Vive le périurbain ! Pour des campagnes urbaines au cœur des transitions territoriales
Les Français aiment opposer la ville à la campagne, comme si le territoire national pouvait être découpé selon cette géographie binaire. C’est pourquoi les espaces de transition et d’interface entre villes et campagnes, appelés périurbains, restent trop peu visibles dans les politiques publiques. Au regard des enjeux économiques, sociaux et environnementaux, il est désormais temps de les reconnaitre comme les lieux stratégiques du changement.


Plus que ceux des villes et des campagnes reculées, les habitants du périurbain sont touchés par les évolutions appelées par la transition écologique. La maison individuelle mal isolée, la voiture indispensable pour la plupart des déplacements affectent négativement leur bilan carbone. Isoler un pavillon vieillissant, changer de chaudière et de voiture a un coût, souvent élevé, même pour des ménages des classes moyennes. Et la remise en cause, parfois condescendante, d’un mode de vie le plus souvent choisi est propice à bien des malentendus sociologiques et politiques. N’y a-t-il pourtant que de mauvaises nouvelles à apporter aux périurbains ? Peut-on dépasser la contradiction apparente entre leurs aspirations sociales et les impératifs écologiques ?
Si les espaces périurbains se sont développés dans les quatre dernières décennies de manière plus dynamique que les villes-centres, les banlieues et les espaces ruraux, c’est qu’ils répondent à une série d’aspirations spécifiques : la demande d’espace, une mobilité autonome, la proximité de la nature, une sociabilité maîtrisée et des services urbains de la grande ville accessibles. Comment redéfinir aujourd’hui ces cinq promesses du périurbain ? On peut imaginer, pour chacune d’entre elle, des réponses contemporaines adaptées qui dessinent des trajectoires de changement pour l’avenir de ces territoires, en respectant leur grande diversité et leurs qualités propres auxquelles les habitants sont attachés.
Les territoires périurbains sont souvent mal repérés et mal désignés. Peu d’habitants s’identifient comme « périurbains », préférant le plus souvent se considérer comme « ruraux ». Surtout, ces espaces sont rarement reconnus comme tels dans les politiques publiques, en particulier parce que les découpages administratifs (commune, département, région) et les catégories spatiales trop binaires (urbain / rural) prennent difficilement en compte leurs diversités comme leurs spécificités. La coopération territoriale nécessaire à une juste prise en compte du mode de vie des périurbains entre lentement dans les mœurs. Mais elle doit se renforcer car ces espaces d’interface entre villes et campagnes sont les lieux stratégiques du changement de notre rapport au territoire.
C’est pourquoi prendre enfin en compte le périurbain est un défi qui s’adresse à l’ensemble des acteurs politiques. A la différence d’une approche administrative habituelle associant un responsable politique à un type de territoire (un périmètre, un acteur, un ensemble de compétences), la variété des situations périurbaines nous conduit à interpeler l’ensemble des acteurs politiques pour qu’ils deviennent des opérateurs à part entière du périurbain.
Les départements, qui sont déjà des acteurs de la mobilité par leur réseau routier et disposent des outils pour se préoccuper des trajectoires résidentielles, doivent développer leur action. Les régions ont la vision pour coordonner l’aménagement aux bonnes échelles territoriales. Les métropoles sont économiquement dépendantes de leurs territoires proches et doivent apprendre à nouer des partenariats mutuellement bénéfiques. Les élus des villages, des bourgs et des petites villes ont tout intérêt à jouer la coopération supra-locale pour retrouver des marges de manœuvre aujourd’hui évanescentes, malgré l’hommage général rendu à la « proximité ». L’État, enfin, doit reconnaitre ces espaces privilégiés de la transition écologique, sans cultiver la nostalgie de l’aménagement à l’ancienne, mais en tenant son rôle d’orientation et d’animation.
Avant-propos
Un nouveau rapport sur le périurbain, est-ce vraiment utile ? Le rapport Mayoux expliquait il y a presque un demi-siècle que le périurbain était « un mouvement profond qui appelle un regard neuf et non un débordement honteux qu’il faudrait contenir à tout prix[1] ». Depuis, contre la doxa du petit monde de l’aménagement et de l’urbanisme, beaucoup d’autres se sont attachés à changer le regard sur ces espaces périphériques. Ils ont expliqué que la périurbanisation prenait certes des formes contestables, en France en particulier, mais qu’elle répondait à des aspirations résidentielles légitimes, qu’elle possédait sa cohérence économique, qu’elle faisait partie inhérente des systèmes urbains contemporains. Et que, dans sa diversité, il y avait certes un peu de France moche[2] mais aussi beaucoup de campagnes urbaines attractives. En tout cas qu’il ne fallait ni la nier ni la dénigrer, mais se soucier de penser son avenir.
Pourquoi Terra Nova a-t-il jugé important de remettre le périurbain sur l’établi ? Parce qu’au regard des enjeux contemporains de notre pays, sociaux autant qu’écologiques, le futur des territoires périurbains est d’intérêt général. Il s’agit certes toujours de mettre à l’agenda politique[3] ces grands oubliés des interventions catégorielles, coincés entre villes et campagnes. Mais il convient surtout, désormais, de comprendre le périurbain comme territoire stratégique de la transition écologique et comme espace privilégié de déploiement de l’ensemble des politiques publiques d’a-ménagement[4] des territoires.
Les recommandations qui concluent ce document assument ce double principe d’action : des politiques publiques pour le périurbain, un peu ; le périurbain pour les politiques publiques, surtout. Elles privilégient un vecteur de changement : les boîtes à outils, les méthodes, les manières de travailler. Des propositions plus que des préconisations, pour des trajectoires de changement contextualisées, préoccupées par les conditions de leur mise en œuvre, impliquant discussions et affinements par les multiples acteurs qui sauront, nous l’espérons, se les approprier.
Introduction
Au secours, le périurbain est toujours là !
Le périurbain ne figure pas à l’agenda politique ; toujours pas. L’actualité de ces dernières années lui a pourtant fourni quelques raisons de gagner en visibilité, entre Gilets jaunes, confinement et législations sur le Zan (zéro artificialisation nette). Mais, caché par l’inébranlable dichotomie ville – campagne, il demeure la terra incognita la plus habitée de l’Hexagone. Car les « étalés » sont de plus en plus nombreux. La « lutte contre l’étalement urbain » a, dans une large mesure, échoué décennie après décennie malgré les offensives répétées mais stériles des défenseurs de la concentration urbaine et avec la complicité active des acteurs locaux qui n’ont aucun intérêt, malgré parfois un discours de façade opposé, à changer de mode d’aménagement de leur territoire proche.
Le périurbain aura quelques pages plus loin sa définition statistique. Mais afin d’éviter les quiproquos, il convient de planter dès à présent le décor. Le périurbain ne se réduit pas aux lotissements pavillonnaires, aux ronds-points et aux hypermarchés. On y croise des vaches, aux près ; des camions, entrant et sortant de leur plate-forme logistique ; des commerces dans d’anciennes stations-services ; des parcs à thème ; des jardins partagés ; des sentiers de randonnée ; des zones d’activité en transformation ; le centre sporadiquement animé d’un bourg ; une base de loisirs près d’un lac de carrière ; un village touristique avec son restaurant étoilé… Des territoires discontinus, fragmentés, juxtaposant espace ouverts et bâtis. La voiture y est (encore) reine.
Comme l’écrit Nicolas Mathieu dans Leurs enfants après eux : « Ici, la vie était une affaire de trajets (…). Chaque désir induisait une distance, chaque plaisir nécessitait du carburant. A force, on en venait à penser comme une carte routière. Les souvenirs étaient forcément géographiques ».
Le périurbain, dans la multiplicité de ses configurations spatiales et de ses dynamiques socio-économiques, accueille les plus fortes croissances démographiques[5], plus que les villes et plus que les campagnes. Il faut faire avec ce « déjà là[6] ». Ses habitants y vivent majoritairement par choix[7], dans la diversité de leurs trajectoires résidentielles et de leurs modes de vie. Face au modèle[8] de la ville « compacte et dense », il agence d’autres compromis entre le proche et le lointain, entre la compacité et la dispersion, entre le vide et le plein. Par ses formes d’occupation des sols, cet entre-deux associe les territoires les plus stratégiques de la transition écologique, tout en maillant les grands systèmes territoriaux.
Pour tout cela, le périurbain mérite l’intérêt ; une attention documentée et motivée, qui sache enfin échapper au sort funeste attaché aux moult précédentes tentatives de réhabilitation de ce tiers-espace[9] disqualifié par le couple centre – périphérie. Autant que d’analyses actualisées et de regards décentrés, le périurbain mérite une action publique audacieuse. En la matière, il s’agit d’y inventer des formes d’intervention qui s’affranchissent des modèles hérités de la ville comme de la campagne, une « rurbanité[10] » à même de rendre justice à ses qualités intrinsèques. Et il s’agit surtout de prendre la mesure de la place prioritaire à lui accorder dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques nationales et locales d’aménagement et de ménagement des territoires : déplacements, habitat, foncier, environnement, services, économie… Les acteurs publics n’obtiendront ni efficacité ni légitimité en s’entêtant à faire l’impasse sur le périurbain, là justement où se trouvent les leviers pour les nécessaires changements de paradigmes.
Le périurbain, combien d’habitants ? La question de la démographie périurbaine n’est pas si simple ! Parce que la statistique publique modifie régulièrement ses manières de catégoriser l’espace français. Et parce qu’il existe des typologies alternatives. En 2020, dans les manuels de géographie de 1ère, les lycéens apprenaient que selon les chiffres de 2014 de l’Insee, 30 % de la population française habitait l’espace périurbain, dans des communes urbaines (plus de 2000 habitants agglomérés) ou rurales (moins de 2000 habitants agglomérés). On comptait ainsi les habitants des « couronnes périurbaines », localisées à l’extérieur des pôles urbains mais intégrées aux aires urbaines. Un peu plus tard, La France et ses territoires (Insee Références 2021) présente le nouveau zonage en aires d’attraction des villes (AAV), qui remplacent les aires urbaines. En 2017, les communes des couronnes représentent alors 42,6 % de la population, les pôles urbains 50,7 %, ce qui ne laisse que 6,7 % pour les communes « hors attraction des villes » (le rural profond en langage courant). Les aires d’attraction ratissent large ! Dans la même période, l’Insee[11] diffuse une nouvelle grille communale de densité. La combinaison entre cette méthode inédite et l’approche AAV dite fonctionnelle (une géographie relationnelle évaluant un degré d’influence) fournit alors d’autres résultats : un rural autonome peu dense et très peu dense à 13%, un rural sous forte ou faible influence d’un pôle à 20 % ; 20 % pour le rural périurbain donc. Avec cette même grille de densité, l’Insee[12] a catégorisé des bassins de vie : 16 % dans le rural non périurbain, 15 % dans le rural périurbain, quelques points de différence par rapport au calcul précédent, à l’aune des modes d’agrégation des communes. Mais n’y a-t-il de périurbains que dans le rural ? Proposée par l’Insee[13] pour affiner les analyses démographiques, la grille communale de densité à 7 niveaux fait apparaître au sein des espaces urbains de densité intermédiaire trois catégories : des centres urbains intermédiaires, des petites villes et des ceintures urbaines. Ces ceintures urbaines (à ne pas confondre avec les couronnes des AAV) représentent 10,5 % de la population (2018). Elles ont « une plus grande part de leur population dans les carreaux périurbains que dans les clusters denses et semi-denses ». Autrement dit, il y a bien du périurbain dans l’urbain, ces « clusters semi-denses périurbains ». Dans une proportion non documentée à ce niveau d’agrégation, mais par construction statistique supérieure à 50%, on peut donc ajouter approximativement aux périurbains du rural 6% à 8% de périurbains habitant ces ceintures urbaines. Ce qui conduit à un chiffre d’environ 27% de périurbains. Alors, combien de périurbains ? Plus de 40 % semble excessif, au regard d’une extension des aires d’attraction ne tenant parfois qu’à la présence dans un bourg rural de quelques actifs travaillant « à la ville ». 27% reste modeste, excluant quelques pourcents d’espaces périurbains ainsi qualifiables au regard de l’omniprésence pavillonnaire, de la modestie des centres anciens, de la cohabitation entre espaces bâtis et non bâtis, intégrés à d’autres tissus urbains. Le 30 % est sans doute plus représentatif de la condition périurbaine. Il rejoint les résultats d’une très intéressante typologie[14] des campagnes françaises effectuée par le CGET (Commissariat général à l’égalité des territoires) en 2015 à partir de données 2011 : les campagnes des villes, du littoral et des vallées urbanisées avec 26,4 % de la population ; 9 % dans les campagnes agricoles et industrielles ; 8,4 % dans les campagnes vieillies à très faible densité. La conclusion s’impose : pas de chiffre officiel, car il n’y a pas de définition légale du périurbain et que les définitions statistiques elles-mêmes proposent plusieurs modes de calcul. Mais, en tenant par ailleurs compte du dynamisme démographique périurbain encore jamais démenti, on ne se trompe pas en affirmant que les habitants du périurbain représentent environ un tiers de la population française. |
1ère partie – France périurbaine, une aveuglante invisibilité
Le développement des espaces périurbains, à partir des années 1960, répond à une aspiration résidentielle d’une logique sans faille. Entre 1968 et 2011, la croissance démographique[15] s’avère forte et soutenue, avec une accélération entre 1975 et 1990, dans les communes périurbaines, soit par densification de territoires déjà périurbains soit par intégration à l’espace périurbain d’unités urbaines et de communes rurales. Dans ces un peu plus de quatre décennies, les populations des villes-centres et du rural stagnent (après quelques légères fluctuations à la baisse ou à la hausse), alors que les habitants des banlieues augmentent de 48% et ceux du périurbain de 63% (passant de 9,4 à 15,3 millions).
Les familles de classe moyenne du baby-boom de l’après-guerre ne souhaitent habiter ni dans les logements inconfortables des centres-villes ni dans les pavillons de banlieue des mal lotis de l’entre-deux guerres, ni dans les grands ensembles de ZUP (zones à urbaniser en priorité) rapidement stigmatisés. Le périurbain[16] s’offrait à eux. Les paysans fournissaient les terrains à construire, soucieux face aux politiques agricoles modernisatrices de garantir leur retraite. Les conseils départementaux construisaient et amélioraient leur réseau routier, permettant aux automobilistes toujours plus nombreux d’habiter plus loin de leur lieu de travail sans pour autant faire exploser leur budget-temps : les prodiges de la vitesse. L’État encourageait le système bancaire à soutenir les Français pour devenir propriétaires de leur logement (de fait, de leur maison), le passage de l’aide à la pierre à l’aide à la personne et le prêt à taux zéro amplifiant plus tard le mouvement.
Dès la fin des années 1960, les développeurs[17] américains, tels Levitt ou Kaufman&Broad, vendaient sur catalogue leurs lotissements « nouveaux villages », particulièrement en région parisienne. La profession de constructeur de maisons individuelles[18] s’inventait, entre groupes nationaux et entreprises artisanales. L’expansion rapide, pionnière pour l’Europe, des grandes surfaces périphériques put alors ancrer dans les modes de vie des trente Glorieuses le triptyque auto – hypermarché – réfrigérateur, en complément au duo bricolage – jardinage cher aux pratiquants de la maison individuelle.
Cette symbiose de facteurs favorables à la croissance périurbaine enclencha un mouvement irréversible, les mêmes conditions attirant décennies après décennies de nouveaux types d’habitants, depuis les jeunes ménages urbains en quête d’espace et de bon air jusqu’aux natifs du périurbain souhaitant s’y ancrer, en passant par les travailleurs du périurbain (la périurbanisation de l’emploi suivant avec des délais variables selon les régions celle de l’habitat). Les enquêtes[19] quantitatives et qualitatives rencontrent moins de « chassés des villes » que d’adeptes d’un style de vie propre au périurbain.
Mais une histoire parallèle s’écrit dès le premier choc pétrolier de 1973. Le périurbain[20], ce n’est pas bien ! Il fait régresser les valeurs de l’urbanité[21]. Il dilapide les ressources rares, tel le foncier et l’énergie. Il faut donc « lutter contre l’étalement urbain ». Le législateur inscrit loi après loi ce slogan, de plus en plus anachronique au fil des décennies, à l’aune de la place croissante des espaces périurbains dans l’urbanisation de la France. Les fausses idées ou préjugés à leur encontre persistent. La statistique publique, cycliquement, les reconnait ou les méconnait.
Quand la statistique publique joue à cache-cache avec le périurbain Un tiers de ruraux, deux tiers d’urbains. C’est ainsi qu’est aujourd’hui comptabilisée la population française depuis qu’en 2021 l’Insee[22] a modifié ses manières de découper l’espace français. A la faveur de la diffusion de la technique Eurostat (l’office statistique de l’Union européenne) de carroyage par densités de population, une classification inédite a été opérée : communes peu denses ou très peu denses, le rural ; communes densément peuplées ou de densité intermédiaire, l’urbain. Dans une période où la ruralité et sa défense deviennent un marqueur idéologique majeur, la façon de compter les troupes n’a rien d’anodine. Moult discours d’élus locaux et de ministres n’ont d’ailleurs pas manqué de se saisir de cette évolution méthodologique pour souligner qu’un tiers des Français vivait à la campagne. Peu en revanche se sont émus de la disparition de la catégorie périurbaine, à la faveur de ce retour bien anachronique du codage binaire ville / campagne. Depuis la création de l’Insee en 1946, l’histoire des statistiques qualifiant les territoires se lit comme une alternance récurrente de survalorisation de l’urbain ou du rural, le périurbain peinant à trouver sa place dans cette dichotomie spatiale. En 1962, le rapide développement des villes incite à créer la notion de zone de peuplement industriel et urbain (ZPIU). S’étendant de plus en plus, ces ZPIU vont in fine réduire la part rurale à moins de 4 %. D’aucuns s’étonneront d’ailleurs a posteriori du « maintien des ZPIU aux recensements de 1982 et 1990, alors même que la France connaît un étalement urbain extrêmement important[23] ». La notion d’aire urbaine est alors élaborée (groupe de travail 1994–96), prenant en considération un critère relationnel fondé sur les navettes domicile-travail. Une aire urbaine[24] est un ensemble de communes, d’un seul tenant et sans enclave, constitué par un pôle urbain (unité urbaine) de plus de 10 000 emplois, et par des communes rurales ou unités urbaines (couronne périurbaine) dont au moins 40% de la population résidente ayant un emploi travaille dans le pôle ou dans des communes attirées par celui-ci. Le périurbain a enfin droit à sa reconnaissance statistique officielle, grâce à ces couronnes périurbaines et à une autre catégorie inédite : les communes multipolarisées. Mais l’histoire se répète : l’urbain se fait omniprésent. En 2010, 85 % de la population vit dans une aire urbaine. Par soustraction, la France ne compte donc plus que 15 % de non-urbains ! Il faut revoir la copie[25]. Au nom du légitime souci[26] de ne pas considérer le rural en négatif de l’urbain, les données de densité vont venir au bon moment faire ressortir les calculettes. 22 millions de « campagnards » donc, par la méthode utilisée des densités. Certes, ce rural statistique est divisé en trois sous-catégories : rural autonome (peu dense ou très peu dense), rural sous faible influence d’un pôle, rural sous forte influence d’un pôle. L’Insee qualifie alors les deux derniers groupes de ruraux périurbains. Mais ce périurbain n’apparaît qu’en deuxième niveau d’analyse. Comme l’exprime la Présidente du conseil scientifique du programme France ruralités, « dans la révélation de la pluralité des ruralités, les ruralités périurbaines paraissent à la peine[27] ». Il y a bien un astucieux hold-up statistique consistant à agréger rural et périurbain. Le Président de l’Association des maires ruraux de France peut ainsi s’enorgueillir que « le rural représente 88% de la superficie du pays, 32 000 communes, 33% de la population[28] ». Mais ce formatage statistique fausse les représentations géographiques de l’Hexagone. Les connotations attachées au terme ruralité renvoient à des paysages de champs, de prés, de bois, de fermes, d’églises, de villages. Le pluriel n’y change rien ! Le périurbain ne s’y retrouve pas. |
Fort de sa légitimité morale et légale, le combat contre l’étalement urbain ne fait d’ailleurs pas de détail et se préoccupe peu de ses variantes morphologiques. Or la périurbanisation à la française possède sa spécificité. Plus qu’ailleurs en Europe, elle ne procède pas seulement par expansion en tache d’huile mais aussi par émiettement[29]. Ce mitage s’explique par le semi très régulier des villages et bourgs, par la densité[30] du réseau viaire, parfois par les structures agricoles préexistantes. Mais il est surtout le résultat d’un maillage communal serré, propice à la fragmentation du pouvoir d’urbanisme, éparpillant les permis de construire sans souci de continuités ou de compacités supracommunales.
