré l’augmentation continue et à venir des besoins financiers liés à l’acquisition et à la gestion des sites.
Conclusion
En définitive, la mer représente bien plus qu’un espace économique ou un champ de batailles géopolitiques. Elle est un organisme vivant, un régulateur planétaire, un miroir de notre rapport au monde. Si nous avons trop longtemps pensé l’océan comme une immensité inépuisable, aujourd’hui les signaux d’alerte se multiplient : pollutions, acidification, effondrement de la biodiversité, montée des eaux… L’horizon marin n’est plus une promesse d’infini, il est devenu la ligne de front de l’urgence écologique.
Dans ce contexte, la France porte une responsabilité singulière. Avec le deuxième domaine maritime mondial, elle est dépositaire d’une part décisive de la biodiversité marine, mais aussi d’un savoir-faire, d’une histoire, d’une culture maritime qu’il est urgent de raviver. Être une puissance maritime au XXIᵉ siècle ne signifie plus seulement contrôler des routes commerciales ou exploiter des ressources ; cela signifie protéger, restaurer, régénérer.
Le Pacte bleu durable que cette note propose est une condition de souveraineté politique, écologique et économique. Il implique, d’abord, de redonner à la mer toute sa place dans le récit national. Non plus comme un arrière-plan discret ou un espace périphérique, mais comme un pilier essentiel du projet républicain pour le XXIᵉ siècle. Il est urgent de placer l’océan au cœur de notre imaginaire collectif, dans nos politiques publiques, dans nos trajectoires de planification écologique, afin que la mer ne soit plus reléguée mais pleinement intégrée aux stratégies de transition et d’adaptation au changement climatique.
Ce pacte appelle également à une profonde réforme de l’économie maritime. L’objectif est de construire une économie bleue résiliente et décarbonée, tournée vers les filières d’avenir. Le transport maritime, les ports, la pêche, les EMR doivent devenir les laboratoires d’une croissance régénérative, rompant avec les logiques extractivistes et pilotée par un horizon de long terme.
Il est aussi indispensable de repenser en profondeur notre rapport aux écosystèmes marins. Protéger ne suffit plus : il faut restaurer, réparer, régénérer les milieux dégradés. Ce Pacte bleu impose ainsi de mettre en œuvre des politiques ambitieuses de protection stricte des espaces marins et de lutte déterminée contre toutes les formes de pollutions, notamment plastique.
Enfin, il engage à construire une gouvernance maritime forte, démocratique et éclairée par la science. Gouverner la mer aujourd’hui, c’est conjuguer expertise scientifique, coopération diplomatique et mobilisation des territoires littoraux. C’est bâtir des institutions agiles, capables d’arbitrer entre les usages, de défendre le bien commun océanique au sein des enceintes internationales, et d’associer pleinement citoyens, collectivités et acteurs économiques aux décisions qui engagent l’avenir marin et océanique.
À la croisée de l’écologie, de l’économie et du multilatéralisme, la mer impose une nouvelle méthode politique : celle de la coopération, de l’humilité scientifique, de la régénération plutôt que de la prédation et de l’exploitation sans limite.
La Conférence des Nations Unies pour les Océans à Nice doit constituer une étape décisive. En tant que pays hôte et co-organisateur, la France a l’opportunité historique de porter un projet mobilisateur, de souveraineté et de progrès, fondé sur l’exemplarité, l’innovation, la solidarité entre les peuples et avec les générations futures.
