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Note

Combien dépenser pour la santé ? Une perspective démocratique

La crise sanitaire a remis en avant le débat sur l’effort national consacré à la santé. Combien sommes-nous prêts à dépenser pour notre santé ? La limite n’est pas facile à définir. Ne faut-il pas défendre le vieux principe : « à chacun selon ses besoins » ? Mais qu’est-ce qu’un besoin de santé ? Pour en débattre de manière démocratique, de nouveaux dispositifs participatifs et délibératifs sont à inventer. L’analyse de Mélanie Heard, coordinatrice du pôle santé de Terra Nova.
Publié le 

INTRODUCTION

Une procédure de référendum d’initiative partagée (RIP) en faveur d’une « refonte humaine, financière et démocratique » de l’offre de santé et de l’hôpital public vient d’être rejetée par le Conseil constitutionnel. La proposition de loi concernée avait d’abord recueilli au printemps le soutien de 185 parlementaires, avant d’être soumise cet été au Conseil constitutionnel, qui devait la valider pour qu’elle puisse être proposée au soutien des citoyens. Dans une décision du 6 août 2021 [1] , le Conseil constitutionnel a finalement invalidé le texte. Les questions posées par cette démarche restent cependant d’actualité.

Émanation des collectifs de défense de l’hôpital public Inter-Hôpitaux et Inter-Urgences [2] , l’association « Notre hôpital, c’est vous » avait pour but, avec cette proposition de loi référendaire [3] , de mettre au cœur de la campagne présidentielle les enjeux du service public hospitalier. La mobilisation avait sa source dans la volonté de tirer les leçons de la crise du Covid et de dénoncer l’insuffisance des réponses du « Ségur de la santé » à l’été 2020. Ainsi pour Matthieu Lafaurie, infectiologue et porte-parole de l’Association « Notre hôpital c’est vous », « Il fallait se faire entendre avant que tout le monde ne passe à autre chose. L’hôpital est en souffrance. On ne peut repartir comme si de rien n’était. A l’issue du Ségur de la Santé , le gouvernement a fait un effort sur les salaires. En revanche, contrairement à ce que Macron avait promis, rien n’a changé sur la gouvernance ou le mode de financement de l’hôpital. »

La question qu’entendait poser ce projet de référendum était, au-delà même de la crise de l’hôpital public, celle de l’allocation des ressources publiques en matière de santé. Quel est le juste niveau de dépenses en la matière ? En situation de ressources contraintes, quels critères de jugement mettant en regard les coûts et les bénéfices guident les décisions publiques lorsqu’il faut rembourser un médicament innovant, construire un hôpital, organiser un dépistage massif – ou encore confiner un pays ? La crise du Covid a remis en avant un débat récurrent en France, sous les auspices du principe énoncé par le Président de la République lors de son allocution du 12 mars 2020 : «  La santé gratuite sans condition de revenu, de parcours ou de profession, notre Etat-providence ne sont pas des coûts ou des charges mais des biens précieux, des atouts indispensables quand le destin frappe  ».

Une crise de l’hôpital public ? Le diagnostic posé par le projet de RIP Dans ce système de santé français dépeint comme « unique au monde », l’hôpital public est un « bien commun ancré au cœur du pacte républicain ». Or, fait valoir l’exposé des motifs de la proposition, sa « paupérisation » serait au centre des préoccupations des Français qui se sont exprimés lors du Grand débat national. La proposition de loi référendaire entendait apporter une réponse à une « triple crise » que le contexte sanitaire a mise en lumière. Une « crise humaine » d’abord : les « dimensions techniques du soin », que valorisent « les modalités actuelles de calcul de la performance économique », tendent à prendre le pas sur ce que « prendre soin de l’autre » veut dire, au prix du sens et de l’attractivité des métiers. Une « crise du financement » ensuite, qui tient à la dette à laquelle les établissements seraient condamnés du fait d’un sous-dimensionnement systématique de l’ONDAM, entravant leurs capacités d’investissement. Une « crise démocratique » enfin : le texte met en avant la nécessité de repenser l’évaluation des besoins de santé à l’échelle des territoires, et propose donc « une définition loyale, partagée, concertée et territoriale des besoins » pour que le fonctionnement des hôpitaux soit « prioritairement tourné vers la réponse aux besoins en santé ». Sur ces éléments de diagnostic, une note récente de Pierre-Louis Bras pour Terra Nova a apporté des éléments d’éclairage auxquels nous renvoyons [4] .

1. Un RIP

L’initiative « Notre hôpital c’est vous » était le troisième projet de référendum d’initiative partagée porté depuis la création de cette procédure référendaire, créée par la révision constitutionnelle de 2008, régie par les troisième à sixième alinéas de l’article 11 de la Constitution, et précisée par la loi organique n° 2013–1114 du 6 décembre 2013 portant application de l’article 11 de la Constitution. Troisième projet, et troisième échec.

«  Donner directement la parole aux citoyens  » : c’est en ces termes que le projet motivait son recours au format du RIP. Si l’initiative citoyenne en matière de référendum est apparue comme une revendication clé des « gilets jaunes », l’idée n’est toutefois pas nouvelle [5] . Récupérée par le Front national qui l’a inscrite à son programme en 1988, elle a d’abord été portée par des représentants de la gauche autogestionnaire dans les années 1970, par le candidat écologiste Brice Lalonde en 1981, par l’ancien président de la République Valéry Giscard d’Estaing en 1984, puis par Michel Rocard en 1995, et bien d’autres encore… Mais le référendum d’initiative partagée (RIP) créé par la révision constitutionnelle de 2008 n’a pas abouti à la consécration de cette aspiration : les conditions de réalisation du RIP sont en effet tellement difficiles à réunir qu’il n’a pu donner lieu à aucune concrétisation depuis.

Première condition de procédure : recueillir le soutien de 20 % des parlementaires, soit 185 députés ou sénateurs. Sur ce point, l’association « Notre hôpital c’est vous » a remporté son pari, le texte ayant été parrainé par 185 parlementaires. Rappelons le sort du RIP sur la défense du bien-être animal lancé en juillet 2020 qui n’avait recueilli que 149 parrainages parlementaires.

Deuxième condition : soumettre la proposition de loi référendaire à la validation du Conseil constitutionnel, qui en vérifie la conformité à la Constitution. C’est ici que le projet de RIP Hôpital a échoué cet été.

Enfin, troisième condition : recueillir le soutien de 10 % du corps électoral, soit 4,7 millions de Français, en moins de neuf mois. En mars 2020, le RIP organisé contre la privatisation du groupe Aéroports de Paris a échoué en recueillant seulement 1,1 million de citoyens sur la période retenue.

Le référendum d’initiative citoyenne a pourtant en sa faveur de forts arguments de légitimité démocratique. Le dispositif présente plusieurs vertus. La première est de donner corps à une démocratie directe reconnue en droit depuis 1789 (article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen), mais toujours limitée. Or cette expression directe répond au désir des citoyens de donner plus souvent leur avis, en ayant non seulement le choix des réponses mais aussi celui des questions. Il est vrai que, comme l’a souligné une note de Terra Nova en 2019, les risques associés à cette procédure doivent être pris en compte : affaiblissement des autorités démocratiquement élues, multiplication de consultations aux effets potentiellement incontrôlables et contradictoires, manque de délibération préparatoire au vote, forte exposition à toutes sortes de manœuvres démagogiques… [6] Reste que l’initiative citoyenne en matière législative présente une forte légitimité démocratique, en particulier parce qu’elle répond aussi au déclin progressif du prestige et de l’autorité du gouvernement représentatif, la seule élection des représentants paraissant de plus en plus insuffisante à satisfaire les attentes démocratiques.

