Flambée des prix de l’énergie : limiter nos vulnérabilités

Flambée des prix de l’énergie : limiter nos vulnérabilités
Publié le 23 novembre 2021
La présente note soutient l’hypothèse que cette flambée des prix constitue surtout le signal avant-coureur des obstacles qu’il faudra surmonter pour réaliser la nécessaire transition du système énergétique vers un monde bas carbone : l’organisation d’un verdissement compatible avec la sécurité d’approvisionnement et préservant le pouvoir de vivre des ménages dans un contexte de hausse soutenue des prix.

Depuis janvier 2021, l’Europe connait une flambée des prix de l’énergie et le client final est impacté par cette hausse des coûts de production. 

De manière conjoncturelle, la reprise dynamique de la demande mondiale, qui intervient après plusieurs mois de baisse significative liée à la pandémie, a incontestablement eu un impact à la hausse sur l’ensemble des prix des énergies et du carbone. 

Mais, la présente note soutient l’hypothèse que cette flambée des prix constitue surtout le signal avant-coureur des obstacles qu’il faudra surmonter pour réaliser la nécessaire transition du système énergétique vers un monde bas carbone : l’organisation d’un verdissement compatible avec la sécurité d’approvisionnement et préservant le pouvoir de vivre des ménages dans un contexte de hausse soutenue des prix.

Pour cela, elle recommande de renoncer à une politique exclusive d’électrification, à se doter d’une politique européenne ambitieuse neutre technologiquement et à travailler sur la complémentarité des énergies renouvelables.

Face à une perspective de hausse structurelle des prix, qui touche inégalement les ménages, elle propose de mettre la lutte contre la vulnérabilité des ménages au prix des énergies au cœur des politiques publiques, en adoptant des politiques de transport et de rénovation thermique remettant la sobriété énergétique au cœur des préoccupations.

Depuis janvier 2021, l’Europe connait une flambée des prix de l’énergie. Concrètement, au deuxième semestre 2021, la situation est la suivante :   

  • le prix du carbone a presque doublé sur le marché de l’ETS, passant de 27€/t à 57€/t ; 
  • le prix du charbon a plus que doublé, passant de de 60 $/t à 150 $/t ; 
  • le prix du gaz (TTF) a été multiplié par six (de 8 à 45 EUR/MWh) ;
  • le prix de l’électricité a doublé en France en un an, été multiplié par 3 en 6 mois en Espagne et au Portugal, et a atteint 183 EUR/MWh au UK, actuellement le record en Europe. 

Le client final est impacté par cette hausse des coûts de production dans la mesure où la composante énergie représente, en moyenne européenne en 2019, 37% de la facture électrique (un peu moins de 50% pour le gaz) dans le secteur résidentiel. Les conséquences de ces évolutions sur les industriels les plus consommateurs d’énergie sont naturellement également structurantes, quelle que soit leur capacité à se couvrir contre le risque de variation des prix de l’énergie.

Cette hausse subite et générale se justifie par des raisons tant du côté de la demande que du côté de l’offre.  

De manière conjoncturelle, la dynamique reprise de la demande mondiale, qui intervient après plusieurs mois de baisse significative liée à la crise du COVID-19, a incontestablement eu un impact à la hausse sur l’ensemble des prix des énergies et du carbone. 

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Mais, cette note soutient l’hypothèse que la flambée des prix constitue surtout le signal avant-coureur des obstacles qu’il faudra surmonter pour réaliser la nécessaire transition du système énergétique vers un monde bas carbone, l’organisation d’un verdissement compatible avec la sécurité d’approvisionnement et préservant le pouvoir de vivre des ménages.

1. La flambée des prix de l’énergie témoigne des difficultés à surmonter pour réussir la transition énergétique vers un monde bas carbone

Les causes de la flambée des prix de l’énergie sont multiples. Au-delà de la reprise économique mondiale qui a conduit à une accélération brutale de la demande, des problèmes conjoncturels ont pesé sur l’offre. Les différentes énergies ont dû faire face à des contraintes nouvelles et à des réactions jusqu’alors peu connues sur le marché :  

  • suite aux annonces de la Commission Européenne sur le « Fit for 55 » et la révision du marché européen des quotas carbone, l’ETS, le prix du carbone a presque doublé. Cette internalisation des externalités négatives des productions énergétiques constitue une bonne nouvelle pour l’orientation de l’économie vers un monde bas carbone, mais révèle brutalement le renchérissement attendu des prix des énergies ;
  • pour le charbon, la situation du marché mondial est particulièrement tendue sur les chaînes d’approvisionnement (inondations en Indonésie, restrictions en Chine, troubles sociaux en Colombie et en Afrique du Sud) révélant en creux la dépendance encore très forte de l’économie mondiale à cette source d’énergie ;
  • pour le gaz, la pression sur les prix résulte de facteurs multiples : la baisse de la production de gaz domestique en Europe, ajoutée à plusieurs interruptions en Mer du Nord, à des tensions sur les approvisionnements russes, notamment à cause de la mise en service retardée du gazoduc NordStream 2 et des renouvellements du transit en Pologne, comme à plusieurs retards pris pendant la crise pour des projets d’unités de liquéfaction de gaz qui auraient dû permettre son transport longue distance par navire et par route ;
  • du côté de l’électricité, les moyens de production thermiques nécessaires à l’équilibrage des réseaux fixent le prix marginal. Dans un contexte de tension pour les mobiliser, les coûts de production ont augmenté concomitamment à la hausse des prix du gaz et du charbon.  

