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Étude

Pour en finir avec les peines plancher

Terra Nova propose un bilan objectif des peines plancher dont la suppression est un engagement de campagne de François Hollande. L’efficacité de cette loi du 10 août 2007 n’est pas démontrée mais ses effets pervers sont, eux, très documentés.

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La suppression des peines plancher est un engagement de campagne du président François Hollande. Cette suppression figure effectivement dans le projet de réforme pénale, présenté en Conseil des ministres le 9 octobre dernier et qui sera débattu au Parlement à compter de la fin du mois de mars.

Cette suppression fait figure de symbole pour une partie de la droite qui s’appuie sur elle pour instruire à ce gouvernement un procès en laxisme. Le recours aux sondages – aux questions judicieusement posées – lui permet d’arguer du fait qu’une très large partie des Français s’oppose à la disparition des peines plancher. Et au sein même de la gauche, certains s’interrogent : ces peines plancher ont-elles réellement des effets négatifs ? Si oui, sont-ils si massifs qu’ils méritent une bataille qui, aux yeux de l’opinion, pourrait accréditer l’idée pernicieuse d’une gauche angélique, manquant de clairvoyance et d’efficacité pour garantir à tout un chacun une sécurité légitime ? D’aucuns seront tentés, à défaut de laisser les choses en l’état, de donner des gages et d’entériner des mesures destinées à compenser la disparition des peines plancher, mesures qui risquent d’être pires que les peines supprimées.

Avant un débat qui s’annonce animé, il est apparu utile de dresser un bilan de l’application de la loi du 10 août 2007, qui a réintroduit dans notre système pénal les peines minimales, dites peines plancher. Pour établir un tel bilan, il faut revenir sur les objectifs assignés à la réforme. De quels arguments ses promoteurs se sont-ils prévalus pour la faire adopter, ce qui n’allait guère de soi, au sein même de la majorité de l’époque ? On s’est ensuite efforcé d’établir la liste des études disponibles sur l’application des peines plancher pour en tirer des conclusions au regard des deux critères qui rendent une peine légitime : l’efficacité et la justice. Au total, si l’efficacité de la loi en matière de récidive n’est pas démontrée, ses effets pervers sont eux bien établis.

1 – LA RUPTURE OPÉRÉE PAR LA RÉFORME DES PEINES PLANCHER

– La fin d’un consensus

La réforme de 2007 a rompu le consensus qui prévalait depuis de très nombreuses années sur la question de l’individualisation des peines. Les peines minimales – celles qui interdisent au juge de prononcer une peine inférieure à un certain quantum – existaient dans le Code napoléonien de 1810, qui précisait pour chaque infraction le minimum et le maximum de la peine encourue. Mais cette règle n’avait que peu de portée pratique puisque le législateur avait donné au juge la liberté de s’en affranchir par le jeu des circonstances atténuantes, laissées à son entière appréciation. Les réformes qui ont suivi ont toutes concouru à accroître le pouvoir d’appréciation du juge. Alors que le code pénal de 1810 limitait le domaine des circonstances atténuantes aux seuls délits, la loi du 28 avril 1832 a généralisé l’application de la règle à tous les crimes et délits prévus par le code pénal. La loi du 21 décembre 1928 et l’ordonnance du 4 octobre 1945 ont rendu les circonstances atténuantes applicables aux infractions prévues par toutes les lois spéciales, non codifiées. Enfin, la loi du 11 février 1951 a supprimé les dernières dispositions spéciales qui limitaient encore le champ des circonstances atténuantes.

La moindre portée des peines minimales est encore renforcée par la consécration, au lendemain de la Seconde guerre mondiale, de l’objectif de resocialisation du délinquant et de l’individualisation de la peine qui conduit à l’adoption de réformes d’inspiration humaniste [3] .

Les lois qui instaurent un nouveau code pénal, en 1992, constatent et consacrent tout à la fois la désuétude et l’inadaptation des peines minimales qui disparaissent de notre système pénal, sous réserve, en matière criminelle, d’un plancher de deux ans pour les crimes punis de la réclusion criminelle à perpétuité et d’un an pour ceux passibles de la réclusion criminelle (peine de 10 à 30 ans de réclusion).

A cet égard, il est important de rappeler que ce nouveau code a été adopté dans un grand consensus, sans qu’une majorité ne l’impose à la minorité [4] . Si bien qu’il est possible de dire que les peines minimales n’étaient plus, depuis très longtemps, un enjeu du débat pénal.

Ce consensus n’a pas pu être brisé facilement. Une première tentative pour réintroduire les peines minimales a échoué. En novembre 2003, le ministre de l’Intérieur de l’époque, Nicolas Sarkozy, avait exprimé son souhait de créer des peines de prisons minimales automatiques pour les délinquants récidivistes. Déjà, cette proposition avait suscité de vives réactions, y compris dans la majorité. Le ministre de la justice, Dominique Perben s’y était opposé [5] . La voie gouvernementale étant fermée, trois députés UMP – Christian Estrosi, Jean-Paul Garraud et Gérard Léonard – ont déposé le 4 février 2004 une proposition de loi visant à créer des peines de prison minimales automatiques pour les délinquants récidivistes [6] . Le texte prévoyait notamment qu’à la troisième récidive, le tribunal devrait obligatoirement prononcer le maximum de la peine ferme. Ces peines minimales présentaient un caractère automatique, le juge pouvant seulement, en matière correctionnelle, décider de prononcer un emprisonnement avec sursis lorsque le prévenu présentait des « garanties sérieuses d’insertion ».

Le Premier ministre avait finalement annoncé l’abandon du projet des peines plancher. Le dossier avait été confié à une mission d’information parlementaire « relative au traitement de la récidive des infractions pénales », installée le 4 mars 2004, dirigée par le président de la commission des lois de l’Assemblée nationale, Pascal Clément, et composée de quatorze députés de la majorité et de l’opposition [7] .

La loi sur le traitement de la récidive des infractions pénales du 12 décembre 2005 est issue d’une proposition élaborée sur la base du rapport déposé par cette commission le 7 juillet 2005. Cette loi a délibérément écarté le recours aux peines plancher tout en durcissant de façon significative les dispositions sanctionnant la récidive.

La réforme des peines plancher devient alors une promesse de campagne du candidat à l’élection présidentielle, Nicolas Sarkozy. La loi n°2007–1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs a constitué l’une des premières réformes de la nouvelle majorité. Elle a été votée très rapidement selon la procédure de l’urgence déclarée.

– Les principales dispositions de la réforme

La loi du 10 août 2007 a donc prévu des peines minimales obligatoires pour les personnes condamnées en état de récidive légale, qu’elle a assorti de dérogations permettant au juge de ne pas les appliquer dans des circonstances spécifiques. Ces dérogations sont bien plus restreintes que les circonstances atténuantes de l’ancien code pénal. Ce sont pourtant elles qui ont conduit le Conseil constitutionnel à déclarer la loi conforme à la Constitution, dans sa décision du 9 août 2007 [8] . Le fait que la juridiction puisse prononcer une peine inférieure au seuil minimal fixé en considération notamment des circonstances de l’infraction et de la personnalité de son auteur a permis au Conseil constitutionnel d’estimer qu’il n’était porté atteinte ni au principe de nécessité des peines ni au principe de l’individualisation des peines, pour les majeurs comme pour les mineurs.

Pour les délits commis en état de récidive légale, le nouvel article 132–19–1 du code pénal prévoit désormais que la peine d’emprisonnement prononcée ne peut être inférieure aux seuils suivants :

1° Un an, si le délit est puni de trois ans d’emprisonnement ;

2° Deux ans, si le délit est puni de cinq ans d’emprisonnement ;

3° Trois ans, si le délit est puni de sept ans d’emprisonnement ;

4° Quatre ans, si le délit est puni de dix ans d’emprisonnement.

Pour les crimes commis en état de récidive légale, le nouvel article 132–18–1 prévoit que la peine prononcée ne peut être inférieure aux seuils suivants :

1° Cinq ans, si le crime est puni de quinze ans de réclusion ou de détention ;

2° Sept ans, si le crime est puni de vingt ans de réclusion ou de détention ;

3° Dix ans, si le crime est puni de trente ans de réclusion ou de détention ;

4° Quinze ans, si le crime est puni de la réclusion ou de la détention à perpétuité.

Quant aux modalités des dérogations prévues, la loi a précisé que la juridiction de jugement – cour d’assises en matière criminelle, tribunal correctionnel en matière délictuelle – peut déroger à l’application des peines plancher et prononcer une peine inférieure à la peine minimale, en fonction des critères suivants :

En cas de récidive simple (première récidive ou récidive multiple de faits moins graves), la dérogation est possible en raison des circonstances de l’infraction, de la personnalité de son auteur ou des garanties d’insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci. Le tribunal correctionnel doit motiver spécialement la décision de ne pas recourir à la peine plancher, la cour d’assises et son jury populaire en étant dispensés ;

En revanche, en cas de récidive aggravée (nouvelle récidive des infractions les plus graves : violences volontaires, délits commis avec la circonstance aggravante de violences, agression ou atteinte sexuelle, délit puni de 10 ans d’emprisonnement), elle suppose que la personne poursuivie présente des garanties exceptionnelles d’insertion ou de réinsertion.

Sans avoir à déroger à l’application des peines minimales, la juridiction de jugement peut assortir la peine, en tout ou partie, d’un sursis (sursis simple ou assorti d’une mise à l’épreuve ou de l’obligation d’accomplir un travail d’intérêt général).

Ces nouvelles dispositions sont applicables aux mineurs de 13 à 18 ans qui subissent une aggravation supplémentaire de leur régime pénal en ce que la loi écarte l’excuse de minorité pour les mineurs de plus de 16 ans condamnés une seconde fois en état de récidive. Cette excuse de minorité prévoit normalement pour les mineurs des maxima de peines divisés par deux pour prendre en compte leur moindre maturité.