Entre déni et dénigrement, le périurbain ne peut ainsi être l’objet ni d’intentions ni de projets ni de politiques publiques. Décrété dangereux pour la société et mal habité, la disparition est son seul destin envisageable ! Et comme les « étalés », plutôt contents de leur sort[31], ne font pas beaucoup parler d’eux, la thématique périurbaine[32] reste la plupart du temps sous les radars, le brouillard se dissipant néanmoins lors de courts moments, au gré de prises de consciences à la genèse diversifiée.
2e partie – Un demi-siècle de propositions inopérantes
Fabriqués par la main invisible du marché, par les inconséquences de politiques nationales sectorielles et par l’addition non régulée[33] de décisions municipales, les espaces périurbains restent un impensé politique et social. L’histoire du périurbain est ainsi jalonnée de rapports censés prendre à bras le corps cet objet spatial négligé pour le porter enfin comme sujet de politiques publiques. Les postulats des rapporteurs convergent : le périurbain est là, il faut faire avec, sans arrière-pensées. En commençant par l’organiser, pour le rendre à la fois plus agréable pour ceux qui y vivent et plus vertueux dans son fonctionnement collectif.
Mais, en quatre décennies, les préconisations des experts comme des politiques n’ont jamais abouti ! Et ce pour des motifs variés, entre erreurs de diagnostic, négligences vis-à-vis des instruments de mise en œuvre et contextes politiques inadaptés. En 1979, la voix dissonante du rapport Mayoux était étouffée par la clameur anti-étalement. En 2019, la réponse aux Gilets jaunes s’avère peu en phase avec les problématiques périurbaines contemporaines : un agenda rural[34] chargé de répondre au « sentiment d’abandon ressenti dans les zones les plus éloignées des services publics », surtout destiné à des centres-bourgs et des villages en quête de revitalisation.
Examinant l’ensemble des rapports officiels dédiés au périurbain, Aurélien Delpirou conclut dans sa note (document pages 61 à 66 en annexe) que le périurbain n’a pas été ignoré mais que les savoirs et préconisations ou conseils sont restés dispersés et, pour l’essentiel, inopérants : « Si la base de connaissances périurbaines est foisonnante, la réalité sur le terrain est celle d’une action publique dispersée aux objectifs flous et aux moyens modestes ».
Plus structurellement, le périurbain reste victime de sa faible densité institutionnelle. Pas de numéro de téléphone ! Les grandes institutions territoriales ne s’y intéressent pas, trop préoccupées d’elles-mêmes (métropoles) ou de leurs campagnes (régions, départements). Les communes directement concernées peinent ou rechignent à endosser l’identité périurbaine. Les instances plus allantes s’avèrent politiquement faibles : parcs naturels régionaux, pôles métropolitains, syndicats de Scot, PETR (pôles d’équilibre territorial et rural), groupes d’action locale (Gal) des programmes européens Leader…
Des administrations centrales de l’État ont parfois eu des éclairs de lucidité : « bien loin de la critique commune et moralisatrice, cet atelier des territoires a permis de démontrer que les périurbains dans toute leur diversité sont des territoires de projet qui peuvent maîtriser leur destin et révéler leur potentiel de territoire à vivre empruntant des qualités à la ville et à la campagne[35] ». Un propos sans lendemains.
Le périurbain souffre de ce manque de porte-paroles, de messagers même. Les maires s’y présentent en tant qu’élus de la ruralité, comme les conseillers départementaux. Du reste, les habitants aussi déclarent[36] habiter la campagne. L’Ile-de-France fait exception, édiles et administrés acceptant plus souvent le qualificatif de périurbain. L’expertise[37] francilienne participe d’ailleurs de cette reconnaissance. Mais le cas demeure isolé, sans influence nationale.
Ce déficit de parrainage politique se double d’une offre d’ingénierie professionnelle modeste, pénalisée par l’inadaptation des outils d’intervention de l’urbanisme classique empreints des savoir-faire hégémoniques de la ville compacte. Parfois mise à l’honneur, à juste titre, l’inventivité locale[38] reste marginale dans ses effets, faute d’articulation aux échelles supérieures.
Les opérateurs économiques pour leur part, acteurs majeurs de la production urbaine, apparaissent soit peu présents soit peu concernés par l’avenir des territoires périurbains. Constructeurs de maisons individuelles, lotisseurs, géomètres-experts, mais aussi responsables de centres commerciaux[39] ou aménageurs de zones d’activités, ils ne s’érigent pas en parties-prenantes de la fabrique périurbaine, parce que ce n’est pas leur job et qu’aucun partenaire ne les y incite. Chacun sur sa parcelle. Plus présentes sans doute, les entreprises de service (SNCF, transporteurs, poste, santé…) tentent avant tout de répondre à l’ambition aussi récurrente qu’inaccessible de l’égalité territoriale.
Enfin, les schémas cognitifs, les référentiels nécessaires à l’action et à la cohérence des interventions restent lacunaires, voire dévoyés par des grilles d’analyse obsolètes ou par la confusion[40] rédhibitoire entre périurbain et rural. La représentation nostalgiquement champêtre des « ruralités » n’aide ainsi pas à repenser tant la notion de service de proximité que celle de centralité, sujets ô combien politiquement mobilisateurs.
Les chercheurs n’ont pas su se faire assez entendre, probablement. Ils ont pourtant précocement ouvert les yeux. Aux travaux pionniers des années 1960–70, se sont joints depuis les années 2000 nombre d’études très convaincantes sur les transformations positives[41] du périurbain, sur les mixités sociales et fonctionnelles de ses occupations, sur l’intérêt et la diversité des pratiques qui s’y déroulent. Plusieurs auteurs[42] ont en particulier invité l’action publique à plus s’appuyer sur une connaissance fine des modes de vie. Et ce sans minimiser les difficultés de certains territoires périurbains, dans des contextes de faible dynamisme régional et d’interdépendances trop ténues avec les territoires urbains. Des situations que Nicolas Mathieu a su en romancier[43] traduire avec talent.
L’auteur de Leurs enfants après eux fait partie d’une génération d’écrivaines et écrivains qui, à partir des années 2010, vont faire du hors-ville plus qu’une toile de fond paysagère ou résidentielle mais bien la matière de leur travail littéraire. On pense entre autres à Fanny Taillandier et son roman - essai Les États et empires du lotissement Grand Siècle (PUF, 2016), à David Lopez avec Fief (édition Seuil, 2017), à Salomé Kiner, Grande couronne (Christian Bourgeois édition, 2021), à Marin Fouqué, 77 (Actes Sud, 2019). En comparaison transatlantique, c’est depuis quelques décennies déjà que les séries télévisées américaines faisaient leur miel de l’American way of life des suburbs.
3e partie – État des lieux : des territoires en mouvement
Le périurbain échappe aux définitions établies, non seulement par l’évolution incessante de ses facteurs et modes de développement mais aussi par la multidimensionnalité de ses caractéristiques. Le lexique du périurbain révèle cette qualité protéiforme : pré-urbain, rurbain, périmétropolitain, périrural, périruralisation, exurbanisation, suburbia, franges, marges, urbanisation profuse, densités dispersées, territoires diffus, urbain desserré, ville émiettée, ville éparpillée, ville éclatée, ville-lisière, entre-ville, ville au large, banlieue molle, campagne urbaine, campagne périurbaine…
Chacun de ces vocables a son ou ses inventeurs, exprimant une manière de se préoccuper du périurbain ou une formalisation d’un moment de sa dynamique spatiale. Même si le terme périurbain peut gêner, par la prédominance explicite à une vision radioconcentrique[44] de la périurbanisation – au détriment de variables géographiques, morphologiques ou fonctionnelles – il restera utilisé dans la suite du propos, mot-valise laissant ainsi aux acteurs du périurbain le soin de sélectionner leur propre terminologie.

La carte élaborée par les services de la région Hauts-de-France[45] illustre la diversité des situations périurbaines (en couleur beige) : autour d’Amiens, un périurbain polarisé par la capitale picarde et par les petites villes qui l’entourent. Du côté de Lille, un vaste tissu périurbain et urbain formant une région métropolitaine diffuse. Dans le sud du département de l’Oise, un périurbain faiblement polarisé, à la manière d’un territoire d’entre-villes. Autour de Saint-Quentin, un périurbain enserré par la campagne proche.
Communes urbaines, rurales sous influence et rurales autonomes
en région Nouvelle Aquitaine

La carte élaborée par les services[46] de la région Nouvelle-Aquitaine (Pôle Datar) combine les deux méthodes de l’Insee : la grille communale de densité et le zonage en aires d’attraction des villes. Ainsi apparait la catégorie des « communes rurales sous influence », communes périurbaines donc. Mais les espaces périurbains se retrouvent aussi, de manière moins explicite, dans les « ceintures urbaines » (voir encadré pages 6 et 7).
D’aucuns[47] qualifient aujourd’hui le périurbain de mature, non pour avoir atteint un hypothétique modèle achevé mais par l’accueil d’habitants aux trajectoires résidentielles d’une grande variété, après plusieurs vagues de peuplements spécifiques ; et le développement de territoires de proximités (« local métropolitain[48] ») relativisant la dépendance[49] au centre. Les marges d’évolution n’en demeurent pas moins fortes, selon des trajectoires multiples. En cela, les territoires périurbains apparaissent bien comme les espaces privilégiés pour structurer la transition écologique, et pour accueillir les mutations des modes de vie afférentes.
En la matière, la question des trajets domicile-travail (DT) mérite actualisation. Le développement du télétravail, le vieillissement de la population (dans le périurbain aussi même si les jeunes y sont relativement plus représentés) réduit la part relative des motifs DT dans les déplacements quotidiens. Par ailleurs, la croissance de la longueur des trajets DT, souvent mise en avant pour critiquer le modèle périurbain, a plusieurs explications[50], qui en minimisent la dénonciation : la baisse de l’emploi agricole ; une émigration d’actifs centraux retrouvant un emploi dans le périurbain, avec des distances DT moins réduites que dans les villes-centres mais une contribution louable à l’autonomisation du périurbain ; d’autres actifs du centre conservant leur travail en ville, en particulier des cadres et professions intellectuelles assez maîtres de leur emploi du temps pour assumer ce choix résidentiel loin des bureaux.
Il faut se garder de toute généralisation, les statistiques nationales ne traduisant pas la diversité des situations régionales voire locales. On observe souvent une dualité entre des premières couronnes périurbaines abritant des catégories sociales aisées, plutôt bien connectées au centre, et des espaces plus excentrés où se cumulent parfois précarité sociale et impasse énergétique (dépendance à la voiture thermique et logements difficiles à chauffer ou à rafraîchir).
Pour autant, la distance à la ville-centre ne programme pas les mêmes trajectoires résidentielles. Des territoires, plus éloignés encore de la ville, flirtant avec le rural, peuvent selon les cas accueillir des populations très atypiques. Dans la région nancéenne, des chercheurs attentifs découvrent aux confins du périurbain l’installation de jeunes ménages aux revenus modestes et moyens, grâce à la construction de pavillons, la rénovation d’anciennes demeures en cœur de villages et l’offre de logements sociaux ; un territoire-refuge[51].
Ailleurs encore, en Île-de-France en particulier, cette nouvelle attractivité résidentielle des communes rurales périurbaines concerne des populations plutôt aisées, en quête d’« espaces ouverts… au cœur des processus de distinction, leur protection leur permettant d’accéder au rang de paysages et de patrimoine. Aux représentations très urbano-centrées d’un premier âge périurbain succède progressivement une promotion de la ville-campagne[52] ».
On le comprend à la lumière de ces deux exemples, le périurbain résiste aux typologies : appartenance régionale, contexte de métropole ou de ville moyenne, armatures urbaines et rurales, phasages de l’expansion ou du recul démographique, situations foncières, traditions pavillonnaires, dynamismes de la ville-centre et de l’agglomération, interventions aménagistes… les combinaisons se multiplient. Attention aux moyennes !
Une catégorie spatiale spécifique mérite ici intérêt : un urbain dispersé linéaire plus que radioconcentrique, tels la littoralisation ou les agencements en corridors, le long d’une voie routière en particulier. Cette périurbanisation usurpe sa dénomination puisqu’il n’y a pas de dépendance à un pôle urbain spécifique. Mais ces dynamiques territoriales inédites présentent bien des caractéristiques communes avec celles du périurbain. Les notions d’entre-deux, de milieu transitionnel[53], trouvent là toute leur pertinence. Ces territoires d’urbanisation diffuses peuvent aussi se trouver en « entre-villes »[54], tel le Carré Picard[55], entre Soissons, Saint-Quentin, Compiègne et Laon.
On ne peut non plus penser un territoire périurbain sans rendre visibles ses interrelations avec les espaces qui l’entourent, de près et de loin, ville et campagne. Or les mobilisations statistiques ont parfois tendance à privilégier les données de stocks, plus faciles à documenter que les flux. Un important travail[56] a récemment été effectué en ce sens, combinant approches structurelle et systémique. La typologie obtenue répartit les ruralités de l’Hexagone en quatre grandes catégories : ruralités résidentielles (principalement les grandes couronnes périurbaines) ; petites polarités (les bourgs offrant des services) ; ruralités productives (tournées vers les fonctions agricoles et industrielles, situées surtout dans le nord et l’ouest) et ruralités touristiques (dans les massifs montagneux du sud et de l’est, sur les littoraux et dans les parcs naturels régionaux). Chacune de ces catégories se subdivise en deux : ruralités résidentielles aisées ou mixtes ; petites polarités industrielles et artisanales ou mixtes ; ruralités productives ouvrières ou agricoles ; enfin ruralités touristiques à dominante résidentielle ou spécialisées.
Ces analyses méritent d’être approfondies, pour dépasser le filtre « rural » et spécifier ainsi les caractéristiques périurbaines. Elles permettront aussi d’évaluer les capacités contributives des différents types de territoires périurbains aux transitions écologiques et énergétiques.
4e partie – Transitions : des marges de manœuvre prometteuses
La transition verte est en effet affaire de changement de paradigmes, qu’ils concernent la mobilité, l’usage des sols, la consommation des ressources, la réindustrialisation. Sa territorialisation trouve donc d’autant plus à s’affirmer là où les capacités de mutabilité sont importantes, qualitativement et quantitativement. Les campagnes (non périurbaines) auront surtout à s’occuper de transition agroécologique, pour répondre aux crises que traversent les mondes agricole et forestier, même si les questions d’accessibilité demeurent patentes. Les villes, les plus grandes d’entre elles du moins, tentent d’optimiser le modèle[57] canonique de la ville compacte, pour y intégrer l’adaptation aux changements climatiques. Cela leur laisse peu de marges de manœuvre. Le périurbain, en revanche, détient un stock important d’espaces mutables. Et ses marges de progrès en termes de mobilité durable sont conséquentes, au regard des kilomètres motorisés[58] parcourus chaque jour par ses habitants.
Que trouve-t-on donc dans le périurbain ? Toutes sortes de voiries : échangeurs autoroutiers, voies express, routes départementales. Toutes sortes d’espaces ouverts : terres agricoles, zones naturelles, golfs, friches. Toutes sortes d’activités : commerces grands et petits, bureaux et usines, équipements de loisirs (mais plus de Macumba[59] !) et… des maisons individuelles.
Le lotissement pavillonnaire est attaché au succès du périurbain, parce qu’il a permis à des millions de Français de se loger « au large[60] » et de devenir propriétaire ; « ce rêve construit pour les Français dans les années 1970 » dont une ministre du Logement[61] déclarait en octobre 2021 que c’était un « non-sens écologique, économique et social ». Depuis Pierre Bourdieu[62], certains[63] continuent effectivement à voir dans la maison individuelle un asservissement familial doublé d’un gaspillage collectif, alors que d’autres soulignent toutes les bonnes raisons de plébisciter cet habitat, dans les dispositifs d’espacement avec ses voisins, son travail, la nature, la grande ville, qu’il permet d’élaborer.
Pris entre les souhaits têtus des Français et les préconisations légales de sobriété foncière, les urbanistes s’essayent à diverses stratégies de compromis : les maisons mitoyennes, bien plus répandues ailleurs en Europe qu’en France ; des logements collectifs innovants, censés offrir les qualités de l’individuel (surfaces extérieures, pièces annexes mutualisées). Cette quête d’acceptabilité sociale de la densité s’est renouvelée depuis une dizaine d’années dans les démarches de division parcellaire[64], aussi louées que contestées. Le futur de la maison individuelle, déjà là ou encore en plan, reste à écrire. Les tentatives avortées des années 1960 afin de créer un urbanisme pour les maisons[65] demeurent d’actualité !
