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Note

Développement des énergies renouvelables en France : des annonces ambitieuses, une mise en place défaillante, une filière industrielle tuée dans l’oeuf?

Le paquet énergie-climat, négocié sous la présidence française de l’Union européenne, prévoit que 23% de l’énergie consommée sur notre territoire proviendront de sources renouvelables en 2020. Selon Julien Marchal et Michel Poncet*, spécialistes des énergies renouvelables, l’approche retenue par le gouvernement pour remplir ces objectifs ambitieux pose problème : en privilégiant une logique basée sur la demande, elle retarde l’essor d’une filière industrielle verte nationale.

Publié le 

Saluée comme démarche d’implication de toutes les parties prenantes, le Grenelle de l’environnement a été l’occasion de fixer des objectifs de production d’énergies renouvelables ambitieux à l’horizon 2020 et 2050. Par ailleurs, la directive européenne 28/CE/2009 adoptée durant la présidence française de l’Union européenne impose à chaque Etat membre un objectif contraignant de production d’énergie renouvelable. Pour la France, cet objectif est cohérent avec les engagements issus du Grenelle de l’environnement : il s’agit que 23% de l’énergie finale consommée en 2020 sur notre territoire soit produite à partir de sources d’énergies renouvelables . En termes d’énergie produite, il s’agit de produire 20,6 Millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep) supplémentaires d’énergies renouvelables par rapport à la production de l’année 2006 où avaient été produits 18,6 Mtep d’énergies renouvelables et consommées 275,3 Mtep d’énergie.

Suite au Grenelle de l’environnement et aux comités opérationnels qui l’ont suivi, une série de mesures a été arrêtée par le gouvernement. Elle se traduit notamment à travers la loi Grenelle 1 et le projet de loi Grenelle 2, ce dernier devant encore être voté par le Parlement courant 2010.

Les mesures envisagées permettront-elles d’atteindre les objectifs fixés pour 2020 ? Derrière les annonces, y a-t-il une réelle volonté de faire de la France une pionnière en matière d’énergies renouvelables ?

Cette note analyse les mesures visant à développer les moyens de production d’énergie renouvelable. Elle ne traite pas de l’autre point essentiel identifié lors du Grenelle de l’environnement en matière d’énergie, à savoir l’augmentation de l’efficacité énergétique.

Des objectifs ambitieux de production d’énergies renouvelables pas nécessairement concrétisés

Le gouvernement a mis en place une série de mesures : incitations tarifaires, incitations fiscales, modification du code de l’urbanisme, simplification des démarches administratives, campagnes de promotion au niveau local… La plupart de ces actions ont pour but d’agir sur la demande, en baissant artificiellement le coût des installations de production ou en augmentation les recettes liées à la vente de chaleur ou d’électricité. Ces actions sur la demande, largement adoptées au niveau européen, nécessitent toutefois pour être pertinentes d’anticiper les évolutions de deux inconnues majeures : le prix de l’énergie fossile et la rapidité des progrès technologiques. Des incitations trop élevées conduisent en effet à des effets d’aubaine et à une ruée des investisseurs sur les énergies renouvelables ; à l’opposé, des incitations trop faibles ne permettent pas aux projets de se concrétiser. Il s’agit donc de trouver pour chaque filière le bon niveau d’incitation. Un exercice de dosage délicat dont le gouvernement actuel peine à se défaire.

Synthèse des objectifs de production d’énergie en France (Mtep)

2008

2020

part d’énergies renouvelables dans la consommation en 2020

TOTAL

consommation totale

181,0

155,0

23,4%*

dont énergies renouvelables

16,2

36,4

ELECTRICITE (dont chauffage électrique)

consommation totale

46,7

46,9

27,3%

dont production énergies renouvelables

6,4

12,8

hydraulique

5,7

6,0

éolien

0,4

4,8

photovoltaïque

0,0

0,5

Biomasse

0,4

1,4

Energies marines et autres

0,01

0,1

CHALEUR (hors chauffage électrique)

consommation totale

75

60

32,8%

dont production énergies renouvelables

10

19,7

solaire thermique

0,07

0,9

PAC

0,4

1,8

Chaudières et centrales biomasse

9,3

16,8

autres

0,2

0,2

TRANSPORT

consommation totale

45,6

42,0

10,0%

dont production énergies renouvelables

2,4

4,2

biocarburants

2,4

3,8

véhicules électriques

0,0

0,4

1 – Les énergies renouvelables dans les transports

1.1 – Les Biocarburants

Suite au Grenelle de l’environnement, le gouvernement s’est fixé l’objectif d’incorporer 10% de biocarburants dans les carburants conventionnels dès 2015, soit 2,8 Mtep (COMOP 10, loi d’orientation agricole de 2006). L’objectif 2020 est de 4 Mtep de biocarburants produits soit 13 à 14% de biocarburants dans les carburants. Ces objectifs sont compatibles avec la directive 28/CE/2009 qui impose aux Etats membres l’incorporation de 10% de biocarburants dans les carburants conventionnels à l’horizon 2020. Point important, cette directive fixe des critères de durabilité à respecter, dont en particulier la réduction avérée des émissions de gaz à effet serre de 35% par rapport aux équivalents fossiles.

L’évolution actuelle laisse à penser que l’objectif de 10% de biocarburants sera atteint en 2015 ou du moins avant 2020. De surcroît, la production sera majoritairement nationale (peu d’importations). La question de la durabilité des biocarburants produits n’est en revanche pas réglée pour l’instant. En tout état de cause, le scénario de développement actuel des biocarburants prévoit que les biocarburants de seconde génération (dont le bilan environnemental et CO2 est meilleur que ceux de première génération) n’auront qu’un rôle très faible d’ici 2020 : le chiffre avancé est d’ 1% de biocarburants de seconde génération en 2020.

La politique actuelle de développement des biocarburants est donc mitigée : certes l’objectif de 10% de biocarburants en 2020 sera atteint avec sans doute un léger excédent, mais les efforts pour développer des biocarburants moins émetteurs de gaz à effet de serre sont insuffisants. Le risque est donc de voir la France perdre progressivement sa place de leader européen des biocarburants au profit d’un pays qui aura su effectuer les efforts de R&D dans les biocarburants de seconde génération. La recherche dans le secteur des biocarburants de seconde génération doit être appuyée, avec un objectif de 3 à 5% de biocarburants de seconde génération en 2020.