Les partisans des peines plancher ont estimé que la réforme de 2007 n’était pas suffisante et ont souhaité les étendre à d’autres situations que les situations de récidive légale.

– Les peines planchers étendues

Prenant prétexte de l’agression de trois policiers effectuant une patrouille à Genevilliers, un amendement a été introduit dans le projet de loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dit « LOPSSI 2 ». La loi LOPPSI 2, adoptée le 14 mars 2011, a donc étendu les peines plancher aux violences aggravées, dès le premier acte de violence. Là encore, l’adoption a été difficile puisque l’amendement a d’abord été repoussé par la commission des lois du Sénat à l’unanimité. Après d’âpres négociations, notamment avec les sénateurs centristes opposés à cette réforme, l’idée de l’extension a été retenue, mais en l’appliquant uniquement aux délits les plus graves, passibles d’au moins dix ans d’emprisonnement. À compter de cette date, les peines plancher n’étaient donc plus réservées aux personnes condamnées en état de récidive. Il est à noter que le Conseil constitutionnel a déclaré inconstitutionnel l’ensemble de ces dispositions concernant les mineurs.

Le débat sur l’efficacité des peines plancher doit d’autant plus être mené qu’à la veille des élections présidentielles de 2012, les députés ont adopté en première lecture une proposition de loi tendant à réprimer les délinquants réitérants [9] . Cette proposition de loi étendait considérablement le champ des peines plancher en prévoyant de telles peines pour les délinquants qui ne se trouvent pas en état de récidive légale mais qui réitèrent une infraction dans les trois ans de leur précédente condamnation (à compter du moment où celle-ci est définitive). Le premier terme de cette réitération devait être un délit intentionnel puni de cinq ans d’emprisonnement minimum. Cette proposition de loi n’a pas été adoptée du fait du changement de majorité à la suite des élections présidentielles.

2 – EVALUER LA RÉFORME DES PEINES PLANCHER

2.1 – Une réforme qui n’a pas été évaluée en amont

La réforme du 10 août 2007 n’a été précédée d’aucune étude d’impact [10] . Comme le souligne le Conseil d’État [11] , une telle étude aurait eu pour objectif de faire apparaître, pour la bonne information du Parlement appelé à statuer :

les raisons du choix d’une stratégie normative plutôt que d’une autre ;

les effets attendus du projet de texte en termes de modification de la situation du secteur concerné ;

les conditions d’insertion de ce projet dans le corpus normatif préexistant ;

qu’il a été procédé à toutes les consultations utiles avec les milieux concernés et quel a été le résultat de la concertation ainsi diligentée.

Pour le Conseil d’Etat, il ne devrait être dérogé à cette règle qu’en cas d’urgence dûment démontrée [12] .

Aucun de ces objectifs n’a été respecté. Le projet de loi sur les peines plancher était simplement précédé d’un exposé des motifs particulièrement pauvre, qui se résumait à une paraphrase du texte présenté.

En aucun cas, les travaux des rapporteurs des commissions des lois de l’Assemblée nationale et du Sénat, quelles que soient leurs qualités, ne sauraient tenir lieu d’évaluation étant donné le temps réduit dont disposent leurs auteurs. Ce temps a été d’autant plus réduit que le gouvernement a fait usage de la procédure de l’urgence. Il aura fallu à peine plus de un mois et demi pour que le projet de loi soit définitivement adopté. En effet, ce projet a été déposé le 13 juin 2007 au Sénat ; François Zocchetto a déposé son rapport le 13 juillet suivant. Le projet de loi a été transmis le 6 juillet à l’Assemblée nationale ; Guy Geoffroy a déposé son rapport le 11 juillet et la loi a été définitivement adoptée le 26 juillet par le Parlement.

Les débats parlementaires accélérés se sont appuyés pour l’essentiel sur une étude de législation comparée du service des études juridiques du Sénat du mois de septembre 2006 [13] .

Par ailleurs, malgré la pauvreté des sources utilisées, la garde des Sceaux avait refusé de rendre public le rapport de la Commission d’analyse et de suivi de la récidive, installée le 5 décembre 2005, à la demande de Pascal Clément, précédent ministre de la Justice et présidée par Jacques-Henri Robert, professeur émérite et directeur de l’Institut de criminologie de l’université Paris II. Il est vrai qu’on pouvait notamment lire dans le rapport que les études étrangères montraient «  combien la réalité de l’efficacité doit être évaluée rigoureusement car elle ne se confond ni avec les bonnes intentions ni avec le « bon sens » ni avec les méthodes qui oublient d’intégrer au programme le fait de traiter les problèmes associés aux comportements délinquants  » [14] . Le professeur Robert avait indiqué que la Commission n’avait pas du tout été consultée lors de l’élaboration du projet de loi [15] .

2.2 – Les données disponibles

Un nombre insuffisant d’études

La question est donc de déterminer les données objectives disponibles aujourd’hui pour l’évaluation.

Force est de constater que de telles données sont denrées rares, pour plusieurs raisons. En premier lieu, les «  justice studies  » telles qu’elles existent dans les pays anglo-saxons, en particulier aux Etats-Unis et au Canada, ne sont pas suffisamment développées en France. Les cursus proposés par les universités anglo-saxonnes s’organisent autour de la justice pensée comme politique publique et mobilisent l’ensemble des savoirs en sciences sociales, ce qui est encore trop rare au sein de l’université française [16] .

De surcroît, les pouvoirs publics ne commandent pas suffisamment d’études scientifiques, ce qui alimente le cercle vicieux du faible attrait pour les études sur la justice. La création de la Mission de recherche droit et justice en 1994 a constitué un progrès important ; elle a permis le financement de nombreuses études utiles [17] . On doit naturellement citer les travaux de l’Institut des hautes études sur la justice (IHEJ) et ceux, majeurs, de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice qui œuvre, dans une perspective comparatiste, dans le cadre du Conseil de l’Europe. Surtout, quand des études existent, le gouvernement et les parlementaires ne s’appuient que trop peu sur elles et elles ne font pas l’objet de restitutions suffisamment larges, notamment auprès des professionnels de la justice.

Les études lancées par les précédents gouvernements à grand renfort de publicité n’ont pas été poursuivies sur la durée. C’est ainsi que lors de l’installation de la Commission d’analyse et de suivi de la récidive le 5 décembre 2005, le garde des Sceaux Pascal Clément avait expliqué qu’il souhaitait « réunir en son sein des praticiens de terrain, de disciplines différentes, pour que l’analyse soit aussi complète que possible, qu’aucun aspect du sujet ne soit laissé et que les propositions qui émergeront des échanges puissent être mises en œuvre aisément ». Le rapport de la Commission était présenté comme le « premier d’une série de périodicité annuelle ». Or, rien n’est venu et on a rappelé comment la ministre de la justice qui a suivi avait laissé de côté ses travaux qui n’allaient pas dans le sens de la réforme des peines plancher [18] .

Sur l’application de la réforme des peines plancher, on dispose aujourd’hui pour l’essentiel de trois études :

– le rapport des députés Caresche et Geoffroy sur la mise en application de la loi n°2007–1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs déposé le 9 décembre 2008 ;

– l’étude publiée dans Infostat Justice n°118 [19] au mois d’octobre 2012 et intitulée « Peines planchers : application et impact de la loi du 10 août 2007 » ;

– le rapport présenté le 14 février 2013 à la conférence de consensus par Jean-Paul Jean [20] – magistrat, professeur associé à l’université de Poitiers – intitulé « Récidive : évolutions législatives et politique pénale, évaluation ». Ce rapport exploite les dernières statistiques fournies par la Chancellerie pour 2012.

S’y est ajoutée récemment l’étude d’impact du projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines datée du 7 octobre 2013, qui s’appuie sur les études précédentes.

Le rapport sur la mise en application de la loi n°2007–1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs du 9 décembre 2008 se donne pour objectif, un an et demi après l’entrée en vigueur de la loi, « de répondre à quatre questions principales :

—  le dispositif mis en place ménage-t-il la liberté des juges d’individualiser les peines en fonction des circonstances de l’espèce ?

—  les peines minimales ont-elles atteint leur cible, c’est-à-dire le noyau dur de récidivistes installés dans la délinquance (majeurs comme mineurs) ?

—  les peines minimales ont-elles atteint leur objectif dissuasif : les statiques de la récidive permettent-elles de démontrer une réduction de celle-ci ?

—  les peines minimales ont-elles les effets pervers annoncés par certains au moment du vote de la loi, notamment sur la population carcérale ? »

Dans la conclusion du rapport, le rapporteur écrit : «  L’impact de la loi sur la récidive demeure difficile à évaluer du fait du manque de recul. Votre rapporteur souhaite que l’effet dissuasif l’emporte, notamment auprès des mineurs, l’objectif ultime de cette loi étant qu’elle n’ait pas à être appliquée. L’impact de la loi sur l’évolution de la population carcérale, si souvent dénoncé, est difficilement quantifiable, tant il est difficile de faire la part de l’augmentation de la population carcérale due à cette loi de celle due à d’autres facteurs, telle la disparition des décrets de grâce collective et lois d’amnistie  ».

En résumé, pour les effets de la loi sur la récidive : « c’est trop tôt » ; pour ses effets sur la population carcérale : « c’est difficile à quantifier ». Cela ne l’empêche pourtant pas de conclure – à l’inverse du co-rapporteur : «  Bien que les interrogations et les oppositions de principe n’aient pas disparu, votre rapporteur estime que la loi a fait la preuve de la validité du dispositif mis en place, qui laisse une réelle marge d’appréciation aux magistrats  ».