Mais la flambée des prix révèle également des problèmes structurels, ceux de la transition de notre système énergétique vers un monde bas carbone. 

La fermeture de certains moyens de production pilotables (centrales électriques nucléaires et au charbon) et la faible production électrique des énergies renouvelables ces derniers mois sont notamment en cause. Paradoxalement, le prix des énergies et particulièrement du gaz, a été tiré par ces difficultés du système électrique.  

La flambée des prix du gaz et de l’électricité est en effet aussi liée aux conditions climatiques, caractérisées par des épisodes frais au printemps (conduisant à des stocks de gaz particulièrement bas en début d’été), mais aussi à la faiblesse du vent et de l’ensoleillement qui ont contraint la production électrique renouvelable. Par conséquent, les énergies renouvelables n’ont pu qu’être très faiblement mobilisées, notamment en France où ne sont utilisés que 2–3 GW des 15 GW installés d’énergie éolienne. La faible production hydroélectrique au Brésil et en Chine a également été un facteur de pression sur les prix, le gaz naturel liquéfié (GNL) indispensable à la production électrique en substitution atteignant 60 EUR/MWh. A l’approche de l’hiver, les stockages de gaz sont désormais à un niveau bas.

La vulnérabilité du système énergétique aux aléas climatiques s’est donc accrue, a vocation à continuer de s’accroître dans les prochaines années et peut générer des tensions significatives sur les prix, qui s’ajoutent au renchérissement structurel du coût des énergies à l’occasion de leur bascule vers des sources renouvelables, comme des problèmes d’approvisionnement énergétique. 

La flambée des prix révèle donc les grands défis de la politique de l’énergie qui doit concilier trois objectifs : la transition écologique, bien sûr, qui demeure un impératif cardinal pour la survie de l’humanité et ne peut être reportée, la sécurité d’approvisionnement pour éviter les ruptures, black-outs, à l’image de la crise dramatique connue par le Texas l’an dernier, et la soutenabilité des prix pour les utilisateurs et notamment les ménages. A bien des égards, la flambée des prix de l’énergie constitue donc la première alerte sur les difficultés techniques et politiques à venir à l’occasion de l’indispensable transition énergétique en cours.

2. La complémentarité des énergies demeure indispensable à la résilience du système énergétique

2.1. Une politique exclusive d’électrification serait inadaptée

Face à une demande d’énergie en hausse – reprise économique, hiver rigoureux – et/ou un déficit d’offre, des moyens de production exceptionnels pour équilibrer le système énergétique d’un déficit de production éolienne et solaire s’avèrent indispensables. La crise actuelle interpelle donc sur la résilience du système face à la pénétration croissante de moyens de production non pilotables – le renouvelable a représenté 38% de la production électrique européenne en 2020. Les besoins accrus de flexibilité et de soutien vont se multiplier alors que de nombreuses unités thermiques sont appelés à disparaitre dans la décennie qui vient.  Or, ces besoins sont à ce jour fournis en Europe par les centrales fonctionnant au gaz fossile et au charbon, plus rarement au fioul. La France a annoncé la fermeture des centrales au charbon d’ici 2022 représentants 3 GW, et devrait avoir fermé 15 GW de capacités nucléaires d’ici 2035. De la même façon d’autres pays ont programmé la fermeture de capacités charbon (Allemagne, Royaume Uni, Italie, Pays-Bas) et nucléaires (Allemagne, Belgique) d’ici à 2030. Au total, cela représente plus de 90 GW de capacités pilotables qui auront été fermées d’ici 2030. Le constat se détériore encore au-delà avec l’annonce de la fermeture des dernières unités de production au charbon allemandes d’ici 2040 et le non-remplacement des centrales à gaz arrivant en fin de vie. Au total, le scénario TYNDP de l’ENTSOE publié en 2020 estime à 150 GW la puissance pilotable européenne en moins par rapport à aujourd’hui dès l’horizon 2040. La constitution d’une alternative capable de couvrir continument les besoins du système énergétique s’avère donc indispensable.