Densités en partage : atouts et limites de la division parcellaire « Oui la maison individuelle fait partie du rêve français », déclarait en février 2024 Gabriel Attal, alors Premier ministre. Quelques années après les déclarations de la ministre du Logement voyant dans la maison individuelle « un non-sens écologique, économique et social » (Emmanuelle Wargon, octobre 2021), le pavillon revenait en grâce gouvernementale, au nom des bienfaits de la « densification douce ». La pratique qui consiste à diviser en deux une parcelle déjà occupée par une maison pour en construire une deuxième existe depuis longtemps, en France comme dans les pays anglo-saxons. Mais ce n’est que depuis le début des années 2010 que le dispositif a acquis sa reconnaissance professionnelle en France sous l’acronyme Bimby (Build In My Backyard). Les promoteurs de la démarche mettent en avant l’intérêt bien compris de propriétaires possédant des surfaces de jardin importantes et souhaitant disposer de rentrées d’argent, pour réduire les frais d’entretien, rénover leur propre maison, loger des enfants, etc. De fait, on constate une tendance à la réduction des surfaces des terrains à bâtir. La superficie médiane des terrains vendus en France métropolitaine (hors Ile-de-France) a perdu approximativement 300 m² entre 2000 et 2018, passant d’environ 1.000m² à 700 m². Et les terrains achetés entre 2019 et 2022 pour construire une maison individuelle ont une surface médiane de 670 m² (ministère de la Transition écologique, « Maisons neuves : une superficie des terrains très variable selon les marchés immobiliers locaux », DataLab, juillet 2024). Plus de maisons, moins de pelouse ! Le slogan de la ville d’Austin (Texas) à la suite de l’abaissement de la surface de terrain minimale autorisant la construction est exportable. Les opérations sont le fait d’initiatives individuelles d’habitants (une majorité des projets pour certains constructeurs de maisons individuelles) ou d’interventions à l’échelle d’un îlot, facilitées par des bureaux d’étude, tels Iudo, Villes Vivantes ou Terra in design. Cette forme d’auto-promotion, affaire individuelle, est aussi vu par ces thuriféraires comme un outil potentiellement massif de réponse à la crise du logement. La densification douce se révèle parfois densification rampante, somme d’initiatives individuelles peu anticipées par la puissance publique. Vu comme outil de politique publique, la division parcellaire pose deux autres problèmes. D’une part, elle peut rencontrer des résistances de la part de riverains inquiets d’une détérioration de leur environnement, opinion alors souvent suivie par des élus locaux soucieux de figer leurs zones pavillonnaires. D’autre part, aussi accompagnée soit-elle, la division parcellaire permet certes de construire des logements mais elle peine à faire œuvre d’urbanisme. Dans les espaces périurbains, opérer la mutation d’un lotissement, d’un quartier, suppose de se préoccuper de réseaux techniques, de voirie, d’espaces publics, de végétation, de services et d’équipements… Références Emilien Robin, « L’imposture BIMBY », Criticat n°12, automne 2013. https://assets.criticat.fr/web-assets/Limposture-BIMBY-E_Robin-criticat-12.pdf Véronique Biau, Michael Fenker et Élise Macaire, entretien avec Jean-Michel Léger, « La controverse ‘Bimby’, émergence et diffusion d’une démarche », Cahiers Rameau, n°7, 2015. Cécile Leroux et François Madoré, « Vers un urbanisme post-pavillonnaire ? L’urbanisation en densification comme prémisse d’une rupture à l’étalement urbain dans le périurbain entre Rennes et Nantes », Cahiers Nantais [En ligne], 2 | 2015, mis en ligne le 05 mars 2021, lURL : http://cahiers-nantais.fr/index.php?id=1366 Julie Ambal, Xavier Guillot, Urbanité campagnarde. Le paysage, matrice d’un récit de transition à Saint-Loubès (Gironde), Popsu, éditions Autrement, 2022. Lily Munson, « Comment le petit propriétaire d’un pavillon de banlieue peut résoudre la crise du logement », note Terra Nova, 14 mars 2022. David Miet, « La densification douce, ou la miniaturisation de l’industrie immobilière à l’heure du ZAN », La Grande Conversation, 6 mars 2024. https://www.lagrandeconversation.com/societe/la-densification-douce-ou-la-miniaturisation-de-lindustrie-immobiliere-a-lheure-du-zan/. |
Les territoires périurbains sont également en mouvement par le rôle très spécifique qu’y joue la mobilité, comprise comme le déploiement dans l’espace et dans le temps d’un programme d’activités (elles-mêmes expressions d’un mode de vie). Les deux modalités de mise en relation, la proximité et la connexité (auxquelles on ajoutera désormais les communications numériques), agencent en effet des réseaux de vie périurbains à la carte, d’une diversité inconnue ailleurs, jouant sur les distances et les vitesses de transport. Est-il nécessaire de rappeler qu’en France périurbanisation et métropolisation vont de pair, si l’on veut bien définir les dynamiques métropolitaines comme une mise en réseau des territoires, à toutes les échelles (et non comme une classique concentration d’activités dans les grandes villes) ? La notion de bassin de vie, pourtant toujours en vogue, y perd donc de sa justesse.
Ces vies mobiles ont un coût économique mais aussi psychologique, souvent dénoncé : importance des budgets d’investissement et de fonctionnement pour la ou les voitures ; fatigue et stress liés aux contraintes horaires (accompagnement des enfants en particulier). En se focalisant sur la question de la dépendance à l’automobile, les politiques de déplacements pointent certes un problème majeur mais passent à côté de cet ADN mobilitaire du périurbain. Il ne signe pas l’inadaptation du périurbain aux exigences de la décarbonation des déplacements mais invite à reprendre à nouveaux frais la question, sans respect excessif à l’égard du paradigme du transfert modal[66] qui continue de structurer depuis des décennies les politiques de déplacement des agglomérations avec des succès mitigés.
Mobilités périurbaines, l’automobile et après ? Le développement du périurbain a en France été congruent avec la croissance de la motorisation des ménages. En 1953, 20% des ménages possèdent une voiture, 30% en 1960, 60% en 1973, 77% en 1990 (autour de 85% aujourd’hui). La motorisation est généralisée, à deux exceptions près : Paris[67] et les populations[68] les plus défavorisées financièrement. En matière d’automobile, la spécificité périurbaine tient donc avant tout à la deuxième voiture : deux tiers des ménages périurbains sont multimotorisés, un tiers au plan national. Si l’idée d’une dépendance à l’automobile semble concerner le périurbain (et la campagne) davantage que les zones urbaines, c’est que les alternatives y apparaissent peu crédibles : dessertes en transport collectif inexistantes ou inefficaces, modes actifs (marche et vélo) peu adaptés aux distances locales à parcourir, systèmes de covoiturage toujours en quête de fiabilité et de modèle économique. Les « dépendants » sont souvent consentants, au nom de choix initiaux liés à l’indépendance procurée par la voiture individuelle, dans des budgets-temps raisonnables. Mais il y a aussi des « captifs[69] » mécontents, lorsque les coûts d’équipement ou d’usage de l’automobile augmentent, lorsque la conscience écologique s’accroît. Et puis il y a les « assignés à résidence », parce que sans permis ou sans voiture. Durant les premières décennies de périurbanisation, ces difficultés de déplacement ont trouvé deux réponses :
Qu’en est-il aujourd’hui ? Quatre orientations, en forme de scénarios, se dégagent.
L’objectif est alors de massifier des flux aux origines et destinations dispersées, en les rabattant sur des lignes de capacité adaptée aux volumes à transporter : covoiturage, cars express, RER métropolitains. Difficulté : comment fluidifier les correspondances (applications numériques, « hubs de mobilité »…) pour rendre fiables, rapides et confortables ces déplacements intermodaux (par exemple vélo + car express + tramway + marche) ?
Ces nouvelles manières d’être mobile vont se traduire concrètement par un usage plus important de la marche, du vélo, du vélo à assistance électrique, de la voiture partagée…Et cette mobilisation des ressources locales (commerces, loisirs, culture…) crée des effets boule de neige favorisant la polarisation spatiale (création de centralités). La dynamique de changement n’est donc pas déterminée par des transferts modaux (un même déplacement opéré par un moyen de transport différent) mais par des évolutions dans les lieux fréquentés, avec un recentrage[70] de l’espace de vie autour du lieu de résidence et une intensification des pratiques locales plus favorables aux modes de déplacement alternatifs à la voiture. Difficulté : au-delà de la rapidité relative de ces changements, rien ne laisse supposer que ces fréquentations du proche se détachent significativement de l’usage de la voiture, pour des périurbains toujours adeptes de flexibilité dans leurs emplois du temps et de diversité dans leurs destinations (zapping territorial).Il est intéressant, sinon préoccupant, de constater que la solution aujourd’hui à l’agenda politique ne fait écho qu’à l’une de ces quatre orientations, la troisième. Il s’agit des RER métropolitains, devenus Serm, lignes de Ter améliorées ou nouvelles lignes de cars express couplées avec des projets de rabattement des habitants vers ces stations de transports collectifs et de densification autour des futures gares. On retrouve là le modèle du Transit Oriented Developement (TOD), qui consiste à programmer autour des stations de transport collectif des quartiers denses et compactes, zones de chalandise favorables au transport collectif. Au regard des flux relativement peu importants sur les lignes actuelles de TER et des faibles densités des territoires à desservir, espérer transformer la structure héritée de l’urbanisation, même à moyen terme, semble une gageure. Références Aurélien Bigo, Voitures : Fake or not, éd. Tana, 2023 Laurent Cailly, Rodolphe Dodier, Arnaud Gasnier, François Madoré, Habiter les espaces périurbains, Presses universitaires de Rennes, 2012. Hélène Nessi, Benoît Conti, Laurent Proulhac, Patricia Sajous, Marianne Thébert, « La mobilité périurbaine : le changement, c’est pour quand ? », EspacesTemps.net, 2017. https://www.espacestemps.net/articles/la-mobilite-periurbaine-le-changement-cest-pour-quand/ Charles Raux et Éric Charmes, « Tous en ville ! Faut-il empêcher l’émiettement périurbain pour décarboner la mobilité ? », Cybergeo: European Journal of Geography, mis en ligne le 14 juin 2021. http://journals.openedition.org/cybergeo/36910. Laurent Cailly, Trajectoires périurbaines. Mobilités spatiales et recompositions des modes d’habiter en marge des villes françaises, Presses universitaires François Rabelais, 2025. |
5e partie – Une doctrine et des récits pour des destinées périurbaines plurielles
L’action publique locale a pris depuis quelques temps la mauvaise habitude de mettre en avant des solutions standardisées, baptisées « bonnes pratiques », solutions dont on ne sait très vite plus à quels problèmes elles sont censées répondre. Faute de doctrines articulant objectifs et moyens, les projets se succèdent ainsi sans fils rouges à même de dessiner une logique de changement. Il faut donc, avant tout, problématiser la question périurbaine.
Considérons d’abord que le « il faut lutter contre l’étalement urbain » ne peut tenir lieu de politique de la périurbanité. Ce combat a sans doute ses raisons – s’il veut bien oublier ses objectifs quantitatifs[71] afin de contextualiser ses ambitions qualitatives – mais il n’apporte pas de quoi se saisir de la réalité périurbaine dans sa totalité, sa diversité et sa dynamique.
Acceptons ensuite l’idée que le périurbain n’est pas de l’urbain diminué, tels certains faubourgs du 19e siècle peu à peu transformés en morceaux de la ville compacte et dense. Le périurbain n’est pas un ersatz de l’urbain. Il détient ses qualités propres, comme territoire d’hybridation et d’interface. Il convient alors d’en réinterroger les promesses initiales sous deux critères d’évaluation actualisés : la transition écologique, les aspirations sociales.
Par-delà leurs histoires singulières et les contextes de leur périurbanisation, cinq éléments apparaissent conditionner la demande périurbaine : de l’espace, souhait doublement traduit par la maison et le jardin, et des horizons ; une liberté de mouvement, initialement concrétisée par un usage immodéré de la voiture individuelle ; une nature proche (sous des formes diverses selon les situations locales et pour des raisons variées : santé, esthétique, promenade…) ; une sociabilité de voisinage adaptative et maîtrisée, propice à la paix civile ; une proximité avec la (grande) ville sans survalorisation de sa centralité (y compris par des pratiques intermittentes).
La maison individuelle permet en outre une moindre dépendance au collectif, au regard des contraintes d’un bailleur ou d’une copropriété, ainsi que des capacités[72] de production autonomes (bricolage, jardinage). Elle se fait habitat évolutif pour suivre les cycles de vie familiaux (la modularité recherchée avec peine par les architectes pour les logements collectifs). Elle semble également encourager une valorisation de la sphère familiale et domestique. Pour cette raison en partie, l’espace public reste peu présent dans le périurbain et la mixité fonctionnelle (coexistence spatiale de l’habitat, des emplois, des services) a priori peu recherchée.
N’y a-t-il pas un raisonnement et un récit à élaborer, qui postulent une convergence entre impératifs écologiques et aspirations sociales ? Comme dans les années de l’après premiers chocs pétroliers (1973 et 1979), la représentation traditionnelle du périurbain ne paraît pas en phase avec la doxa des conditions de la transition écologique : de la sobriété foncière par la densification, de la démobilité par moins de voitures et plus de proximité, sans parler de la cheminée et du barbecue. Mais il y a d’autres chemins de transition pour le périurbain que de devenir une ville compacte et dense. Comment alors traduire pour aujourd’hui et demain les cinq promesses du périurbain ?
La « générosité » des espaces périurbains constitue une triple ressource : biodiversité et production nourricière, en cas de statu quo du partage entre espaces ouverts et espaces construits ; gisement foncier pour la densification résidentielle, l’implantation d’activités ou l’installation d’énergies renouvelables (présence de l’eau, de matériaux) ; mutations des pratiques habitantes, pour un meilleur « taux de remplissage » des maisons[73] devenues trop grandes pour leurs occupants initiaux. Et si l’on veut bien considérer que la démarche Zan avait pour objectif initial la lutte contre l’imperméabilisation des sols et la perte de biodiversité[74], les espaces périurbains s’en sortent plutôt bien en la matière.
L’omniprésence automobile, garante de la liberté de mouvement, représente pour sa part un problème (pour les individus comme pour la société) qui touche en fait tous les lieux d’habitat, et pas spécifiquement le périurbain ou les campagnes, à l’exception des résidents des centres-villes des plus grandes agglomérations françaises. Mais c’est aussi une solution, par une automobile repensée dans ses équipements, dans ses réseaux et dans ses usages. Le transport collectif traditionnel n’a pas vocation à assurer la desserte[75] universelle du périurbain. La voiture individuelle non plus. Un nouveau modèle de mobilité doit voir le jour, qui donne toute sa part à l’évolution du système automobile et à l’agencement des courtes distances de la métrique périurbaine (marche, vélo, vélo à assistance électrique).
Les liaisons avec la (grande) ville, autre problème de déplacement, trouveront quant à elles soit à s’intensifier en ayant recours au transport collectif de masse, soit à se réduire, autonomisation progressive des espaces périphériques aidant. L’alternative ici suggérée se formalise dans les articulations projetées entre modes d’occupation de l’espace et économie des déplacements.
La proximité de la nature n’a sans doute pas été au rendez-vous des attentes. Les espaces naturels stricto sensu sont parfois difficiles d’accès, trop protégés ou trop fréquentés, peu propices à certains usages récréatifs. Le « vert » le plus répandu correspond aux terres agricoles, dont le modèle productiviste majoritaire dévalue fortement les aménités de voisinage (impacts des traitements phytosanitaires, cheminements délicats…). Réduire les interfaces entre le périurbain construit et les espaces libres, par un remembrement généralisé, n’apparaît cependant ni crédible ni souhaitable. Ces entre-deux, ces entremêlements font l’originalité du périurbain, ses paysages et ses ambiances. Ils doivent être mieux assumés et mieux assurés. Il convient donc de rendre les cohabitations plus confortables, plus agréables, plus faciles. Le mot d’ordre de passer du « cadre de vue au cadre de vie [76] » fournit des orientations répondant elles aussi à la double ambition écologique et sociale.
La boîte à outils afférente associe l’attention aux paysages, la gestion des compensations écologiques, l’intégration des lisières dans la planification, la programmation du développement multifonctionnel des trames vertes et bleues, l’attention aux espaces publics[77] du périurbain tels les itinéraires de marche, les projets d’agro-urbanisme ou agri-périurbains, la chasse au « béton vert[78] », des modalités inédites de gestion des jardins privés[79], etc.
La ville à la campagne, rêve des urbanistes « Si l’on construisait actuellement des villes, on les bâtirait à la campagne, l’air y serait plus sain ». Avant Alphonse Allais, en 1860 déjà, Louis-Auguste Commerson fait rire les lecteurs de sa Petite Encyclopédie bouffonne avec cette apparente aporie. Il ne croit pas si bien dire car l’alliance ville-campagne sera l’obsession des urbanistes, décennies après décennies. En Espagne, à la fin du 19e siècle, c’est Arturo Soria qui conçoit sa ville linéaire, ruban sans fin de 40 mètres de large permettant de « ruraliser la vie urbaine, urbaniser la campagne ». A la même époque, Ebenezer Howard va développer en Angleterre son idée de cité-jardin (Garden Cities, 1898), l’association de maisons individuelles, de parcs et de fermes combinant les « forces d’attraction » de la ville et de la campagne. Dans la première moitié du 20e siècle, Le Corbusier rêve d’une ville dont le sol serait tel un parc. Frank Lloyd Wright, architecte américain célèbre pour sa maison sur la cascade, veut pour sa part faire disparaître toute distinction entre ville, campagne et nature. Son projet de Broadacre City, une ville diffuse, non agglomérée, dans une végétation omniprésente, prévoit que chaque famille dispose d’une acre (4 000 m2 environ) de terrain. Lorsque le périurbain se développe en France, l’idée de coupler « le charme de la vraie campagne et les avantages d’une ville » (plaquette du promoteur de maisons individuelles Breguet en 1978) demeure. Mais la périurbanisation n’a pas vraiment gagné ce pari de la campagne urbaine. La nécessaire transition agroécologique est aujourd’hui une opportunité à ne pas manquer pour actualiser l’ambition. Les projets agriurbains élaborent un « modèle renouvelant l’identité de l’entre-ville (…) autour d’un habiter croisant le logement, l’alimentaire, l’activité et le loisir au sein d’un paysage chargé d’une mission écologique[80] ». Leur gouvernance associe élus, agriculteurs, citoyens (plaine de Versailles, plateau de Saclay…). Les exemples les plus aboutis se trouvent en Ile-de-France, la Région ayant, dès 2008, initié des programmes régionaux pour « développer des formes agricoles mixtes, offrir des pôles de production et de distribution alimentaires locaux au cœur des territoires urbains et périurbains, impulser un élan autour des projets urbains pour que l’agriculture y soit intégrée ». |
L’analyse de la sociabilité dans le périurbain a fait couler beaucoup d’encre. Des auteurs ont critiqué le choix périurbain de l’allophobie (versus l’allophilie de la grande ville avec son gradient d’urbanité[81] le plus élevé) et l’entre-soi de la clubbisation des villages. Les enquêtes[82] mettent surtout en évidence une multiplicité de pratiques socio-spatiales. Ne conviendrait-il pas aujourd’hui de renforcer le caractère à la carte de la sociabilité périurbaine ? Et ce en lui permettant de s’exprimer au sein des réseaux de vie qui organisent, plus que les bassins, la vie quotidienne dans le périurbain ; mais aussi par le développement d’une périurbanité spécifique, faisant se côtoyer usages et usagers diversifiés dans les lieux et les temps de la rencontre périurbaine. A la densité caractéristique de l’urbain « ville » répondent les densités éphémères[83] de l’événementiel (du marché forain hebdomadaire au concert mensuel dans l’église en passant par la brocante sur le parking de l’hypermarché), si l’on veut bien y accorder attention et protection.