Deux analyses chiffrées de l’application de la loi, depuis son entrée en vigueur, ont été réalisées, l’une par Infostat Justice (paru en octobre 2012), l’autre par Jean-Paul Jean, à l’occasion de la conférence de consensus du mois de janvier 2013.

Ces trois études rassemblées permettent notamment de faire un bilan du taux d’application des peines plancher sur cinq ans.

Depuis l’entrée en vigueur de la loi, au 1er décembre 2012, sur 94 338 condamnations en récidive légale éligibles aux peines minimales (concernant les mineurs et majeurs, en première instance et en appel), 42 596 ont été effectivement prononcées, soit 45,2 %, dont 16 751 avec une partie d’emprisonnement ferme (39,3 %).

Évolution 2008–2012 de l’application des peines minimales

Année du jugement

Condamnations

Peines minimales Nombre et %

Dont avec emprisonnement

ferme

Appel du parquet Nombre et %

2008

18.317

8.996 (49,1%)

3.345 (37,2%)

805 (8,6%)

2009

20.443

9.861 (48,2%)

3.516 (35,7%)

1.039 (9,8%)

2010

20.056

8.649 (43,1%)

3.315 (38,3%)

728 (6,4%)

2011

17.325

7.666 (44,2%)

3.278 (42,8%)

491 (5,1%)

2012 (sur 10 mois)

13.480

4.880 (36,2%)

2.176 (44,6%)

413 (4,8%)

Source DACG in Jean-Paul Jean – « Récidive : évolutions législatives et politique pénale, évaluation », cité page précédente

L’insuffisance du dispositif statistique

Ces trois études nous livrent une analyse intéressante des statistiques disponibles mais montrent également l’insuffisance de ces statistiques.

Dans leur rapport, les députés Geoffroy et Caresche rappellent que la Chancellerie a mis en place, par dépêche en date du 8 octobre 2007, un dispositif de collecte statistique informatisé relatif au suivi judiciaire des condamnations prononcées en vertu de la nouvelle loi et renseigné par les parquets. C’est sur ces données que le rapport s’appuie. Néanmoins, il souligne le caractère incomplet de ces statistiques qui ne distinguent pas les situations selon que le quantum de la peine prononcée correspond strictement au quantum de la peine minimale ou lui est supérieur. Le système informatique mis en place par la Chancellerie ne distinguant pas selon le quantum de peine prononcé, il est seulement possible de distinguer les cas où la peine minimale a été écartée de ceux où elle ne l’a pas été.

Les députés rappellent également que, alors que l’article 3 de la loi prévoit que le président de la juridiction avertit le condamné, lors du prononcé de la peine, des conséquences qu’entraînerait pour lui une condamnation pour une nouvelle infraction commise en état de récidive légale, aucun bilan statistique n’est disponible sur l’application de cet article 3. Cet avertissement personnalisé était censé avoir un effet dissuasif sur la commission de nouvelles infractions. Les députés indiquent que « seule une étude de terrain permettrait de connaître la pratique des juridictions indépendamment des mentions portées au jugement. La circulaire du 13 août 2007 rappelle en effet que «  la loi n’exige pas que cette information, si elle a été donnée au condamné, soit mentionnée dans le jugement  » , condition qui serait nécessaire pour procéder à un relevé statistique  ».

On doit ajouter qu’il est regrettable que le suivi statistique ne distingue pas entre la première récidive et la récidive dite aggravée (ou multirécidive).

Par la suite, le suivi statistique exigé par la dépêche du 8 octobre 2007 n’a pas fait l’objet d’un suivi ni d’un autre rapport parlementaire. Le rapport annuel de politique pénale de la direction des affaires criminelles et des grâces n’a jamais contenu de développement ni d’analyse de la politique conduite par les parquets en matière de lutte contre la récidive et d’application des peines plancher. Dans la circulaire du 1er octobre 2010, la Chancellerie constatait une baisse du taux de renseignement et rappelait les parquets à leurs obligations. Par une circulaire en date du 26 septembre 2012, la directrice des affaires criminelles et des grâces indiquait aux parquets qu’il était nécessaire que la loi puisse être évaluée et leur demandait de continuer à nourrir le dispositif statistique. Comme l’indiquait Jean-Paul Jean dans son rapport, il est nécessaire que ce dispositif soit maintenu « mais à la condition qu’il contribue effectivement à une évaluation documentée des pratiques judiciaires, avec un retour aux juridictions  ».

2.3 – Les objectifs de la réforme

Les données disponibles doivent être rapportées aux objectifs poursuivis par les promoteurs de la réforme des peines plancher.

Pour le gouvernement, il s’agissait avant toute chose de lutter contre la récidive en dissuadant les « délinquants d’habitude ». Dans une interview au journal Le Monde, la garde des Sceaux Rachida Dati déclarait juste avant de présenter sa réforme : «  C’est la fonction première de la loi pénale d’être dissuasive. Elle doit retrouver cette vertu. J’ai été interpellée par un mineur au Centre éducatif fermé de Rouen en ces termes : « Madame, est-ce vrai que si on recommence, on va être jugé comme des majeurs ? » Il a intériorisé le caractère dissuasif de mon projet  » [21] . Dans son discours devant les députés, elle ajoutait que le nouveau régime de peines était un signal fort adressé à tous et notamment «  aux personnes déjà condamnées qui, clairement, sauront ce qu’elles encourent  ». Avant elle, Nicolas Sarkozy, ministre de l’Intérieur, avait déclaré au mois de décembre 2003 : «  Les multirécidivistes doivent savoir que, puisqu’ils n’ont plus peur de la loi, nous leur appliquerons une loi plus sévère encore. On doit savoir maintenant en France qu’à partir d’un certain niveau de récidive, la peine qui tombera sera une peine qui vous gardera en prison un nombre d’années suffisant pour que vous réfléchissiez à la gravité de ce que vous avez fait . » [22]

Plus généralement, les partisans des peines minimales obligatoires estiment que ces lois exercent :

– un effet de dissuasion, une partie des délinquants, notamment récidivistes, se ravisant au regard des lourdes peines encourues ;

– un effet de neutralisation en écartant le délinquant de la société durant le temps de son incarcération ;

– un effet de réduction des inégalités. Ils considèrent que les peines plancher réduisent l’arbitraire du juge et sont facteur d’une plus grande égalité devant la loi. Ce point est plus particulièrement souligné par une partie de la doctrine favorable à ces peines. Les délinquants condamnés sous l’empire des peines plancher se verraient tous appliquer le même régime et, à infraction et circonstances égales, peu ou prou une sanction similaire [23] .

On verra pourtant que l’effectivité des peines plancher n’est établie à aucun de ces égards.

3 – L’EFFICACITÉ DES PEINES PLANCHER N’EST PAS DEMONTREE

3.1 – La dissuasion : il n’est pas établi que les peines plancher dissuadent de récidiver

Lors de l’examen en commission du projet de loi sur les peines plancher, la garde des Sceaux Rachida Dati a déclaré : «  J’ajoute que ses effets dissuasifs sont déjà bien établis. Tous le reconnaissent, tant les magistrats que les détenus eux-mêmes : chacun sait que, maintenant, l’on « risque gros » en cas de récidive  ».

Au-delà de son caractère incantatoire, cette affirmation ne repose sur aucune donnée sérieuse.

Qu’est-ce que la dissuasion ?

Dissuader c’est inciter quelqu’un à ne pas nuire par la menace d’un danger. On distingue traditionnellement la dissuasion générale et la dissuasion spécifique. Il s’agit d’exprimer le fait que la commission d’une infraction risque de comporter plus de conséquences négatives que positives pour la personne concernée. La dissuasion générale concerne tous les citoyens qui doivent être convaincus, par l’exemplarité des peines, qu’ils n‘ont pas intérêt à commettre des crimes ou des délits. La dissuasion spécifique s’adresse aux condamnés qui, par l’intimidation, doivent être empêchés de recommencer.

Par le discours tenu par la majorité de l’époque – cette loi n’est pas pour les honnêtes gens mais pour les « multirécidivistes » – il est clair que l’effet mis en avant était un effet de dissuasion spécifique.

Cette question de la dissuasion est d’autant plus fondamentale que si elle ne se matérialise pas en faisant baisser la criminalité, il est probable que le durcissement des peines infligées entraîne une grave crise du système carcéral incapable d’absorber l’accroissement des incarcérations qui résulterait de la loi [24] .

Qu’établissent les données disponibles ?

Aucune étude statistique n’a été commandée par le gouvernement qui a promu les peines plancher pour en démontrer l’efficacité en termes de dissuasion.

Les études réalisées sur le caractère dissuasif ou non des peines minimales obligatoires l’ont été à l’étranger, pour l’essentiel aux Etats-Unis et également, depuis quelques années, au Canada.

La dissuasion suppose que les délinquants effectuent un choix de façon rationnelle entre commettre une infraction et ne pas en commettre, en soupesant les avantages attendus et les risques encourus. La théorie de la dissuasion suppose aussi que l’homme est un être hédoniste qui recherche le plaisir et rejette la douleur. Cela suppose enfin que le sujet est libre de choisir, qu’il sait ce qui est bon pour lui et qu’il est maître de son comportement [25] .

Plusieurs études ont été menées. Elles suggèrent que les personnes qui ont commis des infractions se sont bien sûr interrogées sur les meilleures modalités d’action et montrent qu’elles sont rien moins qu’insensibles aux risques encourus. Néanmoins, ces études ont aussi précisé que le risque concerne davantage la probabilité d’être arrêté et incarcéré que la sévérité de la peine encourue (Gabor, 1987 et 1994 et Brown, 1997). Par ailleurs, il est incontestable qu’un grand nombre de crimes et de délits sont commis par des personnes qui n’effectuent pas un choix raisonné mais agissent sur le coup d’une pulsion, d’un déséquilibre psychique ou d’une substance toxique (alcool et drogue en particulier). La population délinquante n’est pas homogène : elle est composée d’individus différents commettant des infractions elles-mêmes de nature différente. Il serait indispensable de s’interroger sur les types de réponses susceptibles d’agir sur telle ou telle catégorie de délinquants.