L’objectif de cette note n’est pas de suggérer que la production nucléaire s’avère dans ce contexte une alternative indispensable au développement des énergies renouvelables électriques qu’il faudrait au contraire freiner. Il est en effet possible d’équilibrer un système énergétique renouvelable à l’aide de molécules renouvelables, de gaz vert, de réseaux de chaleur renouvelable, de bois-énergie ou de carburants issus de la biomasse, dès lors que l’effort de sobriété énergétique est suffisant. Le développement d’une production non pilotable doit simplement être intégré dans un système permettant l’équilibrage comme la résilience face aux événements extrêmes. En revanche, si les efforts de sobriété énergétique, de rénovation thermique s’avéraient insuffisants, la construction de nouvelles centrales nucléaires deviendrait effectivement inéluctable pour compléter le mix 100% renouvelables et atteindre la neutralité carbone.

Les scénarios de RTE sur la demande électrique sont construits à partir de la trajectoire de référence du scenario « AMS » de la stratégie nationale bas carbone (SNBC), soit une demande de 645 TWh en électricité à horizon 2050, et comprennent une variante « Sobriété » pour quatre variantes d’augmentation de l’électrification sous l’effet de différentes hypothèses : échec de la rénovation thermique, réindustrialisation, adoption rapide du véhicule électrique ou essor de l’hydrogène, conduisant implicitement le gestionnaire de réseau électrique à pousser vers la construction de nouvelles centrales pour couvrir la demande. Mais même dans cette hypothèse, il demeure indispensable, comme à ce jour, de compléter les moyens de production électriques de moyens de production stockables capables de passer les pics de demande – ce que prévoit bien RTE.

A cet égard, la capacité offerte par les batteries demeure douteuse. En effet, le rêve de développer des solutions de stockage des électrons se heurte également à une contrainte physique : il est plus facile de stocker de l’énergie sous forme de molécules, d’eau dans les stations élévatrices, d’hydrogène ou de méthane que d’électrons. A titre d’illustration, la capacité des stockages souterrains de gaz aujourd’hui installée et disponible en France est de 130 TWh, représentant un peu plus de 25% de la consommation annuelle de gaz. Cette capacité de stockage constitue l’un des principaux leviers de flexibilité mis en œuvre par le système énergétique français. Si l’on regarde les projets de batteries industrielles, le projet de HDF Energy en Guyane par exemple, plus grand projet en termes de capacité de stockage installée en 2019 associant à une centrale solaire une unité de stockage de 140 MWh basée sur une solution batterie lithium-ion et hydrogène, il faudrait répliquer ce projet près d’un million de fois pour atteindre une capacité installée équivalente à l’énergie stockée dans les stockages de gaz, uniquement pour la France. Les batteries progresseront sans doute encore grâce aux efforts des industriels mais n’offriront probablement pendant longtemps de solutions que pour des variations limitées et ponctuelles de la demande, pas pour répondre à un déséquilibre important. La consommation de métaux rares comme le recyclage de ces batteries en fin de vie devront en outre être traités.

2.2. Un cadre européen ferme sur l’objectif mais adaptable localement serait préférable

Proposition : assurer la neutralité technologique des choix énergétiques

L’objectif de transition énergétique demeure la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Cette réduction suppose la fin progressive de l’usage du charbon et des hydrocarbures fossiles pour leur substituer des énergies bas carbone. De ce point de vue, l’essentiel n’est pas de mener une politique orientée vers le soutien à telle ou telle énergie, mais de s’assurer que le système énergétique se décarbonise suffisamment vite. Une électrification partielle des usages est notamment inévitable pour évincer les hydrocarbures fossiles, mais parier à l’excès sur cette solution en confondant le moyen et l’objectif serait sous-optimal.

Un observateur de la politique énergétique européenne pourrait alors s’étonner du choix fait d’électrifier massivement, sans adaptation possible aux contextes locaux et sans adoption possible d’alternatives permettant d’atteindre des résultats supérieurs. Il n’est pas question de regretter ici le volontarisme de la Commission européenne sur les questions environnementales, qui permet au contraire de construire la politique commune dont les Européens ont besoin face à un choc symétrique et de rétablir la lisibilité de son action pour les citoyens. Il n’est pas non plus question de regretter l’ambition politique d’accélérer la décarbonation de l’Europe, à la hauteur des dérèglements climatiques en cours, qui nous honore. Il demeure indispensable d’organiser la fin du recours aux hydrocarbures, au charbon, au pétrole et au gaz fossile. Mais un choix technologique exclusif d’électrification n’est pas fondé sur la science quand il dégrade la trajectoire des émissions de gaz à effet de serre dont l’humanité a besoin. Si la France dispose d’une électricité bas-carbone grâce à ses capacités nucléaires, ce n’est en effet pas le cas de l’Europe, dont les émissions de gaz à effet de serre issus de la production électrique s’avèrent du même ordre que l’ensemble des émissions du secteur routier fonctionnant au gazole ou au diesel et 2,3 fois plus fortes que celles liées à la consommation de gaz fossile du secteur résidentiel.

