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Note

Transparence des industries extractives: l’Europe sans ambition?

Malgré leur poids économique dans certains pays, les industries pétrolières, minières et gazières ne répondent pas toujours à des standards de transparence suffisants pour permettre la lutte contre la corruption et les détournements de fonds publics. Une proposition de la Commission européenne, en octobre 2011, envisageait d’obliger toutes les entreprises du secteur extractif à rendre public les paiements qu’elles versent aux gouvernements. La Commission des affaires juridiques du Parlement européen s’est prononcée hier sur ce projet, dans un contexte particulier : la législation américaine en la matière est entrée en vigueur il y a quelques jours, présentant une base solide pour améliorer la lutte contre la corruption. Pour être à la hauteur des enjeux, l’Union européenne, malgré les réticences allemandes et britanniques, ne doit pas rester en-deça du standard établi par les Etats-Unis.
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L’Union européenne s’attèle au renforcement de la transparence des industries extractives : une bonne nouvelle… qui risque d’être fort décevante si le Conseil de l’Union européenne reste en deçà de la toute récente législation américaine. Une fois n’est pas coutume, les Etats-Unis auraient-ils des leçons à donner à l’Europe en matière de régulation ?

En 2010, les exportations pétrolières et minières de l’Afrique représentaient environ 333 milliards de dollars[1], soit presque sept fois la valeur de l’aide internationale. Or malgré l’importance de cette industrie, ses opérations se font toujours dans une grande opacité, notamment les transferts d’argent effectués par les entreprises vers les autorités gouvernementales des pays d’intervention. Ce manque de transparence facilite les détournements de fonds publics et maintient paradoxalement la population de pays riches en ressources naturelles dans une extrême pauvreté. La Guinée équatoriale, par exemple, a beau avoir un PIB par habitant équivalent à celui de la Pologne, on estime que deux tiers de la population vivent avec moins de 1,25 dollar par jour.

La Commission européenne a souhaité profiter du renouvellement des directives comptables et de la directive sur la transparence[2] pour améliorer la transparence du secteur extractif. Selon sa proposition présentée en octobre 2011, elle voudrait obliger toutes les entreprises pétrolières, minières et gazières à rendre public les paiements qu’elles versent aux gouvernements afin de mieux traquer les flux. Le Conseil a depuis arrêté sa position et la Commission des affaires juridiques du Parlement européen s’est prononcée mardi 18 septembre, sur ce projet[3]. La négociation du texte final se fera alors en trilogue, c’est-à-dire entre le Conseil, le Parlement européen et la Commission.

Cette réflexion européenne devrait s’inspirer de l’exemple américain : les Etats-Unis ont adopté une législation similaire il y a deux ans dans le cadre de leur réforme du secteur financier. Elle est entrée en vigueur il y a quelques jours. La loi américaine présente une base solide pour améliorer la lutte contre la corruption et pourrait être le précurseur d’une nouvelle norme internationale, si l’Union européenne lui emboîte le pas.

Pour cela, l’Union européenne doit se doter d’une législation  qui remplit, au strict minimum, les mêmes conditions que la loi américaine : la divulgation des paiements pour chaque projet avec une définition précise de celui-ci ; un seuil de paiement suffisamment bas pour capter tous les paiements significatifs pour les populations concernées ; l’engagement de la responsabilité juridique des entreprises au cas où les données fournies seraient fausses ou trompeuses, et ce, sans prévoir d’exonération.

L’Union européenne devrait également profiter de la dynamique créée par les Etats-Unis pour aller plus loin et inclure d’autres secteurs particulièrement opaques, en appliquant la loi aux grandes entreprises non cotées et en exigeant la divulgation d’informations contextuelles permettant d’aller plus loin dans la lutte contre l’évasion fiscale, un fléau qui plombe notre continent autant que les pays en développement.  

L’Allemagne et la Grande-Bretagne s’opposent à des éléments clés de la future loi. Face à elles, il est important que la France s’investisse dans ce processus européen et se fasse le leader d’une loi ambitieuse.

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