Au surplus, il est particulièrement difficile d’établir un effet dissuasif des peines plancher parce qu’il n’est pas suffisant de démontrer qu’une peine minimale obligatoire a un effet absolu de dissuasion. Les peines infligées aux récidivistes avaient déjà un effet dissuasif hypothétique avant la loi ; c’est donc l’avantage marginal des peines plancher – celui qui vient s’ajouter à celui découlant des sanctions préexistantes – qu’il faudrait établir.

On voit donc à la fois que l’effet dissuasif spécifique des peines plancher, telles qu’entrées en vigueur en France en 2007, n’a pas été étudié mais que les études réalisées à l’étranger montrent qu’un tel effet est particulièrement difficile à appréhender. Il est donc faux d’affirmer comme le faisait le gouvernement de l’époque, dès 2009, que les peines plancher ont un effet dissuasif bien établi. En revanche, ces peines semblent avoir un effet de « neutralisation ».

3.2 – La neutralisation : la loi sur les peines plancher a alourdi les peines d’emprisonnement prononcées

Des peines d’emprisonnement plus longues

La neutralisation – ou l’incapacitation – exprime le fait qu’en mettant le condamné à l’écart on l’empêche de nuire le temps de son incarcération. Dans quelle mesure cet effet neutralisant des peines plancher est-il établi et cet effet est-il intéressant ?

L’étude statistique parue dans Infostat Justice d’octobre 2012 montre que la loi du 10 août 2007 a eu un impact élevé sur l’alourdissement des peines. Si l’on compare les deux périodes 2004–2006, avant la loi, et 2008–2010, après la loi, on constate que le taux équivalent à celui des peines minimales prononcées pour des faits similaires est passé de 8,4% à 40,7%.

Cette étude montre également que si la loi de 2007 sur les peines plancher n’a pas entraîné un recours plus important aux peines d’emprisonnement qui, pour les condamnations pour des délits commis en état de récidive, étaient largement majoritaires (94%), en revanche, elle a augmenté la part d’emprisonnement avec sursis total qui est passée de 12% à 15%. Lorsque l’emprisonnement est prononcé, le niveau de peine est en moyenne augmenté de plus de 6 mois, passant de 9 à 15,6 mois, ce qui, comme le font remarquer les auteurs, correspond à la logique même des peines plancher. Le recours au sursis atténue l’impact de l’emprisonnement ferme dont le quantum moyen est néanmoins passé de 8,2 mois avant la loi à 11 mois après (+34%).

On peut donc dire que la récidive était déjà traitée beaucoup plus sévèrement et sanctionnée de peines d’emprisonnement ferme avant la loi. Après la loi, le différentiel de fréquence de l’emprisonnement – ferme ou non – demeure identique. Mais c’est le quantum d’emprisonnement qui se trouve nettement alourdi. Il est multiplié par 2,6 en présence de récidive (de 5,9 à 15,6 mois) et celui de l’emprisonnement ferme par 1,6 (de 6,7 à 11 mois).

L’étude tente d’évaluer l’impact en termes d’années de prison ferme, en comparant le résultat observé des années 2008–2010 avec celui « virtuel » qui aurait été obtenu, sur la même base, mais avec les taux d’emprisonnement ferme et les quanta moyens de la période 2004–2006. On constate que l’accroissement du niveau moyen d’emprisonnement ferme aurait provoqué une augmentation de près de 4% du total des années prononcées sur cette période de 3 ans, soit 4000 années supplémentaires par an. La loi sur les peines plancher a accru la durée globale d’emprisonnement prononcée par les juridictions françaises.

Les effets pervers

Des auteurs de mauvaise foi pourraient souligner ici que le nombre de condamnations prononcées en état de récidive a explosé et en conclure que cet effet de neutralisation – temporaire – établi n’a pas conduit à faire reculer la récidive. En effet, l’étude Infostat constate que, sur la période 2004–2010, le nombre de condamnations prononcées en récidive a été multiplié par deux, passant de 5% en 2004 à 13% en 2010. En réalité, cette progression correspond à des modifications du champ juridique de la récidive qui, depuis 2005 en particulier, s’est considérablement étendu quand les conditions permettant à la juridiction de relever la circonstance de récidive et de prononcer des peines d’emprisonnement se sont, elles, considérablement assouplies. La récidive est donc à la fois plus large, plus facile à retenir et plus facilement réprimée par des peines d’emprisonnement.

Si ces statistiques ne signifient pas par elles-mêmes que les peines plancher ont contribué à accroitre la récidive, on peut néanmoins insister sur le fait que l’emprisonnement constitue un facteur favorisant la récidive et s’interroger sur les effets de l’augmentation significative du niveau des peines d’emprisonnement ferme prononcées. L’emprisonnement ferme favorise la récidive par le biais de plusieurs mécanismes : l’effet désocialisant de l’enfermement qui coupe des réseaux familiaux, sociaux et de l’emploi ; l’effet d’affaiblissement physique et souvent psychiatrique des individus enfermés ; l’effet de pairs ou effet « école du crime » du milieu carcéral ; les chercheurs ont également mis en évidence, lorsque les peines d’incarcération sont excessives, un effet de stigmatisation et de disqualification de la loi et des institutions aux yeux des personnes concernées.

S’y ajoute un effet sur la surpopulation carcérale. Le rapport parlementaire des députés Geoffroy et Caresche en avait déjà perçu la réalité. L’augmentation du nombre des peines d’emprisonnement ferme prononcées – d’une manière générale vers une même catégorie de délinquants – a mis une pression sur tout le système pénal et pénitentiaire. Les prisons, qui étaient déjà dans une situation difficile, ont connu à partir du début de l’année 2008 un phénomène de surpopulation carcérale alors sans précédent.

S’y ajoute un autre phénomène. Conscients d’une situation intenable pour les établissements pénitentiaires, les magistrats ont assorti les peines d’emprisonnement prononcées de sursis avec mise à l’épreuve (SME), associés à des durées d’épreuve de plus en plus longues. Ils ont bien appliqué la loi en prononçant une peine plancher mais ont réduit la durée de l’emprisonnement ferme par le jeu du SME. Ce faisant les peines plancher ont tout de même alourdi la charge de l’administration pénitentiaire par le biais des services pénitentiaires d’insertion et de probation, déjà débordés. Le directeur de l’Administration pénitentiaire de l’époque, Claude d’Harcourt, n’avait pas hésité devant les rapporteurs de l’Assemblée nationale à qualifier la situation de « bulle prête à éclater ».

Conscient de cet effet induit de la loi, le Gouvernement, le même qui a promu les peines plancher, a fait voter par le Parlement une loi pénitentiaire. C’est ainsi que la loi du 24 novembre 2009 est venue renforcer les possibilités d’aménagement des peines, et ce afin de permettre de soulager les établissements pénitentiaires.

Le dispositif – en soi indispensable – mis en place par la loi pénitentiaire a conduit à un effet pervers du système. Celui-ci est apparu comme « tournant à vide » et totalement illisible pour les citoyens : des juges qui prononcent des peines d’emprisonnement, des juges d’application des peines n’ayant pas les moyens pour assurer de manière rapide l’aménagement de ces peines. Au final, la situation ne laissait apparaître qu’une réalité : ce retard dans le dispositif d’aménagement des peines est apparu comme une renonciation à l’exécution des peines, sujet dont s’est vite emparée la droite avant les élections présidentielles de 2012 pour dénoncer à nouveau le laxisme des juges – cette fois-ci non en ce qui concerne le prononcé des peines mais leur exécution.

Ces effets pervers de la loi de 2007 sur le système carcéral soulèvent également la question du coût d’une telle loi. La loi sur les peines plancher est-elle soutenable économiquement ?

3.3 – Le coût budgétaire : la loi sur les peines plancher n’est pas efficace économiquement

67 820 personnes étaient détenues au 1er février 2014 pour 57 490 places. Cette population continue à croitre (+1,6%). Elle était de 63 800 en 2004, de 47 000 en 2001. Entre le 1er janvier 2002 et le 1er janvier 2012, le nombre de personnes détenues est passé de 48 296 à 64 787, soit un accroissement de 34 %. Dans le même temps, le nombre d’habitants, passé, d’après les chiffres de l’INSEE, de 61,1 à 65,4 millions d’habitants, a progressé de 7 % seulement [26] .

On pourrait s’attarder longuement sur les conditions indignes de détention. Il semble loin le temps où dans une belle unanimité, les sénateurs se désolaient des prisons françaises, « une humiliation pour la République » [27] . La Chancellerie tient, depuis quelques années, une bien triste statistique, celle du nombre de matelas au sol dans les prisons : ils étaient 1076 au 1er février 2014. Ce nombre était de  230 au 1er février 2011, de 719 au 1 février 2012 et de 783 au 1 février 2013 [28] . A cette même date, sur 190 établissements, neuf avaient un taux d’occupation supérieur ou égal à 200 %, 35 avaient un taux d’occupation compris entre 150% et 200 % et 52 connaissaient un taux d’occupation compris entre 120 et à 150 %.

Cette surpopulation a un coût auquel le dispositif des peines plancher a contribué. En 2012, pour la première fois depuis qu’elle a été rattachée au Ministère de la Justice, le budget de l’administration pénitentiaire a dépassé celui des juridictions. Cela semble devoir être une tendance lourde, confirmée en 2013 et 2014 [29] . Ce budget atteint 3,24 milliards d’euros pour 2014 (contre 3,12 pour les juridictions).