Emissions de CO2 de l’Union européenne par secteur en 2018

Secteurs émetteursEmissions de CO2 (en Mt)
Consommation de diesel par les véhicules routiers775
Production d’électricité à partir de combustibles solides (lignite, houille…)627
Consommation gaz naturel dans le secteur résidentiel272
Source : Eurostat

Or, le signal prix proposé par la Commission européenne à l’occasion de la révision de la directive sur la taxation de l’énergie va dans le sens opposé d’une incitation à la réduction des émissions de gaz à effet de serre de la production électrique en prévoyant un taux plus réduit pour cette énergie que pour les autres, quel que soit leur contenu carbone respectif. Au lieu de disposer d’un signal prix unique basé sur le contenu carbone, la Commission désincite la décarbonation de la production électrique.

De même, le choix de la Commission de refuser de mesurer systématiquement l’empreinte carbone des produits électriques en cycle de vie, en oubliant le contenu carbone de l’électricité pour les véhicules par exemple, crée un jeu d’incitations perverses quand il suffirait de mesurer systématiquement les émissions de gaz à effet de serre sur l’ensemble du cycle de vie, la consommation des ressources, notamment les métaux rares, l’eau, la biomasse, pour définir des critères communs, neutres technologiquement et permettant à l’innovation de se développer. Une électrification aurait lieu dans tous les cas, mais l’Union européenne éviterait de couvrir la Pologne de véhicules électriques plus polluants que les véhicules diesel compte tenu du contenu carbone encore très élevé de son électricité. Elle éviterait ainsi de constater que les véhicules en Roumanie, pour l’essentiel de deuxième ou troisième main, ne se décarbonent pas assez vite faute d’alternative adaptée à ce pays et renverrait la stratégie de décarbonation à des choix territoriaux. Que telle région, au réseau électrique vétuste, ne disposant pas de bois à proximité ou d’une densité suffisante pour construire un réseau de chaleur biomasse utilise une production de bioénergie ou de gaz vert local pour ses chaudières relève du bon sens. Le volume du marché européen permet dans tous les cas d’envisager des séries assez longues pour permettre de disposer des appareils à coût maitrisé.

Au total, la Commission européenne, qui pendant des années avait favorisé la résilience des réseaux énergétiques européens en favorisant leur interconnexion, organise donc une politique d’électrification systématique, sans s’assurer qu’elle permet effectivement de répondre aux objectifs de la politique énergétique, la transition écologique bien-sûr qui n’est que mal organisée, mais aussi la sécurité d’approvisionnement dont elle renforce les risques de déséquilibre offre-demande et le coût pour les clients qui n’est jamais modélisé et utilisé comme critère de choix.

Proposition : moduler les accises sur l’énergie en fonction des contenus carbone mesurés en cycle de vie

Le volontarisme écologique bienvenu de la Commission européenne serait alors d’autant plus efficace et d’autant mieux accepté si elle créait plutôt un cadre ferme sur l’objectif mais ouvert à des politiques adaptées aux réalités locales, comme à l’innovation sur les moyens d’atteindre les cibles. En matière de fiscalité, elle pourrait notamment prévoir la modulation des accises sur l’énergie, non en fonction de la nature de l’énergie, mais des contenus carbone mesurés en cycle de vie de chaque énergie dans chaque Etat. Tout en incitant à la diffusion des énergies les plus sobres en carbone, cette évolution de la fiscalité énergétique permettrait de conserver à chaque Etat la liberté de sa politique, et pour les uns de miser d’abord sur la décarbonation de l’électricité tandis que d’autres privilégieraient d’autres mix énergétiques renouvelables et bas carbone.

​​​​​​​2.3. La complémentarité des énergies renouvelables permettrait d’assurer la résilience du système énergétique

Il ne s’agit donc pas de contester ici que l’électrification de certains usages va progresser et apporter une réponse adaptée à la décarbonation de certains secteurs comme de certains territoires, ou de critiquer l’augmentation indispensable des énergies renouvelables mais d’en mesurer les conséquences pour la sécurité d’approvisionnement. Les tensions sur la production comme sur la demande ne peuvent que s’accroître et interroger la résilience du système énergétique, comme son coût. Si le renforcement des capacités électriques de l’Union européenne en matière d’énergies renouvelables s’avère bien nécessaire, des besoins accrus de flexibilité et de sécurité d’approvisionnement demeureront indispensables pour éviter que des crises d’approvisionnement ne deviennent récurrentes et dramatiques. Et il y aurait de l’ironie à laisser se développer les problèmes d’équilibrage quand des alternatives existent, ou à rémunérer la renonciation à la consommation d’électricité pour éviter les tensions lors des pics de demande qu’une politique d’électrification exclusive contribuerait précisément à fabriquer.

Pour assurer cette sécurité d’approvisionnement que les Européens attendent à raison, deux options existent. Soit des moyens de production électrique de pointe sont installés qui ne fonctionneront qu’aux moments des tensions sur le système électrique. Leur coût sera donc nécessairement élevé, puisqu’il sera mécaniquement impossible de les amortir sur un temps d’utilisation suffisant. C’est donc leur valeur assurantielle, le prix donné à la sécurité d’approvisionnement, qui servira de limite, générant des tensions prévisibles autour de dépenses élevées puisque la plupart du temps improductives. Soit on construit au contraire un système énergétique qui part du constat de la complémentarité des énergies, du besoin de molécules énergétiques renouvelables pour équilibrer le système, pour construire un système plus résilient, à meilleur coût.