Au-delà de sa forme de RIP, l’initiative « Notre hôpital c’est vous » entendait renforcer la promotion de la parole citoyenne sur la santé et renforcer les missions des instances représentatives de la « démocratie sanitaire » que sont la Conférence nationale de santé et les conseils territoriaux de santé [7] – autrement dit défendre, comme l’a souligné Dominique Méda récemment dans Le Monde , la « démocratie à tous les étages » de l’hôpital [8] . C’est précisément sur les missions nouvelles conférées à la Conférence nationale de santé que le texte a été sanctionné par le Conseil constitutionnel : il a considéré que l’article 7 de la proposition de loi, qui soumettait à un avis conforme de cette instance aujourd’hui consultative le décret fixant le périmètre des activités soumises à la tarification à l’activité (T2A), contrevenait au pouvoir réglementaire du Gouvernement.

2. Les besoins de santé et l’équité des chances

Au-delà du sort de l’hôpital public, l’objectif de cette initiative de RIP était de mettre la question des ressources allouées à la santé au centre de la campagne présidentielle pour 2022. Il semble d’ailleurs probable que, pour certains parlementaires ayant accordé leur parrainage au RIP, le soutien au détail des mesures préconisées comptait moins qu’un objectif politique général : faire en sorte qu’il soit question de la politique de santé, et singulièrement de son financement et de l’hôpital, dans la période pré-électorale.

La nécessité de repenser les conditions du débat démocratique sur les ressources allouées à la santé était déjà centrale dans le cadre du Ségur, avec la mise en chantier au Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie d’une réflexion sur les conditions de la discussion sur l’ONDAM au Parlement. L’article récent de Pierre-Louis Bras pour Terra Nova a montré combien, a fortiori à la lumière de la crise du Covid, l’adéquation entre les ressources allouées à la santé et les besoins auxquels elles répondent demandait à être intégralement repensée, alors que la discussion parlementaire sur l’ONDAM constitue «  un instrument de légitimation de la politique financière proposée par l’exécutif plutôt que l’espace de débat démocratique sur les besoins sociaux  » qu’elle est censée organiser [9] .

La proposition de loi référendaire entendait faire porter la réflexion sur l’adéquation entre les ressources et les « besoins de santé », dont la définition devait devenir à la fois plus fiable et plus démocratique grâce à l’intervention renforcée des instances de la démocratie sanitaire tant au niveau national (Conférence nationale de santé) qu’au niveau des territoires (conseils territoriaux de santé).

La crise du covid a pointé la difficulté de l’exercice, ne serait-ce qu’en posant la question de l’écart entre les besoins « de base » en conditions normales, et les besoins exceptionnels en situation de crise. Il est aussi devenu évident pour chacun que l’expression de « besoins » devait inclure à la fois des « besoins en lits » et des « besoins en ressources humaines ». Enfin, l’impact, sur ces besoins, des données de la science et des recommandations professionnelles de prise en charge, est également devenu évident, qu’il s’agisse par exemple des campagnes de dépistage et de vaccination ou de l’évolution des modalités de prise en charge des patients sous l’effet du progrès des connaissances cliniques.

Centrale de longue date déjà dans l’action publique de planification sanitaire, la notion de « besoins de santé » mérite qu’on s’y arrête. La plupart des définitions en santé publique retiennent l’idée qu’il y a « besoin » s’il y a un écart entre un état de santé constaté et un état de santé souhaité. La référence à un état de santé « souhaité » qui devrait être accessible à tous de façon équitable est incontournable pour parler de besoin. Mais cette référence normative est loin d’aller de soi. Que s’agit-il d’égaliser lorsqu’on veut répondre aux besoins de santé ?

Pour tenter de mieux qualifier cet état de santé « souhaité », on peut retenir ici avec Norman Daniels que l’équité d’accès à ce qu’il appelle un « fonctionnement normal » en santé constitue un bien premier et un élément fondamental de la justice sociale.

On notera d’abord qu’il ne semble pas y avoir de contribution substantielle de la philosophie classique à une théorie de l’équité des chances en santé ; la correction des inégalités liées à la maladie ou au handicap ne reçoit pas, en particulier, la même attention historiquement que celle des inégalités liées à l’éducation. Dans un texte important paru en 1981, Norman Daniels entend pallier l’absence de la santé au rang des « biens publics premiers » dans la Théorie de la justice de Rawls [10] . Ces biens premiers y sont définis comme «  ce que tout homme rationnel est supposé désirer  », comme les biens qui «  normalement, sont utiles, quel que soit notre projet de vie rationnel  ». Pour Rawls, ces biens premiers peuvent être soit « naturels », soit « sociaux ». La santé, de même que l’intelligence ou l’imagination, relèverait des biens « naturels » qui ne sont pas directement sous le contrôle de la théorie de la justice sociale. La question de la justice sociale concerne les biens premiers sociaux que sont d’abord les droits, les libertés et les possibilités offertes à l’individu, ensuite les revenus et la richesse, et, enfin, le respect de soi-même. Dans sa réflexion sur le contrat social, Rawls fait l’hypothèse simplificatrice que tous les agents contractuels fonctionnent normalement tout au long d’une durée de vie normale et ne souhaitent pas inclure dans la contractualisation fictive les dimensions sociales de leur état de santé. Les conditions du choix des termes équitables de coopération entre personnes égales élaboré par Rawls font abstraction de toute maladie, handicap ou mort prématurée avec les désavantages qui en résultent. Selon Norman Daniels, Rawls pensait que le problème de parvenir à des principes de justice était déjà assez difficile dans une telle hypothèse simplificatrice. Mais la conséquence est que Kenneth Arrow, dans sa recension de la Théorie de la Justice, ne manque pas de regretter que la justice comme équité nous laisse incapables de dire quelle personne est la plus désavantagée, de celle qui est riche mais malade ou de celle qui est pauvre mais en bonne santé [11] . En réponse à cette critique, Norman Daniels entend s’atteler à la tâche d’étendre la théorie de la justice sociale à la santé et aux soins de santé.

Pour ce faire, il propose une réflexion sur les besoins de santé : ils seront qualifiés en référence à un « fonctionnement normal » [12] . Celui-ci, prend soin de préciser Daniels, ne se confond pas avec la fameuse définition de l’OMS, qui assimile santé et bien-être : «  La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social, et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité  ». Pour Daniels, le « fonctionnement normal » ne convoque pas d’idée de bien-être mais fait appel à la notion de «  gamme normale d’opportunités  » : «  la gamme normale d’opportunités pour une société donnée est l’ensemble de plans de vie que les personnes raisonnables de cette société sont susceptibles d’envisager pour elles-mêmes  » et «  le fonctionnement normal est un paramètre important affectant la part de la gamme normale disponible pour un individu donné  ». C’est ce paramètre qu’affectent la distribution des soins de santé et la satisfaction des besoins de santé. La notion de « besoin de santé » devient donc partie intégrante de la théorie de la justice comme équité : puisque la théorie rawlsienne de la justice comme équité exige, comme d’autres approches importantes de la justice distributive, que l’on protège l’égalité des chances, alors il faut accorder une importance spéciale au fait de satisfaire les besoins de santé. En effet, l’altération significative du « fonctionnement normal » en santé réduit la gamme des opportunités effectives disponibles qui permettraient aux individus de construire leurs « plans de vie » ou leurs « conceptions du bien ». Pour Norman Daniels, «  quand les différences de talents et d’aptitudes sont le résultat d’une pathologie, nous avons le devoir de déployer des efforts, dans le cadre des ressources disponibles, afin de corriger les effets de la « loterie naturelle »  ». Et ceci, souligne-t-il, ne revient pas à vouloir gommer les inégalités « naturelles » entre les individus ; ce qu’il convient d’égaliser, ce sont des chances qui sont bel et bien socialement déterminées. Dès lors que «  la santé n’est pas purement « naturelle »  », la satisfaction des besoins de santé fait partie des moyens généraux nécessaires pour garantir l’égalité équitable des chances et notre capacité à tirer avantage de nos droits et libertés de base.