Selon la Cour des comptes, une place de détention coûte en moyenne 71 euros par jour (chiffre 2008) [30] . Les coûts estimés par la conférence de consensus sont plus élevés encore : le coût de journée dans une maison d’arrêt (conçue en principe pour recevoir des personnes en détention provisoire, non encore condamnées) s’établissait en 2011 à 85,44 euros, dans un centre de détention (pour courtes peines) à 98,08 euros, dans un centre pénitentiaire (qui mêle plusieurs types de condamnés) à 96,01 euros et dans une maison centrale (pour les longues peines), à 196,14 euros (ces chiffres ne concernent que les établissements gérés en régie, directement par le secteur public). Le coût moyen s’élève donc pour la société à 32 000 euros par an et par détenu. Le prix de journée dans les établissements pénitentiaires pour mineurs s’élève à 496 euros, ce qui s’explique principalement par le fort taux d’encadrement nécessaire pour ce public.

Pour les personnes qui ont bénéficié d’une alternative à l’incarcération ou qui ont été écrouées et bénéficient d’un aménagement de peine, la prise en charge par l’administration pénitentiaire représente un coût très inférieur à celui de la détention. Pour la surveillance électronique, le placement extérieur et la semi-liberté, le coût par personne et par jour est inférieur à 60 €.

Coût des aménagements de peine par journée de placement – 2011

Surveillance électronique

10.43 €

Placement extérieur

31.32 €

Semi-liberté

59.19 €

Source : Administration pénitentiaire

La construction de places de prison supplémentaires présentée hâtivement comme une solution possible engendre deux types de coûts :

– des dépenses pour la construction elle-même ;

– des dépenses de fonctionnement liées à l’accroissement de la population incarcérée, source de coûts de détention.

L’Institut Montaigne – think tank d’inspiration libérale – associé aux Echos a proposé une intéressante étude chiffrée de la proposition du candidat Sarkozy de construire 30 000 places de prison d’ici 2017 [31] . Cette étude conclut que, au total, le coût annuel de la création nette de 23 500 places de prison, permettant de porter le nombre total de places à 80 000, peut être estimé à 1,5 milliards d’euros environ en 2017 (soit 737 millions d’euros en investissement et 730 millions d’euros en fonctionnement). Au-delà, seules les dépenses de fonctionnement demeureraient.

En période de contrainte budgétaire, alors que les Français ressentent l’impact de la crise, on peut se demander – au-delà des sondages simplistes – quelle est réellement leur opinion sur une telle allocation des ressources. Les citoyens sont-ils prêts à envisager un « impôt prisons » pour financer une politique d’enfermement dont l’efficacité n’est pas démontrée ?

4 – Les PEINES PLANCHERS sont injustes

4.1 – Une loi qui s’applique essentiellement aux petits délits

Le rapport des députés Caresche et Geoffroy sur la mise en application de la loi n°2007–1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs déposé le 9 décembre 2008 souligne que « la ventilation de la part des condamnations dans lesquelles a été prononcée une peine minimale en fonction de la peine encourue est édifiante. Cette part est d’autant plus importante que la peine encourue est faible », comme le montre le tableau ci-après.

Tableau des condamnations en récidive et des peines minimales prononcées par les juridictions de première instance en fonction de la peine encourue

Peine encourue pour une première infraction

Peine minimale en cas de récidive

Part des condamnations ayant prononcé une peine minimale

10 ans d’emprisonnement

4 ans

43,7%

7 ans d’emprisonnement

3 ans

46,5%

5 ans d’emprisonnement

2 ans

49,0%

3 ans d’emprisonnement

1 an

57,7%

Il ressort également des conclusions de ce rapport parlementaire que les infractions donnant lieu au prononcé d’une peine minimale sont principalement les vols et atteintes aux biens, qui représentent 55% des peines minimales prononcées. A cet égard, il convient de rappeler que le dispositif des peines minimales avait été conçu pour lutter contre la récidive d’actes graves, notablement de violences faites aux personnes. Or, le constat est unanime dans les études réalisées. Ce dispositif a eu un impact principalement sur les « petites » infractions.

Ce constat est également partagé par Jean-Paul Jean dans l’analyse sur la récidive présentée devant la conférence de consensus. Il note que «  l’analyse de la répartition de ces condamnations selon la nature des infractions fait ressortir que c’est en matière de violences que les peines minimales sont prononcées le plus fréquemment.  » Mais, observe-t-il, ce sont les vols et les infractions aux biens qui constituent la première catégorie en nombre absolu d’infractions avec un taux élevé d’emprisonnement ferme (47,1%). Le taux de peines plancher constaté avant et après la loi est maximal pour les délits punis de trois ans d’emprisonnement au plus : 13,8% avant la loi et 44% après la loi. Son analyse aboutit donc à la confirmation de l’appréciation du rapport des députés Geoffroy et Caresche selon laquelle «  le dispositif des peines minimales, conçu pour lutter contre la récidive d’actes graves, s’applique principalement, comme cela était prévisible, aux petites infractions répétitives.  » Le législateur de 2007 a donc manqué sa cible.

A ce constat, s’ajoute un autre élément d’évaluation particulièrement significatif en termes de bilan du dispositif. Moins la peine encourue est élevée, plus le nombre de condamnations à une peine minimale augmente. Traduction éloquente de cette réalité, on observe que la procédure de comparution immédiate – ancienne procédure des flagrants délits, qui concerne principalement les petits délits – est le lieu de prédilection du dispositif des peines plancher. Cette procédure est celle qui « produit le plus d’emprisonnement ferme sur le fondement des peines minimales (46,2% des peines prononcées par les juridictions pénales).

On peut en conclure, comme le faisaient d’ailleurs les rapporteurs Geoffroy et Caresche, dès 2008, que la loi sur les peines plancher n’a pas eu d’effet sur les actes les plus insupportables pour la société mais sur les petites infractions répétitives. Comme le soulignent les deux députés, «  Outre que cette situation ne correspond pas à l’intention initiale des auteurs de la loi, elle induit un décalage entre l’importance des peines plancher et les infractions constatées qui est à l’origine des difficultés d’application de la loi par les magistrats.  »

Ce qui explique d’ailleurs que le taux d’application de la loi s’est érodé, passant de 50% en 2007 à 38,6% en 2011, les magistrats étant aux premières loges pour constater les effets pervers de la loi.

4.2 – Les disparités d’application

Des disparités d’application sur le territoire national

Le rapport des députés Geoffroy-Caresche constate, fin 2008, que le taux d’application des peines plancher varie très sensiblement d’une cour d’appel à l’autre. Ainsi, si le taux moyen d’application des peines minimales est alors de 49 %, il cache des disparités importantes selon les ressorts : il était de 34,4 % dans le ressort de la cour d’appel de Paris alors qu’il était de 65,6% à Douai, de 68,2 % à Rouen et même de 72,5 % à Bourges.

Surtout, les deux rapporteurs de la commission des lois ont pris la peine de se rendre au tribunal de grande instance de Paris afin d’y rencontrer des magistrats appliquant la réforme et notamment le parquet. Leurs observations sont édifiantes :

«  Ces échanges ont été particulièrement troublants pour votre rapporteur qui a mesuré l’écart existant entre la conception qu’il se fait de la loi et son application sur le terrain. Ne sachant faire la part entre les contraintes qui pèsent sur les magistrats et d’éventuelles stratégies délibérées de contournement de la loi, il souhaite faire part de sa grande préoccupation à l’égard des conditions dans lesquelles la loi est appliquée. Il est inquiet de voir que selon les juridictions, la conception que les magistrats semblent se faire des dérogations prévues par la loi soit à géométrie variable, expliquant sans doute très largement les écarts constatés dans le taux d’application des peines minimales selon les ressorts.

Votre co-rapporteur a été marqué par les propos unanimes regrettant les difficultés et les contraintes que représente l’application de cette loi. Les peines plancher ne paraissent pas adaptées à la plupart des situations auxquelles sont confrontés les magistrats. Soit ils peuvent déroger à la peine qu’ils jugent excessive, soit ils ne peuvent pas et ils appliquent le plus souvent la peine plancher assortie d’un sursis avec mise à l’épreuve pour atténuer la peine. Ils peuvent également être amenés à prononcer une peine plus faible sans la motiver, pratique, certes contestable, mais qui témoigne pour votre co-rapporteur de leur malaise dans l’application de la loi. Ce malaise est d’ailleurs plus important encore concernant les mineurs : « nous sommes en vraie difficulté pour appliquer la loi et en éviter les effets » a déclaré une magistrate.  »

De fait, les disparités d’application territoriale sont confirmées par les études récentes. Jean-Paul Jean fait le constat qu’il existe toujours une très grande disparité dans l’application des peines minimales entre juridictions, entre cours d’appels tout comme entre tribunaux d’une même cour. Il en est de même des appels du parquet.

En premier ressort, sur un total de 84 389 condamnations en récidive légale faisant encourir les peines minimales et 36 615 effectivement prononcées (43,4%), le taux national moyen d’application des peines minimales avec emprisonnement ferme prononcé est de 37,5 %. Il est de 28,8 % dans le ressort de la cour d’appel de Paris (35,5 % au TGI de Paris) mais 55,2 % dans la cour d’appel d’Aix-en-Provence (dont 64,9 % au TGI de Grasse) et jusqu’à 68,9 % à Fort-de-France.

En appel, les écarts sont aussi très importants. Sur un total de 9 949 condamnations en récidive légale faisant encourir les peines minimales, le taux national moyen d’application des peines minimales avec emprisonnement ferme prononcé par les cours d’appel est de 50,3 %. Il est de 30,9 % à la cour d’appel de Paris, 71 % à la cour d’appel d’Aix-en-Provence et 86,4 % à la cour d’appel de Fort-de-France.