L’émergence d’une politique de l’hydrogène constitue en effet une occasion historique pour penser le besoin de dépasser l’affrontement des énergies et organiser leur complémentarité. Comme l’hydrogène qui permettra, sans doute surtout après 2035, le stockage et la valorisation des excédents électriques renouvelables et bas carbone notamment pour les usages industriels et la mobilité, c’est bien l’ensemble des énergies qui pourrait être réarticulé autour de leur complémentarité. L’ensemble des réseaux est en effet interdépendant. Le système électrique comme les réseaux de chaleur renouvelable ne peuvent se passer de la sécurité d’approvisionnement offerte par le gaz, qui de son côté a besoin d’électricité pour fonctionner et de plus en plus de biomasse pour se décarboner. La complémentarité organisée au niveau du système énergétique pourrait donc également être prévue dans les usages locaux d’énergie renouvelable pour les optimiser.

Proposition : miser sur la complémentarité des énergies, y compris au niveau micro, par exemple avec les appareils hybrides

Dans le bâtiment par exemple, les appareils hybrides sont peu diffusés alors qu’ils permettent de conjuguer le meilleur des deux mondes. Par exemple pour la pompe à chaleur hybride, dont le prix est équivalent à celui d’une pompe à chaleur classique, l’appareil bénéficie des avantages de la performance énergétique exceptionnelle de la pompe à chaleur toute l’année mais se reporte vers la consommation de gaz lors des épisodes climatiques qui pourraient mettre sous tension le réseau électrique. Pour une empreinte environnementale identique, les pics de demande, les besoins de réinvestissement dans les réseaux électriques comme le risque de sécurité d’approvisionnement sont limités. C’est la raison pour laquelle RTE prévoit d’ores et déjà dans tous ses scénarios prospectifs pour la France 2,5 millions de pompes à chaleur hybrides en 2050. De la même façon, tous les appareils concourant à améliorer la performance énergétique et la résilience du système comme les micro-cogénérations offrent une solution d’avenir. La réduction des consommations de gaz grâce à l’hybridation permet alors en outre d’envisager la réussite de leur verdissement pour atteindre la neutralité carbone, sans dégrader la sécurité d’approvisionnement.

L’ADEME a en effet estimé en 2018 le potentiel des gaz verts et conclut à la possibilité de couvrir intégralement la demande de gaz vert avec un niveau de demande finale en 2050 en gaz de réseau de l’ordre de 300 TWh contre 460 TWh aujourd’hui. Le potentiel qui ne sera pas intégralement mobilisé se compose alors de 130 TWh de méthanisation, potentiel aujourd’hui confirmé par les travaux menés dans les territoires par les chambres d’agriculture sous l’égide le Commission de régulation de l’énergie, d’un potentiel issu de la pyrogazéification de bois-déchet et combustibles solides de récupération estimé à 140 TWh, mais qui doit être partagé entre réseaux de chaleur et gazéification, 130 TWh de power-to-gas, notamment d’hydrogène et de méthanation. L’étude n’a pas évoqué le potentiel de gazéification hydrothermale donc de matières organiques liquides comme les liqueurs noires de papèterie, les boues de station d’épuration ou de fosses septiques qui peuvent difficilement être valorisées autrement mais représentent sans doute un potentiel de 30 à 40 TWh supplémentaires.

3. Les conséquences de la hausse inéluctable des prix de l’énergie sur le pouvoir de vivre doivent être replacées au cœur de la politique énergétique

​​​​​​​3.1. La montée des prix est structurelle

La flambée des prix de l’énergie repose, deux ans après la fin du mouvement des gilets jaunes, la question du pouvoir de vivre.

La montée des prix de l’énergie parait en effet inéluctable. La tendance est ancienne, même si dans les dernières années, et de façon accentuée dans la période de la pandémie, une modération exceptionnelle des prix avait eu lieu.

Elle devrait se poursuivre. Le coût de l’électricité sera amené à augmenter dans les prochaines années, sans que l’amplitude ne soit connue aujourd’hui. Le dispositif de l’Accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH) est en cours de révision, et son prix devrait passer à partir de 2021 de 42 à au moins 48 €/MWh. D’autre part, la trajectoire énergétique d’ores et déjà validée dans la PPE à l’horizon 2030/2035 conduit les gestionnaires de réseaux de transport et de distribution d’électricité à revoir sensiblement à la hausse le montant de leurs investissements annuels en vue de raccorder les énergies renouvelables électriques, adapter le réseau électrique aux nouveaux usages tels que la mobilité électrique. Ainsi, RTE a annoncé une hausse de 50% de ses investissements annuels pour atteindre 33 Mds€ d’ici 2035. De son côté, ENEDIS prévoit d’investir près de 70 Mds€ d’ici 2035, soit une hausse de 23%. Le président de la Commission de régulation de l’énergie a indiqué publiquement qu’il pensait que ces évaluations seraient bientôt réévaluées, en deux fois. Ces travaux de raccordement pèseront donc inéluctablement sur les ménages, que ce soit par le tarif ou par l’impôt. A titre d’illustration, dans le cadre de la consultation en cours sur les tarifs d’utilisation des réseaux électriques (TURPE), les deux gestionnaires de réseaux estiment que ces investissements conduiront à une augmentation annuelle de la facture moyenne des ménages de 50 €, dès 2024.