Toutefois, admet Normal Daniels, « le simple fait de savoir que nous avons une obligation de promouvoir le fonctionnement normal parce que nous devons protéger des parts équitables de la gamme d’opportunités ne nous dit pas comment répondre de manière juste aux besoins de santé dans les décisions d’allocation de ressources ». Le caractère restreint des ressources disponibles nous condamne à des problèmes de rationnement dans la satisfaction des besoins de santé : l’agrégation de bénéfices modestes pour le plus grand nombre vaut-elle davantage que des bénéfices plus grands pour quelques-uns ? C’est ici qu’il faut faire intervenir des méthodes plus concrètes d’évaluation des besoins de santé.

3. L’évaluation des besoins de santé

L’évaluation des « besoins de santé » constitue de longue date une référence des politiques d’organisation des soins ; c’est bien le souci d’une meilleure adéquation à ces besoins territoriaux qui guide la progressive régionalisation de l’allocation des ressources depuis plusieurs décennies [13] . La loi hospitalière de 1991 entendait indexer la planification sanitaire à une «  mesure des besoins de la population  » . De même, les conférences nationales et régionales de santé instaurées par les ordonnances de 1996 devaient « analyser […] l’évolution des besoins de santé […] de la population  ». La loi du 4 mars 2002 sur le droit des malades réaffirmait cette nécessité, dans des termes presque équivalents, en confiant l’analyse de l’évolution des besoins de santé à la Conférence nationale de santé ainsi qu’aux Conseils régionaux de santé. Plus récemment, la loi de modernisation du système de santé de 2016 place l’évaluation des besoins de santé à l’échelle des territoires au cœur des deux dispositifs clés de gestion de l’offre qu’elle instaure : le Service territorial de santé au public, et le Service public hospitalier. La même loi, qui créait les conseils territoriaux de santé, leur donnait déjà un rôle clé dans l’évaluation des besoins de santé du territoire et l’élaboration d’un «  diagnostic territorial partagé  » de l’adéquation entre l’offre et les besoins.

Pourtant, la méthodologie d’évaluation de ces besoins de santé à l’échelle territoriale est encore loin d’être un dossier réglé, en France comme dans les autres pays. D’après John Wright, dont les publications font référence en matière d’évaluation des besoins de santé, «  malgré l’approbation officielle, il n’y a pas de compréhension partagée de l’évaluation des besoins en matière de santé, et l’expression continue de signifier différentes choses pour différentes personnes  » [14] .

Comme l’a montré Jonathan Bradshaw en 1972 dans un article à portée plus générale sur la notion de besoin dans la conception des services publics, si la notion de service public ne peut se passer d’une qualification du « besoin social » auquel on entend répondre dans un souci d’équité, cette tâche est cependant singulièrement complexe parce qu’elle ne peut, par définition, se résumer à la quantification d’une demande entendue comme l’expression d’une propension à payer, et doit donc passer par une qualification de la norme par rapport à laquelle ce besoin est défini [15] . La taxonomie de Bradshaw distingue quatre définitions possibles des besoins : les besoins « normatifs », les besoins exprimés, les besoins ressentis et les besoins comparatifs.

En matière de santé, il est classique de mesurer les besoins exprimés et satisfaits, qui correspondent à la consommation de soins (données du remboursement, données d’hospitalisations, etc.) ; les besoins diagnostiqués par un professionnel de santé (admission en affection de longue durée, mortalité…) et enfin les besoins ressentis par la population qui sont le reflet de la santé telle qu’elle est perçue par les individus (enquête décennale santé de l’INSEE, enquête soins et protection sociale du CREDES…). Les besoins diagnostiqués et les besoins ressentis correspondent à la demande de soins. La problématique de la planification sanitaire à l’échelle d’un territoire consiste alors, pour maximiser les besoins réels satisfaits, à tenter de mieux faire correspondre les trois notions : offre, demande et besoin réel.

Relation entre l’offre, le besoin, et la demande ; Wright utilise ce schéma pour montrer que la zone d’adéquation « idéale » est la zone centrale [16]

Mais la tâche est complexe, tant sur le plan descriptif (disposer de données fiables et interprétables sur l’offre et la demande) que sur le plan normatif. Si l’on veut faire correspondre l’offre aux besoins réels, on ne peut en effet se passer d’un effort pour qualifier la part de besoins qui n’est pas exprimée sous forme de demande. Cela concerne au premier chef les besoins de prévention, mais également une part des besoins de soins que les patients ne demandent pas, soit parce qu’ils ne connaissent pas leurs besoins, soit parce que leur accès aux soins est entravé pour des raisons par exemple financières ou géographiques.

Si l’on veut définir des besoins « réels » au-delà de la demande exprimée, il est donc nécessaire d’adopter une forme de démarche normative sur l’état de santé souhaité ou ce que Daniels appelle un « fonctionnement normal » à état de santé donné. Un papier de la DREES de 2004, intitulé « Peut-on quantifier les besoins de santé ? », reprend ainsi à son compte la définition suivante : «  En santé publique, les « besoins de santé » peuvent être définis comme l’écart entre un état de santé constaté et un état de santé souhaité par la collectivité ou les pouvoirs publics  », et note aussitôt que «  la question la plus difficile, soulevée pour la quantification des besoins de santé, réside dans la référence à choisir comme norme d’état de santé souhaité  » [17] . Pour ce faire, la proposition de loi référendaire portée par « Notre hôpital, c’est vous » proposait dans son exposé des motifs que l’évaluation des besoins soit guidée par l’évolution des recommandations professionnelles de prise en charge. Mais cette perspective ouvre des débats : en matière par exemple de prothèses auditives, ou de dépistage des cancers, des débats récents ont émergé pointant que la définition, par les experts, d’un état de santé souhaité, faisait intervenir des valeurs ou des représentations que les patients concernés peuvent être amenés à contester. Citons le débat qui a émergé avec la généralisation du dépistage organisé du cancer du sein en 2004, objet depuis lors d’une controverse sur les enjeux du surdiagnotic et du sutraitement, certaines associations pointant que l’action publique tend ici à imposer aux femmes une certaine vision de la balance bénéfice/risque [18] . Ou encore les controverses qui ont entouré les recommandations de la HAS en matière de dépistage néonatal de la surdité (2007) et de prise en charge de la surdité chez l’enfant (2009), motivant les critiques de certaines associations de personnes sourdes qui y voyaient l’imposition d’une vision partiale et négative de la surdité et réclamaient, à rebours notamment des technologies d’implantations réparatrices promues par la HAS, davantage d’ouverture aux différentes représentations de la surdité et à la langue des signes [19] .