[1] Jules Verne, « Vingt mille lieues sous les mers »
[2] https://www.mer.gouv.fr/mer-en-commun/la-mer-en-commun
[3] https://www.diplomatie.gouv.fr/en/french-foreign-policy/climate-and-environment/the-preservation-of-biodiversity/article/biodiversity-what-is-the-situation-in-france
[4] https://unctad.org/fr/publication/etude-sur-le-transport-maritime-2023
[5] L’Union européenne (UE) se place en première position, avec une ZEE totale de 25 millions de km² pour l’ensemble de ses États membres
[6] Cf partie II de la présente note
[7] Source : https://www.info.gouv.fr/organisation/secretariat-general-de-la-mer-sgmer/presentation-du-sgmer
[8] Directive 2014/89/UE du Parlement européen et du Conseil du 23 juillet 2014 établissant un cadre pour la planification de l’espace maritime
[9] Cf partie IV de la présente note
[10] Telle que définie par l’Annexe VI de la convention MARPOL
[11] https://www.dirm.mediterranee.developpement-durable.gouv.fr/restitution-de-l-etude-ineris-du-18-janvier-2019-a2862.html
[12] https://presse.bpifrance.fr/cma-cgm-et-bpifrance-annoncent-le-lancement-operationnel-du-fonds-de-dotation-pour-la-filiere-maritime-francaise-de-200-millions-deuros-finances-via-pulse-le-fonds-energies-de-cma-cgm
[13] http://ecologie.gouv.fr/sites/default/files/documents/27.05.2025_Dossier de presse – Comité interministériel de la mer 2025.pdf
[14] https://www.armateursdefrance.org/presse/armateurs-france-gican-ports-france-sunissent-lancer-plan-strategique-decarbonation-du
[15] https://documents1.worldbank.org/curated/en/099832306292211127/pdf/IDU0cb7d3e640d8b904d360974007f562050d2ef.pdf
[16] https://www.worldbank.org/en/news/press-release/2018/10/29/seychelles-launches-worlds-first-sovereign-blue-bond
[17] https://www.dirm.mediterranee.developpement-durable.gouv.fr/branchement-a-quai-zoom-sur-le-reglement-afir-a3187.html
[18] https://www.mrae.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/8184_cadrage_ps_gpmd.pdf
[19] https://www.marseille-port.fr/en/projets/cenaq
[20] https://www.senat.fr/rap/r21–546/r21–546_mono.html
[21] Ces termes désignent la production d’énergie grâce aux marées (marémotrice), aux vagues (houlomotrice), à la rencontre entre eau de mer et eau douce (osmotique), ou encore à la différence de température entre eaux de surface et eaux profondes (thermique)
[22] https://www.connaissancedesenergies.org/sites/connaissancedesenergies.org/files/pdf-actualites/Projet%20de%20PPE%20n%C2%B03%20soumis%20%C3%A0%20la%20consultation%20%E2%80%93%20Mars%202025.pdf
[23] https://www.ecologie.gouv.fr/politiques-publiques/eolien-mer
[24] https://lemarin.ouest-france.fr/energie/energies-marines/letat-consulte-la-filiere-de-leolien-en-mer-pour-le-prochain-appel-doffres-9f54bcba-0507–11f0-a7a0-db29bf98805a
[25] https://fne.asso.fr/actualites/planification-spatiale-maritime-des-progres-pour-l-eolien-en-mer-des-defis-pour-la
[26] https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/documents/20241018_DP_Eolien%20en%20mer.pdf
[27] Sur les contrats de transition maritime, voir partie IV de la présente note relative à la gouvernance
[28] https://www.fao.org/newsroom/detail/fao-report-global-fisheries-and-aquaculture-production-reaches-a-new-record-high/fr#:~:text=D’apr%C3%A8s%20l’%C3%A9dition%202024,millions%20de%20tonnes%20d’algues.
[29] https://tnova.fr/site/assets/files/61751/la_peche_europeenne_-_amelioration_fragile_et_avenir_incertain.pdf?1cx3ti
[30] Terra Nova, ibid.
[31] https://mer.gouv.fr/organismes-de-formation-aux-metiers-de-la-mer
[32] https://bloomassociation.org/wp-content/uploads/2024/03/Buldozees.pdf
[33] https://www.ecologie.gouv.fr/sites/default/files/documents/22020_DP_AMP_VF_compressed.pdf
[34] https://portals.iucn.org/library/sites/library/files/documents/pag-021.pdf
[35] https://www.marinebiodiversity.ca/marine-health-signals-how-scientists-track-ocean-biodiversity
[36] https://phys.org/news/2022–08-local-stakeholder-involvement-key-marine.html
[37] https://journals.openedition.org/sapiens/1560?