Cette vision n’invalide en rien les démarches visant à renforcer ou recréer des services de proximité, revus dans leurs priorités à l’aune des pratiques numériques et de l’individuation des comportements. Elle implique néanmoins de réviser les modèles de centralités. Il y a par exemple des synergies à élaborer entre revitalisation de centres-bourgs et requalification d’autres types d’espaces collectifs, des hiérarchisations à oublier au profit d’armatures urbaines en grappes[84]. Et ce sans survaloriser la question du domicile, les lieux du périurbain s’animant aux rythmes des habitants mais aussi des usagers et des passants.
Souvent, l’espace périurbain se fait patchwork, tissu territorial hétéroclite répondant à sa manière à la condition urbaine de diversité et de proximité. « Quand on habite la France périurbaine, on peut alterner, en l’espace de quelques minutes, entre routes de campagne, autoroutes, champs cultivés, zones d’activités, entrées de ville[85] », forêt, centre-bourgs, hypermarché… Oublions le ni ville ni campagne pour promouvoir le à la fois ville et campagne.
Les éléments du scénario se précisent, pour réenchanter les promesses périurbaines. Les perspectives ou prospectives existantes (scénarios Mayoux, Inra, Datar…) fournissent des décors variés, aptes à spécifier l’importance relative du maillage périurbain, dans des interdépendances territoriales à mieux documenter. Elles invitent à formuler des trajectoires de changement, à l’aune desquelles s’évalue la capacité relative des diverses situations périurbaines à s’y prêter.
Scénarios prospectifs en stock La ville-parc et le rurbain. En 1980, les conclusions du rapport Mayoux – Demain l’espace, l’habitat individuel péri-urbain – esquissaient deux modèles spatiaux aptes à organiser le développement des espaces périurbains. La ville-parc est pensée pour des urbains en quête de maisons individuelles, dans un cadre verdoyant, avec les services de la ville. La forte présence végétale accueille activités sportives, promenades, loisirs et culture. Le rurbain, quant à lui, est fait pour ceux que l’on appellerait sans doute aujourd’hui des néoruraux. L’urbanisation respecte trames et formes du tissu rural. Les services à réclamer ne sont pas ceux de la ville. Cette idée d’un contrat explicite sur les potentiels d’accès aux services, à l’aune de la taille des zones de chalandise et des niveaux de densité, vaut d’ailleurs attention et mériterait actualisation. Ces deux modèles répondent à l’ambition d’une « nouvelle articulation entre le minéral et le végétal, le bâti et le vivant, l’organisé et le spontané ». Un travail prospectif piloté par l’Inra (Institut national de la recherche agronomique) entre 2006 et 2008 sur Les nouvelles ruralités en France à l’horizon 2030 présente quatre scénarios de transformation des campagnes : les campagnes de la diffusion métropolitaine ; les campagnes au service de la densification urbaine ; les campagnes dans les mailles des réseaux de ville ; les campagnes intermittentes des systèmes métropolitains. Autant les trois premiers scénarios formalisent des dynamiques territoriales déjà à l’œuvre ici ou là, autant la notion de campagne intermittente requiert explication. Elle se fonde sur un nouveau mode de vie, structuré par la multi-appartenance résidentielle, avec alternance de séjours entre métropole et territoire rural. Une autre manière de combiner les usages de la ville et de la campagne. Le travail prospectif le plus abouti a été réalisé dans le cadre de travaux de la Datar (devenue Diact puis CGET). Cinq scénarios sont développés :
L’urbain compacte l’emporte, digère le périurbain en le densifiant et la périurbanisation s’arrête ou devient un phénomène secondaire.
La dispersion généralisée s’impose grâce aux solutions techniques rendant les faibles densités soutenables et l’accès au confort spatial désirable.
L’enjeu agrinaturel est central et structure de nouveaux rapports ville- campagne, et les espaces intermédiaires, jadis périurbains, deviennent des conservatoires périruraux.
L’interterritorialité organise l’ancien périurbain entre les métropoles et entre les territoires par tous leurs sites et fonctions d’interface.
Le périurbain est réquisitionné pour son intérêt écologique global par les villes qui dominent leur région et équilibrent ainsi leur empreinte, dans un contexte de très fortes contraintes environnementales. Les destinées périurbaines semblent ici beaucoup dépendre des capacités d’action des acteurs urbains. Le périurbain « assumé » n’a finalement droit qu’à deux scénarios : la dispersion généralisée, modalité dominante de l’agencement des territoires, façon Broadacre City ; la périruralité patrimonialisée, espace privilégié de belles campagnes, entre une nature sanctuarisée et des espaces agricoles transformés par les logiques environnementales. En miroir, il paraît judicieux de se préoccuper de l’avenir des campagnes productives. C’est ce qui a été étudié par le Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux, qui élabore quatre scénarios :
Au regard de la question périurbaine, on soulignera tout particulièrement que seul le scénario 4 implique une augmentation de la surface agricole utile. Références Olivier Mora (coord.), Les nouvelles ruralités à l’horizon 2030, éd. Quae 2008. Stéphane Cordobes, Romain Lajarge, Martin Vanier, « Pour des périurbains assumés », in Prospective périurbaine et autres fabriques de territoires, Datar, Territoires 2040 n°2, 2e semestre 2010. CGAAER, Agri 2050, Une prospective des agriculteurs et des forêts françaises, rapport n°18066, janvier 2020. |
6e partie – Entre projets territoriaux négociés et politiques publiques subverties
Les destinées périurbaines sont donc plurielles. Elles se façonnent par l’association des orientations politiques et des forces ou faiblesses de l’existant : tendances démographiques et socio-économiques propres, interactions au sein des grands systèmes territoriaux, état des bâtis, caractéristiques de l’économie agricole, initiatives locales publiques et privées. Elles prennent forme dans un projet territorial empruntant pour partie aux trajectoires préétablies par les scénarios à disposition.
Deux situations particulières aident à illustrer la proposition. Un territoire périurbain en croissance démographique régulière, fort de son interdépendance avec une grande agglomération, par exemple dans la première couronne de Toulouse, pourra s’orienter vers une démarche de densification différenciée, permettant d’atteindre dans certaines centralités secondaires des masses critiques aptes à maintenir des services collectifs établis ou à en implanter de nouveaux. Dans un cas de moindre dynamisme démographique et de présence de lotissements pavillonnaires[86] vieillissants (bâti et population[87]), par exemple un peu plus loin de Toulouse autour de Mazamet dans le Tarn, un projet global de « remembrement » articulant divisions parcellaires et valorisation des jardins comme ressource collective pourra être élaboré.
On le comprend, ces projets territoriaux impliquent une approche supra-locale, sans laquelle aucune négociation collective interterritoriale ne saurait prendre corps, apte à donner du sens à des actions d’aménagement et de ménagement multisectorielles. Rien d’intéressant ne peut se faire par l’addition aléatoire d’opportunités de mutation parcellaire.
La bonne échelle de ces projets territoriaux est affaire de substance et de procédure, de contenu du projet et de son organisation institutionnelle. Par exemple, un projet autour de la mise en service d’un réseau de transport « en commun » (transports collectifs traditionnels et covoiturages) dessine un territoire de négociation et d’intervention spécifique. D’autres dimensionnements seront à prendre en considération dans une programmation d’agro-urbanisme/agriurbanisme[88], faisant d’un réseau de parcs agricoles la trame du projet. Ces spatialités spécifiques à la substance du projet se confrontent aux périmètres des structures existantes en capacité de porter politiquement et organisationnellement la démarche ; une question classique pour les politiques publiques locales, devant articuler territoires des problèmes et territoires des solutions.
On propose ici une démarche d’articulation entre espaces fonctionnels et institutionnels relançant les promesses[89] de la coopération interterritoriale, seule à même de garantir l’articulation des échelles de réflexion, de conception et de mise en œuvre.
Une question essentielle subsiste : comment initier cette mise en projet[90] de l’avenir des territoires périurbains ? Quels messages et quels vecteurs élaborer afin de provoquer une prise de conscience partagée du caractère incontournable du périurbain pour l’avenir de l’a-ménagement des territoires en France ? L’analyse des pratiques étatiques en ce domaine conduirait à proposer un programme catégoriel[91] : après les métropoles (attractives), les villes moyennes (et leur cœur), les petites villes (de demain), les villages (d’avenir). Mais cette partition par taille, en miroir à l’organisation des associations d’élus locaux, présente deux limites : ses effets d’entraînement sont faibles ; elle évacue les potentiels de mutation liés aux interdépendances territoriales[92]. Elle ne rendrait par ailleurs pas justice au rôle privilégié que doit prendre le périurbain dans les politiques d’intérêt national.
Rappelons-le, qu’il s’agisse de mobilité, d’habitat, de foncier, d’environnement, d’énergies renouvelables, de transition agricole, c’est dans le périurbain que les enjeux, quantitatifs et qualitatifs, y sont les plus importants. Quantitatifs par les kilomètres parcourus, par les hectares en concurrence d’usages, par les capacités de mutation du bâti. Qualitatifs par la nécessité d’y inventer de nouveaux modèles d’aménagement autant que des dispositifs d’action inédits.
Ces thématiques stratégiques sont aujourd’hui l’objet de politiques publiques anachroniques[93] dans leurs postulats, partielles dans leurs approches et en conséquence peu pertinentes au regard des enjeux contemporains. Elles existent, néanmoins ! Avec leurs mots d’ordre, leurs moyens, leurs gouvernances. Le pari consiste à subvertir ces politiques, à les transformer en faisant du périurbain leur terrain de jeu prioritaire et privilégié, et ce dans l’intérêt de tous les territoires. Les villes et les campagnes trouveront l’essentiel des réponses à leurs questions dans les mutations du périurbain.
La stratégie s’esquisse : des projets territoriaux négociés, mobilisant opportunément des politiques publiques revisitées par la focale périurbaine. Les ambitions de préservation des sols (mal portées par la démarche du Zan) permettent de planifier des occupations de l’espace attentives à une sobriété foncière partagée par tous les types d’usage, préoccupées des nouveaux programmes (EnR, économies circulaires) et jouant sur des réversibilités[94] relatives.
Les études préalables à la mise en œuvre des Serm (services express régionaux métropolitains), dernier avatar du dogme[95] du transport collectif comme panacée, peuvent paradoxalement faciliter l’innovation organisationnelle, prérequis pour concevoir des services de mobilité adaptés aux différents contextes périurbains.
Aux balbutiements de la transition agricole peuvent succéder les enseignements de multiples projets périurbains testant la faisabilité de divers modes de cohabitation entre production agricole et activités résidentielles ou industrielles. Les interpellations politiquement vives en matière de maillage des équipements et services – une fois débarrassées de diverses croyances peu opératoires (de l’opposition binaire métropoles-périphérie à l’égalitarisme républicain du tout partout) – autoriseraient enfin un changement de paradigme sur le « droit à l’accès », encouragé par les multiples formes d’hybridation d’ores et déjà développées dans le périurbain.
Enfin, les besoins de rénovation énergétique et les soucis de précarité énergétique fournissent un fil rouge cardinal pour dimensionner la part du périurbain pavillonnaire dans la réponse à la crise endémique du logement. Il n’est pas interdit de concevoir de nouveaux lotissements, en continuité d’urbanisations préexistantes, sobres en espaces de circulation (ni plans en raquette, ni impasses), intégrant cheminements piétons et vélos, accessibilité transport collectif ; des solutions[96] « fondées sur la nature » pour le traitement des eaux ; des apprentissages entre habitants pour renforcer la biodiversité dans les jardins[97], etc.
7e partie – Quels opérateurs et quels instruments pour le périurbain ?
Changer de paradigme, en matière de politique publique, c’est changer de scénario, de décors, de dialogues, d’acteurs et d’accessoires. Le scénario est fourni par la prospective, avec ses décors pour les amateurs d’images. Les dialogues construisent l’intrigue, les trajectoires de changement. Bien souvent, rien d’autre ne bouge.
On avance ici l’idée que beaucoup se joue dans le casting, et dans des accessoires qui n’en sont justement pas. A l’instar d’un processus d’innovation, la créativité se nourrit de l’hybridation des savoirs, des disciplines, des récits. Or chaque acteur est engoncé dans sa culture institutionnelle, la routine de ses compétences héritées et sa défense identitaire. Quant aux instruments, ils formatent la réalité sur laquelle on souhaite agir, préemptant les problèmes et les solutions. Des pilotes invisibles de l’action.
S’agissant du périurbain, comment modifier la distribution des rôles ? Les potentiels nouveaux acteurs demeurent discrets. Faute de signes annonciateurs tangibles, c’est donc plutôt la modification des systèmes d’acteurs déjà en place qu’il faut viser : les mêmes, mais avec d’autres missions et d’autres interrelations. Les outils ne se transforment pas non plus du jour au lendemain, ils sont créés pour durer. L’efficacité suggère deux voies : la modification d’outils préexistants, la création de quelques instruments porteurs de changements tant symboliques que conceptuels, vecteurs d’autres manière de penser et de faire.
Quel est l’état des troupes périurbaines ? Les départements[98], ayant perdu par la loi NOTRe de 2015 la clause générale de compétence et vu la compétence transport transférée aux régions, ont peu ou prou délaissé les questions de mobilité et d’aménagement ; officiellement en tout cas. Mais beaucoup s’arrangent avec leurs compétences propres pour peser encore sur les questions de développement économique, d’aménagement urbain, d’habitat, d’économie agricole… et de déplacement. Car moult routes sont départementales, supports potentiels de décarbonation de la mobilité par des requalifications de voirie donnant plus de place aux cars express, au covoiturage, au vélo et à la marche. Ce levier de la route multimodale[99] devrait s’avérer judicieux, pour reconfigurer l’ensemble du système de déplacement. En articulation avec les voiries communales, il paraît alors plausible d’esquisser le cahier des charges de dossiers des voiries multimodales[100], réseau des liens et des nœuds (« hubs de mobilité »).
Un groupe d’acteurs se dégage, pour appréhender ainsi les questions de mobilité périurbaine : Département + Région[101] + AOM (autorités organisatrices de mobilité) périurbaines. Ils se trouvent d’ores et déjà parfois réunis au sein de syndicats mixtes[102]. Ces types de structure semblent aptes à établir, sans formalisme juridique, des schémas des reliances[103], donnant à voir les interdépendances avec les « périphéries » du périurbain : la ville et la campagne ; mais aussi aptes à nourrir les réflexions sur les stratégies de polarisation spatiale (renforcement différencié des centralités ou polycentrisme assumé).
Les régions ont hérité par la même loi NOTRe d’une compétence d’aménagement, avec l’élaboration des Sraddet (schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires). Cette mission les met en contact avec les instances chargées des Scot[104], de la planification spatiale. Une sortie utile et honorable de l’impasse dans laquelle se trouve la démarche Zan[105] consisterait à faire émerger des territoires de négociation et d’intervention autour de COP[106] des sols vivants et productifs et de schémas de mutation des espaces ouverts : diagnostic de qualité des sols + programmation EnR + perspectives activités agricoles + forêts/espaces naturels + charte paysages + programme d’aménagement et de gestion des lisières[107] + trames vertes et bleues + espaces verts et jardins (publics et privés).
Cette « inversion du regard[108] » autorisera des analyses inédites sur les potentialités de densification, qu’il s’agisse d’urbanisation en continuité du bâti existant ou de divisions parcellaires ; ou encore d’intensification de l’occupation du sol dans des zones déjà aménagées. Les questionnements[109] sur le devenir des zones d’activités périurbaines y trouvent leur place : restructurations foncières pour libérer des espaces ouverts, densification pour de nouvelles activités économiques, diversification pour développer des centralités multifonctionnelles…
Les agences d’urbanisme apparaissent en capacité de préparer ces exercices par l’édition d’atlas des espaces ouverts. Ces territoires d’étude et d’action se situeraient selon les contextes à l’échelle de grands Scots[110] ou d’Inter-Scots associant de petits Scots. C’est par leur métrique que les espaces ouverts structurent les grands espaces périurbains.
Le périurbain, une clé des processus écologiques urbains Le périurbain recouvre beaucoup de formes et de définitions. Qu’il soit très étendu au-delà de la ville ou compacté, très artificialisé par des lotissements ou peu habité, plus ou moins agricole ou forestier, dans tous les cas ce « paysage » est une interface entre ville et campagne. A ce titre, il joue un rôle majeur dans tous les flux qui relient ville et campagne. Qu’il s’agisse de mobilité ou de distribution alimentaire, il fait intimement partie des réseaux qui structurent un territoire. Un des réseaux qui prend aujourd’hui une autre valeur que la seule protection de la nature est celui de la biodiversité. Il convient non seulement de prendre en compte une végétalisation qui apporte de nombreux « services » aux citadins, qu’ils habitent en ville, en suburbain ou en périurbain (rafraichissement de l’air, gestion des pollutions, bonne santé humaine physique et psychique, ambiances…) mais aussi de viser une durabilité et une gestion sobre de ces espaces. A cet effet, les indispensables plantations sont à considérer comme de petits écosystèmes avec leur diversité de plantes et leur organisation écologique. Mais à la grande échelle les processus de dispersion sont aussi à prendre en compte, ce qui n’est guère réalisé aujourd’hui. Il s’agit alors de connecter les sources d’espèces qui se trouvent surtout en zone rurale (forêts, bois…) avec des espaces à caractère naturel des milieux urbanisés (parcs, jardins…) et ces espaces entre eux. Des structures vertes (haies, chemins creux, bandes boisées, ripisylves…) permettent ces connexions et les déplacements d’espèces, animales comme végétales, au sein des territoires plus ou moins urbanisés. On comprend tout le potentiel que présente le périurbain pour organiser ces cheminements (corridors écologiques) entre campagne et ville. La qualité et la configuration de l’environnement dans les lotissements et les bourgs sont donc particulièrement importantes pour la biodiversité de la ville proche (la majorité des espèces a une mobilité faible). Les concepts de ceinture verte ou de ville archipel vont dans le sens d’une prise en compte d’un environnement planté. Et l’organisation d’un maillage de corridors écologiques reste une vraie question d’urbanisme régénératif qui interroge au-delà de la ville les connexions régionales. Références Philippe Clergeau et Nathalie Blanc (coord.), Trames vertes urbaines, Le Moniteur, 2013. Philippe Clergeau (coord.), Urbanisme et biodiversité, vers un paysage vivant structurant le projet urbain, éditions Apogée, 2020. Mélanie Chollet et Sandrine Larramendy, Végétal et espaces de nature dans la planification urbaine, Plante & Cité, Angers, 2022. Eduardo Blanco, La ville régénérative, un collectif nature-société, éditions Apogée, 2024. Sophie Carré et Philippe Clergeau (dir.), Morphologie urbaine et biodiversité. Apports de terrains de recherches pluridisciplinaires, éditions Apogée, 2025. |
Les communautés de communes, qui forment l’essentiel de la trame institutionnelle du périurbain, sont pour leur part à même de rendre compte de la quotidienneté des habitants et usagers de leurs territoires. Il y est question de plus ou moins grande facilité d’accès aux équipements et services, de carte scolaire, de déplacements réguliers ou occasionnels, d’arbitrages entre présentiel et téléservices… Cette connaissance fine des rythmes de vie mérite des diagnostics partagés, à l’instar de ce qui a pu être esquissé dans l’élaboration des Schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services au public[111]. La mise en œuvre de ce dispositif État / départements a surtout concerné les « ruralités » et les services publics de proximité, à travers les maisons France Service. La démarche mériterait une réappropriation des objectifs[112] initiaux sur les domaines d’intérêt, un outillage actualisé ainsi qu’une ambition inédite de partage démocratique.