Du côté du gaz, le verdissement conduit à un renchérissement mécanique. Si le gaz vert dispose à ce jour d’un prix moyen de 90€ par MWh qui peut baisser à l’avenir, et si les coûts d’adaptation du réseau sont moindres (de l’ordre de 5% de réseau supplémentaire à construire pour relier les zones de production en zone rurale ce qui demeure bien moins onéreux que les mêmes renouvellements de canalisation en milieu urbain), l’écart avec le prix de la molécule fossile demeure significatif. De même, les agrocarburants avancés disposent d’un coût de production significativement supérieur à leur alternative fossile.

3.2. Les ménages ne s’avèrent pas égaux face à la flambée des prix

Or face à cette montée prévisible des prix, les ménages ne sont pas égaux.

Les ménages acquittent des dépenses énergétiques à la fois pour se déplacer et pour leur logement, et, en première analyse, ils arbitrent entre un logement meilleur marché distant nécessitant des dépenses de transport et un logement plus central et plus couteux mais disposant d’un accès plus rapide et moins onéreux aux fonctions urbaines. D’après l’INSEE, le logement pèse en effet d’autant plus dans le budget des ménages que l’unité urbaine de résidence est grande. En milieu rural, les ménages y consacrent 11 % de leur budget (3 600 euros par an en moyenne) contre 17 % (6 600 euros) dans l’agglomération parisienne. Ainsi, pour les locataires, quel que soit leur niveau de vie, le logement pèse davantage dans les villes qu’en milieu rural, en particulier en région parisienne où il représente, en 2017, 27 % de leurs dépenses de consommation (9 200 euros par an en moyenne) contre 23 % en milieu rural (6 900 euros). Le constat est inverse pour le transport, que les ménages soient locataires ou propriétaires. La part du budget qu’ils y consacrent décroît avec la taille de l’unité urbaine, de 21 % en milieu rural à 16 % dans l’agglomération parisienne. Ainsi, en milieu rural, la part supplémentaire consacrée au transport par rapport à l’agglomération parisienne est presque compensée par la moindre part consacrée au logement.

Pour autant, les disparités selon les groupes sociaux se sont accentuées pour les dépenses de logement : en 2017, la part qu’y consacrent les cadres est inférieure de 5 points à celle des ouvriers, alors qu’elles étaient équivalentes en 1979. Pour les 20 % des ménages les plus modestes, la part des dépenses de logement est supérieure de 10 points à celle des 20 % les plus aisés, alors qu‘elle l’était de seulement 1,5 point en 1979.

Surtout, la vulnérabilité aux prix de l’énergie n’est pas la même pour tous les ménages. Les ménages résidant dans des logements individuels anciens éloignés des centres métropolitains cumulent alors l’exposition aux prix de l’énergie pour le transport et celle pour le chauffage, les constructions anciennes étant souvent mal isolées. La carte de la précarité énergétique recoupe alors une fracture territoriale plus large, celle de l’accès aux fonctions urbaines et une fracture sociale, celle de la mobilité. Ces caractéristiques se sont alors retrouvées à l’évidence fréquemment au sein du mouvement des gilets jaunes dont la vulnérabilité au prix du carbone a constitué un déclencheur de l’action collective.

3.3. Sans accent mis sur la sobriété énergétique, les politiques énergétiques peuvent aggraver rapidement les inégalités

Les politiques de transition écologique risquent d’accentuer ces inégalités.

Du côté du transport, la généralisation des zones à faible émission, donc l’interdiction de certaines catégories de véhicules, notamment diesel, dans le cœur des villes de plus de 150 000 habitants, rend indispensable l’accès à un véhicule récent, quand le parc automobile a en moyenne huit ans. La capacité des ménages à accéder au centre-ville devient inégalitaire et pénalise les ménages modestes habitant loin des centres métropolitains. Ils ne bénéficient en effet ni de solutions de transport collectif, ni de la capacité d’acheter un véhicule électrique, créant de facto une fracture territoriale dans l’accès aux fonctions urbaines et notamment à l’emploi. Parmi ces ménages écartés des pôles d’activité se retrouvent souvent des personnes parmi les plus vulnérables aux prix de l’énergie.