En pratique, dans l’analyse des besoins de santé, on utilise souvent essentiellement la méthode comparative pour pointer un écart entre état de fait et état souhaité : est qualifié de « besoin » pour un territoire donné son écart par rapport à la moyenne régionale, nationale, européenne ou OCDE, pour un problème donné. C’est cette moyenne qui constitue la norme de référence du besoin. Cet éclairage par les inégalités territoriales ne donne toutefois pas pleinement satisfaction, notamment parce qu’il n’y a pas de raison de penser que la moyenne ainsi prise pour norme constitue par elle-même un optimum d’état de santé. L’exemple classique est celui de la surmortalité liée à l’alcool en France : dans les territoires où elle se situe dans la moyenne nationale, faut-il considérer que la prévention de l’alcoolisme ne constitue pas un « besoin de santé » ? La pertinence de la péréquation entre régions a fait l’objet de nombreux approfondissements. Suite aux ordonnances d’avril 1996 qui prévoyaient une déclinaison régionale des ressources indexées aux besoins de santé en affichant un souci d’égalisation entre régions, le Haut Comité de la Santé Publique a montré dès 1998 les faiblesses d’un raisonnement qui résumerait les différences interrégionales d’état de santé à un enjeu d’allocation des ressources [20]  : leur compréhension requiert en effet, au-delà de la mesure des écarts d’état de santé observés pour différentes catégories de population à âge comparable, d’analyser en complément les écarts observés dans l’accès aux soins (qui relève essentiellement des caractéristiques de l’offre), des dimensions systémiques portant sur l’utilisation du système de soins (qui fait intervenir les comportements de demande) ainsi que leurs effets, c’est à dire les différences de volume de soins consommés et de dépenses [21] . La capacité du système de santé à assurer que les besoins se traduisent en demandes effectives, et à atténuer la façon dont les inégalités sociales affectent ce mécanisme, est une dimension clé de son efficacité pour améliorer l’état de santé des populations.

4. Un exemple classique : l’évaluation des besoins de santé des enfants et la régulation stratégique de l’offre

L’exemple de la santé des enfants et de la régulation de l’offre en pédiatrie peut servir d’illustration concrète des difficultés auxquelles se heurtent les tentatives de qualification de besoins en santé.

La santé des enfants est prise en charge à la fois par les pédiatres, les généralistes et les services de la Protection maternelle et infantile (PMI). Besoins de soins et besoins de prévention sont ici particulièrement entremêlés, avec une dimension fondamentale d’éducation à la santé, de vaccination et de dépistage, et deux problématiques marquées : celle des inégalités sociales et celle des inégalités territoriales.

Un rapport récent de l’IGAS remis en mai 2021 [22] a entrepris de qualifier ces besoins spécifiques et d’en inférer des recommandations stratégiques pour l’organisation de l’offre destinée aux enfants en pédiatrie et en médecine générale. Du constat qu’il existe un rapport de 1 à 24 entre départements quant à la densité de pédiatres libéraux, et que le délai d’attente moyen pour obtenir un rendez-vous de pédiatre est de 22 jours [23] , faut-il inférer que l’offre de prise en charge en pédiatrie doit être amplifiée dans les territoires où elle est faible ? Comment quantifier le « besoin » de pédiatres ?

La France est peu dotée en pédiatres en comparaison avec les pays de l’OCDE : la densité de pédiatres par rapport à la population est la 22 e sur 31 pays, avec une densité presque quatre fois inférieure à la Grèce (pays le plus dense en pédiatres). La comparaison reste défavorable même lorsqu’elle est ciblée sur les pays ayant un système de prise en charge des enfants comparable au nôtre, avec une prise en charge de premier recours assurée conjointement par des pédiatres et des médecins généralistes.

Dans 8 départements, la densité est inférieure à 1 pédiatre pour 100 000 habitants. A l’inverse, Paris est le département le plus doté en pédiatres (13,7 pédiatres pour 100 000 habitants), suivi de près par les Hauts-de-Seine (11,4). Selon une étude de la DREES de 2016, la disparité entre départements se double d’une disparité forte entre types de communes, avec un fort avantage pour les habitants des pôles urbains [24] , ce qui pose une question majeure d’accès aux soins pédiatriques pour certaines populations (en particulier en deuxième couronne des aires urbaines et dans le monde rural). De surcroît, note la mission IGAS, l’âge moyen des pédiatres libéraux laisse présager une aggravation de la situation : 44 % d’entre eux ont plus de 60 ans. La pédiatrie libérale connaît un recul démographique important. Cet enjeu est renforcé, selon l’IGAS, par la contraction des effectifs médicaux de la PMI et de la médecine scolaire, dont le rôle préventif est essentiel, en particulier auprès des moins favorisés.

En miroir, les médecins généralistes assurent plus de 85 % des consultations de ville des enfants de moins de 16 ans. Mais, souligne l’IGAS, «  leur formation à la médecine de l’enfant, même si elle a été récemment renforcée, reste hétérogène et insuffisante au regard de ce rôle prépondérant  ».

La supériorité du suivi en pédiatrie que suggère cette position implique-t-elle que l’offre de pédiatrie est donc insuffisante dans notre pays ? La mission IGAS complète son diagnostic de l’offre par un diagnostic de l’état de santé des enfants, tendant à suggérer des besoins non couverts. Ainsi, le taux de mortalité infantile en France est légèrement supérieur à la moyenne de l’OCDE (28e position de la France sur 44 pays en 2017) et il reste stable depuis 2005, alors qu’il a tendance à baisser dans les autres pays européens. Certes, des évolutions favorables sont constatées pour l’état de santé bucco-dentaire des enfants (en 2015, 68 % des enfants scolarisés en classe de CM2 sont indemnes de caries, +8 points par rapport à 2008) ainsi que pour l’obésité et le surpoids qui se stabilisent, voire régressent pour les plus jeunes. Mais la France reste plus touchée par le surpoids des enfants que la moyenne de l’OCDE : 32,4 % des enfants de 5 à 9 ans contre 31,4 % en moyenne dans l’OCDE (27e position). Par ailleurs, comme pour l’ensemble de la population, la santé des enfants et des adolescents est marquée par une hausse des maladies chroniques : le nombre d’enfants de moins de 15 ans ayant une affection de longue durée a progressé de 23 % depuis 2012, alors que la population de cette tranche d’âge a diminué de 1% sur cette période.

Enfin, l’IGAS dresse un tableau particulièrement préoccupant des inégalités sociales et territoriales. La mortalité infantile reste deux à trois fois plus élevée en Outre-mer. De même, un enfant d’ouvrier a six fois plus de probabilités d’être obèse qu’un enfant de cadre. Des inégalités sociales qui se retrouvent en termes de santé bucco-dentaire, de pratique sportive ou d’exposition aux écrans [25] .

La mission IGAS pointe aussi des besoins de soins auxquels la réponse paraît problématique, et déplore en particulier un recours injustifié aux urgences qui témoigne selon elle d’une inadéquation de l’offre. Le recours aux services d’urgences des enfants est important, en particulier pour les enfants de moins de deux ans (6 % des passages aux urgences, 2 % de la population) et augmente (+2 % par an en moyenne pour les 0–18 ans entre 2013 et 2018), alors que la population des 0–15 ans diminue sur la même période (-3 %). Selon l’IGAS, «  la difficulté à trouver une consultation non programmée en ville est invoquée par les parents comme par les professionnels comme élément d’explication.  ».

De ces différents éléments du diagnostic l’IGAS conclut que des «  évolutions sont souhaitables, pour répondre aux besoins de santé de l’ensemble des enfants, et notamment les plus vulnérables  ». C’est bien d’une appréciation des besoins que la mission entend se prévaloir pour procéder à une série de recommandations autour d’un nouveau schéma-cible d’organisation : le pédiatre y jouerait un rôle d’expertise et de recours, et le médecin généraliste, moyennant une formation enrichie, un rôle d’acteur de proximité du suivi médical des enfants ne présentant pas de pathologie chronique ni de facteur de vulnérabilité, pour le suivi préventif et les soins non programmés [26] .