Ainsi pourrait-on imaginer un diagnostic collaboratif des espaces-temps des pratiques habitantes (« agendas périurbains »), permettant d’intégrer les préoccupations de déplacement, d’accès aux services, d’intensité d’usages, tout en mobilisant les instances qui par la définition de leurs horaires d’ouverture déterminent de facto le quotidien de tout un chacun (exemple des établissements scolaires). Se retrouvent ici des ambitions en termes de renforcement de vies en proximités[113] et, plus largement, des champs d’intérêt liés aux politiques temporelles, chargées de permettre une meilleure maîtrise des temps individuels et collectifs. En France, leurs résultats sinon leurs ambitions restent modestes, souvent affaires de vie nocturne et d’écrêtement de pointes de trafic, des sujets de villes et d’agglomération. Une bonne raison pour s’y intéresser en situations périurbaines, là où les temps individuels, sans doute plus contraints qu’en ville par les « producteurs de temporalités », ne trouvent plus l’espace des temps collectifs.
Dans une coordination à agencer à la fois méthodologiquement et politiquement, les dispositifs envisagés articulent l’espace et son occupation (le système de localisation), l’offre de mobilité (le système de transport), les pratiques sociales (le système d’activité). Les acteurs impliqués sont déjà en place. Les gouvernances à organiser mobilisent des instances a priori souples en termes organisationnels, familières avec l’interterritorialité, au-delà de leur degré propre de formalisme juridique : syndicats mixtes de mobilité, pôles métropolitains, parcs naturels régionaux, agences d’urbanisme[114], agences/bureaux des temps…
Politique publique nationale | Instruments | Acteurs | Gouvernance | Coordination méthodologique et politique |
Déplacements Système de transport | Dossier de voirie multimodale Schéma des reliances | Départements Régions AOM | Syndicats mixtes de mobilité | Dispositif assembleur (démarche prospective, grand projet, programme thématique, projet territorial ad hoc) + Espace de négociation + Leadership politique |
Foncier Sols Système de localisation | Atlas et Schéma de mutation des espaces ouverts | Régions Syndicats SCoT | COP des sols vivants et productifs | |
Équipements Services Système d’activités | Schéma d’accessibilité des services Agendas périurbains | Départements Intercommunalités | Agence des temps |
Pour qu’enfin le périurbain ait droit de cité, le grand soir n’est donc pas institutionnel. Il se veut d’abord instrumental, parce que c’est en regardant la réalité autrement que l’on peut autrement agir. Les révolutions méthodologiques – changements de paradigme – ont par ailleurs le bon goût de se décréter sans controverses législatives ni politiques. Sans suspicion de technocratisme, les acteurs locaux savent se saisir de telles propositions et opportunités.
La coordination politique passe par la constitution de territoires de négociation. Cette préconisation s’avère audacieuse, au regard des routines organisationnelles locales. Ni forcément contenus dans un périmètre spécifique, ni forcément poussés par une obligation juridique, des acteurs s’associent volontairement, à l’initiative de l’un d’entre eux, en créant un territoire de négociation et d’intervention pour faire projet dans le périurbain. Ce leader politique peut avoir de bonnes raisons pour agir ainsi : arrivée d’un grand équipement, procédure bloquée, envies partenariales, projet politique à engager…
La coordination méthodologique se voit assurée par un travail prospectif, des programmes stratégiques, un projet territorial, dès lors que la démarche acquiert explicitement cette fonction coordinatrice, au-delà de sa mission initiale.
Il y a donc cinq éléments à associer pour faire projet dans le périurbain : un acteur leader, un instrument, un système de gouvernance (préexistant ou à créer), un espace de négociation, un dispositif assembleur. Comme dans le modèle de la corbeille[115] expliquant un processus décisionnel par la convergence d’un problème, d’une solution, d’un décideur et d’une opportunité de décision, mais cela sans chronologie prédéterminée, la recette aux cinq ingrédients pour une démarche périurbaine de projet ne requière pas d’ordre préétabli.
Ainsi une agence d’urbanisme (système de gouvernance préexistant) peut-elle à l’occasion de son travail d’établissement d’un Scot proposer d’élaborer à titre expérimental un atlas des espaces ouverts. La Région prend alors le leadership politique pour inciter les Scots en cours d’élaboration sur son territoire à édifier des schémas de mutation des espaces ouverts. Une COP des sols vivants et productifs abrite les réflexions et négociations afférentes.
Dans un autre contexte, un département soucieux de prendre tout son rôle dans les politiques de déplacement (problématisées autour de l’articulation entre décarbonation de la mobilité et justice sociale) monte un dossier de voirie multimodale. L’État en profite pour suggérer l’actualisation du schéma d’amélioration de l’accessibilité des services. Sous le leadership du département, une démarche prospective intègre les thématiques des deux chantiers.
Troisième exemple : un pôle métropolitain désireux de relancer stratégiquement ses missions propose à ses communautés de communes adhérentes d’élaborer de manière participative des agendas périurbains. Le succès de la démarche aidant, le pôle se constitue de facto en agence des temps pour négocier avec les producteurs de service des réorganisations de rythmes d’ouverture, en cohérence avec une évolution de l’offre de transports collectifs.
8e partie – Requêtes plurielles
On l’a compris, ces diverses démarches s’agencent à la carte, sans protocole, avec pour motivation essentielle chez les parties prenantes la conviction qu’il faut se préoccuper du périurbain et qu’il existe plusieurs façons de faire pour cela. Il y a donc un travail indispensable de mobilisation des partenaires institutionnels à opérer. Ces acteurs ont à prendre conscience du rôle décisif qu’ils doivent endosser pour devenir des opérateurs du périurbain à part entière. Nous les interpellons en conséquence.
A l’adresse des départements
Vous, départements, êtes les propriétaires et gestionnaires de près de 400 000 kilomètres de routes (départementales), qui assurent une bonne part des déplacements des habitants ou usagers périurbains. Vous pouvez devenir des acteurs majeurs pour opérer la transition des mobilités, en participant à la requalification de ces voies pour en faire un réseau multimodal (où cars express, vélos et marcheurs y trouvent toute leur place) et en organisant aux côtés des Régions et de l’État la transformation du système automobile (de la voiture solo à l’automobile collective, au petit véhicule, à la navette autonome).
Avec les acteurs du logement, publics et privés, à travers les programmes départementaux de l’habitat, vous participez aussi à l’adaptation locale des politiques nationales de l’habitat. Il vous est loisible de penser le périurbain comme l’espace privilégié des projets familiaux, dans la compréhension des trajectoires résidentielles et des transitions démographiques (vieillissement, plus ou moins prononcé selon les territoires, de la population). Mieux que l’État sans doute, vous pouvez vous préoccuper de l’avenir des lotissements pavillonnaires ; également intervenir pour que les réhabilitations des maisons individuelles s’effectuent en coordonnant les interventions liées à la décarbonation, à l’adaptation au changement climatique, au vieillissement. Et pour faire des opérations de division parcellaire plus que l’addition de projets d’autopromotion. Vos CAUE (conseils d’architecture, d’urbanisme et d’environnement) s’intéressent d’ailleurs déjà à ces sujets.
A l’adresse des régions
Après l’époque du volontarisme étatique façon Datar, puis celle des contrats État – Régions, vous êtes les principaux acteurs de l’aménagement du territoire aujourd’hui en France, pour des politiques encore trop peu coopératives et des objectifs à actualiser. Vous avez la capacité d’assumer la nécessaire articulation des échelles entre niveaux de responsabilité. Et d’accompagner les indispensables prévisions nationales, aidées de la prospective[116], sur l’évolution de l’occupation des sols agricoles et forestiers.
Organisés au niveau régional, des COP[117] des sols vivants et productifs devraient élaborer des documents d’orientation/chartes d’affectation des sols (en appui ou en remplacement du Zan) structurant leurs usages au regard de leurs qualités fonctionnelles et des mutations foncières potentielles ; et selon des périmètres ad hoc en liaison avec les conférences régionales des Scots. Ces COP se saisissent également de la question du déploiement des EnR, par exemple via des démarches « paysages des énergies renouvelables ». Et elles n’oublient pas que les agriculteurs sont, de facto, des acteurs de la ville.
A l’adresse des intercommunalités, des syndicats de Scot et des AOM
Vous élaborez le document de planification a priori le plus enclin à se soucier du périurbain, le Schéma de cohérence territoriale. Afin de mettre les Scots au service de projets territoriaux pour le périurbain, deux méthodes inédites sont développées : les schémas de mutation des espaces ouverts, les agendas périurbains. Les Fédérations des Scot, des agences d’urbanisme, des Parcs naturels régionaux, accompagnées par l’Ademe, le Cerema, des laboratoires de recherche, développent des expérimentations. Les formes d’élaboration de ces documents en font non un nième hoquet schématologique mais la propagation de démarches collaboratives[118]. Les pas-de-côté méthodologiques facilitent l’appréhension du périurbain comme territoires d’interfaces dotés d’une périurbanité propre : les vides plutôt que les pleins, les réseaux plutôt que les périmètres, les espaces-temps plutôt que la permanence des lieux.
A l’adresse des métropoles
Sans les espaces périurbains, vous n’existeriez pas ! Il y a trois raisons à ce constat trop négligé. D’abord, c’est dans le périurbain que se structure l’économie métropolitaine ordinaire[119], activité invisibilisée mais essentielle pour votre fonctionnement, le back-office des activités productives. De la maintenance informatique au nettoyage des bureaux, ces services représentent sans doute[120] près de 40% de l’emploi salarié, en progression. Ces types de fonctions impliquent des travailleurs mobiles, ayant besoin de se déplacer plusieurs fois par jour. Les problématiques associées concernent la mobilité autant que l’aménagement. Qui s’occupera du fonctionnement de cette économie métropolitaine ordinaire sinon vous, métropoles ?
Le deuxième motif qui devrait vous inciter à jeter un œil de l’autre côté de votre périmètre, c’est pour y observer votre arrière-cour. Vous la trouverez certainement bien occupée ! Car le métabolisme[121] métropolitain a besoin de ressources et d’espaces, qu’il s’agisse d’eau, d’énergie, de traitement de déchets, etc. Ces activités de production, de transformation, de recyclage sont amenées à se développer à la faveur des progrès d’une économie circulaire qui saurait combiner les apports respectifs des espaces urbains et péri-métropolitains.
Vous avez parfois commencé à organiser des coopérations avec vos voisins, ne serait-ce que pour répondre à l’insistante petite musique du bashing métropolitain. Pour ne pas froisser les départements, vous avez souvent choisi des partenariats bilatéraux. Et vous avez mis sur la table des sujets classiques : les liaisons centre-périphéries, le tourisme, les circuits courts alimentaires… Mais votre action sera d’autant plus pertinente et efficace si elle s’attelle à des thématiques nouvelles, majeures pour poser les bases des nécessaires bifurcations socio-économiques : une économie métropolitaine qui se soucie de tous ses opérateurs, singulièrement ses travailleurs mobiles, et qui recompose les articulations urbain – périurbain pour des projets d’avenir.
Au-delà même de ces thématiques économiques, certaines des communes qui composent votre intercommunalité s’apparentent à des espaces périurbains, sinon statistiquement (elles appartiennent à l’unité urbaine) en tout cas par leur organisation spatiale et fonctionnelle. Ne s’y qualifie-t-on pas souvent de « village urbain » ? La question périurbaine ne peut donc vous être étrangère, ne serait-ce que pour éviter le danger d’interventions inadéquates au nom de l’égalitarisme communal.
A l’adresse des maires des villages, des bourgs et des petites villes
Vous êtes à la fois les élus locaux les plus légitimes, reconnus comme tel par vos concitoyens et par l’État, mais vous êtes aussi sans doute les élus les plus dépossédés de capacités d’action. Et ce pour de multiples raisons. Vous manquez de moyens, mais lorsque l’on vous rappelle qu’une partie du problème tient à ce que la moitié des communes françaises ont moins de 500 habitants, vous protestez contre toute idée de fusion au nom de la vivacité de la démocratie de proximité. La décentralisation vous a fait tourner en bourrique avec le jeu sans fin de la répartition des compétences entre collectivités territoriales mais, comme vos collègues des grandes villes, vous n’avez pas vraiment envie de dire que le roi est nu, que les choses se passent souvent ailleurs. Vous êtes fatigués de coopérations intercommunales parfois mal ficelées.
Alors vous en rajoutez ! D’autant que des observateurs avisés de la vie politique ont détecté un renforcement du couple maire – Préfet à l’occasion de la gestion de la pandémie Covid. Votre association des maires ruraux de France a ainsi tout fait pour que la définition des zones d’accélération des énergies renouvelables soit confiée aux communes. Pari risqué, au regard des interdépendances entre localisation des différentes énergies renouvelables et réorganisation des réseaux électriques nationaux. Autre exemple : les tribulations de la démarche Zan (nouvelle loi de juillet 2023) ont autorisé une surface d’un hectare de consommation d’espace pour chacune des 35 000 communes. Cette « garantie communale » semble symboliquement appuyer l’argument d’un mitage de l’espace français provoqué par la fragmentation des compétences d’urbanisme ; la délivrance des permis de construire, mission certes importante pour le devenir d’une commune mais difficile à exercer lorsque gouvernants et gouvernés sont un peu trop proches. Et comment faire, dans ces conditions, de l’aménagement du territoire à la bonne échelle[122] ?
Entre le « imposé d’en haut » et le « initié d’en bas », la coopération horizontale (entre communes) ou verticale (entre niveaux géographiques) ne mérite-t-elle pas d’être tentée ? Car c’est bien par la coopération interterritoriale que vous, Mesdames et Messieurs les maires, trouverez de nouvelles marges de manœuvre, pour que vos souvent judicieuses initiatives trouvent à se concrétiser et que vous sachiez ainsi œuvrer à la gouvernance des espaces périurbains.
A l’adresse de l’État
Que demander à l’État, dont la doctrine territoriale se cherche, entre décentralisation inachevée, courtermisme des programmes catégoriels, difficiles appropriations des orientations européennes et nostalgie d’un aménagement du territoire hexagonal ?
Il doit d’abord partager notre conviction de la place centrale des territoires périurbains pour faire atterrir les politiques de transition écologique. Il doit alors aider à déclencher une prise de conscience périurbaine, dans un contexte de focalisation politique sur les grandes villes (interventions publiques massives) et sur les campagnes (préoccupations idéologiques intenses), sans attendre les requêtes de l’une ou l’autre des associations d’élus locaux. Les administrations centrales, comme les parlementaires, sont concernées.
Quelle initiative d’ampleur, à la hauteur du propos, paraît-elle à même de remplir cette mission de refondation cognitive, apte dans le même temps à embarquer les multiples acteurs (potentiels) de la mobilisation périurbaine tout en se gardant de programmes en prêt-à-porter ? Une initiative qui assure aussi de cranter la démarche, de l’inscrire dans la durée, pour ne pas la laisser s’évanouir faute de combattants et de concrétisations ? Est-ce à l’État de la prendre, aux collectivités territoriales, à l’association des motivés[123] ?
Lançons donc un appel à celles et ceux qui veulent bousculer l’action collective, sponsors en tous genres, entrepreneurs publics, créateurs pédagogiques, professionnels en quête de nouveaux terrains de jeu, élus innovateurs… pour allonger la liste des leviers d’action stratégiques :
- Créer un 1% périurbain sur les budgets d’investissement des métropoles[124], finançant des démarches expérimentales pour « faire projet dans le périurbain[125] ».
- Faire travailler des créateurs de fiction[126] afin de nourrir un nécessaire « récit » prospectif pour le périurbain, en contre-point du modèle de la ville compacte et de l’imagerie rurale.
- Donner envie aux enseignants-chercheurs des formations d’aménagement, d’urbanisme, d’architecture, de développement local, de transition écologique… de parler, un peu plus, du périurbain, par exemple en fournissant des études de cas via des programmes de recherche ou des commandes adaptées. Et ainsi, progressivement, développer une offre d’expertise apte à susciter la demande.
- Etc.
Il reste le plus difficile : amorcer les séquences technico-politiques précédemment présentées, la boîte à outils périurbaine en bandoulière, pour œuvrer au développement d’un a-ménagement du territoire[127] repensé dans ses ambitions, ses priorités et ses dispositifs d’action.
Conclusion : Le périurbain, lieu privilégié de transformation des modèles
Les approches innovantes proposées ici, pertinentes pour le périurbain, opèrent des bouleversements dans les tenants et aboutissants de l’action publique locale, susceptibles de faire école pour l’ensemble des territoires.
En matière d’aménagement et d’environnement, l’approche « espaces ouverts » permet de délaisser l’organisation en poupées russes de la planification spatiale. Cette hiérarchie archaïque des documents d’urbanisme renvoie toute réflexion programmatique au seul enjeu de la constructibilité parcellaire et fabrique des projets introvertis, interdisant les négociations d’allocations des ressources. Il y a urgence à offrir un cadre renouvelé de planification territoriale, propice aux nécessaires dialogues multiscalaires : installation des énergies renouvelables, gestion de l’eau, traitement des risques naturels, protection de la biodiversité…
En matière de logement, faire des mutations de l’habitat pavillonnaire un projet politique ambitieux concerne certes le périurbain mais aussi bon nombre de collectivités locales urbaines. Hors villes-centre, les maisons individuelles sont souvent plus nombreuses que les appartements. Cette orientation, changeant les angles de vue, peut rebattre les cartes de dossiers aussi épineux que la rénovation thermique ou la production du logement social.
En matière de mobilité, la fragmentation de la gouvernance se trouve minimisée par la mise en commun d’un objet intermodal intégrateur : le réseau viaire. La question automobile n’est plus seulement objet de politique industrielle. Les systèmes de déplacement y trouvent leur cohérence.
En matière de service, l’expression équivoque de « cohésion des territoires » s’oublie au profit de l’appréhension conjointe des mutations spatiales de l’offre et de la demande, double diversification aujourd’hui méconnue ou mal comprise qui invente des manières inédites d’habiter, d’assembler les lieux et les liens.
Usages de l’espace et du sol, habitat, mobilité, services… Les campagnes urbaines sont bien au cœur des transitions territoriales. « Campagnes urbaines » ? Parions en conclusion sur cette formule[128], presque un slogan. Elle ose l’oxymore, pour justement affirmer que le périurbain n’est pas une marge anodine, sans qualités, ni ville ni campagne, mais à la fois ville et campagne. Elle écarte le préfixe péri, prenant acte d’interdépendances multiples entre espaces aux densités variées. Elle éloigne les connotations accumulées par un demi-siècle de périurbanisation. Elle évoque l’hybridation des modes d’occupation de l’espace, la multiplicité des modes de vie, entre conditions métropolitaines et ancrages locaux.