1.2 – Les véhicules électriques

Le plan national de développement des véhicules hybrides et rechargeables annoncé par M. Borloo le 20 novembre 2009 prévoit que 2 millions de véhicules électriques soient mis en circulation en 2020 (soit environ 6% du parc total) et plus de 5 millions (soit 15% du parc total) en 2030. Ces objectifs se traduisent en une baisse des importations de carburants fossiles de 4 Mtep en 2020 et 9 Mtep en 2030.

Les mesures annoncées dans ce plan sont diverses, car le déploiement massif des véhicules électriques rechargeables nécessite des changements profonds et notamment l’installation de dispositifs de charge dans les rues, les stations services, les maisons et les immeubles en copropriété. En termes de mesures promotionnelles, le gouvernement a privilégié :

- d’une part le dialogue avec les constructeurs. Le plan annonce en effet la sortie de modèles électriques par les principaux constructeurs français dès 2010.

- d’autre part une incitation à l’achat avec l’instauration d’un super bonus de 5000 € jusqu’en 2012

Si les objectifs de déploiement sont ambitieux et méritent d’être salués, l’adéquation des mesures avec la trajectoire fixée par le plan est difficile à évaluer. Plusieurs points essentiels sont en effet sans solution claire à ce jour :

- l’évolution du prix des carburants fossiles et le niveau de leur taxation (TIPP, taxe carbone européenne) qui conditionnent la compétitivité des véhicules électriques.

- les incitations à l’achat : les voitures électriques ne sont en effet pas compétitives avec les voitures classiques et offrent moins d’autonomie. Pour les particuliers, un crédit d’impôt a été instauré, mais il ne s’agit pas de la cible immédiate. Celle-ci est en effet constituée de grands groupes (la poste, EDF, les services de l’Etat…) possédant une flotte de véhicules effectuant des parcours quotidiens prévisibles. Pour cette cible, aucune incitation n’a à ce jour été proposée.

- le financement des infrastructures de charge : d’énormes investissements (plusieurs dizaines de milliards d’euros) sont à réaliser aussi bien chez les particuliers et les entreprises que dans les lieux publics. Par quel mécanisme ce financement interviendra t-il et quelle sera la part de financement public ? La nécessité de rentabilité pour les investisseurs privés et le déficit grandissant de l’Etat peuvent-ils permettre ce type de financement ? Aucune solution n’est à ce jour proposée.

- les adaptations juridiques : celles-ci sont nombreuses puisqu’il va s’agir de donner un statut juridique à des nouvelles installations (bornes de charge) situées dans des cadres juridiques différents (maison individuelle, copropriété, entreprise, lieux publics…) et soumis à des utilisateurs différents (voiture de passage dans les parking et lieux publics, propriétaire dans le cas d’une maison individuelle…). A ce jour aucune législation spécifique n’a été adoptée.

En tout état de cause, la décision de ne pas mettre en place de taxe carbone au niveau national est regrettable et ne donne pas d’incitation supplémentaire à l’achat d’un véhicule électrique. De plus, face au surcoût important à l’achat d’un véhicule électrique, un prêt bonifié, voire un prêt à taux zéro, pourrait être mis en place pour réduire la charge de l’investissement et permettre la diffusion rapide des véhicules électriques au sein des classes moyennes. Enfin, pour l’heure aucune mesure économique, juridique et aucune solution au financement des infrastructures ne permet de concrétiser les objectifs annoncés.

2 – La production d’électricité renouvelable

Outre le COMOP 10 du Grenelle de l’environnement et les lois Grenelle 1 et 2, le principal texte définissant la politique du gouvernement est la programmation pluriannuelle des investissements de production d’électricité 2009 (PPI). Elle précise un objectif global de production d’électricité renouvelable de 150 TWh (soit 13 Mtep) à l’horizon 2020, chiffre à comparer aux 67,5 TWh (soit 5,8 Mtep) d’électricité renouvelable produite en 2007 et aux 470 TWh (soit 49 Mtep) consommés en 2007 . La PPI détaille des objectifs pour chaque filière de production.

2.1 – L’hydraulique

Les capacités hydrauliques de notre territoire sont déjà bien exploitées puisqu’elles ont produit en 2007 93% de l’électricité renouvelable soit 63 TWh (5,4 Mtep). De plus, l’implantation de nouveaux réservoirs et de nouveaux barrages est désormais très contrainte par les exigences en matière de protection de l’environnement et notamment des poissons. Compte tenu de sa rapidité de mise en oeuvre, l’énergie hydraulique est principalement utilisée pour soutenir la demande de pointe que seules les centrales thermiques classiques sont autrement capables de soutenir. La PPI retient l’objectif raisonnable d’une production supplémentaire de 3 TWh pour l’électricité hydraulique, soit 0,6 Mtep à l’horizon 2020, ce surplus venant essentiellement d’une rénovation du parc existant.

L’électricité d’origine hydraulique est d’ores et déjà compétitive avec les sources d’électricité conventionnelles lorsqu’il s’agit de fournir les besoins de pointe voire de semi-base. Les incitations tarifaires ou fiscales ne sont donc pas requises pour assurer son développement. Pour l’heure, il s’agit d’identifier les meilleurs sites du point de vue environnemental et d’engager un dialogue avec les investisseurs. En ce sens, il est pour l’heure difficile de juger de l’action du gouvernement.

2.2 – L’éolien

L’énergie éolienne est le principal contributeur identifié par la PPI pour atteindre l’objectif de 13 Mtep d’électricité renouvelable en 2020. Elle prévoit ainsi un parc éolien d’une puissance totale de 25000 MW en 2020 dont 6000 MW d’éolien off-shore . Cette puissance correspond à une production annuelle de 55,5 TWh (soit 4,8 Mtep) dont 16 TWh (soit 1,4 Mtep) issus d’éoliennes off shore ; elle doit être comparée au 5TWh (0,43 Mtep) produit en 2008.

Plus d’un tiers de l’électricité renouvelable serait donc produite à partir d’éoliennes en 2020 . Il est à noter que le gouvernement a fait le choix de ne pas inciter au développement des éoliennes domestiques de faible puissance, pour des raisons à la fois paysagères et économiques.