Ce développement sur la pédiatrie a valeur d’exemple : quelles sont les informations qui permettent de qualifier un besoin de santé et d’en faire le fondement d’une réflexion stratégique de planification ou de régulation de l’offre de soins et de prévention ? L’IGAS mobilise des éléments de diagnostic factuels relatifs au volume de la demande de soins, à la nature des consommations et à l’état de santé des enfants. Plusieurs arguments comportent une dimension comparative, qu’il s’agisse de comparaisons entre régions ou entre pays de l’OCDE. Mais la référence à une norme, par rapport à laquelle le « besoin » qui est exploré pourrait être qualifié, est quant à elle plus complexe à caractériser ; elle est présente notamment lorsqu’il s’agit de qualifier une consommation de soins inappropriée aux urgences, mais s’agissant des caractéristiques du suivi en pédiatrie par rapport à celui qu’assurent les médecins généralistes, de la formation de ces derniers, ou encore de la qualification du rôle qui doit leur revenir en lien avec l’apport propre des pédiatres, les éléments normatifs sont sous-jacents mais nettement moins explicites. Serait-il légitime de vouloir réduire les inégalités entre départements dans l’accès à un pédiatre pour généraliser le suivi en spécialité pour tous les enfants en premier recours ? La mission écarte cette option, considérant qu’elle «  n’est ni réaliste démographiquement ni souhaitable, compte-tenu du rôle actuellement joué par les médecins généralistes et des compétences spécialisées des pédiatres  ». Cette assertion rapide n’est pas confrontée aux approches du besoin de santé qui s’intéresseraient à la définition d’une norme de qualité de prise en charge, ou encore aux besoins ressentis par les parents. Le fait d’être suivi par un pédiatre ou par un médecin généraliste engendre-t-il des différences dans la qualité de la prise en charge ? Sur quelle qualité « optimale » de prise en charge peut-on s’accorder, avec quels critères ? Que souhaitent les parents, sur quels critères choisissent-ils le mode de suivi de leur enfant, comment appréhendent-ils les différences éventuelles en termes de reste à charge, de simplicité d’accès, de qualité des soins ? Comment prendre en compte l’hétérogénéité des perceptions et des préférences des parents face à une même situation de santé ? La démarche de qualification du besoin que sous-tendraient de telles interrogations supposerait un appareil méthodologique complexe qui n’est pas disponible.

En outre, le « besoin de pédiatre » serait-il défini qu’on n’aurait pas de cadre précis pour en inférer le juste niveau de dépenses à lui allouer. Il faudrait encore, pour passer aux dépenses, s’accorder sur la rémunération légitime de la consultation, et sur ce que l’on peut attendre du pédiatre en termes de productivité. Et par ailleurs il resterait aussi à s’assurer de l’expression de ce besoin sous la forme d’une demande effective de soins pédiatriques.

5. Renforcer la qualité démocratique de l’évaluation des besoins de santé pour renforcer la qualité démocratique des choix d’allocation

En dépit de l’importance qui lui est d’ores et déjà conférée au fil des différents textes régissant le pilotage stratégique de la santé, l’évaluation des besoins auxquels la dépense de santé vient répondre est donc un enjeu méthodologique encore partiellement indéterminé. Mais c’est simultanément un enjeu démocratique majeur que d’accroître l’intelligibilité des diagnostics qui déterminent les choix d’allocation. La crise COVID a renforcé l’acuité de ce constat ; comme l’a montré Pierre-Louis Bras, l’une des leçons à tirer de la crise concerne la nécessité de renforcer la qualité politique et démocratique des choix d’allocation, en particulier dans le cadre du débat sur l’ONDAM, dès lors que «  la crise a révélé que des ressources étaient allouées aux soins en fonction des exigences de la politique des finances publiques et non en considérant les moyens nécessaires pour délivrer des soins de qualité  » [27] .

Un constat proche de celui établi par le ministre Olivier Véran, lorsqu’à l’issue du Ségur de la santé il a saisi le Haut conseil pour l’avenir de l’Assurance maladie (HCAAM) au sujet des « limites des outils de régulation des dépenses d’assurance maladie  », notant dans sa lettre de mission : «  Norme de dépenses centrale dans la régulation des finances publiques, l’ONDAM est perçu par les acteurs comme détaché des réflexions stratégiques sur l’organisation des soins et de la délibération démocratique sur les politiques de santé  » [28] . En retour, dans son rapport du 27 mai 2021, le HCAAM a repris à son compte ces constats et exprimé son inquiétude quant à la qualité démocratique de la délibération stratégique en matière d’allocation des ressources en santé, en se donnant pour objectif de proposer «  une régulation plus susceptible d’atteindre dans la durée les objectifs assignés par la population et ses représentants, dans leurs composantes politique, sociale et sanitaire, au système de santé  » [29] .

Pour le HCAAM cependant, prendre l’évaluation des besoins de santé pour boussole du pilotage des dépenses relève de l’aporie : «  Définir un montant de dépenses nécessaires à partir de besoins de santé définis ex-nihilo (indépendamment des caractéristiques actuelles de l’offre et du recours) est impossible. Il n’existe en effet pas de définition de la santé susceptible d’être déclinée opérationnellement en termes de besoins, la définition de l’OMS étant emblématique à cet égard : « La santé est un état de complet bien-être physique, mental et social et ne consiste pas seulement en une absence de maladie ou d’infirmité ». Entrent en jeu les présupposés socio-culturels sur ce qu’est la santé, sur ce que la médecine doit couvrir (champ lié notamment au progrès médical) et ce que doit prendre en charge la collectivité, sur la responsabilité de chacun en matière de prévention et de recours.. . » [30] . En somme, des enjeux de valeurs et des choix politiques qui dépassent la quantification de la demande. En revanche, concède le HCAAM, l’évaluation des besoins s’entend pour guider le pilotage de l’offre de soins sur le plan des ressources humaines, au sens d’une gestion prévisionnelle des emplois, des effectifs et des compétences, en fonction des besoins en personnels dans les territoires, et en intégrant l’enjeu des conditions de travail et des niveaux de rémunération.

Pour renforcer la qualité démocratique du débat sur le financement de la santé, la proposition centrale du HCAAM est d’expliciter les valeurs et les choix politiques qu’il engage. Le HCAAM propose d’élaborer «  un document unique  » déterminant «  une trajectoire à cinq ans des objectifs, activités et ressources du système de santé  », et de le soumettre à «  la démocratie politique, sociale et sanitaire, au niveau national et local  ». Ce document, dont l’ONDAM serait une déclinaison, « définirait des priorités transversales telles que : réduire les inégalités d’accès aux soins, structurer les soins de proximité, agir sur les déterminants de santé, dans le cadre d’une trajectoire tenant compte du point de départ  ». Nouveauté décisive qu’il faudrait pouvoir commenter pour elle-même, ce document stratégique serait élaboré dans un cadre interministériel intégrant la santé dans toutes les politiques, pour prendre en compte l’importance des déterminants de santé extérieurs au système de soins et l’impact sur la santé des politiques de l’éducation, du logement, des transports, etc.

Comment procéder pour renforcer la légitimité démocratique de ces orientations stratégiques ?

6. Concertation, participation, délibération

Une piste prometteuse pourrait être trouvée du côté de la délibération citoyenne.

Il faut s’accorder sur le sens de la délibération et sur ce qu’elle n’est pas. La simple concertation, entre représentants des parties prenantes, n’assure pas la qualité délibérative du processus. On ne peut certes que reconnaître l’intérêt d’approfondir cette concertation au sein des instances représentatives que sont la Conférence nationale de santé ou les conseils territoriaux de santé. La concertation sur les besoins de santé, institutionnalisée au sein des instances de démocratie sanitaire, pourra ici être analysée en tant qu’instrument [31] de l’action publique, qui engendre à la fois des effets cognitifs (produire un cadre d’analyse partagé) et des effets d’agrégation (unifier un réseau, porteur de ce que Michel Callon a appelé des activités de traduction entre acteurs hétérogènes). Mais il s’agit ici de concertation entre représentants, inscrits dans des logiques d’appropriation de l’outil, non de délibération citoyenne.