Alors que vive ce périurbain transformé, devenu campagne urbaine, terre d’intervention stratégique pour une action collective réinventée, riche de nouvelles promesses pour ses habitants d’aujourd’hui et de demain.
ANNEXE
Annexe 1, composition du groupe de travail
Jean-Marc Offner, responsable du groupe de travail, Directeur scientifique de 6t bureau de recherche, président de l’Ecole urbaine de Sciences Po
Sabine Baïetto-Beysson, inspectrice générale honoraire de l’administration du développement durable
Philippe Clergeau, consultant en écologie urbaine, membre de l’académie d’agriculture de France
Bernard Coloos, coordinateur du groupe logement de Terra Nova
Louise Cormier, Urbaniste spécialiste des enjeux d’aménagement des territoires et de participation citoyenne
Anne-Claire Davy, cheffe de projet et chargée d’études Habitat et modes de vie chez Institut Paris Région
Aurélien Delpirou, géographe, Ecole d’urbanisme de Paris
Frédérique Lahaye, groupe logement, Terre Nova
Jean-Louis Missika, responsable éditorial de La Grande Conversation
Lucile Mettetal, géographe-urbaniste à l’Institut Paris Région
Alexandre Mompeu-Lebel, coordinateur du groupe de travail
Marc-Olivier Padis, directeur des études, Terra Nova
Matthieu Reffay, professionnel de l’immobilier
Magali Talandier, professeure en urbanisme et aménagement du territoire à l’université Grenoble-Alpes
Martin Vanier, géographe, Ecole d’urbanisme de Paris
Pierre Veltz, économiste
Jean-Christophe Visier, prospective bâtiment et immobilier
Bernard Vorms, économiste du logement
Auditions
Eric Brua, directeur de la Fédération des parcs naturels régionaux
François Venditozzi, maire de Villedoux
Eric Charmes, sociologue et urbaniste, directeur de recherches à l’Ecole des travaux publics de l’Etat
Frédéric Perrière, directeur général adjoint en charge des transports, mobilités et infrastructures à la Région Nouvelle-Aquitaine
Stella Gass, directrice de la Fédération nationale des SCoT
Romain Lajarge, professeur à l’Ecole Nationale Supérieure d’Architecture de Grenoble
Jean-Michel Roux, urbaniste, co-auteur, avec Gérard Bauer, de l’ouvrage de 1976 sur la rurbanisation : La rurbanisation ou la ville éparpillée
Annexe 2
45 ans de rapports sur le périurbain
Des connaissances et des préconisations foisonnantes mais éparpillées
Aurélien Delpirou
Depuis la fin du XIXe siècle, des textes législatifs cherchent à promouvoir mais aussi à encadrer l’initiative privée (les lois Siegfried, 1894 ; Cornudet, 1919 ; Loucheur, 1928). Mouvement ancien et longtemps silencieux, le développement de l’habitat individuel à la marge des villes n’a cependant pas été ignoré des politiques publiques – ni des rapports d’experts. De fait, « la stigmatisation du pavillonnaire par le législateur est récente : conçu comme le principal instrument du développement urbain depuis l’épisode des mal-lotis, le lotissement a été progressivement encouragé et façonné par le droit de l’urbanisme » (Hermann, 2018[129]).
Il faut toutefois attendre 1979 pour voir la publication du premier rapport d’experts spécifiquement consacré à la question périurbaine. Le contexte est celui de l’épuisement des politiques fondatrices d’aménagement du territoire et d’un soutien massif au développement de la maison individuelle à travers différents leviers (fiscalité, épargne, solvabilisation des accédants, organisation d’une filière de constructeurs spécialisés). Par ailleurs, le recensement de 1975 met en lumière l’explosion démographique des couronnes périurbaines, suscitant des analyses sociologiques pionnières, comme celles de Gerard Bauer et Jean-Michel Roux. Une mission d’étude sur « l’habitat individuel péri-urbain » est confiée à l’Inspecteur des finances Jacques Mayoux par le ministre de l’Environnement Michel d’Ornano. Le rapport prend acte d’un mouvement profond à l’origine d’« un nouveau mode d’occupation de l’espace offrant des conditions de vie adaptées à notre temps ». Ce développement, appelé pour la première fois « péri-urbain », n’est « ni temporaire ni dégénéré », car il s’adosse à des ressorts profonds, comme le rejet des formes urbaines (et des modes de vie associés) issus de la croissance des années 1960 (notamment les « grands ensembles »), le désir de retour vers la nature et d’éloignement des nuisances des centres urbains et une volonté de maîtrise et de personnalisation de son cadre de vie. Face aux problèmes posés par cette urbanisation, jugés limités (déplacements, repli sur soi, coûts pour la collectivité), le rapport Mayoux propose une nouvelle politique urbaine fondée sur le concept de « ville-parc » sous l’égide de l’État et de ses services, seuls à même de garantir sa mise en œuvre. Ces travaux sont poursuivis, dans une perspective plus sociologique, par la DATAR (1981) mais leur application se heurte à la priorité donnée au grand mouvement de décentralisation des années 1982–1983.
Près de vingt ans après, le rapport du sénateur Larcher (1998) s’inscrit dans un contexte différent, marqué par la relance des politiques urbaines, la consolidation des connaissances sur la périurbanisation (programme Ville émergente du PUCA, 1996) et l’émergence de la notion de développement durable appliquée à la ville. Initialement centrée sur les parcs naturels régionaux, la mission d’étude s’élargit à la question des équilibres entre zones périurbaines et espace rural. Le constat est que les espaces périurbains connaissent « une urbanisation en apparence sans borne ». Dans son zonage modifié, l’INSEE recense désormais 10 400 communes, soit 10% du territoire national, appartenant aux « couronnes périurbaines » et aux « espaces multipolarisés » des aires urbaines. Le rapport fait état de nombreux conflits d’usage, mais seulement du point de vue de la ruralité : tensions entre « néoruraux » et populations locales, dégradation du paysage là où « l’espace est considéré comme un produit jetable », spéculation des propriétaires fonciers. Les moyens de régulation sont jugés inadaptés. Ainsi, le plan d’occupation des sols (POS) a été perverti au point de devenir un « instrument de la concurrence foncière intercommunale », tandis que les schémas directeurs ne couvrent que très partiellement les espaces périurbains et sont trop souvent modifiés ; les instruments et les opérations d’aménagement sont calibrés pour l’urbanisation dense par grands morceaux ; les opérateurs fonciers sont trop peu nombreux. Les préconisations combinent outils réglementaires (création du label territorial « terroirs urbains et paysagers », mise en place de nouvelles directives territoriales d’aménagement, relance de l’élaboration de schémas directeurs d’agglomération) et action foncière (renforcement du rôle des SAFER, taxations de la vente des terrains agricole, etc.). Elles trouveront des concrétisations partielles dans les lois LOADDT, Chevènement et SRU, au risque d’une dilution de la question périurbaine.
En 2016 paraît Aménager les territoires ruraux et périurbains, rapport dirigé par l’architecte-urbaniste Frédéric Bonnet. Si la croissance périurbaine a désormais ralenti, les espaces périurbains se sont diversifiés et consolidés. Ils suscitent désormais un véritable « bouillonnement intellectuel », qui déborde dans les médias (« La France moche » dans Télérama, 2011). Un groupe de travail pluridisciplinaire reçoit plus 80 contributions d’associations d’élus, de chercheurs, de professionnels de l’architecture, du paysage et de l’urbanisme. Las, non seulement ce rapport ne capitalise ni sur les travaux existants ni sur les analyses menées au même moment par le CGEDD, mais il aborde le périurbain de manière presque idiosyncratique, comme s’il n’était pas pris dans des dynamiques d’échelle large, au premier chef métropolitaines. Par ailleurs, dans leur volonté louable d’« inverser le regard », les propositions sont souvent assez génériques (« reconnaître les atouts des territoires ruraux et périurbains », « inventer de nouvelles manières de faire », etc.), sans que leur faisabilité ne soit jamais vraiment précisée. Le rapport préconise aussi de renforcer l’ingénierie au service des territoires périurbains, y compris en développant le rôle des habitants dans la production de leur cadre de vie. A l’échelle locale, les volets paysagers, urbains et architecturaux des permis d’aménager doivent être améliorés sur la base de nouveaux référentiels.
En 2014, Terra Nova s’était demandé Quelles politiques pour la France périurbaine ? et répondait de manière plus modeste et nuancée, dans une perspective plus sociologique. Les territoires périurbains restent des espaces largement impensés ; aucune définition ne parvient complètement à les cerner, ce qui n’empêche pas les oppositions et antagonismes de s’aiguiser à leur sujet. Le débat à leur sujet est « caricaturé » : pour les uns, le périurbain représente un échec des politiques d’urbanisme, un péril pour l’environnement et un refus du vivre-ensemble propice à des comportements sociaux et électoraux de rejet ; pour les autres, le périurbain offre un mode de vie urbain proche de la campagne, accessible aux classes populaires, qui répond à un besoin d’espace et de proximité avec la nature et qui génère de nouvelles sociabilités. Les difficultés de ces territoires sont principalement liées à l’absence de politique répondant aux besoins des habitants « souvent issus des catégories les plus modestes de la population ». Il apparaît dès lors nécessaire de mener des politiques coordonnées pour contrer la « para-urbanisation », c’est-à-dire l’urbanisation de zones encore rurales éloignées des pôles urbains, qui s’apparente à un mécanisme d’exclusion des ménages modestes à la très grande périphérie des villes. Cette tâche doit être confiée à des intercommunalités élargies et renforcées. Des réformes de la fiscalité immobilière, notamment de la taxe foncière, devront aussi participer à la maîtrise de l’urbanisation.
Requalifier les campagnes urbaines de France (2015) est une commande passée au CGEDD, complémentaire à celle du rapport Bonnet et portant plus spécifiquement sur la « gestion des franges urbaines », soit ces zones d’interface entre le bâti et le non-bâti, entre les banlieues et la campagne, entre l’aire urbaine et le territoire rural. En plus de s’appuyer sur des auditions de « personnalités qualifiées » (qui apparaissent de manière récurrente dans ces démarches), le document opère une forme de synthèse des travaux anciens ou récents d’observations, d’études et de recherches, de discours et de controverses portant sur la thématique du périurbain. Son autre originalité est de déplier des exemples concrets pris dans des contextes territoriaux différents, qui débouchent sur 25 propositions thématisées (mais non hiérarchisées). Pour les rapporteurs, le devenir des franges urbaines est une priorité nationale qui appelle une « stratégie globale de requalification », à inscrire dans les politiques de développement durable et d’égalité des territoires. Cela appelle des évolutions en termes de planification, de gouvernance, d’ingénierie. On retiendra notamment l’extension des périmètres des métropoles et communautés urbaines, la mise en place de pactes inter-territoriaux afin de prendre en compte les franges situées dans le périurbain et aux confins des aires urbaines et la constitution d’outils opérationnels inter-communautaires positionnés sur les enjeux et savoir-faire spécifiques aux territoires périurbains
Bouger les lignes dans le périurbain (2019) est la synthèse des enseignements et propositions issus de l’Atelier des territoires mené par la DGALN, le CEREMA et le CGET en 2016–2018. A partir, là aussi, d’une série d’expérimentations locales, le rapport propose de ne plus appréhender le périurbain comme un concentré de problèmes (consommation d’espace, d’énergie, faible qualité constructive, etc.), mais au travers de ses ressources et acteurs, son potentiel d’innovation et de montée en compétences. Accompagnés des services déconcentrés de l’État, les élus des territoires concernés ont bénéficié de l’appui d’une équipe pluridisciplinaire coordonnée par un mandataire architecte-urbaniste. Aussi nombre de propositions présentent-elles une dimension formelle (« favoriser la transformation qualitative des tissus »), tandis que celles qui relèvent des ressources, acteurs ou transports demeurent peu étayées (« trouver de nouvelles modalités et attirer de nouveaux opérateurs immobiliers pour faciliter les projets de transformation de l’existant »). Plus stimulantes sont les notions de « communs périurbains », créés à partir de la requalification d’espaces techniques (parkings de supermarché, aires de covoiturage ou de drive, etc.) en lieux d’urbanité ; et d’« espaces publics de nature » porteurs de « valeurs positives » comme certains plans d’eau, espaces forestiers ou agricoles, etc. Au plan de la planification, l’Atelier invite, de manière quelque peu optimiste, à relativiser le rôle des schémas à portée règlementaire et privilégier les documents contractuels (engagement collectif ou charte, etc.) non opposables mais ayant une « réelle capacité à créer une dynamique d’adhésion des acteurs et des habitants ».
Au terme de cette exploration non exhaustive, il apparaît que le périurbain non seulement n’a jamais été « abandonné », mais qu’il a capté une bonne partie de l’ingénierie territoriale depuis 45 ans ! Les programmes d’études et de recherche qui lui ont été dédiés sont sans doute aussi nombreux que ceux sur les banlieues, où les difficultés sociales et urbaines sont autrement plus intenses ! Au-delà de constats faits, refaits et désormais stabilisés, on recense plus de 250 propositions de toute nature (des plus généralistes aux plus techniques), mais aussi d’innombrables initiatives locales. Certes, toutes ces approches sont marquées à divers degrés par des biais cognitifs : le périurbain n’est pas vu de la même façon par les urbains (ignorance et condescendance plus que rejet) ; les ruraux (opportunité de revalorisation versus peur d’être engloutis) ; les architectes (l’autosuffisance du projet) ; les paysagistes (la biodiversité et les sols) ; les urbanistes (la mauvaise conscience), la technostructure (longtemps imprégnée d’urbaphobie) ; les élus locaux (le pré carré) et nationaux (l’instrumentalisation).
Mais est-il vraiment opportun de demander encore un « changement de regard » sur ces espaces alors que cette question est, au moins autant que la symétrique « ville dense », une des lubies les plus partagées dans les milieux de l’urbanisme et de l’aménagement en France ?
L’enjeu serait plutôt de parvenir à capitaliser et coordonner les travaux et surtout à leur donner des marges de manœuvre pour leur traduction concrète. Car si la base de connaissances périurbaines est foisonnante, la réalité sur le terrain est celle d’une action publique dispersée aux objectifs flous et aux moyens modestes.

Annexe 3
Histoire intellectuelle du périurbain
Une Chronologie bibliographique périurbaine, entre dénis, stigmatisations et valorisations
Années 1970 – Le périurbain comme projet
Durant les années 1970, la France se découvre périurbaine. L’administration met certes en garde contre le mitage, les premiers chocs pétroliers alertent sur les enjeux énergétiques du transport. Mais le projet périurbain s’installe dans les aspirations résidentielles. En pionniers, des urbanistes et des chercheuses prennent l’affaire au sérieux.
1966 L’habitat pavillonnaire, H. Raymond, N. Haumont et al.
1971 Une image de la France en l’an 2000, le scénario de l’inacceptable, Datar
1973 Circulaire Guichard « interdisant les grands ensembles »
1976 La rurbanisation ou la ville éparpillée, Gérard Bauer et Jean-Michel Roux
1977 Attention mitage, document du ministère de l’Équipement
1979 Un urbanisme pour les maisons, Gérard Bauer
1979 Demain l’espace, l’habitat individuel périurbain, Rapport Mayoux
1980 L’habitat périurbain, revue Métropolis
1980 Rurbanisation et analyse des espaces ruraux périurbains, Martine Berger et al.
1982 L’enjeu périurbain. Activités et modes de vie, travaux Datar
1982 Les pavillonneurs, Marie-Christine Jaillet
Années 1980–1995 – Le périurbain (presque) oublié
Alors que les décennies 1980–1990 voient la périurbanisation se déployer dans toute la France, le modèle de la ville compacte et dense devient l’alpha et l’oméga du développement durable. Les conférences internationales, tant scientifiques que professionnelles et politiques, figent une doctrine au succès retentissant. Les voix dissonantes se font rares.
1989 Cities and automobile dependence, P. Newman et J. Kenworthy
1991 La périurbanisation en France, B. Dezert, A. Metton, J. Steinberg
1992 Conférence de Rio, Sommet « planète Terre »
1994 Charte d’Aalborg, 1ère conférence européenne sur les villes durables
Années 1995–2010 – Territoires périurbains en débats
Au tournant du millénaire, les controverses se multiplient. Le périurbain est enfin reconnu par les statistiques. Certains lui cherchent des dénominations plus valorisantes et des modes de gestion plus appropriés tandis que d’autres discréditent ses paysages et ses habitants. La lutte contre l’étalement urbain renforce son arsenal juridique.
1994–96 Insee, nouveaux zonages en aires urbaines, Thomas Le Jeannic
1997 La ville émergente, Geneviève Dubois-Taine et Yves Chalas
1998 Rapport d’information fait au nom de la Commission des Affaires Économiques et du Plan sur la gestion des espaces périurbains, Gérard Larcher, Sénat.
1999 Colloque au Sénat sur les espaces périurbains : Ville et campagne ensemble
1998 Les campagnes urbaines, Pierre Donadieu
2000 Loi Solidarité et Renouvellement Urbains
2003 Périurbain : le choix n’est pas neutre, Jacques Lévy
2004 Les périurbains de Paris. De la ville dense à la métropole éclatée ? M.Berger
2004 La ville à trois vitesses : gentrification, relégation, périurbanisation, Esprit
2006–2008 Les nouvelles ruralités à l’horizon 2030, programme Inra
2010 La France moche, couverture de Télérama
Années 2010 – Expertises périurbaines en développement
Géographes, sociologues et chercheurs en études urbaines investissent massivement les terrains périurbains. Des programmes de recherche publics les y ont incités. Les milieux professionnels, le monde intellectuel et les administrations centrales emboîtent le pas. L’État redécouvre le périurbain, commande des rapports et se trouve presque sur le point de lui consacrer une feuille de route. Le changement de regard sur le périurbain s’est enfin opéré. La France périurbaine a même son petit Que sais-je ?
2010–2012 Prospectives périurbaines…, travaux Territoires 2040 de la Datar
2011 La périurbanisation comme projet, Martin Vanier
2011 La ville émiettée, Éric Charmes
2011–2013 « Du périurbain à l’urbain », programme de recherche du Puca
2013 Réhabiliter le périurbain, colloque et ouvrage, Forum des vies mobiles
2013 Questionner l’étalement urbain, n° de la revue Urbanisme, CAUE
2013 Campagnes urbaines, Rencontre nationale des agences d’urbanisme
2013 Tous périurbains ! n° de la revue Esprit
2013 Suburbia, Bruce Bégout
2014–2015 Quelles politiques pour la France périurbaine ? étude Terra Nova
2015 Figures discrètes de l’urbain, Antoine Brès
2015 Requalifier les campagnes urbaines de France. Une stratégie pour la gestion des franges et des territoires périurbains, CGEDD.
2016 Aménager les territoires ruraux et périurbains, rapport Frédéric Bonnet
2016 Sociologie du périurbain, n° de la Revue française de sociologie
2016 Nouveaux regards sur le périurbain, n° de Géographie-Économie-Société
2016 Lancement du Lab périurbain (CGET)
2018 Densifier/dédensifier. Penser les campagnes urbaines, J-M. Léger, B. Mariolle (dir.)
2018 Le périurbain, espace à vivre, Florian Muzard et Sylvain Allemand (dir.)
2019 Bouger les lignes dans le périurbain, Synthèse des enseignements et propositions issus de l’Atelier des territoires, DGALN.