Contrairement aux intentions du législateur, le dispositif des peines plancher ne favorise pas une harmonisation du prononcé des peines sur le territoire. Elle est au contraire un facteur d’accroissement des inégalités de traitement par son effet de déstabilisation du système pénal. Cette loi s’appliquant de façon injuste, se concentrant essentiellement sur les petits délits, dans le cadre de la comparution immédiate, engendre des phénomènes de contournement inévitables, largement décrits par les recherches menées sur le sujet aux Etats-Unis ou au Canada. Si on ajoute à cela le fait que la loi a contribué à accroître encore la surpopulation carcérale, on comprend le malaise des magistrats évoqué par le député Caresche dans son rapport.

D’autres disparités ?

On ne peut que s’interroger sur d’autres disparités qui, traditionnellement, ne sont pas mesurées en France où les statistiques ethniques sont bannies. Mais les études menées sur les peines minimales obligatoires dans les pays anglo-saxons montrent que ces peines sont infligées de façon disproportionnée aux membres de minorités raciales ou ethniques. C’est ainsi par exemple que le nombre d’Afro-américains condamnés à des peines d’emprisonnement dans des établissements fédéraux ou d’Etat de 1985 à 1995 a augmenté plus vite que le nombre de leurs homologues blancs (Maxwell, 1999). De même, on a montré que la loi floridienne sur les multirécidivistes était appliquée deux fois plus souvent aux Noirs qu’aux Blancs (Austin, 1993). En Californie, les Afro-américains ne représentent que 7% de la population et 20% des personnes arrêtées pour actes délictueux graves mais ils représentent 43% des personnes condamnées sous le régime de la loi de la troisième faute – dite «  three strikes and you’re out  » (Schultz, 2000) [32] .

Ce constat a d’ailleurs conduit le Territoire du Nord en Australie à abroger en 2001 sa législation sur les peines plancher qui datait de 1996 et qui concernait de façon extrêmement disproportionnée les jeunes autochtones.

D’une façon générale, ces peines paraissent être appliquées de façon disproportionnée aux délinquants se situant au bas de l’échelle sociale. En France, on peut souligner le fait par exemple, que la loi n’autorise le juge à déroger aux peines minimales en cas de deuxième récidive qu’à condition que le délinquant offre des « garanties exceptionnelles d’insertion ou de réinsertion ». Cela suppose, une famille, un réseau, un emploi. Il sera bien plus difficile pour un sans-logis ou un chômeur de prouver cette capacité de réinsertion.

4.3 – Une volonté de contrôle du pouvoir judiciaire

L’instauration du dispositif des peines plancher avait pour finalité de lutter contre la récidive en contournant une jurisprudence pénale jugée trop laxiste par la majorité de l’époque. Le texte visait donc à restreindre l’application du principe d’individualisation de la peine. Certes, le juge constitutionnel a validé le dispositif. Mais il ne l’a fait que dans la mesure où le dispositif laissait malgré tout une marge de manœuvre au juge judiciaire.

L’individualisation de la peine n’a pas pour objet de favoriser per se la liberté du juge. Elle ne se confond pas avec l’arbitraire. Il s’agit d’un principe fondamental qui découle du principe de nécessité des peines posé par l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 [33] . Le Conseil constitutionnel lui a donné une valeur constitutionnelle [34] . C’est sur le fondement de ce principe qu’il a jugé conforme à la Constitution le dispositif des peines plancher instauré par la loi du 10 août 2007. Il a ainsi considéré que le principe d’individualisation de la peine était respecté dès l’instant où le juge judiciaire, même par une décision spécialement motivée, peut user de son pouvoir d’appréciation pour moduler la peine compte tenu des circonstances de fait ou de la personnalité du délinquant et ainsi prononcer une peine inférieure au minimum prévu par la loi.

Les différentes évaluations du dispositif font apparaître que les juges du siège ont largement utilisé la possibilité qui leur était offerte par la loi de 2007 de limiter les effets des peines plancher. Mais la politique menée par les Gardes des sceaux de la précédente législature via les parquets a au contraire incité au développement du recours aux peines plancher. Une circulaire du 13 août 2007 a demandé aux procureurs de la République « de relever de façon systématique l’état de récidive légale ». Il leur a été également demandé par une circulaire du 1er novembre 2009 de faire systématiquement appel à l’encontre des jugements qui écarteraient l’application des peines plancher « par des motifs qui n’apparaîtraient pas très pertinents. » Ces instructions générales ont parfois été complétées par des injonctions d’un type nouveau. Le 26 août 2007, un vice-procureur du tribunal de grande instance de Nancy a été convoqué par les services du ministre de la justice pour avoir revendiqué à l’audience le droit d’appliquer ce texte avec discernement.

Plus qu’un simple « signe de défiance du monde politique envers les juges » (Robert Badinter), cette loi illustre la volonté du gouvernement de l’époque d’exercer un contrôle sur les juges.

Dans une note datée du 24 septembre 2008, la Direction des Affaires Criminelles et des Grâces rappelle en effet aux parquets la nécessité « de renseigner de façon complète et rigoureuse » les fiches d’audience, afin de faciliter la décision d’appel des procureurs et procureurs généraux. Les données ainsi collectées sont ensuite rassemblées au niveau national et ont été utilisées pour établir un contrôle inédit du contenu des décisions pénales. Un rappel sur les statistiques a été adressé par circulaire du 1er octobre 2010. La Garde des Sceaux de l’époque a ainsi inauguré un système généralisé de surveillance de l’activité des juges. Ce recensement sans précédent lui a permis d’identifier « les mauvais élèves » et de convoquer les Procureurs Généraux concernés – au mépris, une nouvelle fois, de la séparation des pouvoirs – pour un ferme « rappel à la loi ».

On a donc fait du dispositif statistique qui aurait dû être un moyen objectif d’évaluation de la loi, un moyen de contrôle de la justice pénale.

*

On peut dire en conclusion que les lois sur les peines plancher ont constitué pour le gouvernement de l’époque une « ligne Maginot pénale » [35] , comme cette ligne de fortification qu’on pensait inviolable mais qui s’est avérée totalement inutile. Le risque est que ce type de lois n’apporte aucun avantage en termes de protection de la société mais que les atteintes aux libertés et les effets pervers produits soient, eux, bien réels.

On a tenté de montrer à quel point les chiffres disponibles comme les études menées à l’étranger et en France n’établissaient aucunement les avantages des peines minimales obligatoires. Au contraire, il était possible de documenter de façon précise ses effets pervers.

Mais pour reprendre les mots de conclusion d’une étude canadienne, l’incertitude pesant sur l’effet dissuasif des peines plancher et leurs effets pervers établis sont tels que c’est à leurs partisans qu’il incombe de prouver que leurs avantages préventifs éventuels justifient leur coûts économiques et humains ainsi que leur empiètement sur le pouvoir judiciaire dans la détermination des peines [36] .

5 – Pour en sortir

5.1 – Le retournement des États-Unis ?

On a choisi ici de s’arrêter sur la situation des Etats-Unis dont d’aucuns ont fait depuis plusieurs années un véritable emblème d’une lutte réussie contre la criminalité, notamment par l’usage des peines minimales obligatoires. Or, un consensus semble se dessiner pour une évolution majeure en la matière.

Un débat a très récemment agité le Sénat américain sur les peines minimales et la législation anti-drogue. Un projet de loi – dit Smart Sentencing Act [37] – introduit par un sénateur démocrate (Richard Durbin) et un sénateur républicain (Mike Lee), en juillet 2013, a été approuvé par la Commission juridique du Sénat à une majorité des deux tiers, mêlant démocrates et républicains. Cette loi diviserait par deux les peines minimales obligatoires pour certaines infractions relatives au trafic de drogue et prévoit des « soupapes de sécurité » pour permettre à certains délinquants d’échapper à ces peines. En mars 2013, les sénateurs Rand Paul (républicain) et Pat Leahy (démocrate) allaient plus loin et proposaient dans leur Justice Safety Valve Act de rendre l’application des peines minimales optionnelle pour les juges dans l’intérêt de la justice [38] .

Il est frappant de constater que cette évolution fait l’objet d’une alliance inattendue entre démocrates et républicains. Rand Paul est d’ailleurs non seulement un Sénateur républicain mais il appartient au Tea Party, comme Mike Lee. Le Président Obama s’est engagé dans le débat en commuant la peine de 6 condamnés pour des délits de trafic de drogue en des peines plus courtes. L’attorney general, Eric Holder, a annoncé que le Département de la Justice ne poursuivrait plus sur le fondement des peines plancher les cas impliquant des défendeurs non violents ou concernés par des affaires de faible ampleur [39] .

Si un tel consensus se dessine, c’est que les démocrates, pour l’essentiel, estiment que le système des peines minimales obligatoires s’est révélé injuste et inefficace dans la lutte contre le trafic de drogue. Il est important à cet égard de rappeler que le système américain, caractérisé par une répression rigoureuse et un taux important d’incarcération, continue de connaître un niveau de criminalité et de délinquance très supérieur à la moyenne européenne et que le taux d’incarcération aux Etas-Unis a progressé de 700% entre 1972 et 2011 ; il a plus que doublé sur les 20 dernières années (le taux d’incarcération y est plus de 7 fois supérieur à celui de la France). Les républicains, quant à eux, considèrent que le système est trop coûteux par rapport aux bénéfices constatés.