[38] https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/les-galapagos-un-modele-a-suivre-pour-proteger-les-oceans_177275
[39] https://www.galapagos.org/newsroom/conservation-of-galapagos-protected-areas/
[40] Edgar, G. J., Banks, S. A., Fariña, J. M., Calvopiña, M., & Martínez, C. (2014). Rising biomass of fishes in no-take zones of the Galápagos Marine Reserve. Biological Conservation
[41] https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/les-galapagos-un-modele-a-suivre-pour-proteger-les-oceans_177275
[42] https://www.mer.gouv.fr/traite-international-pour-la-protection-de-la-haute-mer-et-de-la-biodiversite-marine-bbnj#:~:text=Ce%20trait%C3%A9%20porte%20sur%20la, accord%20vital%20pour%20l’Oc%C3%A9an
[43] https://www.europarl.europa.eu/topics/fr/article/20181005STO15110/pollution-marine-donnees-consequences-et-nouvelles-regles-europeennes
[44] https://www.ecologie.gouv.fr/politiques-publiques/dechets-marins#:~:text=A%20l’%C3%A9chelle%20mondiale%2C%20on, %C3%A0%20la%20surface%20des%20oc%C3%A9ans
[45] https://www.nationalgeographic.fr/environnement/le-vortex-de-dechets-du-pacifique-nord-ferait-trois-fois-la-taille-de-la-france
[46] https://www.actu-environnement.com/ae/news/reprise-negociations-traite-pollution-plastique-45711.php4#note1
[47] https://emsa.europa.eu/newsroom/latest-news/item/5411-press-release-emter.html
[48] https://theconversation.com/preserver-les-oceans-du-bruit-humain-pour-mieux-les-proteger-239872
[49] https://iucn.org/fr/news/marine-and-polar/202010/plus-de-200–000-tonnes-de-plastique-sont-deversees-chaque-annee-en-mediterranee-rapport-de-luicn#:~:text=Gland%2C%2027%20octobre%202020%20(UICN, une%20mauvaise%20gestion%20des%20d%C3%A9chets
[50] https://www.ifremer.fr/fr/presse/exploitation-miniere-des-grands-fonds-la-science-alerte-sur-la-grande-sensibilite-de-la
[51] https://www.actu-environnement.com/ae/news/exploitation-miniere-ocean-grands-fonds-marins-moratoire-scientifiques-proclamation-46071.php4
[52] https://www.leclubdesjuristes.com/international/donald-trump-signe-un-decret-relatif-a-lexploitation-des-grands-fonds-marins-une-remise-en-cause-du-multilateralisme-en-droit-international-de-la-mer-10469/
[53] https://ocean-climate.org/en/unoc2025/
[54] Si bien qu’une association locale s’est constituée depuis plusieurs années afin de soutenir la candidature de la cité phocéenne : https://www.marseillecapitaledelamer.fr
[55] https://www.info.gouv.fr/organisation/secretariat-general-de-la-mer-sgmer/comite-france-ocean-0
[56] https://www.cluster-maritime.fr/
[57] https://ocean-climate.org/
[59] https://www.banquedesterritoires.fr/lancement-programme-de-la-coalition-des-villes-et-regions-cotieres-le-7-juin-prochain-nice
[60] Il s’agit notamment de 4 000 flotteurs profileurs autonomes du réseau mondial Argo – dont la France est partie prenante – qui mesurent en temps réel la température et la salinité de l’océan à l’échelle planétaire : https://www.franceinfo.fr/replay-radio/le-brief-politique/info-franceinfo-l-administration-trump-ordonne-la-fin-des-echanges-scientifiques-avec-l-ifremer_7096341.html
[61] https://www.aefinfo.fr/depeche/724152-aux-origines-d-ipos-giec-des-oceans-dont-le-lancement-formel-est-attendu-lors-de-la-conference-de-nice
[62] https://mer.gouv.fr/redecouvrez-la-richesse-des-littoraux-pour-les-50-ans-du-conservatoire-du-littoral