Afin de dynamiser la filière et d’assurer la rentabilité des projets, le gouvernement a mis en place un tarif d’achat préférentiel de l’électricité d’origine éolienne. Ce tarif d’achat est jugé satisfaisant par les acteurs de la filière. Le gouvernement entend par ailleurs lancer rapidement un premier appel à projets concernant l’éolien off shore : d’une puissance de 500 à 1000 MW, il concernerait une ou plusieurs zones identifiées comme favorables : pas de conflit avec la pêche ou le transport maritime, pas d’impact paysager majeur, et coût de raccordement acceptable [2] . Les mesures d’aides adoptées par le gouvernement sont donc peu critiquables.

En revanche, suite à l’essor des projets depuis le début des années 2000, un fort mouvement de protestation s’est enclenché au niveau local pour protester contre les éoliennes défigurant les paysages. Afin d’apaiser les protestations, le gouvernement a mis en place deux mesures et réfléchit à une troisième mesure :

- Les Zones de développement de l’éolien (ZDE) : depuis 2007, tout parc éolien souhaitant bénéficier du tarif d’achat préférentiel doit être implanté dans une ZDE. La demande de classement d’un territoire en ZDE est une procédure administrative qui exige des études préalables ainsi qu’une concertation avec les élus locaux et la population. Toutefois, cette demande est rarement rejetée hormis pour des motifs techniques (proximité de radars, zones trop proches d’habitations ou d’un aéroport…). Il s’agit donc d’une démarche dont le but est de sélectionner les collectivités locales les plus motivées, les moins motivées n’ayant en général pas la volonté suffisante pour se lancer dans cette démarche administrative.

- Le classement des éoliennes sous le régime ICPE [3]  : il a été annoncé lors du plan de développement des énergies renouvelables de novembre 2008. Si les modalités de ce classement sont encore en définition, la nature même du classement en installations classées pour l’environnement imposera des contraintes très fortes sur les projets éoliens. Le but recherché par ce classement ICPE est de pouvoir prendre en compte des critères paysagers dans l’acceptation ou le refus d’un projet. Or, si la prise en compte du facteur paysager et de l’avis de la population locale est louable, il s’avère les démarches administratives liées au classement ICPE sont lourdes. Certes, le classement en régime ICPE permettra que les services déconcentrés puissent imposer des prescriptions aux porteurs de projet pour minimiser l’impact paysager (limitation de la hauteur, groupement pus dense des éoliennes…), mais il allonge en parallèle le temps de gestation des projets de plusieurs années.

- Un schéma régional de développement prescriptif : le projet de loi Grenelle 2 impose la réalisation de Schéma Régionaux Climat Air Energie (SCRAE). Ces schémas auront pour but de donner une vision globale de l’effort à effectuer par région : quelle augmentation en terme de solaire, d’éolien ou de biomasse, quelle efficacité énergétique, quelle densification… L’objectif, qui ne peut qu’être salué, est ainsi de dresser des feuilles de route indicatives pour décliner les objectifs nationaux par région. Cependant, suite aux protestations des élus locaux et des associations [4] , il est envisagé de rendre ces schémas prescriptifs pour l’éolien : le développement de nouveaux parcs éoliens ne serait plus possible que dans les zones identifiées comme « verte » sur le schéma. Cette hypothèse, qui peut paraître séduisante au premier abord est en fait une « fausse bonne idée ». En effet, les délais très courts de réalisation des schémas et la pression qui s’exercera sur les services déconcentrés de l’Etat lors de l’élaboration risquent d’aboutir à des plans à minima, où chaque élu, dans une logique NIMBY de plus en plus perceptible, aura fait pression pour que son territoire soit en zone rouge ou orange. Le résultat sera donc très probablement une planification prescriptive qui ne respecte pas les engagements nationaux. Face aux nombreuses pressions, il est aussi fort possible que l’élaboration des schémas prenne un retard indéfini et qu’aucun nouveau projet ne puisse se faire tant qu’ils ne sont pas sortis.

L’accroissement démesuré des démarches administratives est en contradiction avec les objectifs annoncés dans la PPI et les mesures de promotion. Il est aussi en contradiction avec la directive 28/CE/2009 qui prévoit une simplification des démarches administratives concernant les moyens de production d’énergies renouvelables.

La priorité est d’éviter que les schémas régionaux climat air énergie deviennent prescriptifs en matière d’éolien . Tous les spécialistes s’accordent pour dire qu’une telle démarche bloquerait de façon certaine le développement de l’éolien terrestre et ne se justifie en aucune façon. Rappelons que l’éolien doit contribuer à l’essentiel de la production d’électricité renouvelable en 2020 : si la majorité de la population juge que l’impact paysager des éoliennes est trop important, il faut baisser les objectifs nationaux et proposer une source d’énergie renouvelable en substitution à l’horizon 2020. En aucun cas, il n’est justifiable de « tuer discrètement » l’éolien via des schémas prescriptifs sans proposer d’alternative.

En second lieu, il convient de réfléchir à une alternative au classement ICPE pour prendre en compte l’aspect paysager. Cette alternative doit permettre aux services locaux de donner des prescriptions particulières pour chaque projet en matière de respect des paysages. En revanche, elle se doit d’être moins lourde au point de vue administratif pour ne pas retarder le développement des projets. Une solution pourrait par exemple être d’ incorporer dans l’étude d’impact environnemental un volet paysager obligatoire et prescriptif.

Par ailleurs, afin de favoriser l’acceptation locale vis à vis des projets éoliens, la participation financière des particuliers et des collectivités locales aux projets éoliens situés sur leur territoire doit être encouragée. Ce type de participation est déjà possible juridiquement et mis en oeuvre dans d’autres pays de l’Union européenne. Outre une campagne de communication et de promotion de cette pratique, il pourrait ainsi être judicieux d’imposer une participation minimale des acteurs locaux aux projets (par exemple une participation minimale à hauteur de 10%).

Enfin, en ce qui concerne la filière naissante de l’éolien offshore, il s’agit d’accélérer sa faisabilité juridique (conflits d’usages, zonage des projets, installation dans les eaux internationales…). Sur ce point, il semble que la lourdeur bureaucratique handicape sérieusement le développement des projets : alors que les projets danois et suédois sont en voie de réalisation, aucun projet français ne sera mis en service avant 2012, ce qui place les rares industriels français dans une situation préoccupante dans ce marché où le « premier présent » est souvent récompensé. Le retard industriel dans la filière éolien terrestre est pour beaucoup présenté comme irrattrapable. Il serait dommage que l’éolien off-shore suive la même voie pour des raisons de lourdeur administrative.