Ce constat ne se limite pas aux infractions à la législation sur les stupéfiants. Alors que deux projets de loi sont en discussion sur cette question, le Vera Institute a très récemment publié un bilan de l’application des peines minimales obligatoires. Il montre que depuis 2009 au moins 29 Etats ont fait marche arrière dans ce domaine avec 32 lois adoptées en cinq ans [40] . Une étude du Pew Charitable Trust publiée en décembre 2013 montre que sur les cinq dernières années, la majorité des Etats des Etats-Unis ont diminué à la fois leur taux de criminalité et leur taux d’emprisonnement ; il est donc faux de faire des Etats-Unis un modèle démontrant l’efficacité d’un système d’enfermement s’agissant de la lutte contre la criminalité [41] .

Il est donc probable qu’en supprimant les peines plancher non seulement la France retrouve la tradition qui était la sienne mais, de façon surprenante, emboîte le pas aux Etats-Unis et à d’autres Etats anglo-saxons.

5.2 – Les pièges à éviter

Peines plancher et opinion

Les promoteurs des peines plancher insistent sur le fait que l’opinion publique française serait massivement en faveur de telles peines. Les sondages produits constitueraient un argument massue en faveur du maintien du dispositif.

Or, là encore les études menées à l’étranger, comme la simple étude de la méthodologie utilisée pour ce type de sondage, démontent cet argument.

En réalité, l’opinion a une faible connaissance des infractions auxquelles correspondent une peine obligatoire minimale ou de l’ampleur des minima imposés par la loi. Par exemple, en 1998, on a demandé à des citoyens participant à l’enquête britannique sur la criminalité (British Crime Survey) s’ils étaient au courant de la durée minimale d’emprisonnement de trois ans pour les personnes coupables de vol avec effraction. Même si cette peine obligatoire avait été l’objet d’une attention majeure de la part des médias, moins d’un quart des réponses fournies étaient affirmatives. Cette constatation est conforme à une étude antérieure effectuée au Canada (Roberts, 1988, 2003).

Comme le fait remarquer Julian V. Roberts, dans une étude canadienne [42] , on observe un écart très net entre le portrait de l’opinion publique qui se dégage des enquêtes standard et d’autres méthodes de recherche dans lesquelles les participants ne se contentent pas de répondre à une simple question fermée (« oui/non » ou « favorable/plutôt favorable »). Lorsque des questions simples sont posées, elles ont tendance à réveiller une attitude punitive puisque les répondants sont portés à penser aux pires scénarios.

Des recherches ont été faites plus particulièrement sur l’opinion et les lois relatives aux peines minimales obligatoires appliquées après trois fautes (three strikes). En Ohio, lorsqu’on a demandé aux participants à un sondage s’ils étaient favorables à l’application d’une telle loi dans leur Etat, 88% ont répondu oui. Puis, un série de cas concrets d’application de cette législation leur était soumise pour lesquels ils devaient choisir une peine appropriée. L’appui à la législation sur les peines minimales a alors diminué de façon très significative. Lorsqu’elles devaient prendre en compte les situations individuelles, seules 17% des personnes constituant l’échantillon ont décidé d’appliquer la peine minimale (Applegate, Cullen, Turner et Sundt, 1996).

Même aux Etats-Unis, où l’appui aux peines minimales obligatoires est ancien et marqué, on observe un déclin de cette faveur de l’opinion, ce qui explique que beaucoup d’Etats fédérés, et désormais l’Etat fédéral, ont abrogé les dispositifs les plus punitifs, comme on l’a vu. En 1995, par exemple, plus de la moitié des gens interrogés aux États-Unis estimaient que les peines obligatoires étaient une bonne chose (Roberts, 2003). En 2001, ce pourcentage avait diminué pour n’atteindre qu’un peu plus du tiers des répondants (Peter D. Hart Research Associates, 2002, Roberts, 2003). Plus de la moitié des personnes ayant participé au sondage était favorable à l’élimination des peines obligatoires imposées aux personnes condamnées pour la troisième fois. Une autre enquête a été menée dans l’État du New Jersey. Lorsqu’on leur a demandé si l’approche la plus efficace contre les condamnés non violents était la prison obligatoire ou un traitement obligatoire pour la toxicomanie, trois personnes sur quatre ont choisi la deuxième option. Les trois quarts étaient favorables au fait de permettre aux juges de passer outre aux peines obligatoires « si une autre peine était plus appropriée » (Eagleton Institute of Politics Center for Public Interest Polling, 2004).

Cette tendance est confirmée par les sondages les plus récents. 60% des Américains s’opposent désormais aux peines minimales pour des infractions non violentes comme la détention de drogue. 84% considèrent « qu’une partie de l’argent que nous dépensons pour enfermer les détenus non-violents à faible risque, devrait être transférée au renforcement des programmes, comme la probation et de la libération conditionnelle ». 59% sont très favorables au fait de moins emprisonner « délinquants non violents à faible risque » et de réinvestir l’argent dans des solutions alternatives à l’incarcération [43] .

En France, 77% des Français pensent que la prison ne dissuade pas les délinquants tandis que deux Français sur trois (64%) considèrent les aménagements de peine comme un levier d’action efficace pour éviter la récidive [44] .

Les sondages distillés dans le contexte du débat sur la réforme pénale laissent croire que les Français appuient massivement les peines plancher. En réalité, le véritable degré d’appui envers ces peines ne peut être déterminé qu’avec davantage d’informations objectives et des exemples précis.

Sortir de la logique des peines plancher

Le dispositif des peines plancher sera très probablement abrogé prochainement. Mais cela sera-t-il suffisant pour sortir de sa logique ?

Les écueils sont nombreux. Le gouvernement a réussi aujourd’hui à éviter le premier d’entre eux. Un projet de loi visant à prévenir la récidive ne peut se concevoir sans une étude d’impact objective et rigoureuse. Au moment de l’élaboration de la loi du 10 août 2007, l’étude d’impact n’était pas une obligation pour le Gouvernement. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Mais l’obligation pour le pouvoir exécutif de préparer une étude d’impact avant tout projet de loi n’est pas suffisante. Encore faut-il que cette étude permette de faire un bilan sérieux de l’état actuel de la législation, des conditions de son application et des impacts de cette législation. Changer de paradigme est une chose. Encore faut-il connaître la raison de ce changement. L’étude d’impact du projet de loi relatif à la prévention de la récidive et à l’individualisation des peines procède à une analyse claire du sujet. Publiée, elle est, en outre, accessible à tout citoyen [45] .

Le deuxième écueil est inhérent à l’élaboration d’un texte. L’objet principal de ce nouveau texte est d’instaurer une peine nouvelle : la contrainte pénale [46] . Cette innovation juridique a été beaucoup critiquée. Ses détracteurs lui reprochent d’être trop générale. D’autres affirment que ce dispositif n’est en réalité pas nouveau et qu’il recouvre toutes les possibilités d’aménagement de peines qui existent déjà dans le code pénal. Il faudra donc que le texte soit suffisamment clair pour être compris par tous. Ainsi que le souligne Jean-Paul Jean, «  c’est seulement dans un cadre juridique clair que les praticiens pourront faire du sur-mesure et concilier l’efficacité de la lutte contre la récidive avec le respect du principe fondamental de l’individualisation de la peine.  »

Un troisième écueil, majeur, consisterait à se doter d’un dispositif de lutte contre la récidive destiné, paradoxalement, à donner des gages aux partisans des peines plancher pour montrer à tout prix que la gauche n’est ni laxiste ni angélique. La notion de récidive légale continue de séduire et on a pu proposer, à gauche, une récidive délictuelle dite « générale », qui conduirait à rapprocher des faits de nature entièrement distincte, par exemple : un outrage, puis un vol ou l’achat et la revente de cannabis. Dans ce dernier cas, la peine encourue serait alors de 20 années d’emprisonnement ! Non seulement, une telle disposition aurait des effets disproportionnés, mais elle s’inscrirait complètement à contre-courant des constats scientifiques et professionnels sur le caractère non-opérationnel de la notion de récidive générale. Elle aurait également un effet pervers en ce qu’elle « écraserait » l’échelle des peines, qui a pour fonction première de maintenir un écart significatif entre les faits les plus graves et les faits les moins graves.

Un dernier écueil a trait à l’évaluation du dispositif. Il paraît indispensable de se doter des outils d’évaluation nécessaires pour que cette réforme puisse faire l’objet d’un suivi. Des bilans des actions conduites par les parquets devront être menés. L’impact sur la récidive devra être mesuré.

5.3 – Quelques pistes

La présente note n’a pas pour objet de présenter un panel complet de propositions relatives à la lutte contre la récidive (qui devrait faire l’objet d’une autre analyse approfondie de Terra Nova). En revanche, il est apparu important d’évoquer quelques pistes destinées, dans le contexte de la suppression des peines plancher, à pallier l’insuffisance des données disponibles, pointée par la présente note. Des pistes sont également formulées pour améliorer les conditions d’individualisation de la peine et tenter de diminuer les disparités dans le prononcé des peines.

Mieux comprendre, mieux évaluer

Au-delà des propositions formulées par la conférence de consensus, qui ont servi de base au dispositif que souhaite mettre en place le Gouvernement, il convient d’évoquer quelques pistes. Il paraît aujourd’hui indispensable de prévoir la création d’un organisme indépendant chargé du suivi des phénomènes de récidive . Un tel organisme a été instauré par exemple au Pays-Bas afin de comprendre le phénomène de la récidive et de tenter de le quantifier. Parmi les douze recommandations de la conférence de consensus figurait le regroupement des différentes unités statistiques existant au sein du Ministère de la Justice ainsi que des divers observatoires qui ont été créés pour suppléer au manque de cohérence statistique : l’observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONRDP), ainsi que l’Observatoire de la récidive prévu par la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, et qui n’a jamais été mis en place [47] .

