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Note

Le fait syndical en entreprise : une feuille de route réformiste pour les années qui viennent

Cette note souligne les raisons pour lesquelles le fait syndical en entreprise doit être défendu, répond aux objections, préjugés et résistances qui en limitent le développement et formule des propositions concrètes pour en garantir l’efficacité et la légitimité.
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L’intérêt des salariés – et plus largement des travailleurs – est d’être représentés dans leur entreprise et leur branche d’activité par des acteurs capables de les défendre, de faire valoir leurs points de vue et de négocier en leur nom des accords collectifs porteurs de progrès, tout en tenant compte de l’intérêt de l’entreprise elle-même, dont dépendent la pérennité des emplois et les conditions d’une prospérité partagée. C’est le credo d’un syndicalisme réformiste pour qui, loin de se réduire à une association patrimoniale d’actionnaires, l’entreprise est un tout dont le destin est inséparable de celui du collectif de femmes et d’hommes qui lui apportent leur contribution. Pour cette raison et sous ces conditions, la présence syndicale en entreprise est un bien commun à la fois pour les salariés et pour les entreprises qui les emploient.

Cette conception réformiste du fait syndical n’avait pourtant rien d’évident dans notre pays, marqué par le triple héritage d’une culture politique jacobine, d’un syndicalisme révolutionnaire et d’un paternalisme managérial, peu propices au développement de corps intermédiaires organisés dans le monde du travail. De ce fait, en France, le syndicalisme n’a acquis droit de cité dans l’entreprise qu’en 1968 avec la création de la section syndicale d’entreprise.

Ces dix dernières années, de nouveaux pas importants ont été franchis : Loi Larcher instituant la consultation préalable des partenaires sociaux avant toute initiative législative touchant au travail ; réforme de la représentativité des syndicats plaçant en son cœur le vote des salariés comme source principale de légitimité, (et non plus une simple et contestable « présomption de représentativité ») ; accords de Bercy sur la rénovation du dialogue social dans les fonctions publiques ; réforme du financement du dialogue social instaurant l’obligation de transparence financière des organisations syndicales et renforçant leur indépendance ; extension de la présence des représentants des salariés au sein des organes de gouvernance (ANI puis loi de sécurisation de l’emploi) ; enfin, réforme des instances représentatives du personnel (IRP) et des règles de la négociation collective avec les lois Rebsamen et El Khomri.

Pourtant, malgré une première moitié de quinquennat marquée par des innovations (conférences sociales), des accords nationaux interprofessionnels ambitieux (accord de sécurisation de l’emploi), et des lois modifiant en profondeur le code du travail et les relations sociales (LSE, loi de modernisation du dialogue social et in fine loi dite « El Khomri »), le dialogue social peut sembler ne pas sortir  vraiment renforcé du mandat de François Hollande. L’adoption au forceps de la « loi Travail » a été marquée par des manifestations répétées et des actes de violence. Plusieurs des partenaires sociaux ont radicalisé leurs discours depuis plusieurs années et ont choisi de ne pas s’engager dans la recherche de compromis et l’élaboration conjointe de nouvelles normes sociales : c’est le cas de la CGT et du Medef notamment. Plusieurs candidats à la primaire LR ont publié des livres et des propositions visant à marginaliser les organisations syndicales en favorisant une relation directe des dirigeants à leurs salariés : suppression du monopole de présentation syndicale au premier tour des élections professionnelles, possibilités accrues de conclure des accords par voie référendaire à l’initiative des directions d’entreprises, relèvement très significatif des seuils sociaux qui marginaliserait la présence des IRP, suppression de la loi Larcher de janvier 2007 et retour à la primauté du politique dans la définition des normes sociales, etc.. Dans le même temps, une partie de la gauche contestataire continue à considérer le syndicalisme comme la courroie de transmission du pouvoir politique. Les poussées de fièvre populistes conduisent enfin à mettre en cause la légitimité des corps intermédiaires et des régulations sociales et à exalter les voies d’une démocratie directe et plébiscitaire.

Plus fondamentalement, à travers la mise en cause des corps intermédiaires, notamment dans le champ social, c’est l’aptitude à trouver des compromis et à vivre ensemble au travail qui est mise en doute, nourrissant ainsi la société de défiance et les illusions radicales ou populistes les plus extrêmes. C’est aussi le retour de tentations colbertistes où l’Etat serait seul légitime à décider de tout.

Pourtant, sur le terrain, le dynamisme de la négociation ne se dément pas, comme en témoigne le nombre d’accords signés chaque année, dont la tendance de long terme est à l’augmentation. Un peu plus de 35 000 accords sont signés chaque année dans les entreprises, contre 700 au début des années 1970, 2 100 en 1982 (année qui marque le début d’une dynamique nouvelle avec les négociations obligatoires), 6 400 en 1992, 18 000 en 2002 (avec les lois Aubry), 20 200 en 2006… Une progression très significative et désormais irréversible… Personne n’en parle toutefois dans les médias grand public : il est plus simple de produire de fortes images avec des pneus qui brûlent ou des manifestants exaltés que de faire comprendre comment des acteurs aux intérêts divergents trouvent des solutions mutuellement gagnantes.

Pour sortir de cette situation schizophrénique, il importe de mettre clairement en exergue les raisons pour lesquelles le fait syndical en entreprise doit être défendu (I), de répondre aux objections, préjugés et résistances qui en limitent le développement (II), de formuler des propositions concrètes pour en garantir l’efficacité et la légitimité (III).  

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