2.3 – La biomasse

La production d’électricité à partir de biomasse offre des perspectives intéressantes, notamment pour permettre de subvenir à la demande de pointe en hiver. Cependant, il convient de garder en mémoire que le débouché « naturel » de la biomasse est avant tout la production de chaleur et que l’électricité produite doit rester un élément secondaire [5] . En aucun cas ne doivent se développer des centrales biomasses majoritairement ou purement « électrogènes ». D’autres formes d’énergies sont en effet prioritaires pour la production d’électricité, soit parce qu’il s’agit de la forme primaire d’énergie qu’elle délivre (éolienne, photovoltaïque, hydraulique), soit parce que leur puissance est telle qu’elle ne peut être valorisée intégralement pour fournir de la chaleur localement (nucléaire). A l’opposé, la valorisation de la biomasse passe par sa combustion, et produire de l’électricité à partir de la chaleur a un rendement faible de l’ordre de 40%.

Par ailleurs, la combustion de biomasse rejette des particules fines nuisibles à la santé qui doivent être filtrées à la sortie des installations. Enfin, la combustion de biomasse ne doit pas entrer en conflit avec d’autres usages : agriculture, production d’engrais naturels (résidus de paille), papeterie et scieries. Pour toutes ces raisons, la PPI retient pour les installations en cogénération l’objectif de 1,44 Mtep de production d’électricité et de 2,4 Mtep de production de chaleur à partir de biomasse en 2020, chiffre à comparer aux 0,25 Mtep produits en 2007 .

Afin d’atteindre ces objectifs, le gouvernement a lancé une série de mesures :

- Mise en place d’un tarif préférentiel d’achat de l’électricité produite à partir de biomasse : ce tarif s’établit à 4,5 c€/kWh plus une prime facultative entre 8 et 13 c€/kWh attribuée en fonction de la puissance, des ressources utilisées et de l’efficacité. A noter que ce tarif permet de valoriser la partie électrique de l’installation en cogénération.

- Limitation de ce tarif d’achat aux installations de puissance supérieure à 5MW : ce seuil de puissance minimale a été retenu afin de limiter le développement de projets « domestiques » qui sont moins performants et ne sont pas soumis à l’installation de filtres à particules.

- Lancement d’un appel d’offre annuel pour la construction de centrales à biomasse en cogénération. Ce système d’appel d’offre a été mis pour permettre de valoriser le débouché chaleur. En effet, contrairement à l’électricité, il n’existe pas actuellement de tarif d’achat de la chaleur produite. La chaleur produite est donc valorisée au prix de marché ce qui ne permet pas la rentabilité de nombreux projets. Afin de remédier à ce problème, les porteurs de projets reçoivent dans chaque appel d’offre une subvention proportionnelle à la chaleur produite. En contrepartie, l’appel d’offre exige des porteurs de projets qu’ils fournissent un plan d’approvisionnement en biomasse ainsi qu’un débouché chaleur fiable (réseau de chaleur urbain, alimentation en chaleur d’un processus industriel…).

Critiques et propositions:

Le fait d’introduire un tarif d’achat de l’électricité produite et de valoriser en parallèle la chaleur produite au prix du marché entraîne un déséquilibre entre électricité et chaleur au profit de la production d’électricité. Or, la chaleur est le débouché naturel de la combustion ou de la fermentation de biomasse. Le système d’appel d’offre permet de pallier à ce déséquilibre. Mais pour un projet qui ne s’inscrit pas dans cet appel d’offre, rien n’est proposé pour rééquilibrer la production de chaleur. Le risque est donc de voir se développer des projets purement électrogènes en dehors du mécanisme d’appel d’offre. C’est pourquoi l’élaboration d’un dispositif de valorisation de la chaleur de manière systématique doit être lancée.

Les centrales à biomasse constituent un moyen de répondre à la demande d’électricité de pointe ou de semi-pointe. Or, avec l’instauration d’un tarif d’achat fixe quel que soit le niveau de la demande, les porteurs de projets biomasse ne sont plus incités à produire au moment de la pointe et choisissent par commodité de produire de manière continue. C’est pourquoi il serait utile d’instaurer dans le cahier des charges des contraintes horaires sur le moment de production.

2.4 – Le photovoltaïque

L’énergie photovoltaïque bénéficie d’une aura assez forte qui la place en tête des énergies d’avenir. Cependant, elle doit encore faire face à des coûts de production importants du fait des progrès techniques restant à accomplir. Les coûts de production des modules photovoltaïques sont actuellement de l’ordre de 2,5 €/W à comparer aux 1 €/W pour les éoliennes, qui de surcroît, fonctionnent plus régulièrement au long de l’année et produisent donc plus de kWh/an à puissance égale. La PPI retient un objectif modéré de 5 400 MW installé à l’horizon 2020, soit une production annuelle d’environ environ 6 TWh (0,5 Mtep).

Si des progrès technologiques restent nombreux à accomplir, l’essor de la filière photovoltaïque est d’ores et déjà très marqué puisque la capacité annuelle installée double depuis 2005. Fin 2009, 280 MW ont été installés et plus de 1000 MW sont en attente de raccordement. C’est pourquoi l’objectif retenu dans la PPI pourrait être atteint dès 2015 et jusqu’à 10 000 MW (11 TWh soit 0,9 Mtep) pourrait être installés en 2020. Nous proposons donc de revoir cet objectif à la hausse à 8000 MW afin de conforter le signal en faveur du photovoltaïque. Toutefois la trajectoire à suivre doit être plus progressive qu’elle n’est aujourd’hui afin de limiter les coûts pour le consommateur d’électricité et de laisser le temps à une industrie nationale de se créer.