2019 La revanche des villages, essai sur la France périurbaine, Éric Charmes
2021 La France périurbaine, H. Marchal, Jean-Marc Stébé, « Que sais-je ? »
Années 2020 – Les ruralités (périurbaines), entre exode urbain et Zan
Longtemps statistiquement caché par l’urbain, le rural prend sa revanche, intégrant le périurbain aux ruralités. Par ailleurs, le psychodrame technico-politique autour des errements de la démarche Zan réactualise la lutte contre l’étalement urbain. La crise du logement réinterroge les capacités d’accueil d’un périurbain dont la destinée vaut bien un groupe de travail.
2021 Loi Climat et Résilience, démarche Zéro artificialisation nette (Zan)
2021 Une nouvelle définition du rural, Insee
2024 « Le pavillon fait partie du rêve français », Gabriel Attal 1er ministre, 14 février
2025 Publication Terra Nova : Vive le périurbain ! Pour des campagnes urbaines au cœur des transitions territoriales (rapport du groupe de travail sur le périurbain)
[1] Demain l’espace : rapport de la Mission d’étude sur l’habitat individuel péri-urbain, la Documentation française, 1979.
[2] Cette formule assassine fut employée par des collaborateurs de Télérama pour une couverture de l’hebdomadaire « Halte à la France moche » (12 février 2010). Anthropologue, Éric Chauvier publia quelques mois plus tard un petit ouvrage : Contre Télérama (éd. Allia, 2011), expression de « sa révolte contre le jugement de classe émis par des journalistes bien-pensants ».
[3] Jean-Marc Offner, « Élaborer un new deal pour le périurbain », Le Monde, 27 février 2024.
[4] Le néologisme a-ménagement permet d’associer les activités traditionnelles de l’aménagement avec les préoccupations plus inédites de gestion de l’existant, de ménagement. Ce terme est utilisé par Michel Marié, sociologue, dès 1985, dans son texte De l’aménagement au ménagement du territoire en Provence. Roger Brunet, géographe, publie en 1994 La France, un territoire à ménager. Et Philippe Madec, architecte, prononce en 2002 une conférence sur L’a-ménagement du monde.
[5] Entre 2007 et 2017, le rural sous forte influence d’un pôle a vu sa population augmenter de 1% par an, le rural sous faible influence d’un pôle de 0,8%, l’urbain de 0,4%, le rural autonome peu dense de 0,3%, le rural autonome très peu dense de 0% (La France et ses territoires, Insee, 2021). Les trajectoires résidentielles les plus récentes confirment ces dynamiques : « Plutôt qu’un départ massif des villes vers les campagnes, sous-tendu dans l’idée d’exode urbain, la pandémie a plus globalement accéléré les départs en provenance des grands centres urbains, en particulier des plus grandes métropoles, vers d’autres territoires, au premier rang desquels… des villes (un peu) plus petites, et des couronnes périurbaines », Marie Breuillé, Julie Le Gallo, Pierre Vidal et al., « Exode urbain : un mythe, des réalités : que savons-nous sur les flux migratoires enregistrés en France après la crise de la Covid-19 ? », 2023. https://popsu.archi.fr/ressource/synthese-des-resultats-exode-urbain-un-mythe-des-realites
[6] Expression appréciée des architectes et des urbanistes à la suite du mot d’ordre « refaire la ville sur la ville » de la loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbains) de 2000.
[7] Les variables économiques ne s’avèrent pas exclusives dans les choix résidentiels des ménages pour le périurbain. Elles expliquent en revanche souvent la plus ou moins grande distance à la ville-centre. Voir Pierre-Yves Cusset, Alban George, « Centre, banlieue, périphérie : quelle répartition des populations ? », Note d’analyse de France Stratégie, 2024/5 n° 135. Jean-Yves Authier (dir.), État des lieux sur les trajectoires résidentielles, Puca, avril 2010. www.urbanisme-puca.gouv.fr/IMG/pdf/etatdeslieux_trajectoiresresidentielles.pdf
[8] La Rome antique n’était pas une ville compacte ! Elle avait son suburbium, à l’instar d’Orange avec son centre fortifié et une occupation périphérique. L’ambivalence urbain / rural est déjà là. Voir Hélène Ménard et Rosa Plana-Mallart (coord.), Espaces urbains et périurbains dans le monde méditerranéen antique, Presses universitaires de la Méditerranée, 2015.
[9] Martin Vanier, l’un des premiers géographes en France à se préoccuper du périurbain autrement que comme un espace à problèmes, a utilisé cette expression de tiers-espace pour qualifier ces territoires dès le début des années 2000. Voir « Qu’est-ce que le tiers espace ? Territorialités complexes et construction politique », revue de Géographie Alpine, 2000, 88–1.
[10] Le terme de rurbain est sinon créé en tout cas popularisé par Gérard Bauer et Jean-Michel Roux, auteurs du livre La rurbanisation ou la ville éparpillée (Seuil, 1976). Le rapport Mayoux l’utilise aussi.
[11] D’Alessandro C., Levy D., Regnier T., « Une nouvelle définition du rural pour mieux rendre compte des réalités des territoires et de leurs transformations », in La France et ses territoires, Insee Références 2021.
[12] « Le nouveau zonage en bassins de vie 2022 », Insee Analyses n° 83, avril 2023.
[13] S. Beck, M.-P. De Bellefon, J. Forest, M. Gérardin, D. Levy, La grille communale de densité à 7 niveaux, document de travail Insee n° 2022–18, 5 janvier 2023.
[14] Aménager les nouvelles ruralités, CGET, juillet 2015.
[15] François Cusin, Hugo Lefebvre, Thomas Sigaud, « Enquête sur la croissance et la diversité des espaces périphériques », Revue française de sociologie, 2016/4 Vol. 57.
[16] Il existe d’autres histoires de périurbains, ailleurs en Europe et dans l’urban sprawl nord-américain. D’autres histoires de l’expansion urbaine, de la diffusion du chemin de fer et de la voiture, de la maison individuelle, du rapport à la nature et à l’agriculture.
[17] Renaud Le Goix, « Chapitre 1. De l’étalement au post-suburbain », Sur le front de la métropole, éditions de la Sorbonne, 2016.
[18] Marie-Christine Jaillet, Les pavillonneurs, CNRS éditions, 1982. Marie-Christine Jaillet, Guy Jalabert, « Politique urbaine et logement : la production d’espace pavillonnaire », L’Espace géographique, tome 11, n°4, 1982. Voir aussi « Une autre histoire de la maison individuelle », interview d’Arnaud Bouteille par Éric Charmes, Fonciers en débat, 24 janvier 2025.
[19] Être périurbain en Gironde, 6t – bureau de recherche, a’urba (agence d’urbanisme Bordeaux Aquitaine), 2020. Cette enquête, comme bien d’autres, souligne les choix résidentiels explicites en faveur du périurbain, même si les contraintes financières peuvent parfois amener à habiter dans des zones plus lointaines qu’espérées.
[20] Daniel Lecouédic et Lionel Prigent parlent avec ironie de « pratiques indûment centrifuges » dans « L’urbanisation profuse saisie par la longue durée. Le cas de la Bretagne », Cahiers de géographie du Québec n°165, décembre 2014.
[21] Lors des rendez-vous de l’histoire de Blois de 2024, l’historien Patrick Boucheron a ainsi pu développer l’idée que « l’étalement urbain, parce qu’il étire les solidarités et provoque les cassures de la ségrégation, blesse l’idée même d’urbanité » (Cahier du Monde, 4 octobre 2024).
[22] Voir Insee Références, 2021, « Une nouvelle définition du rural pour mieux rendre compte des réalités des territoires et de leurs transformations ».
[23] Anne Bretagnolle, « La naissance du périurbain comme catégorie statistique en France. Une perspective internationale », L’Espace géographique 2015/1.
[24] Thomas Le Jeannic, « Une nouvelle approche territoriale de la ville », Économie et statistique, n°294–295, mai 1996.
[25] Conseil national de l’information statistique, « La refonte des zonages de l’Insee : réflexions de chercheurs », Chronique Cnis n°23, juin 2020.
[26] Olivier Bouba-Olga, Dylan Buffinton, Ruralités d’aujourd’hui, ruralités de demain : éléments de réflexion, Fondation Jean Jaurès, 04/07/2025.
[27] Monique Poulot, Premier rapport du conseil scientifique du programme France ruralités, « Des campagnes aux ruralités : changer de regard sur les ruralités, pour des politiques publiques adaptées à leurs réalités et soucieuses de leur diversité », Gip Epau, mai 2025.
[28] « 3 questions à Michel Fournier », Envies de ville, 8 février 2024. https://www.enviesdeville.fr/penser-la-ville/3-questions-amrf/.
[29] Éric Charmes, La ville émiettée. Essai sur la clubbisation de la vie urbaine, PUF, 2015.
[30] Dans certaines régions comme la Bretagne, le remembrement du foncier agricole a renforcé ce maillage routier, par la transformation de chemins ruraux en routes carrossables.
[31] La mobilisation des Gilets jaunes à partir d’octobre 2018 a de nombreuses interprétations. Elle a certes à voir avec le périurbain, en particulier dans une demande de sociabilité et d’espaces publics, symbolisée et concrétisée par l’occupation des ronds-points. Elle révèle plus encore des situations sociales de précarités mal détectées (femmes seules avec enfants significativement). Elle agrège aussi les expressions hétérogènes de périphéries fâchées avec leurs conditions de déplacement : trajets domicile-travail trop longs et trop fatigants mais surtout multiples déplacements au cours de la journée ; et ce pas seulement pour le livreur mais aussi pour l’aide à domicile, le plombier, l’agent d’entretien, l’infirmière… Non des travailleurs nomades mais bien des travailleurs mobiles. Voir Manon Loisel et Magali Talandier, « Les travailleurs mobiles, un angle mort des politiques publiques », Horizons publics n° 26, 2022. Les deux autrices considèrent qu’il y a environ dix millions de ces travailleurs mobiles, soit près de 40 % des actifs, très mal connus des statistiques.
[32] Les thèses de Christophe Guilly, depuis La France périphérique (2014) jusqu’à Métropolia et Périphéria (2025), ne croisent pas directement les propos développés dans ce rapport. Fondées sur l’idée d’une déconnexion entre élites et classes populaires et moyennes déclassées, elles n’appréhendent pas le périurbain comme forme spécifique de la « périphérie ». Surtout, elles négligent la diversité socio-économique des habitants du périurbain, au-delà d’éventuelles situations d’entre-soi à une échelle plus locale. Bien des métropoles se caractérisent d’ailleurs par une localisation résidentielle des plus riches en première couronne périurbaine. Voir pour des statistiques récentes : Mathilde Gérardin, « Pauvreté et territoires : davantage de jeunes et de locataires du parc social dans les grandes villes, plus de retraités parmi les pauvres dans le rural », Insee Première n°1968, octobre 2023. En cohérence avec bien d’autres analyses, l’étude souligne que « les ménages pauvres résident en grande majorité dans l’urbain ».
[33] « Le lotissement enclavé en copropriété, au cœur des débats sur la gouvernance urbaine privée, peut donc – au niveau métropolitain – faire l’objet d’une assez forte régulation dans sa forme et dans les stratégies de localisation des promoteurs immobiliers. Néanmoins (…) : cette régulation ne peut reposer sur les collectivités locales mais passe par une action coordonnée au niveau de l’État ». Renaud Le Goix, Acteurs, collectivités locales et contextes locaux dans la production des lotissements périurbains, communication au colloque « Gouvernement et gouvernance des espaces urbains », Rouen, mai 2009.
[34] L’association des maires ruraux de France a été l’interlocuteur privilégié de l’État dans l’élaboration de cet agenda rural. Parmi ses mesures les plus emblématiques figurent le Programme « Petites villes de demain », l’installation d’espaces France services et de maisons de santé, le déploiement du très haut débit.
[35] Paul Delduc (alors directeur général de l’Aménagement, du Logement et de la Nature), avant-propos de l’ouvrage collectif Le périurbain, espace à vivre, sous la direction de Florian Muzard et Sylvain Allemand, éd. Parenthèses, 2018.
[36] Voir en particulier Annabelle Morel-Brochet et Nathalie Ortar (dir.), La fabrique des modes d’habiter, L’Harmattan, 2012.
[37] Établissements publics d’aménagement, Établissement public foncier d’Ile-de-France, Institut-Paris-Région…
Voir pour illustrations les travaux des deux agences d’urbanisme, francilienne et parisienne : Stéphane Bove, Lucile Mettetal, Zan et désir de maison : l’équation impossible ? note Institut-Paris-Région, 7 septembre 2023. 446 000 pavillons dans la Métropole du Grand Paris, note Apur n° 184, septembre 2020.
[38] Voir Sylvain Allemand, Objectif Zan ? Apprendre du périurbain et des campagnes urbaines, éd. Puca, 2020.
[39] En 2023, l’État a lancé un programme de transformation de centres commerciaux d’entrées de villes. Plusieurs dizaines d’agglomérations, villes petites ou moyennes très majoritairement, ont été sélectionnées en 2024. Mais les projets peinent à démarrer. En septembre 2025, la foncière Frey, spécialiste de la requalification des centres commerciaux, a annoncé jeter l’éponge, faute de modèle économique pérenne (Le Monde, 16 septembre 2025). Voir aussi Alain Devriese, « Regard sur les boîtes à chaussures », Sur-Mesure, mis en ligne le 3 septembre 2025. https://www.revuesurmesure.fr/contributions/regard-sur-les-boites-a-chaussures.
[40] Le titre « De la France moche à la France morte ? » (Jean-Laurent Cassely, Slate, 2017) illustre bien cette confusion, la France moche renvoyant aux couronnes périurbaines alors que les situations de déclin concernent les petites villes ancrées dans leurs territoires ruraux : https://www.slate.fr/story/139454/grand-declassement-territoires-francais-moyens
[41] Réhabiliter le périurbain, sous la dir. de L. Rougé, Ch. Gay, S. Landriève, A. Lefranc-Morin, C. Nicolas, Forum Vies Mobiles, 2013.
[42]Voir en particulier les travaux de Rodolpe Dodier, Habiter les espaces périurbains, Presses universitaires de Rennes, 2012 (avec la collaboration de L. Cailly, R. Dodier, A. Gasnier, F. Madoré). Laurence Costes (dir.), Territoires du périurbain : quelles nouvelles formes d’appropriation ? L’Harmattan, 2016. Le programme de recherche du PUCA (plan Urbanisme Construction Architecture) « du périurbain à l’urbain », mené entre 2011 et 2013, a joué un rôle important dans cette mobilisation des milieux de recherche.
[43] Les ouvrages de Nicolas Mathieu possèdent leur signature propre, en ce qu’ils se passent principalement en Lorraine, dans les banlieues et espaces périurbains de villes comme Épinal ou Thionville, très touchées par la désindustrialisation comme l’ensemble du quart Nord-Est de la France.
[44] Par ce qualificatif de radioconcentrique, on entend un schéma spatial où la ville est le « centre » à partir duquel s’organisent les territoires voisins en couronnes de plus en plus éloignées.
[45] Agence Hauts-de-France 2020–2040 (4 septembre 2021), Typologie de l’ossature régionale de l’espace périurbain et rural [document cartographique] IGN GeoFia, carté n°3267–1. https://cartes.nouvelle-aquitaine.pro/portal/apps/sites/#/ressourcesditpdatar/apps/eaad21f917d14b65a9b759aa681cd75b/explore
[46] Pôle Datar de la région Nouvelle-Aquitaine (traitement). Sources Insee, 2024. Communes urbaines, rurales sous influence et rurales autonomes [document cartographique] IGN admin express. https://cartes.nouvelle- aquitaine.pro/portal/apps/sites/#/ressourcesditpdatar/apps/eaad21f917d14b65a9b759aa681cd75b/explore
[47] Martine Berger, Claire Aragau, Lionel Rougé, « Vers une maturité des territoires périurbains ? »,
EchoGéo, 27 | 2014, mis en ligne le 02 avril 2014, http://journals.openedition.org/echogeo/13683.
[48] Julien Essers et Monique Poulot, « Se nourrir dans le périurbain ouest francilien. Une approche par les mobilités alimentaires », Bulletin de l’association de géographes français, 96–4, 2019. Voir aussi Mireille Bouleau et Lucile Mettetal, La mobilité dans le périurbain : désir d’ancrage et nouvelles proximités, Institut d’aménagement et d’urbanisme Ile-de-France, note rapide n° 646, mars 2014.
[49] Ludovic Chalonge, Xavier Desjardins, « Enfin libres ? A la recherche des proximités dans l’urbain dispersé », Études foncières n°158, août 2012.
[50] Sandrine Chaumeront, Aude Lécroart, « Le trajet médian domicile-travail augmente de moitié en 20 ans pour les habitants du rural », INSEE Première n° 1948, mai 2023.
[51] Jean-Marc Stébé et Hervé Marchal, « Le pré-urbain : un territoire refuge aux confins du périurbain éloigné », Métropolitiques, 30 octobre 2017.
[52] Martine Berger, « Vers un deuxième âge périurbain ? L’exemple de l’ouest francilien », Espace populations sociétés [En ligne], 2019/2, 2019, mis en ligne le 17 septembre 2019, http://journals.openedition.org/eps/8870.
[53] Voir Martin Simard, « Urbain, rural et milieux transitionnels : les catégories géographiques de la ville diffuse », Cahiers de géographie du Québec, vol.56, n°157, avril 2012.
[54] Traduction de l’allemand Zwischenstadt, ouvrage de Thomas Sieverts paru en 2004.
[55] « Cet Entre-villes combine à la fois des formes d’urbanisation héritées de son substrat rural (bourg, village, hameau…) et des formes contemporaines plus génériques (lotissements, résidentiel collectif, zones d’activités) ». Antoine Brès et Béatrice Mariolle, « Vivre en ville dans l’Entre-villes : l’exemple du Carré Picard », Le quatre pages PUCA, mai 2015.
[56] Acadie et Magali Talandier, Étude sur la diversité des ruralités « Typologies et trajectoires des territoires ». Rapport final, ANCT, février 2023. Il est à noter que cette étude utilise le terme ruralité selon la définition actualisée de l’Insee, donc en englobant les espaces périurbains.
[57] La ville compacte a ses traductions du moment : ville du quart d’heure, ville circulaire…
[58] L’analyse territoriale montre que le lien entre les villes-centres des agglomérations et leur périurbain forme le cœur des émissions des mobilités du quotidien. Ce lien pèse 25 fois plus que la circulation à l’intérieur des villes-centres, qui compte pour une portion congrue : 0,2% (…). Si l’on veut décarboner les mobilités du quotidien, c’est sur le lien périurbain -agglomération et entre agglomérations qu’il faut porter l’effort ainsi que sur les déplacements au sein du périurbain : 70% des émissions du quotidien.
Jean Coldefy, 16 février 2023. https://www.lagrandeconversation.com/ecologie/mobilites-pour-des-solutions-justes-et-decarbonees-et-non-juste-decarbonees/.