Cette exclusion ne résulte pourtant pas intégralement d’une rationalité environnementale : le véhicule de luxe électrique est, lui, admis dans les centres-villes alors que son poids génère des émissions de gaz à effet de serre supérieures au petit véhicule diesel qui en est exclu. Le choix de renoncer à un seuil carbone identique pour tous les véhicules conduit alors à une inégalité sociale majeure, la constitution d’un droit à polluer réservé aux nantis, qui ne peut pas être justifiée par la préservation de l’environnement. S’il est naturellement indispensable de décarboner les véhicules légers, et de se passer du diesel, cela ne peut avoir pour effet de créer un régime à deux vitesses permettant le maintien d’émissions significatives par certaines catégories de véhicule fussent-ils électriques.

Du côté du logement, alors que, selon la Fondation Abbé Pierre, douze millions de personnes ont froid chez elles ou dépensent trop d’argent pour se chauffer, tous les ménages n’accèderont pas facilement à la rénovation énergétique. Une rénovation complète performante coûte d’après l’ADEME de l’ordre de 53 000€, chaque geste en moyenne 5 500€ d’après l’Observatoire national de la rénovation énergétique. Une prise en charge publique de tout ou partie du coût s’avère nécessaire, notamment pour les ménages modestes. Les deux milliards sur deux ans, issus du Plan de relance à destination des aides à la rénovation des logements privés, y contribuent mais ne font que compenser la suppression du crédit d’impôt (CITE), sans même revenir au niveau de soutien public de 2018 qui avait atteint 1 948 M€, contre les 1 400 M€ prévus avec MaPrimeRénov’ en 2021. La communication à la Commission européenne, dans le cadre du pacte de stabilité, d’un plan français de stabilité prévoyant après les présidentielles un ajustement budgétaire équivalent à 3 points de PIB, rend sceptique sur la volonté de l’Etat de poursuivre un soutien financier important à ces investissements.

La rénovation énergétique du parc social peut cependant être menée à terme plus vite que dans le parc privé. La politique de massification de la rénovation du parc social déjà engagée laisse espérer la réussite de sa rénovation complète, comme s’amorce la rénovation du parc public. Réalisée par un bailleur unique et non décidée par une assemblée de copropriétaires pouvant craindre des nuisances pendant les travaux, la perte de surface ou d’ensoleillement en cas d’isolation externe des façades, disposant d’un circuit de financement robuste et de locataires qui demeurent globalement attachés à la conservation d’un logement au loyer modéré, la rénovation thermique du parc social peut être réalisée plus facilement, le volume de travaux permettant d’attirer des professionnels des différents corps de métier nécessaires à une rénovation globale. Sa massification et son accélération font donc partie des leviers dont dispose l’Etat pour mener une politique volontariste de réduction des consommations énergétiques.

Afin de toucher les ménages modestes et les plus vulnérables aux prix de l’énergie, une action résolue sur l’habitat individuel, notamment périurbain, s’avère en outre prioritaire (cf. Infra).

Toutefois, l’accès à un professionnel formé pour opérer une rénovation globale reste délicat pour les particuliers, la formation constituant un goulot d’étranglement manifeste, source possible d’effets inflationnistes sur le prix des services comme de risques sur leur qualité. Une évaluation ex post de l’impact des travaux de rénovation énergétique dans le secteur résidentiel sur la dépense énergétique, cohérente avec des travaux comparables effectués aux Etats-Unis et en Allemagne, identifie un effet très modeste des travaux sur les factures énergétiques puisque 1000 € supplémentaires dépensés induisent dans cette étude une diminution moyenne de la facture énergétique annuelle de 8,29 € (soit – 0,64 %). Il faut donc un temps de retour de 120 ans pour amortir l’investissement initial par les économies d’énergie. Il est vrai qu’une fraction significative du gain énergétique est captée par l’occupant sous forme d’amélioration du confort (effet rebond), des ménages mal chauffés accédant (enfin) au bien-être. Une autre partie de ce déficit de résultat vient probablement de travaux de qualité insuffisante ou n’apportant que des réductions limitées de consommation (un changement de fenêtres plutôt qu’une isolation des façades ou des combles par exemple). Mais, en tout état de cause, la rénovation énergétique ne constitue pas un gisement d’opérations peu coûteuses de réduction de la consommation d’énergie, qui peut aisément être laissé à la charge des ménages notamment modestes pour leur permettre d’affronter la perspective de hausses de prix.

4. Faire le pari de la transition des territoires

​​​​​​​4.1. La subsidiarité des choix énergétiques doit être organisée

Alors, que faire ? Si l’idée d’une planification énergétique nationale s’impose, force est de constater qu’elle ne peut avoir pour effet l’organisation bureaucratique de la transition par une administration beaucoup moins nombreuse que par le passé, ayant moins d’occasions du fait de la décentralisation de se confronter aux projets et aux contraintes du terrain. Si la logique politique conduit souvent à afficher des stratégies étatiques, face à des sujets appelant de l’innovation permanente, le fléchage bureaucratique conserve une probabilité élevée d’échouer si l’Etat fait autre chose que soutenir l’innovation, les solutions sans regret et interdire des technologies condamnées.