Concernant la réglementation des installations photovoltaïques, l e gouvernement a mis en place à la fois une simplification des démarches administratives et un meilleur encadrement . Sur ce point, tout ou presque était à faire, puisque le corpus de règlements et de lois sur l’électricité n’était pas fait pour traiter de milliers de petites installations de faible puissance. Le décret 2009–1414 du 19 novembre 2009 et le projet de loi Grenelle 2 en cours d’examen réduisent les démarches administratives préalables à l’installation de dispositifs photovoltaïques et établissent un équilibre entre développement du photovoltaïque et protection des paysages et du patrimoine architectural. En parallèle, les centrales photovoltaïques au sol, pour lesquelles il n’y avait jusqu’à présent que très peu de réglementations, sont désormais solidement encadrées : elles sont soumises à permis de construire, étude d’impact environnementale et enquête publique. Le but de cet encadrement est d’éviter la prolifération de centrales au sol sur des endroits non souhaités, soit parce qu’il s’agit de zones naturelles, soit parce que l’impact paysager est important, soit parce qu’il s’agit de terres agricoles. Si les évolutions réglementaires engagées par le gouvernement sont positives, il reste à s’assurer qu’elles seront correctement appliquées afin de permettre l’essor rapide des installations sur toiture et de limiter le nombre de projets au sol aux meilleurs emplacements possibles (carrières, friches…)

Concernant les aides, le gouvernement a fait le choix d’une aide par la demande . Il a ainsi mis en place un crédit d’impôt de 50% pour les dispositifs photovoltaïques à comparer aux 25% des pompes à chaleur et 40% des chauffe-eau solaires. Mais le principal outil mis en place est le tarif d’achat de l’électricité photovoltaïque le plus élevé au monde malgré la baisse intervenue début 2010 : le tarif le plus élevé (58 c€/kWh [6] ) est réservé aux installations de faible puissance situées sur des bâtiments résidentiels, d’enseignement et de santé. Pour les installations sur les hangars agricoles ou les bâtiments tertiaires, deux tarifs intermédiaires de 50 c€/kWh et de 42 c€/kWh sont adossés respectivement à des conditions d’intégration au bâti et à des conditions d’intégration simplifiée au bâti. Pour les centrales au sol, le tarif varie de 31,4 c€/kWh à 37,75 c€/kWh selon la région d’implantation. Au-delà de 2012, il est prévu une dégressivité de tarifs pour les nouveaux contrats de 10%/an.

Il y a lieu de s’interroger sur la pertinence de ces aides à la demande et en particulier du niveau des tarifs d’achat. En effet, les coûts de fabrication des modules photovoltaïques [7] ont baissé annuellement de 20% par an ces deux dernières années et les prévisions font état d’une nouvelle baisse de 20% en 2010: la baisse de 10%/an à partir de mi-2012 parait dès lors à la fois trop lointaine et trop faible. De même, compte tenu de l’essor actuel y compris par des acteurs n’ayant que très peu à voir avec les énergies renouvelables et qui recherchent une rentabilité analogue à celle des produits bancaires, il est évident que le niveau actuel des tarifs est encore trop élevé -particulièrement pour les centrales au sol- et conduira rapidement à une nouvelle embolie de projets , certains investisseurs se prenant à créer des fermes solaires, des hangars ou des ombrières de parking dans le simple but de bénéficier d’une rente confortable via le tarif d’achat.

Si un niveau trop élevé des tarifs constitue assurément un moindre mal par rapport à un tarif trop bas, le risque est de voir rapidement grandir un rejet de la population face à la prolifération des installations photovoltaïques par des acteurs recherchant uniquement la rentabilité. L’autre risque majeur est de voir le coût de la CSPE (mécanisme de répercussion des surcoûts liés à l’obligation d’achat sur la facture des consommateurs d’électricité) augmenter considérablement. Compte tenu du niveau des tarifs envisagés et de l’augmentation de la puissance installée, la part de la CSPE liée au photovoltaïque et répercutée sur les factures des consommateurs d’électricité pourrait grimper à 2 milliards d’euros (soit 30€/an par foyer) en 2020 .

Il est souhaitable de diminuer le crédit d’impôt aux particuliers à 25% et d’avancer la dégressivité des tarifs d’achat dès fin 2010 au lieu de 2012. Cette dégressivité doit par ailleurs être calibré année par année pour coller à la baisse des coûts de fabrication.

En parallèle du tarif d’achat et du crédit d’impôt, une niche fiscale particulièrement inéquitable a été mise en place. En investissant dans une PME spécialisée dans le photovoltaïque, une personne peut défiscaliser soit 50% de l’investissement de son impôt sur la fortune (ISF), soit 25% de l’investissement de son impôt sur le revenu (IR). Cette niche fiscale, qui touche d’autres secteurs que le photovoltaïque, est justifiée par le fait que l’investissement est risqué : pour compenser le risque que la PME fasse faillite, l’Etat incite à l’investissement en offrant de la défiscalisation. L’explication ne manque pas d’une certaine validité dans le cas général, mais est complètement fausse dans le cas du photovoltaïque : les tarifs d’achat régulés et le crédit d’impôt garantissent en effet une absence presque totale de risque que la PME périclite. Avec ce mécanisme, les plus riches d’entre nous peuvent donc avoir le beurre et l’argent du beurre : ils investissent dans une entreprise qui leur versera des dividendes confortables et défiscalisent une partie de leur investissement.

Il est donc proposé de supprimer le plus vite possible cette niche fiscale qui permet la défiscalisation d’ISF ou d’IR lorsqu’une personne investit dans une PME spécialisée dans le photovoltaïque.

Enfin il y a surtout lieu de s’interroger sur la pertinence de ces aides à la demande (crédit d’impôt, tarif d’achat, exonération d’ISF ou d’impôt sur le revenu…) vis à vis du développement d’une filière industrielle sur le territoire. En effet, depuis 2008, une proportion de plus en plus importante des panneaux photovoltaïques installés sur le territoire est importée : 80 % des panneaux installés en 2009 proviennent d’usines chinoises. Sur ce point, le gouvernement se contente d’afficher sa volonté de créer une dynamique industrielle sans mettre en oeuvre de mesures permettant de limiter l’importation de panneaux d’Asie où ils sont produits 30 à 40% moins chers qu’en France. Les mécanismes de soutien à la demande, et en particulier le tarif d’achat, sont donc en partie captés par les industriels asiatiques via l’augmentation de leurs marges, ce qui leur permet d’accroître leurs efforts de R&D et de conforter leur position de leader. Le gouvernement adopte donc une posture schizophrénique alors que des mesures sont possibles afin de concilier atteinte des objectifs et développement d’une filière industrielle sur le territoire.

Informer de manière systématique tout porteur de projet sur l’importance de l’origine de fabrication des panneaux photovoltaïque sur l’économie nationale pourrait être un premier pas pour favoriser l’émergence d’acteurs nationaux.