Approfondir la dimension délibérative des choix d’allocation en santé ne signifie pas non plus seulement promouvoir la participation directe des citoyens à leur instruction. Le recueil, lors de réunions publiques ou même par sondage, de l’expression citoyenne sur les besoins de santé est une piste mise en avant par de nombreux acteurs de la démocratie sanitaire. La pratique est promue dans la réalisation de nombreux « diagnostics territoriaux partagés » au sein des conseils territoriaux de santé. C’est bien cette dimension d’expression directe qu’entendait défendre le projet de RIP. Ces dispositifs participatifs permettent l’expression citoyenne sur les besoins de santé ressentis et ont le mérite de reconnaître une forme d’expertise « expérientielle » indispensable à l’approfondissement de la démocratie sanitaire. Mais ils ne disent rien des conditions dans lesquelles on entend promouvoir la formation des citoyens aux enjeux de la juste allocation des ressources en santé.

Or ces conditions nécessaires à une expression éclairée sont une part essentielle de la qualité démocratique du débat que l’on cherche à favoriser. Comme l’a montré Bernard Manin, la légitimité démocratique que l’on recherche dans l’expression citoyenne ne tient pas seulement à ce que tous auront pu parler ; mais plus essentiellement à ce tous auront été conviés à une discussion balancée sur les justifications de la décision. C’est le sens de la distinction entre participation et délibération qu’il résumait ainsi dès 1985 : « La décision légitime n’est pas la volon té de tous, mais celle qui résulte de la délibération de tous ; c’est le processus de formation des volontés qui confère sa légitimité au résultat, non les volontés déjà formées ». [32]

Les formats délibératifs comme les panels citoyens sont-ils une approche convaincante en matière de politique de santé ? La santé vient au deuxième rang des secteurs que la démocratie délibérative a le plus investi à l’échelle des pays de l’OCDE [33] .

Et parmi les sujets de santé soumis à des panels citoyens délibératifs, la juste allocation des ressources vient en première place ! C’est bel et bien pour guider les décisions d’allocation que, historiquement, la délibération citoyenne a d’abord été expérimentée dans le secteur de la santé, à une échelle locale, en tant que mécanisme d’intégration des valeurs publiques ainsi que des expériences et des besoins réels des populations. L’un des premiers exemples d’utilisation de la délibération publique pour éclairer la politique de santé est ainsi le cas désormais célèbre du plan de santé de l’Oregon, dans lequel les habitants de l’Oregon ont été invités à délibérer au sein d’un vaste dispositif de « town hall meetings » et de panels délibératifs pour hiérarchiser les conditions médicales à couvrir par le programme Medicaid de l’État en 1990 [34] . L’expérience fait désormais référence comme la première démonstration qu’il est possible de s’appuyer sur la démocratie délibérative pour accroître la pertinence et la légitimité des décisions en santé.

De nombreuses autres initiatives ont été portées depuis dans ce champ. L’équipe canadienne de Julia Abelson a recensé les publications qui analysent des initiatives de démocratie délibérative dans le secteur de la santé depuis les années 1990 [35] . Elle montre que différentes méthodes, du sondage délibératif au panel citoyen en passant par les conférences de consensus, ont été mobilisées sur des enjeux de santé aussi variés que le remboursement de l’innovation, le périmètre de remboursement, les priorités de santé publique, ou des enjeux de bioéthique, comme par exemple la création de biobanques ou la xénotransplantation, et enfin des exercices de planification pour les situations de pandémie. Les dispositifs citoyens délibératifs du National Health Service britannique font figure de référence s’agissant de la gestion territorialisée de l’offre de santé [36] , de même que le panel délibératif permanent de 30 citoyens (« Citizens Council ») qui contribue aux décisions de remboursement au sein du National Institute for Health and Clinical Excellence (NICE) [37] . Certaines initiatives délibératives ont aussi concerné, au Canada ou à Taiwan au début des années 2000, des réformes de grande ampleur du système de santé [38] .

Sur quels arguments les décideurs de ces pays ont-ils été convaincus de recourir à une telle innovation démocratique ? Les spécificités des enjeux de santé semblent apporter des éléments de réponse : l’importance des valeurs de solidarité qu’engagent les choix politiques d’un côté, et la dimension concrète et quotidienne de ces enjeux de l’autre. En outre, note par exemple l’équipe canadienne de Julia Abelson, ces enjeux de santé apparaissent porteurs de risques politiques majeurs en situation de crise sanitaire, ce qui engage les gouvernants à privilégier les marques d’attention et de respect à l’égard des attentes citoyennes. L’OCDE note ainsi que des délibérations citoyennes soigneusement conçues peuvent être l’une des rares voies disponibles pour fournir la légitimité dont les décideurs ont besoin pour traiter des problèmes controversés, complexes et à forts enjeux qui caractérisent le secteur de la santé : «  Le fait d’associer les citoyens à un processus actif de délibération peut aussi permettre de renforcer leur sentiment d’efficacité politique (c’est-à-dire leur sentiment de pouvoir comprendre et influencer les affaires politiques) en cessant de les traiter comme de simples objets des textes et des décisions  ».

Cette perspective résonne de façon toute particulière dans le contexte de la crise Covid et à l’approche de l’élection présidentielle de 2022. L’analyse des enjeux posés par l’initiative avortée de RIP éclaire deux défis qui restent entiers : un défi intellectuel et cognitif (définir la juste boussole des choix d’allocation, au-delà de l’invocation des besoins de santé) et un défi démocratique (faire émerger une volonté collective éclairée). En dépit de quelques initiatives importantes, en particulier sur la vaccination des nourrissons sous la présidence d’Alain Fischer [39] , le « tournant délibératif » [40] de la démocratie sanitaire reste largement à provoquer dans notre pays. Tant l’expérience acquise avec la Convention citoyenne sur le climat [41] , que la richesse des initiatives prises dans d’autres pays en matière de délibération citoyenne sur les choix d’allocation en santé, sont une invitation à tenter de relever ces défis en promouvant un approfondissement participatif et délibératif de la démocratie sanitaire.

La crise du Covid a rappelé à chacun les atouts de notre système de santé mais aussi ravivé des questions structurelles sur ses limites. Le bilan qui doit en être fait pourrait être l’occasion d’un tel approfondissement. L’échec du projet de RIP laisse derrière lui un enseignement clair, que corrobore le diagnostic livré par le HCAAM à l’issue du Ségur de la santé : il semble essentiel de proposer un format nouveau capable de conférer davantage de légitimité démocratique aux choix structurels qui orientent l’allocation des ressources en santé. Ces choix stratégiques sont aujourd’hui énoncés à travers de multiples canaux : stratégie nationale de santé à cinq ans, projets régionaux de santé, plans nationaux de santé publique thématiques, lois de financement de la sécurité sociale, etc. La proposition avancée par le HCAAM d’un document unique définissant de façon pluriannuelle une trajectoire des objectifs, activités et ressources du système de santé vient poser la question des conditions de sa légitimité démocratique.

Comment améliorer la légitimité démocratique des choix gouvernementaux en ces matières fondamentales qui sont aujourd’hui largement confisquées par des enjeux techniques ? Comment favoriser la capacité des citoyens à s’emparer du travail de définition des objectifs et des ressources d’une politique de santé dont la crise Covid est venue rappeler à tous à la fois qu’elle comporte des dilemmes difficiles et qu’elle peut changer la vie ?