L’application stricte du principe de subsidiarité parait de ce fait préférable. Il importe effectivement aux échelles les plus larges de s’assurer de l’atteinte des grands objectifs de politique publique et d’organiser la fixation d’objectifs carbone, de production d’énergie renouvelable, des conditions communes de durabilité des énergies et les interconnexions pour l’Union européenne, la construction des unités indispensables à la résilience du système énergétique et à la sécurité d’approvisionnement, les mécanismes de solidarité au niveau national.

Pour autant, la transition écologique appelle surtout l’organisation de la transition des territoires. La quatrième révolution énergétique, celle de la production et de la consommation décentralisée d’énergie renouvelable, du contrôle citoyen sur les choix, appelle la renonciation à une vision jacobine et centralisatrice, appuyée sur un productivisme fossile. La quatrième révolution énergétique est au contraire constituée du passage à une organisation territoriale de l’atteinte de la neutralité carbone, en circuits courts, en s’appuyant sur les ressources et les atouts des territoires.

Proposition : confier aux territoires la conception et la mise en œuvre de stratégies de transition vers la neutralité carbone, s’appuyant sur des circuits courts énergétiques et des communautés d’énergie renouvelable

Si la politique industrielle peut conduire à organiser des filières, à favoriser certains appareils, cette note se faisant l’avocate des appareils hybrides, c’est bien au niveau local, en fonction des contextes locaux qu’une transition harmonieuse peut être organisée. Dès lors que le bouquet de solutions demeure limité, l’industrialisation ne s’oppose pas à ce que les territoires choisissent, parmi les solutions disponibles, celles qui correspondent le mieux à leur contexte. Cela suppose certes d’arrêter d’imaginer que les énergies renouvelables pourront continuer de se développer en traitant séparément offre et demande d’énergie. Cela suppose donc de réaffirmer, dans la continuité des contrats de relance et de transition écologique et du développement des communautés d’énergie renouvelable, qu’il appartient au territoire de penser une stratégie globale de décarbonation, comme les synergies entre réseaux et entre sources d’énergie. A l’Etat de veiller à l’exportation de ressources des territoires richement dotés vers les territoires consommateurs nets pour assurer la solidarité énergétique indispensable. La subsidiarité de la politique énergétique doit être organisée et la transition écologique confiée aux territoires, les établissements publics de coopération intercommunale opérant la gestion dans le cadre de stratégies déterminées à l’échelle régionale, l’Etat se faisant accompagnateur des projets.

​​​​​​​4.2. L’efficacité énergétique pourrait s’organiser plus efficacement au niveau territorial

Proposition : créer un service public territorial de l’efficacité énergétique ciblant prioritairement les ménages les plus vulnérables aux hausses de prix de l’énergie

Afin de répondre à la hausse attendue des prix de l’énergie, un service public territorial de l’efficacité énergétique pourrait être organisé, ciblant prioritairement les ménages les plus vulnérables à la hausse des prix. Une telle proposition invite à déplacer la focale de l’action publique des consommateurs d’énergie vers les fournisseurs de solutions de rénovation énergétique avec un double objectif : réduire les prix et améliorer la qualité de la rénovation. La multiplication des aides allouées à leurs clients n’a en effet pu que dégrader leur performance sur ces deux dimensions. Des dispositifs comme l’opération « isolation des combles à 1 euro » rendent en effet presque accessoires le prix et la qualité des travaux réalisés. En confiant aux territoires cette compétence nouvelle, en organisant la montée en compétences locale des professionnels, comme la priorisation des travaux, la soutenabilité de la transition écologique ne peut qu’être facilitée. Un tel service offrirait alors une réponse aux habitants vulnérables, par exemple des zones périurbaines, à la fois au prix du carburant et du chauffage.

Proposition : étendre le bonus écologique aux véhicules d’occasion et le moduler en fonction de la desserte en solution collective de mobilité.

De même, un ciblage ou une modulation territoriale des bonus écologiques en faveur des territoires les moins bien desservis en solution collective aurait du sens. Tout le monde ne pouvant accéder à un véhicule neuf, le bonus pourrait alors être étendu aux véhicules d’occasion passant le seuil carbone unique des zones à faibles émissions. Ce seuil, pour éviter le scandale actuel des SUV électriques autorisés plutôt que les véhicules légers diesel pourtant moins polluants des ménages modestes, serait unique pour tous les véhicules particuliers. Ceci permettrait alors à la fois d’accélérer la sortie nécessaire du diesel tout en se donnant une contrainte de poids nécessaire socialement autant qu’environnementalement. Le bonus deviendrait alors aussi un outil de réponse aux fractures sociale et territoriale de la mobilité. A contrario, à Paris, le choix de disposer d’un véhicule personnel ne serait pas aidé.

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François Kirstetter