Ce premier pas doit être conjugué avec d’importants efforts de R&D notamment dans les techniques de production viables d’ici 3 à 5 ans. L’INES [8] a pour but de fédérer les efforts de recherche ; l’Ademe a aussi un rôle important à jouer via le fond démonstrateur. Il convient de s’assurer qu’ils disposent des moyens financiers suffisants [9] .

En parallèle, il convient d’organiser dès aujourd’hui la levée des fonds (via des business angels ou des fonds d’investissement) qui seront nécessaires lorsqu’il faudra convertir ces efforts de R&D en application industrielle. Cette articulation R&D/industrie est traditionnellement un point faible : or le secteur du photovoltaïque est très capitalistique est aura grand besoin de cette articulation.

Pour éviter d’avantager inutilement les industries chinoises, il est nécessaire de diminuer à court terme le rythme d’implantation des panneaux photovoltaïques en France en revoyant à la baisse les tarifs d’achat et les autres incitations.

Enfin, une réflexion doit être lancée sur les possibilités juridiques de limiter l’importation de produits asiatiques. Cette réflexion pourrait d’inscrire dans une réflexion plus large sur la façon d’incorporer les conditions sociales et environnementales de fabrication dans le prix final de vente d’un produit. Sans cette réflexion, le risque est que les efforts de R&D soient insuffisants pour que les industriels français arrivent à percer le marché saturé de produits asiatiques à bas coûts (d’autant plus que la Chine dispose de moyens de R&D conséquents et que bas coûts ne signifie donc pas obligatoirement mauvais rendement ou mauvaise qualité).

2.5 – La géothermie et les énergies marines

La production d’électricité à partir d’installations géothermiques nécessite un sous-sol particulier avec des poches de chaleur peu profondes. Le potentiel sur le territoire français est très limité. C’est pourquoi la PPI retient pour 2020 un objectif inférieur à 0,1 Mtep .

En ce qui concerne les énergies marines (marémotrice, hydroliennes, énergie thermique des mers…), elles nécessitent encore des efforts de R&D importants. La PPI retient une contribution marginale en 2020 avec une contribution possible inférieure à 3,5 TWh (0,3 Mtep). Pour autant ces technologies, et en particulier les hydroliennes et les dispositifs exploitant l’énergie de la houle représenteront une part significative de la production à l’horizon 2030 et 2040, avec des prévisions pouvant aller jusqu’à 10% de l’énergie renouvelable en 2040.

Il s’agit donc de réaliser dès aujourd’hui des efforts de recherche et développement afin de démontrer la faisabilité à l’échelle industrielle de l’utilisation des énergies marines. Le fonds démonstrateur géré par l’Ademe et doté de 450 millions d’euros est le principal outil permettant de subventionner ces technologies naissantes. Un appel à manifestation d’intérêt propre aux énergies marines a été lancé en juillet 2009. Par ailleurs, le président de la république a récemment annoncé la création d’une plate forme technologique gérée par l’IFREMER au large de Brest.

Si ces deux initiatives vont dans la bonne direction, elles restent à coordonner (les projets financés par le fonds démonstrateur seront-ils réalisés sur la plate forme de l’IFREMER ?) et à pérenniser en terme de budget. Comme pour l’éolien offshore, il semble que la lourdeur bureaucratique et le manque de volonté politique handicapent la réalisation rapide de démonstrateurs. Le risque est donc de voir les acteurs industriels français se faire doubler par leurs concurrents irlandais et britanniques.

Afin d’assurer un développement rapide des filières marines, où, il faut le souligner, la place de leader est encore à prendre, un soutien plus marqué à la R&D apparaît souhaitable. De manière générale, les 450 millions du fond démonstrateur apparaissent insuffisants pour subventionner l’ensemble des filières renouvelables . Ce fond doit être doublé ou triplé [10] , et ¼ de son budget réservé aux énergies marines .

2.6 – Remarques sur l’intermittence

L’électricité éolienne et photovoltaïque sont des énergies dites « fatales », c’est à dire qu’elles sont intermittentes et que cette intermittence n’est pas contrôlable. Dans le cas d’un déploiement massif de l’éolien et du photovoltaïque, cette intermittence pose un problème pour maintenir à tout instant l’équilibre entre production et consommation. Ainsi entend t-on parfois que pour chaque éolienne installée, il faut aussi installer une centrale thermique classique prête à prendre le relais si l’éolienne ne fonctionne pas faute de vent. Le bilan environnemental et financier de ces énergies renouvelables fatales serait dès lors loin d’être évident… Ces critiques doivent cependant être tempérées :

- d’une part, le marché de l’électricité est désormais européen, et en cas d’absence de vent ou de soleil en France, il est possible d’importer de l’électricité d’autres pays voisins où il y a du vent. Cet effet de taille permet de lisser les fluctuations météorologiques. De plus, contrairement à l’Allemagne, la France a la chance de bénéficier de trois régimes de vents indépendants ce qui limite fortement la variabilité de production éolienne à l’échelle nationale.

- d’autre part, les progrès en matière de prévisions météorologiques permettent désormais de connaître très précisément et plusieurs heures à l’avance les conditions locales d’ensoleillement et de vent. Ceci permet aux gestionnaires de réseaux d’être en mesure d’anticiper les variations de production des énergies fatales et de prévoir des moyens de substitution. Parmi ces moyens, il n’y a pas que les centrales fossiles : l’hydraulique et la biomasse peuvent aussi jouer le rôle de substitution.

Le bilan des énergies fatales n’est donc pas aussi mauvais que les critiques laissent parfois penser. Certes, il est vrai qu’en hiver et par un jour sans vent, la production photovoltaïque et éolienne ne couvre qu’une petite partie des besoins et doit être complétée par d’autres sources de production. Mais, à l’opposé, dès que les conditions climatiques sont favorables, chaque kWh produit par une éolienne ou un dispositif photovoltaïque se substitue à un kWh qui aurait autrement été produit certainement par des centrales thermiques ou nucléaires.

En tout état de cause, RTE et ERDF indiquent dans leurs dernières études être en mesure d’équilibrer offre et demande d’électricité tant que la part d’électricité fatale est inférieure à 20%, part très supérieure aux scénarios du Grenelle pour 2020.