Les outils de la démocratie participative et ceux de la démocratie délibérative sont aujourd’hui sur la table pour répondre à cette question : d’enjeux normatifs longtemps réservés aux théoriciens de la démocratie, ces pratiques démocratiques sont devenues des savoir-faire concrets. Aucun dispositif n’apporte cependant de solution miracle.

Parier sur l’apport d’un panel délibératif, c’est s’exposer aux critiques d’avoir mené une forme d’expérience de laboratoire réservée à quelques happy few (on ne peut pas délibérer correctement en face-à-face à plus de 200 ou 300 personnes…). Sélectionnés sur la base d’un tirage au sort et de critères de représentativité, les citoyens participant à de tels panels ne sont pas ipso facto légitimes à opter pour la masse de leurs concitoyens : d’une part, ces derniers n’ont pas vécu la même expérience de « formation des volontés » ; de l’autre, rien ne prouve que, plongés dans le même dispositif, ils seraient arrivés aux mêmes conclusions. L’une des limites des expériences de panels délibératifs, c’est leur faible capacité à entrainer la société et à nourrir une forme d’ empowerment social de grande échelle.

A l’inverse, parier sur l’expression directe dans un format participatif ouvert à tous, c’est optimiser ses chances d’entrainer la société en rassemblant un très grand nombre de femmes et d’hommes (le Grand Débat national a ainsi recueilli les contributions de plus de deux millions de Français…), mais c’est aussi prendre le risque mobiliser essentiellement celles et ceux qui ont le plus de capital social et culturel ou tout simplement le plus de temps : les sociologues le savent, ces formats réunissent de façon privilégiée ceux qui participent déjà activement à la vie sociale (membres d’associations, de syndicats, de fédérations de parents d’élèves, de collectifs de quartiers, etc.). Opter pour ces formats, c’est aussi s’exposer aux critiques de n’avoir produit qu’une somme de préférences individuelles hétéroclites et très inégalement informées : le nombre des participants fait la valeur de ces expressions, mais n’en garantit ni la représentativité ni la pertinence.

Dans le premier cas, on manque la légitimité que confère le nombre et la prise en compte d’une vaste expertise du vécu. Dans le second cas, on manque la légitimité que confère la construction dialogique et renseignée d’une expertise dûment délibérée. Cette opposition entre délibération et participation est structurelle : plus on s’approche de l’une, plus on s’éloigne de l’autre. Pour autant, chacune apportera in fine aux décisions une légitimité démocratique dont la crise actuelle du système électoral représentatif invite à ne plus se passer.

Les éléments qui précèdent sont une invitation à combiner les trois ordres de légitimité – participation, délibération et représentation –– dans un format nouveau de délibération participative.

La légitimité de l’expression citoyenne directe d’abord. La participation de tous à l’expression des besoins en santé et à l’identification des priorités d’allocation des ressources n’est pas une chimère. Une littérature internationale importante permet de recenser de tels formats participatifs et d’identifier les facteurs de succès. La capacité à produire la synthèse d’une telle conversation nationale, de type Grand débat, pour en dégager des lignes de force communes et construire des scénarios alternatifs, est disponible. Cependant, de tels dispositifs, on l’a dit, ne permettent qu’une expression de préférences à un instant t et ne garantissent pas la représentativité des participants.

C’est pourquoi il serait intéressant, dans un deuxième temps du processus, de verser les productions de cette première étape participative à la délibération d’un panel citoyen plus resserré. Celui-ci, construit sur le modèle de la Convention citoyenne climat par exemple et éventuellement hybridé d’un tiers d’élus (comme dans la première Citizens’ Assembly irlandaise), aurait à charge d’instruire les scénarios issus de la participation de tous. Un tel panel délibératif, répondant à certaines exigences méthodologiques en termes notamment de representativité, accèderait à une qualité d’information et d’expertise et à des conditions de débat formalisé qu’il n’est pas possible de proposer à tous dans la première étape, mais qui présentent l’intérêt de guider la formation de choix collectifs délibérés, c’est-à-dire mieux fondés en raison que la simple expression agrégée de préférences individuelles.

Les productions de ce panel délibératif, fruits d’une instruction fouillée et d’arguments explicites dont la pédagogie pourrait être faite auprès de tous les citoyens, pourrait à son tour être soumise à l’arbitrage du législateur, qu’il s’agisse du peuple si l’issue est un référendum, ou bien de ses représentants…

Analysant les enseignements de la Convention citoyenne sur le climat dans son ouvrage à paraître [42] , Thierry Pech propose une telle combinaison dans le temps des différents ordres de légitimité. L’idée, en faisant se succéder ces trois registres du travail démocratique, est de répondre simultanément aux limites de la participation directe, qui n’offre qu’une photographie d’opinions (qui plus est imparfaite), à celles de la délibération en panels, qui ne concerne nécessairement qu’un petit nombre de citoyens, et à celles de la représentation. Pour résoudre la contradiction entre participation de masse et délibération de petite taille, entre mini-public et grand public, qu’Eric Buge a parfaitement illustrée par dans son étude comparative du Grand Débat national et de la Convention citoyenne [43] , il fait valoir qu’on peut les articuler dans le temps. On en trouvera un modèle dans l’expérience écossaise d’une assemblée citoyenne pour le climat, inspirée de l’expérience française, qui a été précédée par l’organisation d’une « Great Conversation » à laquelle chaque citoyen écossais pouvait venir s’exprimer.

On peut arguer que les enjeux de la politique de santé se prêteraient très bien à un tel dispositif. La définition de priorités transversales (telles que la réduction des inégalités sociales de santé, la structuration des parcours de santé, l’action sur les déterminants de santé et l’environnement, la qualité des soins, ou encore la préparation des crises sanitaires) intègrerait la définition d’une trajectoire pluriannuelle des ressources correspondantes. Ce travail de programmation, nourri à la fois de l’expérience quotidienne de tous dans son volet participatif, et de la nécessaire montée en compétences de quelques-uns dans son volet délibératif, permettrait que la politique de santé, loin de se résumer aux enjeux techniques à travers lesquels elle est souvent débattue (nombre de lits, tarification, Ondam…), soit effectivement perçue collectivement comme l’horizon de dilemmes cruciaux et de choix politiques fondamentaux dont la crise Covid est venue rappeler à chacun l’importance vitale.

  1. https://www.conseil-constitutionnel.fr/actualites/communique/decision-n-2021–2-rip-du-6-aout-2021-communique-de-presse

  2. «  Notre hôpital, c’est vous » est une association constituée au printemps 2021, issue des mouvements de défense de l’hôpital public particulièrement liés aux collectifs Inter-Urgences et Inter-Hôpitaux nés en 2019, et également soutenue par plusieurs associations de lutte contre la précarité (MDM, ATD Quart Monde, Emmaüs…).