[59] Ancienne chaîne de discothèques, développée à partir des années 1960–70 près des grandes surfaces commerciales périphériques, les boîtes de nuit Macumba venaient « éclairer une nuit périurbaine » (Martine Drozdz, « La fermeture du dernier Macumba permet de réfléchir aux ‘ trente glorieuses ’, une période qui hante nos imaginaires politiques et géographiques », Le Monde, 1er mars 2025). Le clap de fin a été donné à Lille en 2024.
[60] Martin Vanier, Quelles perspectives pour la « ville au large » ? 2013. https://www.pop-up-urbain.com/quelles-perspectives-pour-la-ville-au-large-entretien-avec-martin-vanier-geographe/.
[61] Emmanuelle Wargon, 14 octobre 2021.
[62] Actes de la recherche en sciences sociales. Vol. 81–82, mars 1990, « L’économie de la maison ».
[63] Voir pour une analyse du caractère idéologique de nombres d’assertions favorables ou défavorables à la maison individuelle : Bernard Coloos et Bernard Vorms, « Procès de la maison individuelle : comparution à délai différé », 2022, https://politiquedulogement.com/2022/01/proces-de-la-maison-individuelle-comparution-a-delai-differe/. Voir aussi Arthur Pétin, « L’habiter pavillonnaire à la française : explorations fictionnelles et reconfigurations critiques », in Ch. Duret, Ch. Lahaie, Ici et maintenant. Les représentations de l’habiter urbain dans la fiction contemporaine, éd. Lévesque, 2022, pp. 301–322, 2022.
[64] La division parcellaire est une opération de création de terrains à bâtir par découpe d’une unité foncière préexistante déjà construite. Des promoteurs de cette démarche parlent de « densification douce ».
[65] En 1962, le ministre de la Construction signe une circulaire « relative à la maison familiale et à l’urbanisme ». Voir Monique Eleb et Lionel Engrand, La maison des Français, discours, imaginaires, modèles, éd. Mardaga, 2020. Gérard Bauer, Un urbanisme pour les maisons, coll. 10–18, 1979.
[66] Lorsqu’une personne décide de changer de moyen de transport pour effectuer un déplacement, il y a transfert modal. Sur le plan collectif, le transfert modal aboutit à reporter une partie des flux d’un mode de transport vers un autre. Le paradigme du transfert modal structure les politiques de déplacement, depuis les premières crises pétrolières des années 1970, en formalisant des objectifs d’évolution du partage modal (le pourcentage des déplacements effectué par chaque moyen de transport) de l’automobile vers le transport collectif et vers les autres modes alternatifs à la voiture individuelle.
[67] A Paris, près de deux tiers des ménages ne possèdent pas de voiture.
[68] Sdes, Le parc automobile des ménages en 2023, juillet 2024. Les ménages motorisés détiennent en moyenne 1,5 voiture. Plus le niveau de vie s’élève et plus l’équipement moyen des ménages possédant au moins une voiture augmente. Les ménages motorisés issus des 10 % les plus modestes possèdent en moyenne 1,3 voiture alors que parmi les 10 % de ménages les plus aisés, ceux motorisés détiennent en moyenne 1,7 voiture.
[69] Wimoov, Baromètre des mobilités du quotidien, 2024 https://wimoov.org/actualites/lessentiel-de-la-3eme-edition-du-barometre-des-mobilites-du-quotidien.
[70] Voir les travaux de 6t bureau de recherche sur les territoires des courtes distances : https://www.6-t.co/article/territoire-des-courtes-distances-diagnostic-et-enjeux-pour-le-canton-de-geneve-et-le-grand-geneve
[71] Voir Jean-Marc Offner, « Les vers de terre contre le Zan », Urbanisme n° 435, janvier-février 2024.
[72] Voir l’étude Ademe, Typologie des ménages ayant réalisé des travaux de la rénovation énergétique, 2023.
Au regard de l’objet de ce rapport, le sujet par ailleurs essentiel de la rénovation thermique des maisons individuelles du périurbain ne sera pas abordé. Voir aussi Wissem Baba Moussa, Adrien Pauron, Jean-Bernard Salomond, Julie Sixou, Effet de l’isolation thermique des logements sur la consommation réelle d’énergie résidentielle, Insee, 10 juillet 2025.
[73] Catherine Lavaud, Romuald Le Lan, « Un quart des ménages vivent dans un logement en sous occupation très accentué », Insee Première, n°2064, juillet 2025.
[74] Thomas Hans et David Miet, La densification peut-elle être un levier pour améliorer la biodiversité ? 11 janvier 2024. https://www.vv.energy/.
[75] Matthieu Drevelle, Pierre-Henri Emangard, Atlas de la France périurbaine. Morphologie et desservabilité, éditions Economica, 2015.
[76] Monique Poulot, « Du vert dans le périurbain. Les espaces ouverts, une hybridation de l’espace public (exemples franciliens) », EspacesTemps.net, 2013. Sont définis comme espaces ouverts des espaces libres de constructions et non artificialisés.
https://www.espacestemps.net/articles/du-vert-dans-le-periurbain/
[77] Antoine Fleury, « Les périurbains et leurs espaces publics : enquête sur les franges nord de la métropole parisienne », Cybergeo: European Journal of Geography [En ligne], Espace, Société, Territoire, document 841, mis en ligne le 18 janvier 2018. http://journals.openedition.org/cybergeo/28914
[78] Le paysagiste Gilles Clément utilise cette expression pour dénoncer les haies de tuyas et autres « produits » des lotissements pavillonnaires aussi peu esthétiques que nuisibles à la biodiversité.
[79] Voir Mathilde Riboulot-Chetrit, « Les jardins privés : de nouveaux espaces-clés pour la gestion de la biodiversité dans les agglomérations ? », Articulo, Journal of Urban Research, Special issue 6, 2015, mis en ligne le 15 mai 2015, http://journals.openedition.org/articulo/2696.
[80] Sophie Bonin, « Émergence en France de l’agriurbain et modèle associatif francilien : une dynamique paysagère pour les espaces périurbains ? », Territoire en mouvement. Revue de géographie et aménagement, 44–45, 2020, mis en ligne le 21 février 2020. Voir aussi Terres en villes, publications de l’association, https://terresenvilles.org/chantiers/co-construction-politiques-agricoles-urbaines/
[81] Jacques Lévy, « Liens faibles, choix forts : les urbains et l’urbanité », la vie des idées, 29 mars 2013.
[82] Voir en particulier Laurent Cailly, Trajectoires périurbaines. Mobilités spatiales et recompositions des modes d’habiter en marge des villes françaises, Presses universitaires François Rabelais, 2025.
[83] Mireille Appel-Muller, Jean-Pierre Orfeuil, « Vers des hyperlieux mobiles ? Des activités mobiles augmentées
par les potentialités du véhicule autonome et connecté », Enjeux numériques n°7, septembre 2019, Annales des Mines. Les auteurs présentent la réflexion prospective menée dans la région de Saint-Nazaire, avec cette proposition d’intensités temporaires dans des lieux qui en sont dépourvus, en offrant une réponse originale aux souhaits d’équité territoriale et de visibilité́ des attentes des zones moins denses. « La ville centre comme les villages ont besoin de lieux intenses mais aussi de lieux plus calmes. À chacune de ces polarites correspondent une ambiance, un rythme et un usage différents (…). Les intensités, à l’image des ambiances, seront éphémères et variables (…). Pour s’ajuster à ces variations, le territoire deviendra réversible et modulable. Il doit devenir territoire de ressources et de ressourcement ».
[84] Les différents types d’armature urbaine désignent les formes de relations entre les diverses unités urbaines d’un territoire. Le modèle le plus répandu présente une hiérarchisation à plusieurs niveaux entre villes, des plus grandes aux plus petites. Un modèle en grappe associe des villes à la fois proches et de taille équivalente, tel des grains de raisin, sans hiérarchie entre elles (pas de dépendances mais des interdépendances). L’organisation territoriale de certains départements bretons se rapproche de ce modèle.
[85] Chloé Morin, « Le périurbain conservera son identité, dans une nouvelle manière de faire ville et de faire campagne », juin 2022. https://www.enviesdeville.fr/attractivite/itw-chloe-morin-marie-le-vern/
[86] Les lotissements sont souvent régis par des règlements de copropriété (de droit privé) très difficiles à faire évoluer. Cette question juridique est d’importance, freinant la mutabilité souhaitable de nombre de lotissements anciens. Voir les actes du colloque dirigé par Vincent Legrand et Lionel Rougé : « Le lotissement à l’heure de la sobriété foncière », revue Droit et Ville, 2024/2, n°98.
[87] Claire Aragau, « Les campagnes périurbaines face au vieillissement en France métropolitaine », Bulletin de l’association de géographes français, 96–4, 2019, 555–567.
[88] Question juridique de l’actuelle juxtaposition d’un droit de l’urbanisme et d’un droit rural. Voir Esther Sanz Sanz, Claude Napoléone, Bernard Hubert, « Caractériser l’agriculture périurbaine pour mieux l’intégrer à la planification urbaine : propositions méthodologiques », L’Espace géographique, 2017/2, Tome 46.
[89] Martin Vanier, Le Temps des liens. Essai sur l’anti-fracture, éditions de l’Aube, 2024.
[90] Martin Vanier, « La périurbanisation comme projet », Métropolitiques, 23 février 2011.
[91] Pilotés par l’Agence nationale de la cohésion territoriale, avec l’accompagnement financier de la Caisse des dépôts/ Banque des Territoires, ces programmes de revitalisation concernent les villes moyennes exerçant des fonctions de centralité (Action Cœur de villes), les villes de moins de 20 000 habitants (Petites villes de demain) et les communes rurales de moins de 3 500 habitants (Villages d’avenir).
[92] Aurélien Delpirou, « Action cœur de ville : une réponse en trompe l’œil à la crise des villes moyennes ? », Métropolitiques, 28 octobre 2019. https://www.metropolitiques.eu/Actioncoeur-de-ville-une-reponse-en-trompe-l-oeil-a-la-crise-des-villes.html. Voir aussi Mikaël Dupuy Le Bourdelles, « De l’injonction étatique à l’apprentissage du mode projet dans les villes moyennes : les écueils de l’intersectorialité dans Action cœur de ville », Riurba, no 14, janvier 2023.
[93] Jean-Marc Offner, Anachronismes urbains, Presses de Sciences Po, 2020.
[94] Maylis Desrousseaux et Marie Fournier, « Le rétrozonage ou le retour à l’affectation agricole ou naturelle des sols : du conflit au projet territorial », Annales de géographie, 2024/5–6, n°759–760.
[95] Jean-Marc Offner, « La standardisation des politiques publiques locales : une renationalisation tacite », La Grande Conversation, 25 septembre 2023.
https://www.lagrandeconversation.com/ecologie/la-standardisation-des-politiques-publiques-locales/
[96] Voir l’importante littérature technique et scientifique sur ces solutions fondées sur la nature, actions de conservation, gestion ou restauration des écosystèmes.
[97] Voir Pauline Frileux, Le bocage pavillonnaire, une ethnologie de la haie, Créaphis éditions, 2013.
[98] Éric Charmes et Arie Fitria, « Le département, futur représentant du périurbain ? », Métropolitiques, 15 septembre 2014.
[99] La multimodalité désigne la capacité à utiliser des moyens de transport différents pour effectuer l’ensemble d’un déplacement. Voir Institut-Paris-Région, « Des voies rapides multimodales pour décarboner et décongestionner le réseau routier francilien », note rapide Mobilité n° 1002, 8 février 2024.
[100] Expérience intéressante des dossiers de voirie d’agglomération (DVA) dans les années 1990 (circulaire du 15 novembre 1991 relative à l’élaboration des DVA).
[101] Les régions sont cheffes de file de la compétence Mobilité depuis la loi Lom.
[102] Mobilisée pour accompagner l’étude et la mise en œuvre des Serm, la Société des grands projets (ex-Société du Grand Paris) saura-t-elle pour sa part dépasser la vision très ferroviaire de la genèse des RER métropolitains et s’associer à ce groupe ?
[103] Mobilisé par Edgard Morin pour penser la complexité des systèmes, le terme reliance pourra être remplacé par liaison ou connexion s’il paraît trop théorique.
[104]Dans le cadre de la planification territoriales, le schéma de cohérence territoriale se veut document stratégique intercommunal, fixant de grandes orientations mises ensuite en œuvre par les plans locaux d’urbanisme.
[105] A l’automne 2025, l’actualité législative concernant la démarche Zan est en pause. Une proposition de loi dite d’assouplissement, qualifiée de détricotage par ses détracteurs, doit compter avec une autre proposition qualifiée de riposte, qui veut « réussir la transition foncière ».
[106] Les conférences des parties, bien connues au plan international, sont des forums de construction de règles communes.
[107] Richard Raymond, Philippe Beringuier, Sophie Bonin et al., « Les paysages des franges périurbaines : transition ou parois de verre ? », in Biodiversité, paysage et cadre de vie, Yves Luginbühl (dir.), éd. Edisens, 2015.
[108] Au début des années 2000, le Scot de l’agglomération de Montpellier a mis en avant la préservation du « capital nature » de son territoire en forte mutation. L’expression « inversion du regard » a été formalisée par le paysagiste Alfred Peter.
[109] Anne Gippet, « Repenser les zones d’activité économiques », tribune Libération, 4 juin 2024.
[110] Les Scots sont aujourd’hui sous-utilisés dans leurs potentialités stratégiques et délibérative. Anticipant sur leur rôle dans l’élaboration des Plans locaux d’urbanisme, ces documents de planification restent modestes dans l’usage du projet d’aménagement et de développement durable censé présenter le projet politique.
[111] Gwénaël Doré, « Services au public et territoires : l’instauration des schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services au public (SDAASP) », Information géographique n°3, 2021.
[112] Le diagnostic porte sur les domaines tels que l’accès aux services marchands et non marchands, aux nouvelles technologies, à l’éducation, à l’accès aux soins, aux services de l’emploi et aux services quotidiens (boulangerie, épicerie, station essence, pharmacie, etc.).
[113] Voir les travaux de 6t bureau de recherche sur les territoires des courtes distances, diagnostics territoriaux de l’accessibilité à pied aux équipements et services de proximité : https://www.6-t.co/article/territoire-des-courtes-distances-diagnostic-et-enjeux-pour-le-canton-de-geneve-et-le-grand-geneve, 2022.
[114] La Fédération nationale des agences d’urbanisme a tenu en mai 2024 le colloque de lancement d’un cycle de réflexion sur « les nouveaux dess(e)ins du périurbain ».
[115] Cohen M., March J., Olsen J. (1972), « A Garbage Can Model of Organizational Choice », Administrative Science Quarterly, Vol.17 n°1.
[116] Voir par exemple « Agri 2050, une prospective des agricultures et des forêts françaises », Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux, janvier 2020.
[117] Manon Loisel et Nicolas Rio, Une COP des sols vivants pour faire atterrir la planification, Blog, 2021.
https://partieprenante.com
[118]Voir l’évolution des programmes alimentaires territoriaux (PAT), le plus souvent mono-acteur à leurs débuts mais progressivement passés au statut de vecteur d’interterritorialité multi-acteurs. Fabienne Barataud, Caroline Petit, Josette Garnier, Louise de La Haye Saint Hilaire, Gilles Billen et Camille Noûs, « Pour penser la territorialisation alimentaire, intégrer les inter-territorialités », Géocarrefour [En ligne], 96/4, 2022, mis en ligne le 17 janvier 2023. http://journals.openedition.org/geocarrefour/21053.
[119] Magali Talandier, L’économie métropolitaine ordinaire, éditions Autrement, collection Popsu, 2023.
[120] La précaution reste de mise, tant ces emplois sont méconnus des statistiques traditionnelles (en particulier pour cause de sous-traitance en cascade).
[121] Le métabolisme territorial désigne l’ensemble des processus de consommation et de transformation de l’énergie et des matières mises en jeu par le fonctionnement d’un territoire. Voir Sabine Barles et Marc Dumont, Métabolisme et métropole. La métropole lilloise, entre mondialisation et interterritorialité, Les Cahiers POPSU, éditions Autrement, 2021.
[122] Pour Éric Charmes, le périurbain a des possibilités d’adaptation à terme. Mais pour ce faire, il faut coordonner ; coordonner en particulier les politiques de transport, de développement local et de régulation de la production de logements. « Une telle coordination suppose notamment de dépasser l’échelle communale. Beaucoup de choses ont été faites sur ce terrain pour les agglomérations mais presque tout reste à faire dans le périurbain ou comme on l’a dit la fragmentation du tissu communal est extrême et l’urbanisme reste largement une affaire de maire ». Éric Charmes, « Le périurbain : un territoire de perdants ? », Constructif, n°48, 2017/3.
[123] Voir la constitution récente de l’Alliance pour la décarbonation de la route, réunissant acteurs publics et privés. Une Alliance pour la transition périurbaine réunirait la fédération des agences d’urbanisme et l’ordre des géomètres-experts, la Poste et Kaufman&Broad, l’Union nationale des aménageurs et la fédération des CAUE, Leroy-Merlin et la Fédération française de randonnées…
[124] L’association des petites villes de France a fait en 2017 une proposition similaire, pour que 1% des recettes fiscales des métropoles finance des projets structurants… dans des petites villes.
[125] Les « refuges périurbains » de la métropole bordelaise ont été financés par l’institution intercommunale, au titre de la commande publique artistique.
[126] Le ministère des Armées a fait travailler des créateurs de science-fiction pour imaginer des scénarios de menace du futur (Red Team Défense).
[127] Dominique Faure, ancienne ministre des Collectivités territoriales et de la Ruralité, a été chargée par François Rebsamen, le ministre de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation le 28 mai 2025 d’une mission pour dessiner les grands axes d’une politique d’aménagement du territoire renouvelée.
[128] L’expression « campagne urbaine » a été proposée dès 1998 par Pierre Donadieu dans son ouvrage éponyme (éditions Actes Sud). En géographe, agronome, paysagiste, il proposera quelques années plus tard la notion de ville-campagne comme une forme inédite de l’urbain dont la médiation paysagiste peut se saisir. En 2013, la 34e Rencontre des agences d’urbanisme, à Amiens, prendra pour titre « Campagnes urbaines ». Le Conseil Général de l’Environnement et du Développement Durable s’appropriera la notion en 2015 pour son rapport : Requalifier les campagnes urbaines de France. Une stratégie pour la gestion des franges et des territoires périurbains. En 2017, l’Institut d’aménagement et d’urbanisme d’Ile-de-France organisera un séminaire intitulé : « Vivre dans les campagnes urbaines ». En 2019–2020, le Plan Urbanisme Construction Architecture (Puca) proposera autour de la thématique « Campagnes urbaines » une série de conférences, vidéos et postcasts.
[129] Lou Herrmann, « Le lotissement en France : histoire réglementaire de la construction d’un outil de production de la ville », Géoconfluences, avril 2018.
https://geoconfluences.ens-lyon.fr/informations-scientifiques/dossiers-regionaux/france-espaces-ruraux-periurbains/articles-scientifiques/histoire-reglementaire-du-lotissement