Des efforts sont enfin en cours pour modifier le réseau d’électricité et le rendre plus « intelligent » (smart grid en anglais). Derrière ce terme générique, il s’agit principalement :

- de renforcer les réseaux aux endroits où des puissances importantes vont être installées (parcs éolien off shore par exemple)

- d’optimiser la distribution d’électricité sur le réseau en l’équipant de systèmes de mesure et de contrôle permettant de mieux intégrer la production décentralisée de miliers d’installations photovoltaïques et éoliennes.

- de permettre le développement des « smart box », c’est à dire de dispositifs domestiques permettant de contrôler sa consommation et de l’ajuster manuellement ou automatiquement aux pics de production (coupure des appareils en veille entre 19h et 21h, coupure du chauffe-eau non utilisé en journée…)

A terme, il est aussi prévu que le réseau d’électricité « intelligent » permette de prendre en compte astucieusement l’énergie contenu dans les batteries des voitures électriques pour gérer la pointe de consommation électrique. Il s’agirait notamment, par un système de contrôle commande automatique, de décharger les batteries non-utilisées aux heures de pointe électrique et de les recharger aux heures creuses de nuit. Un tel mécanisme s’il est mis en place a la capacité de lisser la pointe de plus de 75% mais doit encore faire face à la levée de problèmes techniques et juridiques.

3 – La production de chaleur renouvelable

Environ 30% de l’énergie dépensée en France sert à chauffer les bâtiments. La production de chaleur à partir de sources d’énergie renouvelable est donc de première importance, même si elle est souvent considérée comme accessoire par rapport à la production d’électricité. La question de la production de chaleur est indissociable de la question de l’amélioration de la qualité thermique des logements . « Le meilleur kWh est celui qu’on ne dépense pas et non celui qui est produit à partir de sources renouvelables [11]  ». Nous ne présentons ici que les objectifs et mesures prises pour favoriser la production de chaleur renouvelable et ne traitons pas des mesures d’amélioration de la qualité thermique des bâtiments. La programmation pluriannuelle des investissements de production de chaleur 2009 est le principal document de planification en matière de chaleur.

3.1 – Le solaire thermique

Les objectifs affichés dans la PPI sont d’équiper 4 millions de foyers (0,82 Mtep) de chauffe-eau solaires d’ici 2020 , contre 850 000 foyers (0,017 Mtep) équipés début 2007. Pour les bâtiments tertiaires, l’objectif est de multiplier par 10 le nombre d’installations pour atteindre des économies de chauffage de 0,1 Mtep en 2020. L’effort principal porte donc sur les logements résidentiels. Les chauffe-eau solaires sont des dispositifs éprouvés déjà implantés par millions en Europe. Ils offrent de faibles perspectives d’amélioration technique.

Les mesures mises en place pour atteindre cet objectif sont incluses dans les mesures du « plan de rénovation des bâtiments ». Outre les campagnes d’information aux particuliers, les principales mesures sont :

- l’éco-prêt à taux zéro : lorsqu’un particulier s’engage dans une rénovation lourde de son logement, il peut bénéficier d’un prêt à taux zéro, l’Etat compensant les intérêts à verser aux banques à la place du particulier.

– le crédit d’impôt : son taux est de 40% du prix de l’équipement en 2009

Si ces incitations ont permis en 2007 et 2008 le décollage du marché des chauffe-eau solaires en France, la progression semble ralentir en 2009 à cause de la concurrence des panneaux photovoltaïques . En effet, les aides à l’installation de panneaux photovoltaïques sont très incitatives et assurent une rente confortable liée à la revente de l’électricité au tarif d’achat préférentiel. De même, le crédit d’impôt est plus favorable aux panneaux photovoltaïques : ne prenant en compte que le prix de l’équipement, il est en effet plus important pour des panneaux dont le coût de fabrication est cher. Il est dans l’intérêt général de réduire les incitations pour le photovoltaïque afin de redynamiser le marché du chauffe-eau solaire. Par ailleurs, à l’instar de certaines régions espagnoles, les constructions neuves du Sud de la France pourraient être obligées à disposer de chauffe-eau solaires. Enfin, il faut étudier la possibilité d’imposer en 2012 l’installation de moyens de production d’énergies renouvelables lors de rénovations lourdes de toiture, cette obligation étant accompagnée d’un mécanisme d’aide spécifique, par exemple par l’Anah, pour les ménages modestes.

Comme pour le photovoltaïque, les aides actuelles sont des aides à la demande et n’ont que peu favorisé la création d’un tissu industriel sur le territoire. Les perspectives de R&D étant assez faibles dans ce secteur, il semble désormais peu probable que des acteurs industriels français parviennent à s’implanter comme leaders sur ce marché. Néanmoins il peut être envisagé d’informer tout porteur de projet sur l’importance de l’origine de fabrication des panneaux solaires sur l’économie nationale lors de la demande de permis de construire.

3.2 – Les Pompes à chaleur et les chaudières biomasses domestiques

Les PAC et les chaudières biomasses ont connu un fort engouement dans les pays nordiques au début des années 2000. Dotée de ressources forestières importantes et ayant une expérience de longue date dans le chauffage électrique via le développement du parc nucléaire, la France place ces deux technologies comme essentielles dans le mix de chauffage.

La PPI retient des objectifs ambitieux :

- Pour les PAC, il s’agit d’équiper 2 millions de logements (1,9 Mtep) en 2020 contre 75 000 début 2007. A ces chiffres se rajoute le développement de puits géothermiques pour le chauffage collectif de bâtiments tertiaires (0,7 Mtep)

- Pour le chauffage au bois individuel, il s’agit de passer de 5,5 millions de foyers chauffés au bois en 2007 à 9 millions en 2020 . Toutefois, les systèmes installés étant plus performants et les bâtiments mieux isolés, la variation en termes de quantité de bois consommée serait nulle et représenterait 7,4 Mtep en 2020.

Les principales mesures d’aides pour atteindre ces objectifs sont les mêmes que pour les chauffe-eau solaires : crédit d’impôt et éligibilité sous conditions au prêt à taux zéro. Toutefois, dans le projet de loi de finances pour 2010, le gouvernement a décidé de ramener le taux de crédit d’impôt à 25% à partir de 2010 pour les PAC et les chaudières bois à moins qu’elles ne soient installées dans un bâtiment construit avant 1977. Cette baisse du crédit d’impôt est inexplicable, d’autant qu’elle est la même quelle que soit la performance de l’installation choisie alors que le but du crédit d’impôt est de tirer le marché vers les meilleurs installations disponibles. Pour les PAC, le risque est ainsi qu’à partir de 2010 les particuliers n’installent plus des PAC géothermiques plus coûteuses à l’investissement mais plus efficaces et se contentent de PAC air/eau moins chères mais moins performantes. Aussi , il est urgent de rétablir le crédit d’impôt à 40% pour les PAC et chaudières bois les plus performantes.