  3. https://www.notrehopital.org/la-proposition-de-loi

  4. P.-L.Bras, « Comment le Covid transforme le débat sur les dépenses de santé », mars 2021, https://tnova.fr/notes/comment-le-covid-transforme-le-debat-sur-les-depenses-de-sante

  5. voir Terra Nova, « Le référendum d’initiative citoyenne délibératif », février 2019 https://tnova.fr/system/contents/files/000/001/701/original/Terra-Nova_RIC-deliberatif_190219.pdf?1550507661

  6. Terra Nova, « Le référendum d’initiative citoyenne délibératif », février 2019, art. cité.

  7. pour un rappel des missions de ces instances, voir encadré 1 en annexe

  8. D.Méda, “A l’hôpital, réintroduire de la démocratie à tous les étages”, Le Monde , 19/06/21 https://www.lemonde.fr/idees/article/2021/06/19/dominique-meda-a-l-hopital-reintroduire-de-la-democratie-a-tous-les-etages_6084769_3232.html

  9. P.-L.Bras, « Comment le Covid transforme le débat sur les dépenses de santé », mars 2021, https://tnova.fr/notes/comment-le-covid-transforme-le-debat-sur-les-depenses-de-sante

  10. Norman Daniels, « Health-Care Needs and Distributive Justice. » Philosophy & Public Affairs 10, no. 2 (1981): 146–79

  11. Kenneth Arrow, « Some Ordinalist-Utilitarian Notes on Rawls’s Theory of Justice », Journal of Philosophy , vol. 70, no 9, 1973, p. 251

  12. Norman Daniels, « L’extension de la justice comme équité à la santé et aux soins de santé », Raisons politiques , vol. 34, no. 2, 2009, pp. 9–29.

  13. Voir par exemple Magali Coldefy et al , « Le territoire, un outil d’organisation des soins et des politiques de santé ? Evolutions de 2003 à 2011, », Questions d’économie de la santé , IRDES, 2012 : https://www.irdes.fr/Publications/2012/Qes175.pdf

    Voir encadré 2 en annexe pour un résumé des étapes de la territorialisation de la planification.

  14. J. Jordan, J. Wright, “Making sense of health needs assessment.”, Br J Gen Pract . 1997;47(424):695–696.

  15. Jonathan Bradshaw, “Taxonomy of social need.”, In: McLachlan, Gordon, (ed.) Problems and progress in medical care: essays on current research , 7th series, London, Oxford University Press, 1972, pp. 71–82 ; https://eprints.whiterose.ac.uk/118357/1/

  16. J. Wright, R. Williams, JR. Wilkinson, “Développement et importance de l’évaluation des besoins de santé″, British Medical Journal, 1998 ; 316 (7140):1310–1313. ; https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC1113037/

  17. C. Cases, D. Baubeau, « Peut-on quantifier les besoins de santé ? », Solidarité et santé , 2004 (1)

  18. La controverse a motivé une conférence citoyenne en 2016, voir http://www.concertation-depistage.fr/ pour une synthèse des positions. On pourra aussi consulter la « cartographie » de cette controverse proposée par le Centre de sociologie de l’innovation de l’Ecole des Mines, https://controverses.minesparis.psl.eu/public/promo17/promo17_G13/www.controverses-minesparistech.fr/groupe13/index.html

  19. Voir par exemple la synthèse de la consultation publique réalisée par la HAS en 2009,

    https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2010–02/surdite_de_lenfant_-_0_a_6_ans_-_consultation_publique.pdf

  20. https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/Ouvrage?clef=1

  21. Vincent Perrin, Yolande Obadia et Jean-Paul Moatti : « Systèmes et états de santé : l’équité introuvable ? », Économie publique , 1998/2.

  22. E. Fauchier-Magnan et Pr. B.Fenoll (IGAS), avec le concours de la Pr. B. Chabrol, La pédiatrie et l’organisation des soins de santé de l’enfant en France , IGAS https://www.igas.gouv.fr/IMG/pdf/2020–074r.pdf

  23. C. Millien, H. Chaput, M. Cavillon, " La moitié des rendez-vous sont obtenus en 2 jours chez le généraliste, en 52 jours chez l’ophtalmologiste" , Études et Résultats , DREES n°1085, octobre 2018.

  24. Noémie Vergier, Accessibilité aux professionnels de santé libéraux : des disparités géographiques variables selon les conditions tarifaires, DREES, 2016

    https://drees.solidarites-sante.gouv.fr/publications/etudes-et-resultats/accessibilite-aux-professionnels-de-sante-liberaux-des-disparites

  25. Mathilde Gaini, Nathalie Guignon, Stéphane Legleye, Muriel Moisy, Stanislas Spilka, Annick Vilain, « Les inégalités sociales de santé apparaissent avant la naissance et se creusent durant l’enfance », Insee Références, édition 2020.

  26. D’autres recommandations concernent notamment le renforcement des spécialités pédiatriques paramédicales et des coopérations, ainsi que la révision de la nomenclature pour revaloriser la rémunération des pédiatres – l’une des plus faibles parmi les spécialités médicales.

  27. Pierre-Louis Bras, « Comment le Covid transforme le débat sur les dépenses de santé », mars 2021, https://tnova.fr/notes/comment-le-covid-transforme-le-debat-sur-les-depenses-de-sante

  28. Lettre de mission du 03/09/2020 : https://www.strategie.gouv.fr/sites/strategie.gouv.fr/files/atoms/files/avis_regulation_hcaam_avril_2021.pdf

  29. HCAAM, Rapport sur la réguation du système de santé, 27 mai 2021 : https://www.securite-sociale.fr/files/live/sites/SSFR/files/medias/HCAAM/2021/HCAAM%20-%20Rapport%20r%c3%a9gulation%20HCAAM%202021.pdf

  30. HCAAM, idem

  31. Pierre Lascoumes, Louis Simard, « L’action publique au prisme de ses instruments »,RFSP, 2011/1 https://www.cairn.info/revue-francaise-de-science-politique-2011–1-page-5.htm?try_download=1

  32. Bernard Manin, « Volonté générale ou délibération ? Esquisse d’une théorie de la délibération politique », in Le Débat , Gallimard, 1985/1, n° 33, pp. 72–94

  33. OCDE, Participation citoyenne innovante et nouvelles institutions démocratiques, 2020

  34. JA. Kitzhaber, “Prioritising health services in an era of limits: the Oregon experience”, BMJ, 1993, Aug 7;307(6900):373–7

  35. J. Abelson, E. A. Blacksher, K. Li, S. E. Boesveld & S. D. Goold, « Public deliberation in health policy and bioethics: mapping an emerging, interdisciplinary field ». Journal of Public Deliberation , 2013, 9 (1).

  36. R. Cookson & P. Dolan, « Public views on health care rationing: a group discussion study ». Health Policy , 1999, 49 (1–2), 63–74

    P. Dolan, R. Cookson & B. Ferguson, « Effect of discussion and deliberation on the public’s views of priority setting in health care: focus group study ». British Medical Journal , 1999, 318 (7188), 916–919.

  37. M. Rawlins, « The NICE way of influencing health spending: a conversation with Sir Michael Rawlins. Interview by Nicholas Timmins ». Health affairs (Project Hope) , 2009, 28 (5), 1360–1365.

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  41. Thierry Pech, Clara Pisani-Ferry, « Convention citoyenne pour le climat : quels enseignements pour l’avenir ? », Terra Nova, décembre 2020, https://tnova.fr/system/contents/files/000/002/226/original/Terra-Nova_Convention-Citoyenne-pour-le-Climat-quelques-enseignements-pour-l-avenir_071220.pdf?1607264937

  42. Thierry Pech, Le Parlement des citoyens , Paris, Seuil / La République des idées, à paraître en octobre 2021.

  43. Eric Buge, « À la recherche du diamant de Micromégas. Quelques réflexions à propos du Grand débat national et de la Convention citoyenne pour le climat », Archives de philosophie du droit , tome 61, 2020. Sur l’opposition délibération/participation de manière plus générale, voir S. Elstub, « Deliberative and Participatory Democracy », in Andre Bächtiger, J. S. Sryzek, J. Mansbridge and M. Warren (dir), The Oxford Handbook of Deliberative Democracy, Cambridge, Polity Press, 2013.

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