Parallèlement, il serait souhaitable de lancer un appel d’offre pour une série d’enquêtes de terrain sur des panels de délinquants récidivistes, en fonction de leur prise en charge.

Les statistiques traduisant l’activité des juridictions pénales devrait être mieux exploitées. Il apparaît nécessaire de prévoir des mécanismes permettant de demander aux parquets généraux un bilan des actions poursuivies en matière de récidive .

Surtout, les résultats issus de ces études statistiques et de terrain devraient faire l’objet d’une restitution dans les juridictions. C’est à la condition que les magistrats soient étroitement associés aux réflexions menées qu’il est possible d’espérer une modification dans le prononcé des peines, pour un meilleur traitement de la récidive et une diminution de la disparité dans le prononcé des peines.

Mieux déterminer la juste peine

La pratique canadienne des rapports présentenciels devrait être explorée. Le rapport présentenciel est un rapport préparé par un agent de probation pour aider le juge à décider quelle peine imposer. L’agent de probation prépare un rapport lorsque le tribunal le lui demande « afin d’aider le tribunal à infliger une peine (…) ». Le tribunal ne peut demander un rapport présentenciel qu’une fois que le délinquant a été déclaré coupable ou qu’il a déposé un plaidoyer de culpabilité. Ce rapport contient des renseignements généraux pour permettre une individualisation ab initio .

Enfin, on doit envisager, pour donner de la solidité au dispositif, l’organisation d’une formation initiale et continue des magistrats au sentencing – les enjeux du prononcé de la peine – avec une mise à jour des travaux scientifiques et des techniques d’intervision [48] , pour apprécier au mieux la détermination de la peine pour les prévenus .

  1. Andrea Forseti et Anna Paul sont les pseudonymes de magistrats.

  2. L’intervision est un dispositif particulier de rencontres entre pairs afin qu’ils échangent leurs expériences.

  3. Cf. notamment la création du juge de l’application des peines dans le code de procédure pénale en 1958.

  4. Les quatre lois du 22 juillet 1992 ont été adoptées au Sénat par 300 voix sur 317 suffrages exprimés pour 318 votants et à l’Assemblée par 261 voix exprimées sur 287 votants.

  5. Le garde des Sceaux a notamment déclaré : « Je n’ai pas du tout l’intention de céder […] Dans un Etat démocratique, il faut laisser au juge indépendant la possibilité de tenir compte de la personnalité du délinquant et du contexte dans lequel le délit a été commis. » – In Libération – « Récidivistes : 150 députés pour des peines plancher » – 30 janvier 2004.

  6. Proposition de loi tendant à instaurer des peines minimales en matière de récidive présentée par MM. Christian Estrosi, Gérard Léonard et d’autres membres du groupe UMP, n° 1399, AN, XIIè législature.

  7. Le Monde – Le premier ministre renonce aux « peines plancher » chères à M. Sarkozy – 23.04.2004.

  8. Décision n° 2007–554 DC du 09 août 2007.

  9. Proposition de loi de M. Jean-Paul GARRAUD et plusieurs de ses collègues tendant à renforcer l’effectivité de la peine complémentaire d’interdiction du territoire français et visant à réprimer les délinquants réitérants, n° 4168, déposée le 17 janvier 2012

  10. L’article 8 de la loi organique n° 2009–403 du 15 avril 2009 venu compléter l’article 39 de la Constitution, issu de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, oblige désormais le Gouvernement à accompagner tout projet de loi d’une étude d’impact expliquant notamment pourquoi l’introduction d’une nouvelle législation est nécessaire et ce que l’on peut en attendre. Cette obligation n’intervient qu’à compter des projets déposés à partir du 1er septembre 2009.

  11. Conseil d’État – Rapport d’activité 2006 – Sécurité juridique et complexité du droit

  12. Entretemps, la loi organique n° 2009–403 du 15 avril 2009 est venue compléter l’article 39 de la Constitution, issu de la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 et oblige le Gouvernement à accompagner tout projet de loi d’une étude d’impact expliquant notamment pourquoi l’introduction d’une nouvelle législation est nécessaire et ce que l’on peut en attendre

  13. Service des études juridiques du Sénat – Les peines minimales obligatoires – LC 165, septembre 2006 http://www.senat.fr/lc/lc165/lc165.html .

  14. Rapport de la Commission d’analyse et de suivi de la récidive – p. 37

  15. Nouvel Observateur – « Récidive : la Commission d’analyse et de suivi « pas consultée » » – 2 juin 2007

  16. On peut citer le master justice et sciences sociales de l’université Paris I dirigé par le professeur Cadiet

  17. La Mission de recherche Droit et Justice a été créée par un arrêté du 11 février 1994, à l’initiative conjointe du Ministère de la justice et du CNRS. La convention instituant le GIP lui fixe pour objectif général la constitution d’un potentiel de recherche mobilisable sur l’ensemble des questions intéressant la justice et le droit, quel que soit le champ disciplinaire concerné.

  18. Présentation site ministère de la Justice datée du 26 juillet 2007 – http://www.justice.gouv.fr/publications-10047/rapports-thematiques-10049/commission-danalyse-et-de-suivi-de-la-recidive-12848.html

  19. Infostat Justice est une parution diffusée par la sous-direction de la statistique du ministère de la Justice. Cette publication a pour vocation de vulgariser les données issues des études statistiques conduites sur le système et les politiques judiciaires et plus largement sur l’ensemble des domaines liés à la Justice

  20. Jean-Paul Jean est également président du groupe des experts évaluation de la Commission européenne pour l’efficacité de la justice du Conseil de l’Europe.

  21. Le Monde – Rachida Dati : « La marge d’appréciation des juges sera préservée » – 1er juin 2007

  22. Libération – Une peine automatique pour les récidivistes – 12 décembre 2003

  23. Cf. Jean Pradel – « Enfin des lignes directrices pour sanctionner les délinquants récidivistes » – Recueil Dalloz 2007, p. 2247 et Hugues Moutouh – « Des peines plancher pour prendre le droit pénal au sérieux » – Recueil Dalloz 2006, p. 2940.

  24. T. Gabor et N. Crutcher – les effets des peines minimales obligatoires sur la criminalité, la disparité des peines et les dépenses du système judiciaire – Division de la recherche et de la statistique – Ministère de la justice du Canada

  25. La crainte du châtiment : la dissuasion – Commission de réforme du droit du Canada – 1976

  26. Rapport d’information de la commission des lois en conclusion des travaux d’une mission d’information sur les moyens de lutte contre la surpopulation carcérale – 23 janvier 2013

  27. Rapport de commission d’enquête n° 449 (1999–2000) de MM. Jean-Jacques HYEST et Guy-Pierre CABANEL, fait au nom de la commission d’enquête, déposé le 29 juin 2000 – Prisons : une humiliation pour la République

  28. Ces statistiques ont été initiées par Pierre-Victor Tournier – Observatoire de la privation de liberté et des sanctions et mesures appliquées dans la communauté (OPALE)

  29. http://www.senat.fr/rap/a13–162–12/a13–162–121.html#toc5

  30. Cour des comptes – Rapport public thématique – Le service public pénitentiaire : « Prévenir la récidive, gérer la vie carcérale » – Juillet 2010

  31. Site chiffrages-déchiffrages- http://www.chiffrages-dechiffrages2012.fr/propositions/sarkozy-creer-30–000-places-de-prison-d-ici-2017

  32. In T. Gabor et N. Crutcher – opus cité

  33. L’article 8 de la DDH énonce que, s’agissant des peines, « la loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires ».

  34. Décision no 2005–520 du 22 juillet 2005

  35. Pour reprendre – et détourner – une expression de Jean Pradel, partisan des peines plancher. In Geneviève Giudicelli-delage – Droit pénal et dangerosité – Droit pénal de l’ennemi – RSC 2010 – p.69

  36. Gabor et Cutcher, opus cité

  37. La traduction est intéressante : les sénateurs proposent une « loi sur un choix des peines intelligent ».

  38. New York Post – Ending unjust mandatory minimum sentences – 5 février 2004.

  39. National public radio – How long is tool long? Congress revisits mandatory sentences – 9 janvier 2014.

  40. Vera Institute of Justice – Playbook for Change? States Reconsider Mandatory Sentences Février 20014 http://www.vera.org/sites/default/files/resources/downloads/mandatory-sentences-policy-report-summary-v3.pdf

  41. http://www.pewstates.org/research/data-visualizations/states-cut-both-crime-and-imprisonment-85899528171

  42. Julian V. Roberts – Peines d’emprisonnement obligatoires dans les pays de common law : Quelques modèles représentatifs – Division de la recherche et de la statistique – Ministère de la Justice du Canada – 2005

  43. Pew Center on the States, Mars 2012 http://www.pewstates.org/uploadedFiles/PCS_Assets/2012/PEW_NationalSurveyResearchPaper_FINAL.pdf

  44. Infostat n°122 – Les Français et la prison – juin 2013

  45. http://www.assemblee-nationale.fr/14/projets/pl1413-ei.asp

  46. Les personnes condamnées pour un délit puni d’une peine n’excédant pas cinq ans d’emprisonnement pourront se voir appliquer cette peine. Elles seront soumises, pour une période de six mois à cinq ans, à une série d’obligations et de contrôles, fixés par un juge d’application des peines, après évaluation de la situation par un conseiller d’insertion et de probation.

  47. La garde des Sceaux Christiane Taubira a annoncé sa création prochaine.

  48. L’intervision est un dispositif particulier de rencontres entre pairs afin qu’ils échangent leurs expériences. Des expériences prionnières ont été menées à la Cour d’appel de Caen et aux TGI de Roanne et de Créteil. Cf. http://www.ca-caen.justice.fr/index.php?rubrique=10476&ssrubrique=10485&article=20556

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