Enfin, comme pour le photovoltaïque, les aides actuelles sont des aides à la demande et n’ont que peu favorisé la création d’un tissu industriel sur le territoire. Les leaders historiques nordiques sont désormais peu à même d’être détrônés par un acteur français. Néanmoins il peut être envisagé d’informer tout porteur de projet sur l’importance de l’origine de fabrication des panneaux solaires sur l’économie nationale lors de la demande de permis de construire.

Remarque sur pompes à chaleur air-air

Depuis 2009, les pompes à chaleur air-air, ne sont plus éligibles au crédit d’impôt . Il a en effet été considéré que le marché des PAC air-air était suffisamment mature. De plus, ces PAC, qui ont l’avantage d’être très peu chères et de s’installer facilement, ont un rendement médiocre en particulier dans les régions froides . L’exclusion des PAC air-air du mécanisme du crédit d’impôt est donc légitime.

3.3 – Les centrales à biomasse et l’extension des réseaux de chaleur

Peu développée aujourd’hui, la combustion de biomasse dans des centrales de moyenne importance est amenée à croître dans les années à venir. Les sources de biomasse, les types d’utilisation de la chaleur et la taille des centrales sont variables. Il peut s’agir de résidus de paille, de déchets de bois, de déchets ménagers ; la chaleur peut être utilisée pour chauffer des logements via un réseau de chaleur ou pour alimenter un processus industriel énergivore ; les déchets de bois ou ménagers peuvent être dégradés pour former du biogaz brûlé sur place ou injecté dans un réseau urbain de gaz naturel ; la taille de la centrale peut varier de quelques mégawatts à plusieurs centaines.

La PPI retient les objectifs suivants :

- 2,4 Mtep de chaleur fournie par les centrales de grande puissance à biomasse fonctionnant en cogénération. Actuellement aucune installation n’est en service

- 1,2 Mtep d’injection de chaleur dans des réseaux de chaleur urbains ou teritaires par des centrales de faible puissance. Actuellement quelques installations fournissent 0,1 Mtep.

- 3,2 Mtep d’injection de chaleur renouvelable dans des process industriels contre 1,2 Mtep en 2007

- 0,5 Mtep de biogaz produit par la fermentation de végétaux contre 0,050 produit actuellement.

La PPI souligne que ces objectifs «  sont très ambitieux, mais atteignables si la volonté de tous est au rendez-vous ». De part la complexité des projets et leur relative unicité, les aides à la réalisation ne peuvent pas prendre la forme d’un crédit d’impôt ou d’un simple prêt bonifié. Suite au Grenelle de l’environnement, le gouvernement a donc décidé la mise en place d’un «  Fonds chaleur renouvelable » doté de 650 millions d’euros dont le but et de favoriser le financement de projets dans les secteurs de l’habitat collectif, du tertiaire et de l’industrie . Ce fonds agit soit comme une aide à l’investissement, soit comme une aide au kWh renouvelable produit, analogue à un tarif d’achat d’électricité. La constitution d’un tel fonds est indéniablement positive. En effet, le coût actuel de production de chaleur par des combustibles fossiles est faible, si bien que très peu de projets utilisant la biomasse comme source de chaleur ne sont compétitifs.

La difficulté à mobiliser la biomasse de façon pérenne et à lui assurer un débouché chaleur sont deux obstacles importants qui jusqu’à présent entraînent la frilosité des investisseurs, ceux-ci préférant investir dans des technologies plus standardisées comme l’éolien ou le photovoltaïque. De plus, les modalités administratives pour candidater à ce fonds peuvent s’avérer décourageantes pour les porteurs de petits projets. Enfin, carrefour entre agriculteurs, sylviculteurs et élus locaux, la production de chaleur à partir de biomasse se heurte pour l’instant à de nombreuses réticences. Il est difficile pour l’heure d’évaluer si la trajectoire suivie est en adéquation avec les objectifs retenus par la PPI.

  1. Michel Poncet est le pseudonyme d’un spécialiste des énergies renouvelables

  2. Le fond marin des côtes françaises plonge assez vite en dessous de 50 mètres de profondeur. Or, les technologies actuelles ne permettent pas à coût raisonnable de développer des parcs éoliens ancrés au sol si la profondeur excède 30 à 50 mètres. Les parcs « flottants » sont eux au stade de R&D préindustriels.

  3. Les installations classées pour l’environnement (ICPE) sont des installations reconnues comme présentant des risques significatifs de dégradation de l’environnement. La liste des types d’installations soumises à ce régime administratif contraignant est précisée dans les articles du titre I du livre V du code de l’environnement. Suivant sa dangerosité, chaque installation est soumise à un régime administratif plus ou moins contraignant. Le plus contraignant est le régime dit SEVESO.

  4. Cf. rapport parlementaire présidé par M. Ollier, disponible sur http://asset.rue89.com/files/energie_eolienne.pdf

  5. On parle de centrales en cogénération biomasse pour des centrales produisant à la fois de la chaleur et de l’électricité à partir de la biomasse

  6. Un particulier achète son électricité environ 10 c€/kWh ; le prix de gros sur le marché européen est de l’ordre de 5 c€/kWh.

  7. un système photovoltaïque est composé de modules photovoltaïques, de câblage électrique et de supports structurels. Il est relié au réseau par un onduleur. La baisse des coûts de fabrication concerne principalement les modules, qui jusqu’à présent étaient les éléments les plus coûteux ; avec cette baisse, le câblage et le support, dont les prix ne baissent que très peu, forment une part du coût total de plus en plus grande (jusqu’à 40%)

  8. institut national de l’énergie solaire

  9. Le grand emprunt prévoit d’allouer des sommes importantes aux énergies nouvelles et en particulier au photovoltaïque

  10. Le grand emprunt prévoit de doubler le montant fond démonstrateur.

  11. Le plan bâtiment issu du Grenelle de l’environnement de réduire de 38% la consommation des logements en France d’ici 2020.

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