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Note

Audiovisuel public : tous ensemble vers le numérique

L’offre numérique, dans ses différentes dimensions (délinéarisation, convergence du son, de l’image et du texte, interactivité, nouvelles formes) est un élément incontournable de la capacité de l’audiovisuel public à assumer et conforter ses missions dans un univers en pleine mutation. Les moyens croissants qu’y consacrent France Télévisions, Radio France, France Médias Monde, l’INA, Arte, voire TV5 Monde sont aujourd’hui déployés sans coordination. Leur mise en commun, telle qu’on peut l’observer dans la plupart des grands services publics à l’étranger, apparaît indispensable pour mieux assurer la capacité du service public à tenir sa promesse d’universalité, en particulier en direction des jeunes adultes qui tendent aujourd’hui à le délaisser, ainsi que l’indépendance, le pluralisme et la diversité ou encore l’efficacité économique qui doivent caractériser son action.

Publié le 

Les évolutions des technologies et des usages ont modifié en profondeur le secteur des médias et des industries de contenus.

C’est un nouveau monde auquel l’audiovisuel public, dans son ensemble et collectivement, doit s’adapter. Un monde plus ouvert où l’accès aux médias et aux contenus s’affranchit de plus en plus des frontières tant technologiques entre médias de l’écrit, de l’image et du son, que géographiques ; le numérique est un espace commun sur lequel l’ensemble des médias se rejoignent tout en conservant leurs spécificités – la radio filmée en est une illustration. 

Un monde d’abondance de l’offre privée, qu’elle émane des acteurs traditionnels ou des pure players (actifs uniquement sur Internet), où le service public doit chaque jour faire la preuve que sa spécificité, son accessibilité au sens le plus large, justifient l’octroi à son profit d’une ressource publique de plus en plus contrainte. Un monde plus complexe et en évolution constante, où le maintien des compétences et leur développement, ainsi que celui d’une culture de l’agilité dans l’entreprise, sont devenus des enjeux majeurs de compétitivité.

Individuellement les sociétés de l’audiovisuel public ont su prendre le virage du numérique. Leurs offres sont de qualité par rapport à celles de leurs concurrents. Cependant, dès lors que l’on considère l’empreinte globale de l’audiovisuel public, le constat est nettement moins flatteur : une offre fragmentée, cloisonnée, parfois redondante et confuse, des services qui se concurrencent, des infrastructures techniques complexes et hétérogènes, une ergonomie très variable selon les services.

Au Royaume-Uni, la BBC met à la disposition des usagers, sous sa bannière unique, un bouquet d’offres thématiques, transversales et complémentaires, sur une infrastructure technique commune. Au bénéfice du citoyen qui dispose ainsi d’un accès simplifié à l’ensemble de l’offre de l’audiovisuel public et nourrit sans doute le sentiment d’un usage intelligent et responsable de l’argent public.

En France, il est aujourd’hui urgent de mettre en œuvre ce dont tout le monde ou presque s’accorde à reconnaître la nécessité :  une vision intégrée et ambitieuse de l’offre numérique de l’audiovisuel public afin, grâce à la coordination des actions et à la mutualisation des ressources, de garantir aux usagers une  offre ergonomique, exhaustive et cohérente ; aux contribuables  une efficacité économique renforcée ; aux citoyens, une rénovation du rôle que joue l’audiovisuel public dans la cohésion sociale, en retrouvant les clés d’un accès à de larges franges de la population.

Cette ambition pourrait se concrétiser selon deux axes :

1) S’agissant des moyens technologiques, l’ensemble des services numériques de l’audiovisuel public (France Télévisions, Radio France, France Médias Monde, Arte, TV5 Monde et l’INA sont ici concernés) doit s’appuyer sur une infrastructure commune pour l’hébergement et la publication des contenus et services. Cette infrastructure sera mise en œuvre par une entité de droit public (existante ou à créer) désignée à cette fin, et dont la mission principale sera d’assurer l’hébergement, l’indexation et la publication de l’ensemble des contenus, de mettre à disposition des outils transverses de connaissance des publics (d’« intelligence client », pour reprendre un vocable d’entreprise), d’animation marketing et, le cas échéant, de monétisation et de commercialisation. La mutualisation des ressources donnera à l’ensemble plus d’efficacité économique, une présence numérique plus large et un meilleur référencement, une capacité d’innovation et une agilité accrues.

2) S’agissant des services, et sans réduire la capacité de chaque éditeur, chaque chaîne ou chaque programme à maintenir et développer des sites propres (pour autant qu’ils  procèdent de la même infrastructure), le regroupement des forces des sociétés de l’audiovisuel public  doit se traduire par une structuration des contenus autour d’offres thématiques (ou « verticales ») communes, consacrées à l’information, à la culture et au spectacle vivant, aux  jeunes adultes, à l’éducation…

Les offres de  télévision de rattrapage et de podcast, de vidéo à la demande à l’acte et demain par abonnement, pourront également être regroupées pour bénéficier de la dynamique des offres croisées et des propositions additionnelles. En complément de ces offres thématiques, chaque éditeur pourra s’appuyer sur ces ressources communes pour distribuer des services qui lui sont propres, permanents ou événementiels, et s’adresser à des territoires de marques spécifiques.

Evidemment, et sauf à envisager un service public à nouveau unifié (ce qui ne devrait pas être un tabou mais soulève des enjeux dépassant le cadre de cette analyse), donner une forme concrète à ces propositions suppose d’instituer un pilotage serré, et une « gouvernance » adaptée, pour surmonter les inerties et les blocages qui empêchent aujourd’hui en pratique toute coopération spontanée.

Pour désigner un pilote crédible et éviter les surcoûts de la création d’une entité ex nihilo, deux options paraissent envisageables : s’appuyer sur France Télévisions Editions Numériques, qui seule possède une taille critique et une couverture suffisante des offres et services évoqués ici ;  ou sur l’INA, dont les missions, la forme juridique et l’expertise numérique sont a priori compatibles avec les objectifs fixés. Ces deux acteurs semblent à même d’assurer la maîtrise d’ouvrage opérationnelle d’un tel projet, dans le cadre d’une gouvernance collégiale.

En tout état de cause, il reviendra à l’Etat, qui est à la fois tutelle, financeur, actionnaire et stratège, d’intervenir avec détermination pour fixer des objectifs, une méthode et des leviers d’action. L’arrivée de nouveaux dirigeants à France Télévisions et à l’INA, la négociation du Contrat d’Objectifs et de Moyens de Radio France, et la création éventuelle de l’instance de pilotage stratégique de l’audiovisuel public, préconisée par Marc Schwartz dans le rapport « France Télévisions 2020 : Le chemin de l’ambition », créent les conditions  d’une telle impulsion.

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